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15/02/2017 | FRANCE | N°15/00707

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 15 février 2017, 15/00707


Ch. civile A

ARRET No
du 15 FEVRIER 2017
R. G : 15/ 00707 MB-C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 29 Juin 2015, enregistrée sous le no 1115000130

X...
C/
Consorts Y...Z...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
QUINZE FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT
APPELANTE :
Mme Antoinette X... veuve A... né le 16 septembre 1931 à PARIS 10ème ...20220 SANTA RÉPARATA DI BALAGNA

assistée de Me Valérie TABOUREAU de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZ

ZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA, Me SCP CABEE-BIVER-LAREDJ-SPANGHE, avocat au barreau...

Ch. civile A

ARRET No
du 15 FEVRIER 2017
R. G : 15/ 00707 MB-C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 29 Juin 2015, enregistrée sous le no 1115000130

X...
C/
Consorts Y...Z...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
QUINZE FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT
APPELANTE :
Mme Antoinette X... veuve A... né le 16 septembre 1931 à PARIS 10ème ...20220 SANTA RÉPARATA DI BALAGNA

assistée de Me Valérie TABOUREAU de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA, Me SCP CABEE-BIVER-LAREDJ-SPANGHE, avocat au barreau de CARCASSONNE

INTIMES :

M. Joseph Y... né le 18 janvier 1954 à SANTA REPARATA DI BALAGN ......34000 MONTPELLIER

assisté de Me Laurence GAERTNER DE ROCCA SERRA, avocat au barreau de BASTIA, Me Olivier GUERS de la SCP VERBATEAM, avocat au barreau de MONTPELLIER

Mme Marie Marguerite Y... née le 16 juin 1948 à SANTA REPARATA DI BALAGNA ......34000 MONTPELLIER

assistée de Me Laurence GAERTNER DE ROCCA SERRA, avocat au barreau de BASTIA, Me Olivier GUERS de la SCP VERBATEAM, avocat au barreau de MONTPELLIER

Mme Noëllie Z... veuve Y... née le 15 décembre 1924 à CALVI ......34000 MONTPELLIER

assistée de Me Olivier GUERS de la SCP VERBATEAM, avocat au barreau de MONTPELLIER, Me Laurence GAERTNER DE ROCCA SERRA, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 décembre 2016, devant Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. François RACHOU, Premier président Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Cécile BORCKHOLZ.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 février 2017.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. François RACHOU, Premier président, et par Mme Cécile BORCKHOLZ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant un acte authentique de bail en date des 13 janvier et 13 avril 1965, M. Michel Y... a consenti un bail à Mme X... veuve A..., portant sur un logement au premier étage d'une maison située 21 Place de la Fontaine à Santa Reparata di Balagna, pour une durée de vingt cinq ans.

Par arrêt du 5 novembre 1992, la cour d'appel de Bastia, a déclaré que ce bail avait été renouvelé pour une durée de vingt-cinq ans à compter du 15 avril 1990.

Par acte d'huissier du 16 septembre 2014, M. Joseph Y..., Mme Marie Y... et Mme Noëlle Z... veuve Y... (les consorts Y...), en qualité d'héritiers de M. Michel Y..., ont donné congé à Mme X... veuve A..., aux fins de vente avec effet au 14 avril 2015.

Par acte d'huissier du 27 février 2015, Mme X... veuve A... a assigné les consorts Y... devant le tribunal d'instance de Bastia, en vue d'obtenir, à titre principal, l'inopposabilité de ce congé, subsidiairement, la constatation du caractère tardif dudit congé, ainsi que sa nullité. Elle sollicitait aussi la condamnation des consorts Y... au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et de frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire du 29 juin 2015, le tribunal a :
- constaté la validité du congé délivré par les consorts Y..., sus-nommés, le 16 septembre 2014 avec effet au 14 avril 2015,
- ordonné l'expulsion de Mme Antoinette X... veuve A... du logement sis 21 Place de la Fontaine à Santa Reparata di Balagna,
- fixé l'indemnité provisionnelle d'occupation à la somme mensuelle de 804, 54 euros à compter du 14 avril 2015,
- dit que Mme Antoinette X... veuve A... devra payer cette indemnité jusqu'à la libération des lieux,
- autorisé les consorts Y... à transporter les meubles et objets garnissant le logement en cause dans un garde meubles aux frais de la locataire,
- débouté Mme Antoinette X... veuve A... de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et de celle sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les consorts Y... de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme Antoinette X... veuve A... aux entiers dépens.

Par déclaration reçue le 24 août 2015, Mme X... veuve A... a interjeté appel de ce jugement.

Par ses conclusions reçues le 15 décembre 2015, l'appelante demande à la cour de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de :

AU PRINCIPAL,

- constater que le congé lui est inopposable compte tenu de son âge et de ses ressources, et ce, conformément au paragraphe III de l'article 15 de la Loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi ALUR applicable à l'espèce

SUBSIDIAIREMENT, et dans tous les cas :
- prononcer la nullité du congé du 16 septembre 2014 qui ne comporte pas les conditions de la vente envisagée par les propriétaires,
- condamner les consorts Y... à lui payer une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les consorts Y... aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Taboureau en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par leurs conclusions reçues le 30 mars 2016, les intimés demandent à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 juin 2015 par le tribunal d'instance de Bastia,
- débouter Mme X... veuve A... de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- valider le congé délivré le 16 septembre 2014 pour le 14 avril 2015,
- constater que Mme X... veuve A... est déchue de plein droit de tout titre d'occupation des locaux loués à compter de la date d'effet du congé,
- prononcer l'expulsion pure, simple et immédiate de Mme Antoinette X... veuve A... des lieux qu'elle occupe 21 Place de la Fontaine à 20220 Santa Reparata di Balagna ainsi que de tous occupants de son chef, en la forme ordinaire et avec l'assistance du commissaire de police et de la force publique si besoin est,
- ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux en tel garde-meubles qu'il plaira à la cour de désigner, aux frais, risques et périls de Mme Antoinette X... veuve A...,
- condamner Mme Antoinette X... veuve A... au paiement d'une somme de 804, 54 euros mensuelle (670, 45 X 1, 2) du 14 avril 2015 jusqu'à parfaite libération des lieux, à titre d'indemnité d'occupation,
- condamner Mme Antoinette X... veuve A... à leur verser la somme de 3 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme Antoinette X... veuve A... aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 06 avril 2016.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions sus-visées et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'inopposabilité du congé

Le tribunal a relevé que Mme X... veuve A... était âgée de 83 ans au moment de la délivrance du congé litigieux et que ses ressources annuelles étaient inférieures à une fois et demie le S. M. I. C, de sorte que celle-ci remplissait les conditions du paragraphe III de l'article 15 de la loi du 06 juillet 1989, ce qui n'est pas contesté par les intimés devant la cour.
Il a cependant retenu que les consorts Y... étaient tous les trois âgés de plus de 60 ans et qu'en conséquence, ceux-ci bénéficiaient aussi d'un régime de protection leur permettant de s'exonérer d'une obligation de relogement du locataire.
En cause d'appel, Mme X... veuve A... soutient à nouveau que les consorts Y... ne pouvaient bénéficier de la protection résultant des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 15- III de la loi du 6 juillet 1989, en faisant valoir que le congé du 16 septembre 2014 est un congé " aux fins de vente " et non de reprise du logement et que les intimés n'ont aucun problème d'hébergement.
Les consorts Y... répliquent qu'en l'espèce ils étaient respectivement âgés de 61, 67 et 91 ans et que dès lors, sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article 15- III de la loi du 6 juillet 1989, l'appelante ne bénéficiait pas de la protection posée par les dispositions de l'article 15 III alinéa 1 de ladite loi.
La cour relève que les dispositions dont se prévalent à juste titre les intimés, s'appliquent tant au congé pour vendre qu'au congé en vue du relogement par le bailleur.
Il n'y a donc pas lieu de tenir compte du fait que les consorts Y..., n'auraient pas de problèmes de logement et que ces derniers n'auraient manifestement pas besoin d'argent, comme l'allègue l'appelante, en invoquant, notamment l'esprit de la loi ALUR.
Par ailleurs, ainsi que l'a retenu à juste titre, le premier juge, au vu des dispositions de l'article 14 de la loi ALUR du 24 mars 2014, il y a lieu, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version antérieure à ladite loi de 2014, de sorte que la condition relative à l'âge du bailleur est 60 ans et non 65 ans, comme le fait valoir, à tort, l'appelante.

Il convient, en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande d'inopposabilité du congé soulevée par Mme X... veuve A....

Sur la nullité du congé pour absence des mentions obligatoires
Le tribunal a, au visa de l'article 15 II alinéa 1 de la loi du 6 juillet 1989, considéré qu'en l'espèce, le prix et les modalités précises de la vente envisagée apparaissaient bien dans le congé litigieux.
Devant la cour, l'appelante fait valoir qu'aucun élément concernant la performance technique du logement, les risques en matière de plomb et d'amiante et d'insectes xylophages, ne figurent en annexe du congé.
Elle se prévaut d'un arrêt de la Cour de Cassation du 20 février 2008.
Mme X... veuve A... soutient également que le congé litigieux est purement formel et n'a aucun caractère réel et sérieux, en invoquant, notamment, que le prix indiqué est exorbitant.
De leur côte, les consorts Y... concluent que le congé mentionne le prix, la charge des frais et droits de mutation, les modalités de paiement, ainsi que les conditions de transfert de propriété et de jouissance, de sorte que les conditions essentielles de la vente ont été portées à la connaissance de l'appelante.
Ils répliquent que l'arrêt du 20 février 2008 dont se prévaut cette dernière pour fonder sa demande de nullité du congé, est inapplicable aux faits de l'espèce.
Ils précisent que dans cet arrêt de la Cour de Cassation, le bailleur devait informer les locataires de l'état de l'immeuble et des travaux à prévoir en leur communiquant divers diagnostics et bilans techniques avec l'offre de vente, en application de l'accord collectif du 9 juin 1998. Cet accord collectif s'applique aux congés pour vente par lots aux locataires dans les ensembles immobiliers d'habitation.
Les intimés invoquent, en revanche, la jurisprudence selon laquelle au stade de l'offre de vente, il n'était pas nécessaire d'informer le locataire sur les risques d'amiante, de saturnisme, la présence de termites ou autres insectes xylophages dans les lieux loués.
S'agissant du prix de la vente, ils relèvent que Mme X... veuve A... conteste la validité du congé au motif que ce prix serait exorbitant, sans justifier son allégation et répliquent que ce prix ressort d'une évaluation dressée par un professionnel.

A défaut d'éléments nouveaux, la cour estime que le premier juge a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties, en rejetant le moyen de Mme X... veuve A... tiré de l'absence de mentions obligatoires dans le congé litigieux.

En effet, au vu de l'acte d'huissier du 16 septembre 1914, le congé aux fins de vente (pièce 4 des intimés), contient l'ensemble des mentions exigées par les dispositions légales.
En outre, comme le relèvent à juste titre les intimés, au stade de l'offre de vente, les diagnostics techniques (amiante, saturnisme, insectes xylophages), n'ont pas, en l'espèce, à être annexés au congé litigieux.
S'agissant du prix de la vente, les consorts Y... produisent un rapport de M. Laurent C..., expert en évaluation immobilière, 05 juin 2014, qui justifie ce prix, au vu de l'évaluation de l'immeuble faite par cet expert.
Le jugement querellé sera donc confirmé en ses dispositions sur ce point, ainsi que sur le rejet de la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formulée par l'appelante, laquelle s'avère injustifiée.
Sur les demandes reconventionnelles des consorts Y...
Les intimés sollicitent la confirmation des dispositions du jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à leurs demandes tendant, à l'expulsion de Mme X... veuve A..., au paiement d'une indemnité d'occupation par cette dernière et à l'autorisation de transporter les meubles et objets garnissant le logement.
L'appelante fait valoir que sur un plan humain, au regard de son grand âge et de sa maladie, justifiée par le certificat maladie versé aux débats, il était inconcevable d'ordonner son expulsion.
En l'absence d'éléments nouveaux, la cour estime que le premier juge a pour de justes motifs, qu'elle approuve, fait droit aux demandes reconventionnelles des consorts Y....
En effet, conformément aux dispositions légales dont les intimés sont en droit de se prévaloir, Mme X... veuve A... est occupante sans droit ni titre du logement appartenant aux consorts Y..., depuis le congé qui lui a été délivré depuis le 16 septembre 2014.
Il convient donc de confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
En l'espèce, il n'est pas inéquitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions à ce titre et les parties seront déboutées de leurs demandes respectives sur ce même fondement, pour la procédure d'appel.

L'appelante, succombant en son recours, supportera les entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel ;
Déboute les parties de tous autres chefs de demandes ;
Condamne Mme Antoinette X... veuve A... aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 15/00707
Date de la décision : 15/02/2017
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2017-02-15;15.00707 ?
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