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11/01/2017 | FRANCE | N°15/00170

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre sociale, 11 janvier 2017, 15/00170


ARRET No
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11 Janvier 2017
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15/ 00170
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Francis X...
C/
GDF SUEZ ENERGIE SERVICES
---------------------- Décision déférée à la Cour du :
26 mai 2015
Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'AJACCIO
14-00147
------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : ONZE JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT

APPELANT :

Monsieur Francis X...
...
...
20090 AJACCIO
Représenté par Me Aljia FAZAI-CODACCIONI, substituant Me Jean Michel MARIAG

GI, avocats au barreau d'AJACCIO,

INTIMEE :
Société GDF SUEZ ENERGIE SERVICES exerçant sous le nom commercial COFELY SERVICES, pris...

ARRET No
-----------------------
11 Janvier 2017
-----------------------
15/ 00170
-----------------------
Francis X...
C/
GDF SUEZ ENERGIE SERVICES
---------------------- Décision déférée à la Cour du :
26 mai 2015
Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'AJACCIO
14-00147
------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : ONZE JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT

APPELANT :

Monsieur Francis X...
...
...
20090 AJACCIO
Représenté par Me Aljia FAZAI-CODACCIONI, substituant Me Jean Michel MARIAGGI, avocats au barreau d'AJACCIO,

INTIMEE :
Société GDF SUEZ ENERGIE SERVICES exerçant sous le nom commercial COFELY SERVICES, prise en la personne de son représentant légal,
Le Voltaire-1, place des degrés
92059 PARIS LA DEFENSE
Représenté par Me Marie FAVRE de l'ASSOCIATION ZIELESKIEWICZ et ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 octobre 2016 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme BESSONE, Conseiller, faisant fonction de président,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme LORENZINI, Présidente de chambre
Mme BESSONE, Conseiller
Madame GOILLOT, Vice présidente placée près M. le premier président

GREFFIER :

Mme COMBET, Greffier lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 4 janvier 2017, puis prorogée au 11 janvier 2017

ARRET

Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe.
Signé par Mme LORENZINI, Présidente de chambre, et par Mme COMBET, Greffier, présent lors de la mise à disposition de la décision.

***
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. Francis X... a été engagé à compter du 02 octobre 2006 par la société COFATHEC Services (devenu COFELY SERVICES, et actuellement société ENGIE ENERGIE SERVICES) en qualité d'agent technique niveau 3 échelon 3.
Il occupait en dernier lieu ce poste pour un salaire de base mensuel de 1. 815 euros bruts, un horaire de trente-cinq heures par semaine, et était rattaché à l'agence Corse de la Direction Régionale Sud Est.
Par courrier recommandé du 28 mars 2014, la société ENGIE ENERGIE SERVICES a notifié à M. X... son licenciement pour cause réelle et sérieuse, assorti d'un préavis rémunéré de trois mois qu'il était dispensé d'exécuter.
Le 20 mai 2014, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de d'AJACCIO. Il demandait en dernier lieu à cette juridiction de condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :
-12 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de procédure,
-10. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
-3 250 euros au titre des astreintes,
-5 844 euros au titre des heures supplémentaires,
-564, 20 euros au titre des paniers repas,
-2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 26 mai 2015, le conseil de prud'hommes d'AJACCIO a :
- condamné la société au paiement de la somme de 1. 815 euros bruts au titre de l'irrégularité relative à l'entretien préalable,
- débouté M. X... de toutes ses autres demandes.

Par lettre recommandée expédiée le 16 juin 2015, M. X... a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 30 mai 2015.
M. Francis X... demande à la cour :
- de constater la nullité du jugement pour défaut de motivation,
- de constater l'irrégularité de la procédure de licenciement, et de condamner la société COFELY SERVICES à lui payer à ce titre la somme de 2. 000 euros par application de l'article L1235-2 du code du travail,
- de constater l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement,
- de condamner la société GDF SUEZ COFELY SERVICES à lui payer la somme de 12. 000 euros à ce titre,
- de la condamner à lui payer les sommes suivantes :
10 000 euros de dommages-intérêt au titre " du climat particulier de l'entreprise et du caractère abusif du licenciement ",
3 520 euros au titre des astreintes,
5 844 euros au titre des heures supplémentaires,
546, 20 euros au titre des paniers-repas,
4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. X... fait valoir que lors de l'entretien préalable au licenciement, l'employeur était représenté par trois personnes : M. B..., M. C..., et M. D..., alors que le salarié était assisté d'un conseiller syndical.
Il indique d'une part qu'il est titulaire du diplôme de frigoriste, mais qu'il ne disposait pas des qualifications nécessaires pour occuper un poste d'intervenant électricien, et d'autre part que son contrat lui a donné pour mission d'assurer la maintenance et le dépannage d'installations techniques, alors que le règlement COFELY mission CHSCT précise que les agents de niveau 1 à 4 n'ont pas la responsabilité de l'installation, et ne font pas de dépannage qui reste du ressort des techniciens.
Il conteste avoir suivi une quelconque formation à la qualification BS, dont il n'est pas titulaire, puisqu'il n'était qu'agent de maintenance de niveau 3, et non pas technicien.
Il ajoute qu'il ne pouvait être itinérant, dans la mesure où il était de niveau 3, et que les habilitations produites par l'employeur, qui datent pour certaines de son embauche en 2006, sont périmées.

Il affirme n'avoir commencé à exercer une activité indépendante d'électricien qu'en juillet 2014 et non pas en 2011 comme l'affirme l'employeur.
Revenant sur les motifs de son licenciement, M. X... fait donc valoir :
- qu'il ne pouvait contrôler le fonctionnement des moteurs électriques de la résidence PIETRALBA, ni effectuer le dépannage des installations de l'hôpital de CASTELUCCIO, mais que malgré son absence de formation et d'habilitation, il tentait de réaliser les interventions,
- que les dysfonctionnements relevés sur l'installation du casino de PROPRIANO relèvent tous de l'intervenant électricien, et que plusieurs agents de COFELY sont intervenus, de sorte qu'il n'existe pas de raison de lui faire porter seul la responsabilité des désordres,
- que les faits rapportés par l'hôpital de CASTELUCCIO dans son courrier du 14. 11. 2013 sont prescrits sur le plan disciplinaire,
- que le problème des bons d'intervention auprès de la gendarmerie n'a jamais été discuté lors de l'entretien préalable,
- que l'employeur n'ignorait selon lui rien de son activité, puisqu'il facturait ses interventions aux clients à l'heure, sur bons, et non pas selon un forfait annuel,
- que la fixation du lieu de l'entretien préalable à trois heures de route de son lieu de travail ne lui permettait pas d'être présent à son poste le matin du 7 mars 2014, et dès lors aucune absence injustifiée ne peut lui être reprochée sur cette journée.

En ce qui concerne sa demande en paiement des heures supplémentaires, il indique que la procédure interne des EVP (Eléments Variables de Paie) qui doivent être fournis par le salarié préalablement à l'établissement de la paie, n'a jamais été réellement respectée par l'employeur. Selon le salarié, ni les EVP produits par l'employeur, raturés et non signés, ni les listing parcellaires de l'appareil PDA ne peuvent faire échec aux bons d'intervention qu'il verse aux débats.
Il affirme avoir réalisé des semaines complètes d'astreinte, 24 heures sur 24, pendant quatre mois de mai à août 2013, en raison de démissions et de l'absence d'une partie du personnel qui avait intégré une société concurrente, la MAINTECO courant 2013. Il précise que, pendant cette période, lui étaient attribuées des responsabilités de chef d'agence, puisqu'il participait aux réunions de chantier, et gérait tous les portefeuilles de clients.
Il réclame des heures supplémentaires de cinq à six heures par jour en semaine, de quatre heures le samedi et quatre heures le dimanche, sur la période de mai, juin et juillet 2013, puis ponctuellement jour par jour de septembre 2013 à mars 2014, et les paniers-repas quotidiens de mai à août 2013, soit soixante paniers-repas à 6, 20 euros.
La société ENGIE ENERGIE SERVICES demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qui concerne le licenciement et les créances salariales,
- de l'infirmer en ce qui concerne l'irrégularité de procédure,
- de débouter M. X... de sa demande de dommages-intérêts à ce titre,
- de condamner M. X... à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle que constituent des causes réelles et sérieuses de licenciement l'insuffisance professionnelle si elle est la conséquence de négligence, de désintérêt pour le travail, de désinvolture, d'une abstention volontaire ou d'une mauvaise volonté délibérée, l'inexécution fautive par le salarié de son contrat de travail, et l'insubordination, et que la gravité de la faute doit être appréciée notamment au regard de la persistance du salarié dans une attitude fautive.
Elle fait valoir que s'agissant d'un licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, la charge de la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties, que la lettre de licenciement est motivée de façon parfaitement précise et circonstanciée, et que M. X... ne verse aux débats aucun élément de nature à remettre en cause son licenciement.
Elle reproche à M. X... une attitude inacceptable dans le cadre des relations de travail, matérialisée par une exécution de mauvaise foi de son contrat de travail, procédant :
- d'une exécution défectueuse, voire d'une inexécution des tâches lui incombant notamment auprès de la résidence Pietralba et du Casino de Propriano,
- d'une déclaration à son employeur d'heures de travail non réalisées,
- de multiples négligences dans la transmission d'informations à sa hiérarchie, et plus particulièrement, une absence de remise à son supérieur de ses bons d'intervention auprès de l'hôpital de Casteluccio, ou des gendarmeries.

Elle souligne que ces manquements se sont avérés préjudiciables aux intérêts de la société, en entachant de son image de professionnalisme et en dégradant ses relations commerciales avec ses clients.
Elle rappelle que l'habilitation électrique du salarié n'est pas directement liée à sa position hiérarchique ni à sa qualification professionnelle, qu'elle concerne toutes les opérations d'ordre électrique et non électrique, et que la maintenance dans le voisinage ou sur un ouvrage ou une installation électrique constitue une opération d'ordre non électrique.
Elle indique que M. X... avait un BEP " froid et conditionnement " et un CAP " froid et climatisation ", qu'il était titulaire d'une habilitation HO/ BO/ HOV/ BS, et donc à même de " maîtriser la manipulation de matériel et outillage dans un environnement électrique " mais également de " réaliser une intervention basse tension élémentaire ", et qu'il était donc compétent pour contrôler, nettoyer et procéder aux interventions de technicité modérée sur les installations litigieuses de chauffage-climatisation-ventilation au sein de l'hôpital de Casteluccio, du bâtiment de Chambord, de la résidence Pietralba, et du casino de Propriano.
Elle ajoute qu'il lui appartenait en tout état de cause d'informer sa hiérarchie des difficultés rencontrées lors de ses interventions, et le cas échéant de permettre à la société de ré-affecter la tâche à un autre salarié détenant une autre habilitation et/ ou compétence technique afin de mettre en fonctionnement les installations, ce que M. X... n'a pas fait.
En ce qui concerne le carnet d'habilitation, la société ENGIE ENERGIE SERVICES indique qu'elle disposait d'un délai de quatre ans à compter du 1er juillet 2011 (soit jusqu'au 1er juillet 2015) pour intégrer l'ensemble de ses salariés dans le processus d'habilitation.
Elle indique que le salarié est particulièrement mal fondé à se prévaloir d'une incompétence électrique, alors qu'il a créé fin 2011 son entreprise spécialisée dans le secteur d'activité des travaux d'installation électrique dans tous locaux.
Elle explique que la procédure d'EVP (Eléments Variables de Paie) est déclarative, et que seules les fiches EVP servent à payer les éléments variables de paie déclarées par le salarié, alors que les bons d'intervention n'attestent quant à eux aucune heure supplémentaire et ne servent qu'à justifier auprès du client la réalisation des prestations et leur facturation. L'analyse comparative des fiches EVP et des bulletins de paie fait selon la société ENGIE apparaître que Francis X... a été intégralement désintéressé des astreintes, heures supplémentaires et paniers repas qu'il a déclarés, y compris sur la période de mai à août 2013.

Elle rappelle que les astreintes, qui ne peuvent excéder une période de sept jours consécutifs sur quatre semaines, ne sont pas rémunérées mais récupérées, et ouvrent droit à une prime d'astreinte.
Les trente-six heures supplémentaires déclarées par M. X... en mai 2013, lui ont été payées sur son bulletin de paie de juin 2013, et les dix-sept heures supplémentaires déclarées en juin 2013 ont été payées en juillet 2013.
Il en va de même des paniers-repas selon l'employeur.
La société ENGIE SERVICES indique enfin que les astreintes déclarées en août 2013 et novembre 2013, et en janvier et février 2014, ont toutes été payées à M. X....
Elle rappelle enfin que les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne se cumulent pas avec celles qui sanctionnent l'inobservation des règles de forme.
A l'audience du 08 novembre 2016, les parties ont repris les termes de leurs conclusions écrites.

MOTIFS

Sur l'annulation du jugement
Par application de l'article 455 du code de procédure civile, tout jugement doit être motivé.
Le jugement du 26 mai 2015 se contente d'indiquer que l'entretien préalable au licenciement est irrégulier, sans indiquer pourquoi, et que " les motifs invoqués à l'appui du licenciement de M. X... sont justifiés ", sans autre précision.
Le rejet de toutes les autres demandes n'est pas du tout motivé.

Il convient d'annuler le jugement, et en application de l'article 562 alinéa 2 du code de procédure civil, d'évoquer l'affaire.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 28 mars 2014 est motivée comme suit :
" Vous travaillez au sein de l'agence Côte d'Azur depuis le 02. 10. 2006, et occupez des fonctions d'agent d'exploitation au sein de l'équipe D'AJACCIO.
Depuis plusieurs mois et jusqu'à ce jour, nous déplorons un manque de sérieux, un mécontentement de votre hiérarchie et un comportement déviant de votre part (non respect des consignes et négligences répétées). "

Mécontentement Client, insatisfaction de la hiérarchie et non exécution du travail demandé
Le lundi 24 février 2014, lors de la réunion des copropriétaires de la résidence Pietralba, de nombreuses personnes se plaignaient de COFELY Services, dû à un manque d'entretien des caissons de VMC et à des dysfonctionnements récurrents. Pourtant les installations de cette résidence qui font partie de votre portefeuille d'activité avaient été normalement nettoyées et contrôlées récemment par vous-même à la suite d'une demande de votre responsable d'équipe M. C.... En effet, d'après les bons d'intervention que vous avez produits, qui ne sont d'ailleurs pas contre-signés par le client, vous semblez même avoir passé trois heures sur site le 06 janvier 2014, et trois heures le 08 janvier 2014. Sur ces mêmes fiches vous notez d'ailleurs " vérifications générales OK " et " nettoyage et contrôles divers ". Pour faire suite à la réunion et à l'insatisfaction client, M. C...décide alors de missionner un de vos collègues pour aller vérifier et comprendre d'où vient le mécontentement. Il est alors constaté qu'effectivement, deux caissons sont en sécurité (les moteurs tournent à l'envers !) et que trois caissons sont dans un état déplorable : toiles d'araignées, courroies cassantes, poussière. Les courroies semblaient prêtes à casser, et les manchettes étaient percées.
Ce qui nous amène à constater que si vous êtes réellement intervenu sur le site, vous n'avez pas fait votre travail, et que vos installations ne sont pas entretenues.

En effet, vu que vos bons ne sont pas contre-signés par le client, nous n'avons pas de preuve de votre passage sur la résidence. Nous vous rappelons d'ailleurs que cette absence de signature est récurrente sur la plupart de vos fiches d'intervention et qu'elle vous a d'ailleurs valu des remarques régulières par votre responsable.
Le 18 février 2014, l'entreprise BARRARD pour laquelle nous travaillons, recevait un courrier de résiliation de la part du CASINO de PROPRIANO, à cause d'une incapacité technique et d'une insatisfaction globale sur la prestation. Or par sous-traitance, ce site faisait partie de votre portefeuille d'intervention.
Cette résiliation est basée sur la visite technique de contrôle effectuée par la société AJC le 11 février 2014 à la demande du client et cette visite a révélé plusieurs dysfonctionnements qui nous sont imputables.
Un compresseur qui fonctionne à l'envers sur le Roof 1 !
Le compresseur 2 qui semblait avoir été remplacé était en réalité hors service et n'a pas été remplacé sur le Roof 1 !
Des problèmes d'alimentation et de raccordement ce qui occasionnait des dysfonctionnements dans l'armoire électrique du Roof 1.
Des installations qui sont à 50 %, 0 % ou 40 % de fonctionnement !
Pourtant, vous ne nous avez jamais fait aucune remontée sur des dysfonctionnements ou des difficultés que vous auriez pu rencontrer sur ce contrat. Dans le cas contraire, l'entreprise aurait pu réagir vite et faire intervenir un autre technicien pour faire le nécessaire et remettre en fonctionnement les installations.
Ce manque de sérieux, votre manque de vigilance et cette attitude désinvolte sont inacceptrables et dévalorisent l'image de la société.

Négligence dans les remontées d'information
Le 20 février 2014 la direction de l'entreprise présentait l'état de l'activité P3 de l'année 2013 à notre client de l'Hôpital de Casteluccio afin notamment de budgétiser l'année 2014.
Ce contrat faisant partie de votre portefeuille, cet état était alors basé sur vos bons d'intervention 2013.
Le lendemain de la réunion, à la grande surprise de la hiérarchie, il a été découvert dans votre véhicule de service une trentaine de bons d'intervention 2013, faisant référence à ce contrat, que vous n'aviez pas remis à votre hiérarchie.
En conclusion, le mémoire technique et le budget qui ont été présentés la veille étaient erronés puisque des éléments étaient manquants, et cela à cause de votre manque de rigueur. Cette situation dommageable pourra engendrer des impacts financiers néfastes sur l'entreprise.

Même surprise le 11 mars dernier lorsque des bons d'intervention sont encore découverts dans votre véhicule concernant le contrat des gendarmeries alors que le 28 février 2014, M. C...avait regroupé et envoyé tous les bons 2013 à l'entreprise AJC, pour laquelle nous sommes sous-traitants, afin que cette dernière puisse nous payer les interventions.
Cette négligence est pénalisante pour l'entreprise et montre de nouveau un manque de sérieux et d'investissement manifeste de votre part.
A cet effet, le jour de l'entretien, alors que votre entretien était prévu à 15H, vous avez pris la décision sans prévenir votre hiérarchie, de ne pas venir travailler le matin. En effet, ne vous voyant pas à 8 h, votre hiérarchie a tenté de vous contacter par téléphone plusieurs fois mais ses tentatives étaient restées vaines puisque vous ne répondiez pas au téléphone. Nous avons su ensuite que vous aviez pris l'initiative de prendre la route pour Borgo le matin même afin d'aller récupérer votre représentant syndical à l'aéroport de Bastia. Ce comportement illustre votre mauvais état d'esprit et votre manque de respect vis-à-vis de votre hiérarchie et de l'entreprise.
Force est de constater que vous n'avez pas tenu compte des remarques de votre hiérarchie, ni pris la mesure de la patience dont nous avons fait preuve jusqu'à présent. ".

Il n'est pas contesté que la lettre de licenciement est motivée de façon précise, circonstanciée et vérifiable.
En ce qui concerne le premier grief, l'employeur ne produit aucun courrier de réclamation du syndicat des copropriétaires de la résidence Pietralba, ni aucune constatation objective des désordres relevés sur place, alors même que ce point est contesté par l'appelant qui produit des attestations de copropriétaires se disant satisfaits de ses services. La seule pièce versée aux débats par l'employeur sur ce point, est un mail non daté adressé par M. C...chef d'exploitation à sa hiérarchie, dans lequel il indique avoir été destinataire de la réclamation de la copropriété, et avoir en conséquence dépêché sur le site un salarié prénommé Sébastien, lequel a constaté que " deux caissons étaient en sécurité, et que les trois caissons étaient dans un état lamentable ". Il s'agit toutefois d'un document interne à l'entreprise. Ce premier grief n'est donc pas suffisamment étayé.
Le 18 février 2014 la CODIM 2 qui exploite le Casino de Propriano demandait par courrier la résiliation du contrat de maintenance dont les termes n'étaient selon elle pas respectés.
M. X... avait pourtant établi pour ce client deux fiches d'intervention de sept heures chacune (dont trois heures de trajet) les 10 janvier 2014 et 30 janvier 2014, la première n'étant pas contresignée par le client. M. X... écrivait le 10. 01. 2014 " Fonctionne sur un compresseur ", " Impossibilité d'accéder aux réglages de thermostats en l'absence de documentation ". Il notait le 30 janvier 2014 " remplacement d'un compresseur et essais OK ". Face au mécontentement du client, la société AJC effectuait une visite technique qui mettait en évidence que sur le ROOF 1, le compresseur 1 fonctionnait à l'envers et que le compresseur 2 était hors service, que les filtres étaient partout à remplacer, que les circuits frigorifiques étaient vides de fluides.
Cet épisode caractérise une négligence certaine de la part de M. X..., même si le relevé de certains dysfonctionnements dans ses fiches des 10 et 30 janvier 2014 n'a pas été suivi d'effet.
L'employeur n'établit par aucune pièce la défaillance de M. X... dans la transmission de ses fiches d'intervention. Il ne justifie notamment pas du tout, qu'à deux reprises ainsi qu'il l'affirme dans la lettre de licenciement, une multitude de bons aient été découverts dans son véhicule de service, concernant l'hôpital de Casteluccio ou les gendarmeries.
Ce troisième grief n'est pas établi.
Enfin, M. X... ne conteste pas ne pas s'être présenté à son poste de travail le 17 mars 2014 au matin, jour de sa convocation à l'entretien préalable au licenciement, et être allé chercher à l'aéroport de BASTIA le représentant syndical qui devait l'assister dans l'après-midi. Il ne justifie pas avoir prévenu sa hiérarchie, ni avoir justifié de son absence. Il n'avait pas en tout état de cause à aller chercher son assistant à l'aéroport sur ses heures de travail.
Les circonstances de cette absence injustifiée sont cependant particulières : La convocation de l'intéressé à 15H à Borgo, ne lui permettait pas de rester toute la matinée à AJACCIO, sauf à quitter son poste dès midi et à circuler sans faire de pause.
En résumé, les griefs formulés à l'encontre du salarié dans la lettre de licenciement ne sont que très partiellement établis. Ils n'ont pas donné lieu à un avertissement préalable.
Il convient de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par application de l'article L1233-5 du code du travail, M. X... peut prétendre à une indemnité égale au salaire des six derniers mois bruts, soit la somme de 13 166 euros. Il sollicite toutefois uniquement une somme de 12 000 euros qui lui sera accordée.
Il réclame également une somme de 10 000 euros au titre du climat particulier de l'entreprise et du caractère abusif du licenciement, sans expliciter précisément ces griefs.
Les éléments du dossier ne permettent pas de considérer que le licenciement revêtait un caractère vexatoire dans ses modalités, ni que son employeur lui a fait subir des conditions de travail incompatibles avec son obligation de sécurité de résultat, ou l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail. Il convient de rejeter cette demande.
Par ailleurs, lorsque le salarié a moins de deux ans d'ancienneté dans une entreprise d'au moins onze salariés, ce qui est le cas en l'espèce, il résulte des dispositions de l'article L1235-2 du code du travail que le non-respect par l'employeur de la procédure de licenciement peut uniquement être sanctionné si le licenciement a une cause réelle et sérieuse.
Il convient en conséquence de débouter M. X... de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure.

Sur la demande en paiement d'heures sup-plémentaires, d'heures d'astreinte, et de prime de panier

Il résulte de l'article L3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement des éléments de nature à étayer sa demande.
Le système en vigueur dans l'entreprise pour fixer la rémunération est déclaratif : Chaque semaine, le salarié doit compléter un formulaire permettant de remplir la fiche mensuelle d'éléments de paie, qui récapitule les heures programmées, les absences, les astreintes, les heures supplémentaires, et les primes.
La société ENGIE ES produit les fiches mensuelles d'éléments de paie de M. X... pour 2013 et 2014. Elles ont été renseignées manuscritement, et signées par le supérieur hiérarchique, ce qui établit que contrairement à ce qu'affirme l'appelant, cette procédure était bien appliquée dans l'entreprise. Elles sont d'ailleurs identiques aux quelques fiches correspondantes qui ont été produites par le salarié, hormis un certain nombre de rectifications expressément apportées par l'employeur. Il n'y a donc pas lieu de craindre que ces documents aient été modifiés pour les besoins de la procédure, ni d'exiger la production des originaux.

Par ailleurs les fiches d'intervention qui doivent être contresignées par les clients sont destinées à justifier auprès de ceux-ci de la réalisation des prestations facturées. Elles ne peuvent servir pas à calculer les rémunérations, et en particulier les heures d'astreinte ou les heures supplémentaires, puisqu'elles ne comportent aucun horaire.
M. X... affirme d'abord avoir fait des heures supplémentaires entre mai et août 2013 au titre de ses permanences à MONOPRIX tous les mardis et vendredis de 6 H à 19H, outre quatre heures le samedi et quatre heures le dimanche. Il ne produit cependant sur ce point aucune pièce, hormis un relevé manuscrit assez confus, qui ne fait état qu'une seule fois du nom " Monoprix " en janvier 2013. Aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que les quelques fiches d'intervention à MONOPRIX qui ont été établies n'ont pas été intégrées dans le temps de travail payé à M. X....
Au demeurant, les fiches de paie afférentes à cette période font état d'heures supplémentaires rémunérées à 125 %, voire à 150 % : huit heures supplémentaires en mai 2013, trente-six en juin 2013, et dix-sept en juillet 2013.
Il indique ensuite avoir effectué, à compter de septembre 2013 des astreintes et des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées. Il ne produit pour en justifier que des fiches d'intervention auprès de clients, hormis une " fiche justificative d'heures supplémentaires " pour novembre 2013, faisant état neuf heures supplémentaires au titre de trois déplacements à Porto-Vecchio et de " mises en routes diverses " sur AJACCIO. Ces heures supplémentaires ont cependant été refusées par l'employeur sur fiche mensuelle d'élément de paie au motif qu'elles n'avaient pas été renseignées sur le document adéquat et qu'elles n'avaient pas été validées.
La cour ne dispose pas d'élément suffisants pour considérer que ces heures supplémentaires réclamées par le salarié ont été à tort considérées comme non justifiées par l'employeur.

Il n'explique pas précisément dans quelles circonstances il aurait été amené à effectuer en qualité de chef d'agence des semaines complètes d'astreinte entre mai et août 2013.
M. X... qui ne produit pas d'éléments suffisants pour étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires et d'heures d'astreinte, sera débouté de ces demandes.

Sur la prime de panier

Le calcul de la prime de panier obéit aux mêmes règles que celles qui régissent les autres éléments de rémunération.
Il existe sur les fiches mensuelles d'éléments de paie remplies sur déclarations du salarié, une rubrique hebdomadaire sous forme de grille, réservée aux primes. Le salarié doit déclarer chaque semaine, les primes de panier qui correspondent à son activité de la semaine. Concernant M. X... l'examen des fiches mensuelles d'éléments de paie permet de constater que sur un grand nombre de semaines, cinq primes de panier ont été validées par la hiérarchie.
La cour ne dispose d'aucun élément permettant d'affirmer qu'un nombre de primes supérieur à celui qui a été déclaré était dû.
M. X... sera débouté de cette demande.

Sur les frais et dépens

Partie succombante, la société ENGIE E. S. devra supporter les dépens d'appel et de première instance.
Il n'est pas inéquitable de condamner l'employeur, partie tenue aux dépens, à payer au salarié la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

***

PAR CES MOTIFS
L A C O U R,
Statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
- ANNULE le jugement du conseil de prud'hommes d'Ajaccio en date du 26 mai 2015 ;
- Statuant à nouveau, CONDAMNE la société ENGIE ENERGIE SERVICES (venant aux droits de COFATECH) à payer à M. Francis X... la somme de 12 000 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- DEBOUTE M. Francis X... de sa demande de dommages-intérêts, d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement, de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, d'heures d'astreinte, et de prime de panier ;
- CONDAMNE la société ENGIE ENERGIE SERVICES à payer à M. Francis X... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNE la société ENGIE ENERGIE SERVICES aux dépens de première instance, et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/00170
Date de la décision : 11/01/2017
Sens de l'arrêt : Annule la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2017-01-11;15.00170 ?
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