La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/02/2017 | FRANCE | N°15/00020

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre sociale, 08 février 2017, 15/00020


ARRET No-----------------------08 Février 2017-----------------------15/ 00020----------------------- Jean Louis X... C/ URSSAF DE LA CORSE---------------------- Décision déférée à la Cour du : 10 décembre 2014 Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AJACCIO 21400014------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : HUIT FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT

APPELANT :

Monsieur Jean Louis X... ...20000 AJACCIO représenté par Me Jean-Pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA substituant Me François PIETRI, avocat au barreau d'AJA

CCIO

INTIMEE :

URSSAF DE LA CORSE Contentieux Boulevard Abbé RECCO B. P. 901 20701 AJ...

ARRET No-----------------------08 Février 2017-----------------------15/ 00020----------------------- Jean Louis X... C/ URSSAF DE LA CORSE---------------------- Décision déférée à la Cour du : 10 décembre 2014 Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AJACCIO 21400014------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : HUIT FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT

APPELANT :

Monsieur Jean Louis X... ...20000 AJACCIO représenté par Me Jean-Pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA substituant Me François PIETRI, avocat au barreau d'AJACCIO

INTIMEE :

URSSAF DE LA CORSE Contentieux Boulevard Abbé RECCO B. P. 901 20701 AJACCIO CEDEX 9 représentée par M. Dominique Z..., muni d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Décembre 2016 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme LORENZINI, Présidente de chambre, Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme LORENZINI, Présidente de chambre, Mme BESSONE, Conseiller Madame GOILLOT, Vice présidente placée près M. le premier président

GREFFIER :
Mme COMBET, Greffier lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 08 Février 2017.

ARRET

Contradictoire Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe. Signé par Mme LORENZINI, Présidente de chambre et par Mme COMBET, Greffier, présent lors de la mise à disposition de la décision.

***
FAITS, PROCEDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Le 9 janvier 2014, l'Urssaf de la Corse a décerné une contrainte à l'encontre de Jean-Louis X... aux fins d'obtenir le paiement d'une somme de 7490 euros représentant les cotisations, majorations et frais, pour le 4ème trimestre 2013 ; cette contrainte été signifiée par huissier le 13 janvier 2014.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 janvier 2014, M. X... a formé opposition à cette contrainte devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Corse du Sud (numéro de recours 21400014).
Par jugement du 10 décembre 2014, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Corse du Sud a :
- déclaré régulier, recevable mais mal fondé le recours exercé,- validé la contrainte émise le 9 janvier 2014 et signifiée par voie d'huissier le 13 janvier 2014 par l'Urssaf de la Corse à l'encontre de M. X... pour un montant de 7490 euros sous réserve du calcul des majorations de retard qui continuent à courir jusqu'au complet règlement du principal,- condamné M. X... au paiement des frais de signification de la contrainte,- rejeté le surplus des demandes.

M. X... a interjeté appel de cette décision le 22 janvier 2015.
Par arrêt avant dire droit en date du 21 octobre 2015, la cour a ordonné la réouverture des débats et ordonné à M. X... d'adresser à l'Urssaf ses conclusions et pièces dans le mois de la réception de la décision afin de permettre à l'Urssaf de répondre.
Par ses écritures oralement soutenues à la barre, M. X... demande à la cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré mal fondé le recours exercé par M. X... et validé la contrainte,
statuant à nouveau :
- déclarer irrecevables, faute de justification de sa capacité pour agir, les demandes de l'Urssaf de la Corse,- déclarer également irrecevables, faute de justification de la qualité pour agir du directeur de l'Urssaf et/ ou de son délégataire, les demandes de l'Urssaf de la Corse,- déclarer en outre irrecevables, faute de droit à agir et faute de respect de la législation européenne, les demandes de l'Urssaf de la Corse,- déclarer en conséquence bien fondée l'opposition à contrainte effectuée le 20 janvier 2014 par M. X...,- déclarer nulle et de nul effet la contrainte du 9 janvier 2014 délivrée à M. X...,

subsidiairement,
- infirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 10 décembre 2014 en ce qu'il a déclaré mal fondé le recours exercé par M. X... et validé la contrainte déférée,
statuant à nouveau :
- constater que l'Urssaf de la Corse n'a pas rempli les obligations de l'article R. 414-1 du code de la mutualité et est donc dissoute,- en tirer les conséquences de droit,- déclarer bien fondée l'opposition à contrainte effectuée le 20 janvier 2014 par M. X...,- déclarer nulle et de nul effet la contrainte du 9 janvier 2014 délivrée à M. X...,

plus subsidiairement,

- infirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 10 décembre 2014 en ce qu'il a déclaré mal fondé le recours exercé par M. X... et validé la contrainte déférée,
statuant à nouveau :
- constater que les appels de cotisation et la contrainte contestés ne correspondent pas aux revenus de M. X...,- annuler en conséquence la contrainte du 9 janvier 2014 délivrée à M. X...,- plus subsidiairement encore, lui accorder les plus larges délais de paiement et rejeter la demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de l'Urssaf de la Corse qui n'a pas constitué avocat.

Il soutient en substance que :
- l'Urssaf de la Corse ne justifie pas de la production de ses statuts et de son agrément par l'autorité ministérielle compétente et il existe une difficulté certaine quant au fondement juridique des Urssaf, leur forme juridique, leur capacité et leur droit à agir,- elle ne justifie pas plus de la qualité pour agir de son directeur et/ ou de son délégataire, et le tribunal n'a pas répondu à ce moyen,- l'Urssaf de la Corse ne justifie pas de sa nature juridique, l'article L. 216-1 du code de la sécurité sociale instituant des Unions de recouvrement en général mais aucune Urssaf en particulier,- il résulte de l'article 6 de la directive 92/ 49 et 5 de la directive 92/ 96 que les différentes caisses exercent sous forme de mutuelle et que l'Urssaf, dont la forme sociale n'est précisée dans aucun élément ni statut ni la loi, doit être assimilée à un prestataire commun relevant de ces directives, la seule forme sociale dont elle pourrait relever serait la mutuelle, relevant en tant que telle du code de la mutualité,- il résulte de l'ordonnance no45/ 10 du 4 octobre 1945 instituant l'organisation de la sécurité sociale, et de l'ordonnance no45-2456 portant statut de la mutualité, que toutes les caisses de sécurité sociale sont des mutuelles, qu'elles ont le même objet,

- la Cour de Justice des Communautés Européennes par en date du 16 décembre 1999, a imposé à l'Etat français une transposition complète des directives CE 92/ 49 et 92/ 96 aux mutuelles régies par le Code de la Mutualité, et n'exclut aucune sorte de mutuelle quant à l'obligation de transcription, ces directives ayant abrogé le monopole dont se prévaut l'Urssaf,- l'Urssaf doit dès lors être considérée comme une mutuelle et de justifierqu'elle a obtenu de l'autorité administrative compétente, après avis préalable du Conseil Supérieur de la Mutualité, son agrément, et son inscription au Registre National des Mutuelles, et qu'elle dispose de statuts conformes aux articles L411-21 et suivants du même code, faute de quoi, elle doit être considérée comme dissoute et privée d'existence légale, et par conséquent de droit d'agir, ce qui rend sa demande en paiement irrecevable en application de l'article 122 du code de procédure civile,- dès lors, la référence à l'article R633-2 du Code de la Sécurité Sociale est inopérante, comme non conforme aux règles européennes, ainsi qu'en ont décidé un certain nombre de décisions de juridictions françaises,- l'Urssaf de la Corse ne s'étant pas conformée dans les délais légaux aux dispositions du code de la mutualité, elle est dissoute,- étant une mutuelle, elle n'a pas d'action pour exiger le paiement des cotisations en application des dispositions de l'article L. 223-19 du code de la mutualité,- au nom du respect de la législation européenne, M. X... réclame la possibilité de s'adresser à d'autres organismes sociaux, sauf à voir les organismes français bénéficier d'une protection indue, l'Urssaf de la Corse étant une entreprise soumise aux dispositions des articles 81 et suivants du traité de Rome,- il y a violation des dispositions de la directive 92/ 50 modifiée par la directive 2004/ 18 et de l'arrêté du 4 octobre 2005 portant réglementation sur les marchés des organismes de sécurité sociale car l'Urssaf est attributaire du marché public de la sécurité sociale des professionnels exerçant à titre libéral, exerçant le métier du " recouvrement ", soit une prestation de service ; l'Etat a passé convention avec l'Acoss et les Urssaf sans aucun appel d'offre communautaire au mépris des directives précitées, en sorte qu'elle exerce illégalement ses activités,

- les directives 92/ 49 et 92/ 96 ont abrogé le monopole de la sécurité sociale et ont été transposées en droit français par les lois 94-5 du 4 janvier 1994, 94-678 du 8 août 1994 et par ordonnance no 2001-350- du 19 avril 2001, ratifiée par la loi no2001-624 du 17 juillet 2001, ce qui consacre le libre-choix pour les professionnels indépendants de l'organisme gestionnaire de leur sécurité sociale,- en droit européen, un régime est légal dès lors qu'il concerne toute la population et, en France, cela ne concerne que le régime des allocations familiales, tous les autres régimes étant des régimes professionnels ne concernant qu'une partie de la population,- le montant des cotisations réclamées chaque année ne correspond pas aux revenus annuels qu'il a déclarés à l'administration fiscale.

Dans ses écritures également soutenues à la barre, l'Urssaf de la Corse représentée par M. Z..., muni d'un pouvoir à cet effet, sollicite la confirmation du jugement, la validation de la contrainte du 9 janvier 2014 pour un montant de 7490 euros, et la condamnation à lui payer cette somme ainsi qu'au paiement des frais de signification de la contrainte outre la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait principalement valoir que :
- elle tient sa capacité et son droit d'agir de la loi (art. L. 213-1 du code de la sécurité sociale),- elle a été créée par arrêté du Ministre du travail et de la sécurité sociale du 29 juin 1954 régulièrement publié ; son conseil d'administration a entériné, le 10 avril 1997, ses statuts conformes à l'arrêté ministériel du 28 novembre 1996, décision approuvée par l'administration de tutelle,- elle justifie de l'acte de nomination de M. B...au poste de directeur de l'Urssaf de la Corse,- remplissant une fonction de caractère exclusivement social, elle n'est ni une mutuelle ni une entreprise, ce que confirme la jurisprudence de la cour européenne,- elle n'est pas plus assujettie aux directives européennes de marché public, la mission de recouvrement n'étant pas un contrat à titre onéreux,- le droit européen ne permet pas de choisir librement son régime de sécurité sociale ; seule la souscription à une couverture additionnelle est de choix libre,

- M. X... ne démontre pas la non concordance entre ses revenus et les sommes réclamées,- l'octroi de délais de paiement relève de la compétence exclusive du directeur ou de la commission de recours amiable.

MOTIFS
Sur la capacité juridique de l'Urssaf :
Aux termes de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, la loi détermine les principes fondamentaux du droit de la sécurité sociale, étant rappelé que l'ordonnance du 4 octobre 1945 prévoit le regroupement de caisses pour le recouvrement des cotisations ; la loi de finance du 14 avril 1952 indique que ces services communs chargés du recouvrement des cotisations ont la même personnalité juridique que les organismes de sécurité sociale et leurs modalités de fonctionnement ont été fixés par le décret du 12 septembre 1952 qui précise en outre la circonscription des unions ; l'article 1er du décret 60-452 du 12 mai 1960 prévoit la création obligatoire des unions et les ajoute à la liste officielle des organismes de sécurité sociale.
Aux termes de l'article L 213-1 du code de la sécurité sociale, les Urssaf ont le pouvoir de :
- procéder au recouvrement :
*des cotisations d'assurances sociales, d'accidents du travail, d'allocations familiales dues par les employeurs au titre des travailleurs salariés ou ssimilés, par les assurés volontaires et par les assurés personnels, *des cotisations d'allocations familiales dues par les employeurs et membres des professions libérales, *d'une partie des cotisations et contributions sociales dues par les employeurs et les personnes exerçant les professions artisanales, industrielles et commerciales, dans les conditions prévues aux articles L. 133-6-2, L. 133-6-3 et L. 133-6-4, *d'une partie de la contribution sociale généralisée selon les dispositions des articles L. 136-1 et suivants, *des contributions, versements et cotisations mentionnés aux articles L. 5422-9, L. 5422-11 et L. 3253-18 du code du travail, *les cotisations sociales mentionnées aux articles L. 642-1, L. 644-1, L. 644-2, et au c du 1er de l'article L. 613-1 pour l'application des dispositions prévues à l'article L. 133-6-8 ;

- contrôler et suivre le contentieux du recouvrement prévu aux 1 º, 2 º, 3 º et 5 º.

Elles sont constituées et fonctionnent conformément aux articles L 216-2 et suivants et leurs modalités d'organisation administrative et financière sont fixées par les articles D 213-1 à D 213-7.
Ainsi, les Urssaf, instituées par l'article L 213-1 du code de la sécurité sociale, tiennent de ce texte de nature législative leur capacité juridique et leur qualité pour agir dans l'exécution des missions qui leur sont confiées par la loi ; dès lors, M. X... n'est pas fondé à invoquer l'absence de justification par l'Urssaf de la Corse de la légalité de son existence, de sa mission et de sa personnalité juridique, étant rappelé que l'administration de tutelle n'est pas le préfet mais le Ministère chargé de la sécurité sociale via la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales.
En conséquence, les Urssaf, organismes de droit privé investis d'une mission de service public, disposent de la personnalité morale dès leur création et, étant chargées de la gestion d'un service public, placées sous la tutelle de l'Etat et intégrées à l'organisation statutaire de la sécurité sociale n'ont pas un caractère mutualiste ; les dispositions qui régissent le fonctionnement de l'Urssaf sont issues du code de la sécurité sociale et non du code de la mutualité comme le soutient M. X..., étant rappelé que les mutuelles ne font que participer à la gestion d'un régime légal de sécurité sociale, ce que ne fait pas l'Urssaf, seulement chargée du recouvrement des cotisations des régimes obligatoires de sécurité sociale ; en conséquence, dans la mesure où elle ne constitue pas une mutuelle au sens de l'article 111-1 du code de la mutualité, l'Urssaf n'est pas concernée par l'immatriculation au registre prévu par l'article L. 411-1 du même code dans sa version antérieure au 21 janvier 2010 et ne saurait être considérer qu'elle est de fait dissoute, faute d'existence légale ; le moyen soulevé par l'appelant considérant que l'Urssaf est un établissement mutualiste, non inscrit au registre des mutuelles, qui ne justifierait pas de sa capacité à appeler les cotisations aujourd'hui réclamées doit en conséquence être écarté.
M. X... n'est pas plus fondé à soutenir que la contrainte n'a pas été décernée par une personne compétente alors que
cette contrainte a été signée par M. B...dont l'Urssaf justifie, sans être utilement contredite, qu'il s'agit de son directeur en poste lors de la délivrance de l'acte litigieux ; en conséquence, en application des dispositions de l'article R. 133-4 du code de la sécurité sociale, la contrainte a été valablement décernée.
En ce qui concerne le respect de la législation européenne et le droit communautaire, il y a lieu de relever que :
- les directives n º 92-49 CEE du 18 juin 1992 et n º 92-96 CEE du 10 novembre 1992 du Conseil des CE portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, disposent, en son article 2 par renvoi à la directive n º 73-239 du 24 juillet 1973 et en ses articles 2 et 3 par renvoi à la directive n º 79-267 du 5 mars 1979 du Conseil des CE, qu'elles ne s'appliquent pas aux assurances comprises dans un régime légal de sécurité sociale,- la notion d'entreprise au sens des articles 85 et 86 du Traité de Rome ne vise pas les organismes chargés de la gestion des régimes de sécurité sociale, ces organismes remplissant une fonction à caractère exclusivement social dans le cadre d'une activité fondée sur le principe de la solidarité nationale dépourvu de tout but lucratif, les prestations versées étant des prestations légales indépendantes du montant des cotisations,- selon l'article 2, d), de la directive 2005/ 29/ CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/ 450/ CEE du Conseil et les directives 97/ 7/ CE, 98/ 27/ CE et 2002/ 65/ CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n º 2006/ 2004 du Parlement européen et du Conseil, on entend, aux fins de la directive, par " pratiques commerciales des entreprises vis-à-vis des consommateurs " toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d'un professionnel, en relation avec la promotion, la vente ou la fourniture d'un produit aux consommateurs ; le recouvrement, selon les règles fixées par les règles d'ordre public du code de la sécurité sociale, des cotisations et contributions dues par une personne assujettie à titre obligatoire au régime de protection sociale des travailleurs non salariés non agricoles ne revêt pas le caractère d'une pratique commerciale au sens des dispositions sus-rappelées et n'entre pas, dès lors, dans le champ d'application de la directive,- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne reconnaît, et respecte, en son article 34, § 1, le droit d'accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux selon les règles établies par le droit de l'Union et les législations et pratiques nationales ; elle énonce en son article 51, § 2, repris dans l'article 6 du Traité sur l'Union européenne, que la Charte n'étend pas le champ d'application du droit de l'Union européenne au-delà des compétences de l'Union, ni ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelle pour l'Union et ne modifie pas les compétences et tâches définies dans les traités,- l'article 153 du Traité du fonctionnement de l'Union européenne précise que les dispositions contenues dans cet article " ne portent pas atteinte à la faculté reconnue aux Etats membres de définir les principes fondamentaux de leur système de sécurité sociale et ne doivent pas en affecter sensiblement l'équilibre financier ", la protection sociale obligatoire relèvant toujours de la maîtrise de chacun des Etats membres de l'Union.- l'arrêt BKK de la CJUE du 3 octobre 2013 est étranger à l'obligation d'affiliation à un régime légal de sécurité social, tel que prévue par l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale ; cet arrêt ne statue que sur la question de l'application de la directive 2005/ 29 sur les pratiques commerciales déloyales et la notion de professionnels qui peut concerner une caisse d'assurance maladie, mais seulement en ce qu'il pourrait lui être reproché une pratique commerciale trompeuse, l'organisme de sécurité sociale concerné par cette décision, se livrant pour partie à des activités économiques de nature commerciales, ce qui n'est pas le cas de l'Urssaf de la Corse ; cette décision n'a donc aucune portée quant à la légalité du régime de la sécurité sociale français laquelle, d'ailleurs, a été maintes fois confirmée par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans le cadre des arrêts Poucet et Pistre du 17 février 1993 qui rappellent que les caisses de maladie ou les organismes qui concourent à la gestion du service public de la sécurité sociale remplissent une fonction de caractère exclusivement social, activité fondée sur le principe de la solidarité nationale et dépourvue de tout but lucratif, ce dont il résulte que cette activité n'est pas une activité économique et que dès lors les organismes qui en sont chargés ne constituent pas des entreprises au sens des articles 85 et 86 du traité CEE et n'obéissent pas à une stricte logique de marché ; cet arrêt-dès un arrêt du 26 mars 1996 (Garcia), la Cour de Justice des Communautés Européennes a dit que l'article 2 paragraphe 2 de la directive CE 92/ 49 doit être interprété en ce sens que les régimes de sécurité sociale tels que ceux en cause étaient exclus du champ d'application de cette directive ; l'article 2. 3 de la directive CR 92/ 96 dispose qu'elle ne s'applique ni aux assurances et opérations ni aux entreprises et institutions auxquelles la directive CE 79/ 267 ne s'applique pas ni aux organismes cités à l'article 4 de celle-ci,- l'article 2. 4 de la directive CE 79/ 267 du 5 mars 1979 stipule qu'elle ne s'applique pas aux assurances comprises dans un régime légal de sécurité sociale,- l'arrêt Podestat de la CJUE en date du 23 mai 2000 devait répondre à la question préjudicielle de l'applicabilité de l'article 119 du Traité de Rome relatif à l'égalité des salaires entre hommes et femmes aux régimes de retraite complémentaire AGGIRC-Arrco, régimes destinés à compléter les prestations des régimes légaux ou de s'y substituer et qui s'adressent à des salariés, actuels ou anciens ; il n'est donc pas applicable à la présente espèce.

En outre, s'agissant de l'application des règles relatives aux marchés publics et aux appels d'offre, la directive n º 2004/ 18/ CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004, invoquée par M. X..., indique en son article 1 que : 1. Aux fins de la présente directive, les définitions figurant aux paragraphes 2 à 15 s'appliquent. 2. a) Les " marchés publics " sont des contrats à titre onéreux conclus par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l'exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services au sens de la présente directive. [...] d) Les " marchés publics de services " sont des marchés publics autres que les marchés publics de travaux ou de fournitures portant sur la prestation de services visés à l'annexe II.

En conséquence, il ne peut être considéré que la mission de recouvrement des cotisations de sécurité sociale confiée à l'Urssaf, selon les règles d'ordre public du code de la sécurité
sociale, relève d'un contrat dès lors que cet organisme, qui une fois encore n'est pas une entreprise, s'est vu attribuer lesdits recouvrement par la loi elle-même dans le cadre de l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que cela a été rappelé précédemment, cette activité de recouvrement n'entrant dans aucune des catégories définies à l'article 1er du code des marchés publics ; l'Urssaf n'est donc attributaire d'aucun marché public et relève du code de la sécurité sociale, tant en ce qui concerne ses organes de direction, notamment son conseil d'administration et son règlement intérieur ou encore le recouvrement contentieux des cotisations et contributions qu'elle a pour mission légale d'assurer ; dans ces conditions, l'Urssaf n'a pas à être soumise aux règles régissant la passation de marchés publics, contrairement à ce que plaide M. X....
Enfin, contrairement à ce que soutient l'appelant, le droit communautaire ne lui permet pas de se prévaloir du prétendu libre-choix d'un autre prestataire assurant l'ensemble de ses risques sociaux, étant surabondamment observé qu'il n'allègue pas avoir procédé à un tel choix.
Il s'ensuit que, loin d'être contraire au droit européen, l'obligation d'affiliation à l'Urssaf est conforme au Règlement (CE) n º 883/ 2004 du Parlement Européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale et c'est vainement que M. X... tente d'entretenir la confusion avec un régime d'assurance complémentaire et/ ou de prévoyance, alors qu'aux termes de l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale, toute personne travaillant en France est obligatoirement affiliée au régime de sécurité sociale français dont elle relève et, à ce titre, est assujettie aux cotisations de sécurité sociale correspondantes, cette affiliation permettant d'assurer à toute personne résidant sur le territoire français le service des prestations sociales, et que ni la directive CE 92/ 96 ni la directive 92/ 49 ne s'appliquent aux régimes obligatoires légaux de sécurité sociale français dans toute leur étendue et donc y compris ceux des travailleurs non salariés ; c'est donc vainement que l'appelant soutient que les régimes français de sécurité sociale sont des régimes professionnels et non pas un régime légal et ne concerneraient qu'une partie de la population alors que l'Urssaf procède au recouvrement des cotisations sociales dues par l'ensemble des travailleurs salariés ou non salariés et donc même par ceux qui n'appartiennent pas à une entreprise ou à un groupement d'entreprises et qui n'ont pas à faire partie de tel ou tel secteur professionnel ou interprofessionnel.
En conséquence, l'Urssaf de la Corse dispose de la personnalité juridique, de la capacité à agir et du droit d'agir, disposant d'une compétence pour ester en justice, recouvrer les cotisations impayées, y compris par la voie judiciaire.
La demande formée par M. X... à ce titre sera rejetée et le jugement entrepris confirmé.
Sur la non-concordance entre les sommes réclamées et les revenus de l'appelant :
En application des dispositions des articles L. 131-6-2, L. 133-6 et L. 642-2 et suivants du code de la sécurité sociale, les travailleurs indépendants sont tenus de déclarer chaque année leurs revenus pour le calcul de leurs cotisations et contributions sociales ; les cotisations sont calculées à titre provisionnel en pourcentage du revenu professionnel de l'avant-dernière année ; elles font l'objet d'une régularisation lorsque le revenu professionnel est définitivement connu. ; en outre, il ressort de l'article D. 642-6 du même code, qu'il n'est pas procédé à la régularisation des cotisations si l'assuré n'exerce plus l'activité lorsque les revenus sont définitivement connus ou a demandé la liquidation de sa retraite de base.
M. X... soutient que les sommes réclamées au titre des cotisations pour le quatrième trimestre 2013 ne correspondent pas aux revenus qu'il a déclaré à l'administration fiscale ; toutefois, s'il fait état de ses revenus 2008 à 2012, il ne communique aucune pièce à l'appui de ses dires alors que s'il fait état d'un revenu imposable de 68321 euros pour 2011, l'Urssaf retient un revenu déclaré de 72 071 euros pour la même année ; il ne précise pas en quoi le calcul opéré par l'Urssaf est erroné alors que le principe du paiement provisionnel des cotisations, avec régularisation postérieure au vu des revenus réels d'activités, organisé par l'article R. 131-6-2 du code de la sécurité sociale, devait conduire M. X... à respecter le paiement de ses cotisations provisionnelles de ce trimestre, ce qu'il n'a pas fait ; il ne soutient ni ne démontre avoir déclaré à l'Urssaf ses revenus pour l'année 2013 afin de permettre à celle-ci de procéder à la régularisation des cotisations et contributions sociales, étant observé qu'il ne donne à la cour aucun élément sur ses revenus de l'année en question. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur l'octroi d'un délai de grâce :
Les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale ne peuvent accorder des délais en application des dispositions de l'article de l'article 1244-1 du code civil ancien (devenu1343-5 du même code), cette demande relevant de la seule compétence de la Caisse ; le jugement sera de nouveau confirmé.
Sur la demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et le droit d'appel :
Le fait qu'une procédure soit prévue sans frais ne fait pas obstacle à l'application de ce texte, lequel ne saurait concerner uniquement les frais d'avocat mais vise tous les frais non inclus dans les dépens ; en conséquence, l'équité commande de faire droit à la demande de l'Urssaf de la Corse à ce titre mais d'en réduire le montant à de plus justes proportions.
Il convient de rappeler qu'en application des dispositions de l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale, la procédure devant une juridiction des affaires de sécurité sociale est gratuite et sans frais avec néanmoins condamnation de l'appelant qui succombe d'un droit d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement,
REJETTE les fins de non recevoir et déclare l'Urssaf de la Corse recevable en ses demandes,
CONFIRME le jugement du Tribunal des Affaires de sécurité Sociale d'AJACCIO en date du 10 décembre 2014 en toutes ses dispositions,
CONDAMNE Jean-Louis X... à payer à l'Urssaf de la Corse la somme de DEUX MILLE EUROS (2000 €) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
FIXE le droit d'appel prévu par l'article R 144-10 al. 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant qui succombe au dixième du montant mensuel du plafond prévu par l'article L. 241-3 du même code et condamne M. X... au paiement de ce droit ainsi fixé.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/00020
Date de la décision : 08/02/2017
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2017-02-08;15.00020 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award