Ch. civile A
ARRET No
du 23 MARS 2016
R. G : 13/ 00985 FL-C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 16 Juillet 2009, enregistrée sous le no 08/ 00340 Arrêt Au fond, origine Cour d'Appel de BASTIA, décision attaquée en date du 11 Mai 2011, enregistrée sous le no 09/ 00808 C Arrêt Au fond, origine Cour de Cassation de PARIS 01, décision attaquée en date du 17 Septembre 2013, enregistrée sous le no R11-21. 770
SCI SANTA MARIA
C/
Syndicat des copropriétaires IMMEUBLE L'EMPEREUR
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT TROIS MARS DEUX MILLE SEIZE
MIXTE
APPELANTE :
SCI SANTA MARIA prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège C/ O Madame X...... 20200 SANTA MARIA DI LOTA
assistée de Me Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA, Me Pierre MICHOTTE, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE :
Syndicat des copropriétaires IMMEUBLE L'EMPEREUR pris en la personne de son syndic en exercice la SARL KALLISTE CORSE GESTION elle-même prise en la personne de son représentant légal 40 Boulevard Paoli 20200 BASTIA
ayant pour avocat Me Frédérique GENISSIEUX de la SCP CABINET RETALI et ASSOCIES, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 janvier 2016, devant la Cour composée de :
Mme Françoise LUCIANI, Conseiller, magistrat du siège présent le plus ancien dans l'ordre des nominations à la Cour, faisant fonction de président de chambre, Mme Judith DELTOUR, Conseiller Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 23 mars 2016.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Françoise LUCIANI, Conseiller, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La société civile immobilière Santa Maria a acquis les lots numéro 1, 2 et 9 de la copropriété de l'immeuble « l'Empereur » situé 25 avenue Emile Sari à Bastia.
Elle a fait assigner la société " Le Kalliste corse Gestion " en sa qualité de syndic de la copropriété de l'immeuble, devant le tribunal de grande instance de Bastia pour obtenir la rectification des répartitions des charges de copropriété, la restitution des charges perçues indûment et une mesure d'expertise afin de rétablir les décomptes des charges afférentes à ses lots.
Suivant jugement du 16 juillet 2009 le tribunal de grande instance de Bastia a :
- dit que la clause contenue à l'article 3 du règlement de copropriété stipulant que les lots 1 et 2, la station-service, ne participeraient qu'aux charges de copropriété relatives à la réparation des gros murs et à l'étanchéité, était réputée non écrite,
- débouté la société civile immobilière Santa Maria de ses demandes,
- dit que l'assemblée générale des copropriétaires procéderait à une nouvelle répartition des charges en se conformant aux dispositions légales et réglementaires,
- condamné la société Santa Maria au paiement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
La société civile Santa Maria a formé appel de cette décision le 9 septembre 2009 et par arrêt contradictoire du 11 mai 2011 la cour d'appel de Bastia a confirmé le jugement du 16 juillet 2009 en toutes ses dispositions.
Y ajoutant, elle a dit que les sommes consignées par la société Santa Maria en application de l'ordonnance du juge de la mise en état du 24 octobre 2008 seront attribuées au syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Empereur, elle a condamné la société Santa Maria à verser à ce syndicat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné la société Santa Maria aux dépens de l'instance.
La Cour de Cassation, saisie par la société Santa Maria, a par arrêt du 17 septembre 2013 cassé et annulé mais seulement en ce qu'il a dit que l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble l'Empereur procédera à une nouvelle répartition des charges, l'arrêt rendu le 11 mai 2011 entre les parties par la cour d'appel de Bastia ; la cour a remis en conséquence sur ce point la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit les a renvoyés devant la cour d'appel de Bastia autrement composée.
Dans ses dernières conclusions déposées le 3 septembre 2015 la société civile immobilière Santa Maria demande à la cour, aux motifs précisés dans les écritures, de désigner un expert en matière de copropriété pour proposer un tableau de répartition des charges conforme aux critères de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 ; de dire que les frais et honoraires d'expertise seront avancés par le syndicat des copropriétaires ;
en tout état de cause de dire irrecevable et à tout le moins non fondée la prétention du syndicat des copropriétaires à la suppression comme non écrite de la clause dérogatoire relative aux assurances de la station service ;
en tout état de cause également de dire non fondée ou à tout le moins prématurée la demande de paiement de sommes présentées par le syndicat ;
de réserver les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions déposées le 20 novembre 2015 le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Empereur demande à la cour de débouter la SCI Santa Maria de sa demande d'expertise, de dire que la nouvelle répartition des charges se fera sur la base des tableaux de répartition de charges existants tel qu'issus de l'acte modificatif du 20 septembre 1970 ;
de dire que la demande formée par la concluante visant à solliciter la suppression de la clause numéro 7 ne constitue pas une demande nouvelle ;
de supprimer les clauses du règlement de copropriété contraires à l'ordre public soit :
- la clause contenue dans l'article 3 concernant la participation aux charges communes ainsi libellée : « par dérogation aux clauses ci-dessus la station-service lots numéros 1 et 2 ne participera qu'aux suivantes : réparation des gros murs, étanchéité. »
- la clause numéro 7 contenue dans l'article deuxième ainsi libellée : « les assurances de la station-service seront indépendantes de celle de l'immeuble. » ;
de remplacer l'intitulé « tableaux récapitulatifs » par l'intitulé suivant « nouvelle répartition des millièmes de propriété et charges » ;
si la cour devait faire droit à la demande d'expertise, de dire que l'expert désigné devra en toute hypothèse tenir compte du règlement de copropriété du 17 décembre 1968, des actes modificatifs intervenus en 1970, des décisions sus-citées et des règles d'ordre public ;
de condamner la société Santa Maria à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est du 27 août 2015.
SUR CE :
En conséquence de la décision définitive de la cour, confirmant le jugement du 16 juillet 2009, et de l'arrêt de la Cour de Cassation du 17 septembre 2013, la clause contenue à l'article 3 du règlement de copropriété, concernant les charges communes, selon laquelle la station-service, lots numéros 1 et 2, ne participera qu'à la réparation des gros murs et à l'étanchéité, est réputée non écrite ; il revient à la cour, saisie sur renvoi de la Cour de Cassation, et en application de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1965, de procéder à la nouvelle répartition des charges.
Pour s'opposer à la demande d'expertise de la SCI Santa Maria, le syndicat des copropriétaires fait valoir que la répartition des charges telle qu'opérée par les actes rectificatifs de l'état descriptif de division-règlement de copropriété, établis par devant notaire les 23 février et fin septembre 1970, régulièrement publiés, restent applicables sauf à éliminer les clauses contraires à l'ordre public.
Le syndicat des copropriétaires soutient qu'outre celles contenues à l'article 3, est également contraire à l'ordre public la clause prévoyant que les assurances de la station-service et de l'appartement du pompiste seront indépendantes de celle de l'immeuble.
La SCI Santa Maria objecte à tort qu'il s'agit d'une demande nouvelle, puisque dans son propre exploit introductif d'instance elle demandait elle-même au tribunal de faire application de cette clause, qui faisait donc déjà litige.
En réalité, et comme l'avait interprété la cour dans son arrêt du 11 mai 2011, cette clause n'est pas contraire à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, puisqu'elle ne dispense pas le propriétaire de la station-service de participer à l'assurance de l'immeuble ; elle prévoit seulement qu'il doit souscrire des assurances spécifiques pour son activité. Il n'y a donc pas lieu de réputer cette clause non écrite.
Quant à la nouvelle répartition des charges, il est exact que les actes notariés de 1970 ont prévu une répartition des millièmes de la copropriété, le tableau récapitulatif du 20 septembre 1970 établissant une répartition aux 1060e, et que le règlement de copropriété, également établi devant notaire, publié régulièrement au bureau des hypothèques, recense les charges communes. Mais aucun de ces documents ne prévoit, en conformité avec l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, la quote-part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges. En effet, d'une part, et comme le souligne la SCI Santa Maria, aucune disposition n'évoque la charge du chauffage, de l'eau chaude, de l'ascenseur ; de plus, dans le cadre de la modification des millièmes opérée en 1970, une nouvelle répartition des charges de structure a été opérée, mais pas celle des charges d'entretien.
En outre, on observe dans les comptes versés aux débats par l'appelante que les charges générales sont réparties en 1056e, que les comptes mentionnent un bâtiment A et un bâtiment B avec des tantièmes différents ; enfin, qu'il existe un litige au sujet de la répartition et de la charge du chauffage ainsi que cela résulte du procès-verbal de constat du 30 mars 2010.
L'ensemble de ces constatations soulève des questions techniques qui ne peuvent être tranchées par la cour sans avoir au préalable recouru à une mesure d'expertise.
Il convient donc de l'ordonner avant dire droit sur la répartition des charges. Les frais seront avancés par le syndicat des copropriétaires.
La charge des dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile seront réservés.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Rejette la demande tendant à suppression de la clause numéro 7 du règlement de copropriété selon laquelle « les assurances de la station-service seront indépendantes de celles de l'immeuble. » ;
Avant dire droit sur la répartition des charges de l'immeuble,
Ordonne une mesure d'expertise ;
Désigne M. Ange-Michel Y...en qualité d'expert avec pour mission :
au vu du règlement de copropriété reçu devant notaire le 17 décembre 1968, des deux modificatifs établis également devant notaire le 23 février 1970 et le 20 septembre 1970 ; au vu de l'arrêt de la cour d'appel de Bastia du 11 mai 2011 et du présent arrêt :
- décrire l'immeuble en ses différentes composantes,
- inventorier les différentes catégories de charges conformément à la loi du 10 juillet 1965 en relevant si leur sort est ou non réglé par les dispositions contractuelles applicables,
- proposer un tableau de répartition conforme aux critères d'ordre public de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Dit que l'expert se conformera pour l'exécution de son mandat aux articles 232 à 248 et 263 à 284 du code de procédure civile, communiquera directement rapport de ses opérations à chacune des parties et en déposera deux exemplaires au greffe de la cour d'appel de Bastia avant le 30 juillet 2016 ;
Dit que l'expertise aura lieu aux frais avancés de la SCI Santa Maria qui consignera au greffe de la cour avant le 15 avril 2016 la somme de deux mille cinq cents euros (2 500 euros) à titre de provision à valoir sur les honoraires de l'expert ;
Dit qu'à défaut de consignation dans le délai ci-dessus fixé, la désignation de l'expert sera caduque, à moins que le magistrat, chargé des expertises, à la demande d'une des parties se prévalant d'un motif légitime, ne décide une prorogation du délai ou un relevé de caducité,
Désigne le magistrat chargé des expertises pour :
1) remplacer par une ordonnance l'expert empêché ou refusant, 2) assurer le contrôle de la mesure d'instruction ;
Réserve l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT