Ch. civile A
ARRET No
du 23 MARS 2016
R. G : 14/ 00593 JD-C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 19 Juin 2014, enregistrée sous le no 13/ 00625
X...
C/
Consorts Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT TROIS MARS DEUX MILLE SEIZE
APPELANTE :
Mme Julie X...née le 15 Avril 1931 à ALGER ...20000 AJACCIO
assistée de Me Jean Louis LENTALI de la SCP LENTALI PIETRI DUCOS, avocat au barreau d'AJACCIO plaidant en visioconférence
INTIMES :
M. Jean Joseph Y...né le 29 Novembre 1952 à ALGER ......20000 AJACCIO
ayant pour avocat Me Caroline PERES-CANALETTI, avocat au barreau d'AJACCIO
Mme Pascale Y...épouse Z......10300 SAINTE SAVINE
ayant pour avocat Me Caroline PERES-CANALETTI, avocat au barreau d'AJACCIO
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 janvier 2016, devant la Cour composée de :
Mme Françoise LUCIANI, Conseiller, magistrat du siège présent le plus ancien dans l'ordre des nominations à la Cour, faisant fonction de président de chambre,
Mme Judith DELTOUR, Conseiller Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 23 mars 2016.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Françoise LUCIANI, Conseiller, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE
Suivant acte de partage du 5 août 1991, reçu par Me A..., Mme Julie Y...épouse X...est attributaire du lot No2 constitué d'une parcelle de terre cadastrée No1603 section B, lieu dit Sualello, commune de Piana, pour 1ha 06a 00ca ; M. Etienne Y...est attributaire du lot No1 constitué d'une parcelle de terre cadastrée No1602 section B. L'acte crée une servitude perpétuelle de passage de la parcelle B1603 au profit de la parcelle B1602.
Alléguant des travaux de voirie réalisés par les héritiers de feu Etienne Y...et la modification de l'emprise et de la nature de la servitude, par acte du 3 juin 2013, Mme Julie Y...a fait assigner M. Jean Joseph Y...et Mme Pascale Y...épouse Z...devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio, pour obtenir le rétablissement de la servitude en respectant le tracé du plan, le reboisement de la parcelle B1603 sous astreinte et leur condamnation au paiement des frais et dépens, de 10 000 euros de dommages et intérêts et de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 19 juin 2014, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a, au visa de l'acte de partage et de l'article 691 du code de procédure civile,
- rejeté les demandes de Mme Julie Y...épouse X...,
- rejeté la demande de M. Jean Joseph Y...et Mme Pascale Y...épouse Z...,
- laissé les dépens à la charge de Mme Julie Y...épouse X....
Mme Julie Y...a interjeté appel par déclaration reçue le 11 juillet 2014.
Par dernières conclusions communiquées le 18 juin 2014, Mme Julie Y...demande :
- de dire son appel recevable et fondé,
- d'infirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise,
Statuant à nouveau, de
-faire injonction à Mme Z...Pascale et M. Y...Jean Joseph de respecter le tracé de la servitude de passage qui a été accordée à Feu Etienne Y..., aux termes de l'acte authentique du 5 août 1991 et de ses annexes,
- leur faire injonction d'avoir à reboiser la partie de la parcelle B 1603 qu'ils ont " démaquisée " avec des espèces de mêmes nature et maturité que celles enlevées,
- les condamner à remettre les lieux en l'état, sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification de la décision à intervenir,
- les condamner solidairement au paiement de 10 000 euros de dommages et intérêts,
- les condamner solidairement au paiement des dépens et de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose en substance que les intimés ont obtenu une autorisation de lotir leur lot et qu'ils ont modifié le tracé et l'emprise de la servitude pour réaliser une opération de spéculation, qu'il s'agit d'une atteinte à son droit de propriété, qui a été constatée par le géomètre chargé de borner les lots réalisés et qu'ils ont détruit l'état naturel des lieux.
Par dernières conclusions communiquées le 4 décembre 2014, Mme Pascale Y...et M. Jean Joseph Y...demandent de
-confirmer le jugement,
- débouter Mme Alessandri X...de ses demandes,
- la condamner au paiement des dépens et de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- leur donner acte de ce qu'ils se réservent le droit de saisir la juridiction compétente pour obtenir le partage des frais d'entretien.
Ils contestent toute voie de fait ou violation du droit de propriété de l'appelante. Ils font valoir qu'il n'est pas démontré que le chemin réalisé constitue une emprise non conforme, que bénéficiant de la servitude, ils peuvent effectuer les travaux nécessaires à sa conservation, y compris des travaux de goudronnage. Ils ajoutent que le tracé de la servitude a été précisé, que le permis de lotir et l'arrachage de la végétation consécutifs n'ont pas été contestés en temps utiles. Ils exposent que le débroussaillage est obligatoire, que l'opération n'a aucune vocation spéculative et que l'appelante profite de l'accès qu'ils ont réalisé.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er juillet 2015. L'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 21 janvier 2016, mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 23 mars 2016.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application de l'article 697 du code civil, celui auquel est due une servitude a droit de faire tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la conserver. Il est constant que la parcelle attribuée à Mme Y...supporte une servitude de passage au bénéfice de la parcelle attribuée à M. Jean Joseph Y....
L'acte prévoyait une servitude d'une largeur minimale de quatre mètres et le constat fait état d'une route goudronnée de 4, 00 mètres à 4, 10 mètres de large. L'acte prévoyait également une servitude de passage souterrain pour les réseaux d'eau, d'électricité, d'assainissement et de téléphone, de sorte qu'elle ne peut se plaindre du passage de canalisations ou de la présence de regards. L'appelante ne prouve pas que les travaux réalisés excèdent ce qui était nécessaire à l'usage ou à la conservation de la servitude. Mme Julie Y...ne prouve pas la violation de son droit de propriété.
En application de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. Mme Y...ne démontre pas l'existence d'une violation de son droit de propriété puisque d'une part, les travaux réalisés sont conformes aux prévisions de l'acte notarié de partage et que d'autre part, le débroussaillage est obligatoire. La nature ou la valeur des essences n'est pas un argument pertinent. En revanche, cette obligation de débroussailler aux abords des constructions, des chantiers et des travaux ainsi que des voies privées y donnant accès sur une profondeur de 10 mètres de part et d'autre, incombe au propriétaire des constructions, des chantiers et des travaux, ce que sont les intimés titulaires de l'autorisation de lotir. Le jugement doit être confirmé par substitution de motifs.
Mme Julie Y...qui succombe en sa demande principale sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts. Le donner acte n'est pas constitutif de droits, Mme Pascale Y...et M. Jean Joseph Y...seront déboutés de leur demande à ce titre.
Mme Julie Y...qui succombe sera condamnée au paiement des dépens et d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
- Confirme par substitution de motifs le jugement entrepris,
Y ajoutant,
- Déboute Mme Julie Y...de ses demandes contraires,
- Déboute Mme Pascale Y...et M. Jean Joseph Y...de leur demande de donner acte,
- Condamne Mme Julie Y...au paiement des dépens,
- Condamne Mme Julie Y...à payer à Mme Pascale Y...et M. Jean Joseph Y..., parties communes d'intérêts, une somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT