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23/03/2016 | FRANCE | N°13/00548

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 23 mars 2016, 13/00548


Ch. civile A

ARRET No
du 23 MARS 2016
R. G : 13/ 00548 JD-C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'Ajaccio, décision attaquée en date du 20 Juin 2013, enregistrée sous le no 12/ 00621

SCI LA PADULE
C/
X...Y... Compagnie d'assurances GAN ASSURANCES

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT TROIS MARS DEUX MILLE SEIZE
MIXTE
APPELANTE :
SCI LA PADULE prise en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège Lieudit Pirelli Ste Lucie de Porto Vec

chio 20144 ZONZA

assistée de Me Antoine GIOVANNANGELI de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barrea...

Ch. civile A

ARRET No
du 23 MARS 2016
R. G : 13/ 00548 JD-C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'Ajaccio, décision attaquée en date du 20 Juin 2013, enregistrée sous le no 12/ 00621

SCI LA PADULE
C/
X...Y... Compagnie d'assurances GAN ASSURANCES

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT TROIS MARS DEUX MILLE SEIZE
MIXTE
APPELANTE :
SCI LA PADULE prise en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège Lieudit Pirelli Ste Lucie de Porto Vecchio 20144 ZONZA

assistée de Me Antoine GIOVANNANGELI de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AJACCIO plaidant en visioconférence

INTIMES :

Mme Valentina X... née le 13 Mars 1978 à MILAN ...20144 SAINTE LUCIE DE PORTO-VECCHIO

ayant pour avocat Me Anne Marie LEANDRI de la SCP LEANDRI LEANDRI, avocat au barreau d'AJACCIO

M. René Y... né le 05 Avril 1946 à NERVESA DELLE BATAGLIA ...20213 FOLELLI

assisté de Me Marie Mathilde PIETRI, avocat au barreau de BASTIA

Compagnie d'assurances GAN ASSURANCES société anonyme, RCS Paris 542 093 797, prise en la personne de son représentant légal demeurant audit siège 8-10, Rue d'Astorg 75008 PARIS

assistée de Me Claude THIBAUDEAU, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 janvier 2016, devant la Cour composée de :
Mme Françoise LUCIANI, Conseiller, magistrat du siège présent le plus ancien dans l'ordre des nominations à la Cour, faisant fonction de président de chambre, Mme Judith DELTOUR, Conseiller Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 23 mars 2016.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Françoise LUCIANI, Conseiller, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE

Par acte notarié reçu par Me Z..., le 15 mars 2004, Mme Valentina X... a acquis en état futur d'achèvement, de la S. C. I. La Padule, une maison d'habitation No4 du groupe d'habitation, La Padule sis à Sainte Lucie de Porto Vecchio.

Alléguant de nombreux désordres, Mme X... obtenait, par ordonnances de référé des 19 avril et 25 mai 2011, la désignation d'un expert en la personne de M. A...qui déposait son rapport le 11 janvier 2012.
Par acte des 30 mai et 1er juin 2012, Mme X... assignait la S. C. I. La Padule, M. René Y... et le GAN devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio pour obtenir la condamnation de la S. C. I. La Padule à lui payer les sommes de 94 440, 60 euros au titre des travaux relevant de la garantie décennale, de 8 692, 52 au titre des travaux relevant de la responsabilité contractuelle, de 20 000 euros au titre du trouble de jouissance subi jusque fin 2011, de 3 600 euros pour la période de travaux et 400 euros par mois depuis le 1er janvier 2012 jusqu'à la complète remise en état des lieux, de 56 000 euros de dommages et intérêts pour dépréciation de l'immeuble, de 34 000 euros au titre du trop perçu sur le prix de vente, de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de M. Y... au paiement de la somme de 9 761, 89 euros TTC.

Par jugement du 20 juin 2013, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a

-condamné la S. C. I. La Padule à payer à Mme Valentina X... :
. la somme de 103 828, 50 euros TTC sur le fondement de la garantie décennale avec indexation sur l'indice BT 01 du coût de la construction à compter du jugement et jusqu'à parfait paiement,. la somme de 9 684 euros au titre du préjudice de jouissance,. la somme de 56 000 euros au titre de la dépréciation de l'immeuble,. la somme de 34 000 euros au titre de la répétition de l'indû,

- condamné M. René Y... à payer à Mme Valentina X... la somme de 9 761, 89 euros TTC sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- rejeté les demandes de préjudice moral de la S. C. I. La Padule et le recours récursoire sur le fondement de l'article 1792 du code civil, à l'encontre de M. René Y... et du GAN,
- condamné la S. C. I. La Padule à payer à Mme Valentina X... la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la S. C. I. La Padule aux dépens y compris les frais d'expertise judiciaire réalisée par M. A....

La S. C. I. La Padule a interjeté appel par déclaration reçue le 4 juillet 2013.

Par dernières conclusions communiquées le 17 juin 2015, la S. C. I. La Padule demande de
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a indiqué qu'elle devait la garantie décennale à Mme X... au titre des désordres de nature décennale chiffrés 103 828, 50 euros TTC,
- réformer pour le surplus le jugement entrepris,
- débouter Mme X... de sa demande au titre du préjudice de jouissance comme non justifiée et non fondée,

Reconventionnellement, de

-condamner Mme X... à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts, outre la somme de 316, 84 euros pour les frais de constat et de 277, 23 euros pour les frais de sommation, en raison de la faute commise en prétendant faussement avoir été contrainte de quitter son logement depuis le 1er janvier 2012, afin d'asseoir sa demande indemnitaire,
- débouter Mme X... de sa demande indemnitaire au titre de la dévaluation de sa maison,
- débouter Mme X... de sa demande indemnitaire de remboursement du trop-payé sur le prix de vente,
- débouter Mme X... de l'ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions,
en tout état de cause, statuant sur son appel en garantie, au visa de l'article 1792 du code civil, de
-réformer le jugement,
- condamner in solidum M. René Y... et son assureur, la compagnie d'assurances le GAN à la garantir de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre, y compris celles au titre des dépens, frais d'expertise et les frais irrépétibles.
Elle expose ne pas contester devoir la garantie décennale pour les désordres allégués, mais s'opposer à la demande au titre du trouble de jouissance faisant valoir que Mme X... n'a jamais quitté son logement, à l'inverse de ce qu'elle a soutenu. Elle considère qu'il s'agit d'une tentative d'escroquerie au jugement, que les demandes ne sont nullement justifiées s'agissant du trouble de jouissance ou de la valeur locative et que la supercherie lui cause un préjudice. Elle ajoute qu'elle ne peut être indemnisée de l'intégralité des désordres et d'une dépréciation qui n'est pas justifiée au regard de la valeur d'achat. Elle soutient que les demandes de modification du projet émises par Mme X... ont porté le coût du bien à 178 443, 85 euros, qu'elle ne l'a jamais contesté, qu'elle l'a accepté et s'est acquittée à hauteur de 159 000 euros, que sur ses relances, elle a payé 174 000 euros, laissant un solde de 4 443, 85 euros hors les intérêts de retard et qu'il s'agit là encore d'une escroquerie au jugement. Elle réclame la garantie de M. Y..., constructeur et invoque son recours intégral contre ce dernier et consécutivement la garantie du GAN, estimant sa demande fondée et le rejet par le premier juge non fondé. Elle estime malgré l'absence de réception formelle, que les éléments de cette réception " en 2007 " étaient réunis et que la cour devra statuer sur le caractère apparent ou non des désordres. Elle ajoute que M. Y... n'était pas constructeur de maison individuelle, puisqu'étant promoteur, elle lui a confié les travaux à réaliser, qu'il s'agissait de travaux correspondant à ses activités déclarées, lesquels sont porteurs de désordres de nature décennale.

Par dernières conclusions communiquées le 20 avril 2015, Mme Valentina X... demande de

-débouter la S. C. I. La Padule de son appel,
- confirmer la décision du 20 juin 2013,
Y ajoutant de :
- condamner la S. C. I. La Padule à lui payer 20 000 euros au titre du trouble de jouissance subi jusqu'à la fin 2011, celle de 3 600 euros pour la période des travaux et celle de 400 euros par mois depuis le 1er janvier 2012 jusqu'à la complète remise en état des lieux,
- condamner M. Y... au paiement de la somme de 8 162, 12 euros HT soit 9 761, 89 euros TTC avec indexation sur l'indice BT depuis le jour du dépôt du rapport jusqu'à parfait paiement et de dire que le GAN devra garantir M. Y...,
- condamner la S. C. I. La Padule au paiement des dépens et de la 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Elle expose que les éléments d'une réception sont réunis, elle détaille les désordres et demande de confirmer l'analyse du premier juge, Elle fait valoir qu'elle a dû rester dans les lieux malgré l'importance des désordres et conteste toute fraude à cet égard. Elle fait valoir que les travaux de réparation ne rendront pas à l'immeuble les qualités d'un immeuble neuf, ce qui justifie sa demande au titre de la dépréciation. Elle soutient qu'elle ne doit aucune pénalité de retard et que la preuve d'une modification des accords entre les parties n'est pas rapportée, qu'elle a réglé directement l'agrandissement de la terrasse à M. Y..., qu'elle peut prétendre au remboursement de 34 000 euros sur le fondement de l'enrichissement sans cause, qu'elle a été abusée. Elle estime que la terrasse payée directement à M. Y... a été mal réalisée et qu'elle démontre l'existence d'un contrat de louage d'ouvrage et d'une réception tacite.

Par dernières conclusions communiquées le 6 octobre 2014, M. René Y... demande de

-réformer le jugement qui l'a condamné au paiement de la somme de 9 761, 89 euros,
- dire que le GAN devra le relever et garantir de toutes les condamnations susceptibles d'être mises à sa charge,
- statuer sur les dépens.
Il expose que la S. C. I. La Padule comprend trois associés Mme Nadine C..., son ex-compagne, M. Grégory B..., fils de Mme C...et compagnon de Mme X... et lui-même, qu'il a édifié des maisons
commandées par la S. C. I. La Padule, qu'il n'a pas été payé de l'intégralité des travaux. Il expose que l'acte de vente à Mme X..., le mentionne comme constructeur, assuré par le GAN, que les travaux ont pris du retard en raison du non respect par Mme X... de ses obligations, qu'il y a eu une réception " en 2007 ", que les désordres sont de nature décennale et sont inclus dans son champ d'activité.

Par dernières conclusions communiquées le 12 mars 2015, le GAN demande, de

-constater l'absence de réception de l'ouvrage,
- dire que les désordres et dommages affectant l'ouvrage acquis par Mme X... relèvent de la responsabilité contractuelle de M. Y... et de la S. C. I. La Padule,
- dire qu'il ne doit pas garantie au titre de la police d'assurance décennale,
- débouter la S. C. I. La Padule et quiconque de leur action récursoire en garantie à son encontre,
et au visa du contrat d'assurance « Assurance des Entreprises du Bâtiment » no 001102023 souscrit par M. René Y... auprès du GAN Assurances, de
-constater que M. Y... a construit l'ouvrage en qualité de constructeur de maisons individuelles,- constater que cette activité n'a pas été déclarée à la souscription du contrat d'assurance,

- dire que Le Gan ne peut voir ses garanties engagées pour des travaux et prestations ne relevant pas des activités assurées et celles non conformes aux activités souscrites,
- débouter la S. C. I. La Padule et quiconque de leur action récursoire en garantie à son encontre,
- condamner la S. C. I. La Padule au paiement des dépens de première instance et d'appel et de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le GAN fait valoir qu'il n'y a pas eu de réception, ni de document attestant la livraison et qu'il ne peut devoir sa garantie, qu'il a soumis la question à l'expert qui a constaté l'absence de réception formelle, que Mme X... n'a jamais manifesté son intention de recevoir l'ouvrage, qu'à l'inverse elle a fait état de nombreux désordres, que la prise de possession ne suffit pas à caractériser une réception tacite, d'autant qu'il existe un solde restant dû. Il estime que seule la responsabilité de contractuelle de l'entreprise peut être mobilisée, que les désordres allégués étaient apparents. Il ajoute qu'il n'est pas l'assureur de la S. C. I. La Padule, mais
celui de l'entrepreneur, qui a déclaré les activités maçon, charpentier bois et couvreur, que M. Y... était propriétaire du terrain qu'il a divisé, qu'il a construit les maisons commercialisées par le truchement de la S. C. I. La Padule, qu'il a agi comme constructeur de maison individuelle et n'a pas souscrit le contrat idoine, qu'il a exercé sur le chantier des activités non déclarées de plombier, carreleur, électricien, qu'aucune action récursoire ne peut être reçue contre lui.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er juillet 2016.

L'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 21 janvier 2016.
L'affaire a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 23 mars 2016.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au terme de l'acte notarié du 15 mars 2004, la S. C. I. La Padule a cédé à Mme X... le lot No4 du groupe d'habitations dénommé La Padule résultant du permis de construire délivré le 1er octobre 2003 au nom de M. René Y... transféré au nom de la S. C. I. La Padule le 23 octobre 2003 portant sur la section F No1712 lieu dit Calzone d'une contenance de 12a 01ca, s'agissant d'une maison élevée d'un étage sur rez-de-chaussée, en état futur d'achèvement, moyennant paiement de 140 000 euros dont 28 000 payés comptant. L'acte fait référence à Alessandro X..., bien qu'il n'y soit pas partie. Il indique que le vendeur conserve la qualité de maître d'ouvrage jusqu'à la livraison après constat contradictoire de l'état d'achèvement, que l'acquéreur s'interdit de s'immiscer dans l'exécution des travaux et notamment de solliciter directement le constructeur pour réaliser des travaux supplémentaires et que la prise de possession est conditionnée par le paiement des tranches de travaux au fur et à mesure de leur réalisation.

Suivant l'article 1792-6 du code civil, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves ; elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement ; elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.
Le premier juge ne pouvait prononcer des condamnations en application de la garantie décennale sans au préalable constater l'existence d'une réception. En l'espèce, il n'existe aucun réception contradictoire entre M. Y... et la S. C. I. La Padule et il n'existe aucune constatation de l'état d'achèvement de l'immeuble préalable entre la S. C. I. La Padule et Mme X.... Ni l'expert ni la juridiction n'ont pu constater l'existence du certificat d'achèvement ou du procès verbal de réception. Ni la S. C. I. La Padule, ni M. Y... ni même Mme X... ne peuvent préciser la date à laquelle la réception qu'ils invoquent aurait eu lieu. Ces derniers estiment cependant que les conditions d'une réception tacite étaient réunies. Or, sans certificat d'achèvement entre le vendeur et l'acquéreur,
le vendeur qui avait conservé la qualité de maître d'ouvrage ne pouvait procéder à une réception avec le constructeur. La S. C. I. La Padule, qui avait seule qualité pour procéder à la réception, n'établit pas avoir pris possession de l'ouvrage, pas plus que M. Y... n'établit le lui avoir livré. En effet, au terme du contrat, la réception fût-elle tacite, exigeait l'établissement d'un certificat d'achèvement, qui n'existe pas et qui ne peut être tacite.
Si Mme X... a pris possession de l'immeuble, " fin 2007 " selon elle, avec retard selon M. Y..., l'allégation d'un solde restant dû sur le montant duquel les parties ne sont pas d'accord, l'existence d'un procès verbal de constat d'huissier établi à la demande de Mme X..., le 8 octobre 2009 par lequel, elle a fait relever des désordres et malfaçons affectant l'ouvrage et la circonstance que la réception relevait de la S. C. I. La Padule, excluent l'existence de la réception tacite invoquée entre Mme X... et M. Y....
En l'espèce, la réalisation des dispositions contractuelles relatives à l'achèvement, à la livraison puis la prise de possession n'est pas démontrée, de sorte que les éléments d'une réception même tacite ne sont pas réunis.
A défaut de réception, la responsabilité de la S. C. I. La Padule ne peut pas être recherchée au visa des articles 1646-1 et 1792 et suivants du code civil. La responsabilité contractuelle du vendeur en état futur d'achèvement peut être recherchée en application des articles 1642, 1642-1 du code civil et au titre des désordres en cas de preuve d'une faute pouvant lui être imputée. Cependant, la S. C. I. La Padule demande la confirmation du jugement en ce qu'il a indiqué qu'elle devait la garantie décennale à Mme X... au titre des désordres de nature décennale chiffrés 103 828, 50 euros TTC. La S. C. I. La Padule ne conteste pas cette condamnation quand même son fondement juridique serait erroné, elle n'a pas formulé de demande subsidiaire. L'indexation a été fixée par le tribunal à compter du jour du jugement, suite à une confusion entre l'indexation sur l'indice BT01 et les intérêts assortissant normalement une condamnation, Mme X... est fondée à réclamer l'indexation à compter du jour du dépôt du rapport d'expertise.
La S. C. I. La Padule réclame la garantie de M. Y..., constructeur au titre des désordres, cette demande est fondée dès lors que ce dernier revendique avoir réalisé les travaux pour la S. C. I. La Padule et qu'il est mentionné comme constructeur à l'acte de vente.
M. Y... sera donc condamné à garantir la S. C. I. La Padule du montant de cette condamnation.
M. Y... réclame la garantie du GAN. Or, en absence de réception contradictoire entre la S. C. I. La Padule, maître d'ouvrage et M. Y..., constructeur, cette garantie n'est pas due. De surcroît, parmi les désordres relevés par l'expert et retenus, sans contestation des parties, en l'occurrence :
- l'absence d'arase étanche qui aurait dû se trouver entre la sous face du plancher bois du rez-de-chaussée et la tête du mur maçonnée,

- la désagrégation des joints entre les lames du plancher du rez-de-chaussée, en liaison directe avec le vide sanitaire sans isolant thermique,- la portance insuffisante du plancher bas,- les traces d'infiltrations au niveau du seuil d'entrée,- les moisissures les salles d'eau provenant du défaut de mise en oeuvre des joints de douche,- le barreaudage non conforme du garde-corps de la mezzanine inférieure,- l'insuffisance du contreventement,- l'inadaptation de l'enduit extérieur,- le voile du seuil bois des portes fenêtres,- l'absence de plaques hydrofuges sur les cloisons des salles de bains,- l'insuffisance de la charpente dans le séjour mezzanine,- l'absence d'étanchéité sur la terrasse extérieure de l'étage,- l'absence de relevé d'étanchéité sur la toiture,- le défaut de pente des évacuations eaux usées et eaux vannes,- le défaut de finition de la tête de cloison de la salle d'eau,- l'insuffisance ou l'absence de traitement du bois,- l'existence d'un espace entre les plaques sous tuiles PFT et la panne sablière, alors que la prestation était due,

figurent des travaux relevant d'activités non déclarées donc non garanties puisque M. Y... avait seulement déclaré les activités : maçon, charpentier bois et couvreur et non celles de carrelage, revêtement sols et murs.
Mme X... ne conteste pas avoir passé le 9 juillet 2007 et le 8 novembre 2007 deux marchés à forfait avec M. René Y... pour la confection d'une terrasse, la confection de deux piliers destinés à la pose d'un portail. Si M. Y... conteste la condamnation prononcée, il ne précise pas les moyens de sa critique. L'expert a constaté que la terrasse du rez-de-chaussé présentait des clous visibles, que les appuis étaient bricolés et insuffisants et qu'il s'agissait d'une impropriété à destination. M. Y... indique, sans distinction, que la réception de l'ouvrage courant 2007 n'est pas contestable. Mme X... soutient également cette version. Cette concordance, une prise de possession sans réserve et le paiement du solde caractérisent une réception tacite. M. Y... réclame à ce titre la garantie du GAN, s'agissant de désordres de nature décennale, affectant des travaux relevant des activités déclarées. La garantie du GAN est due à ce seul titre.

Sur le préjudice de jouissance

La S. C. I. La Padule conteste l'existence d'un tel préjudice et d'une telle ampleur, se fondant notamment sur la preuve qu'elle apporte qu'à l'inverse de ses affirmations en procédure, Mme X... n'avait pas quitté le logement avant les travaux, constitutive selon elle d'une escroquerie au jugement.

Si l'existence des désordres est établie, il est seulement prouvé par l'expertise qu'il existe un trouble de jouissance consécutif à la difficulté de manoeuvrer les portes-fenêtres et volets, l'engorgement des canalisations d'évacuation mais sans remontées en raison de leur pente insuffisante, la présence de moisissures dans les salles de bains, l'existence de courants d'air les jours de vent au niveau du plancher du rez-de-chaussée, d'une fuite au niveau de la jonction des bâtiments et la présence d'un garde corps dangereux. Ce trouble de jouissance est établi depuis 2009. Ces éléments qui gênent la vie quotidienne, justifient une indemnisation au titre du trouble de jouissance, pour un montant nécessairement forfaitaire, en absence d'autre démonstration, de 3 000 euros.

Mme X... réclame encore 3 600 euros de dommages et intérêts au titre du trouble de jouissance pendant les travaux et 400 euros par mois du 1er janvier 2012 jusqu'à la réalisation des travaux. L'expert indique que la durée prévisible des travaux est de 5 mois et que la maison sera inhabitable pendant 3 mois. La nécessité d'un relogement étant établie, la S. C. I. La Padule sera condamnée à payer à Mme X... une somme de 3 600 euros de dommages et intérêts au titre du trouble de jouissance pendant les travaux. Si le premier juge n'a pas statué sur l'exécution provisoire demandée, au stade de l'arrêt, la S. C. I. La Padule est condamnée au paiement des sommes correspondant aux travaux de reprise et non à réaliser les travaux, de sorte que la demande supplémentaire au titre du trouble de jouissance jusqu'à la réalisation des travaux doit être rejetée. Mme X... sera déboutée de ses prétentions contraires et supplémentaires.
En application de l'article 1382 du code civil, la S. C. I. La Padule démontre un fait fautif de Mme X... qui lui a causé un préjudice. Cependant, l'enquête menée par la S. C. I. La Padule qui a déjoué la supercherie mise en oeuvre par Mme X..., ne lui permet pas, à défaut de preuve d'un autre préjudice, de solliciter des dommages et intérêts excédant le montant des frais engagés pour y parvenir. Ces frais sont justifiés seulement à hauteur de 316 euros, la pièce 3bis visée au bordereau de communication des pièces ne figurant pas dans le dossier.
Au visa de l'article 16 du code de procédure civile et de cette mention sur le bordereau de communication des pièces, il a lieu d'ordonner la réouverture des débats et la production de la pièce manquante.
La créance de la S. C. I. La Padule n'est pas définitivement fixée, de sorte que la compensation ne peut jouer.

Sur la dépréciation

Mme X... a demandé et obtenu l'indemnisation de l'intégralité du préjudice résultant des désordres, coût des réparations et trouble de jouissance, elle a réclamé et obtenu 56 000 euros de ce chef. Or, la demande n'est pas motivée en droit. Fondée sur l'article 1382 du code

civil, elle impose la démonstration d'un dommage imputable à la S. C. I. La Padule causant un préjudice direct à Mme X.... Cette démonstration n'est pas faite par une considération générale suivant laquelle un immeuble neuf est déprécié quand il subit des travaux de reprise, d'autant qu'en l'espèce l'étendue des travaux de reprise est telle que Mme X... va bénéficier d'un immeuble en grande partie rénové, plusieurs années après son installation. L'expert avait en effet apprécié la dépréciation " en l'état " c'est-à-dire avant les travaux de reprise. Le jugement doit être infirmé de ce chef.

Sur les comptes entre les parties

L'acte liant Mme X... et la S. C. I. La Padule portait sur la vente en état futur d'achèvement d'une habitation sur un terrain qui n'interdit pas, contrairement au marché à forfait, les modifications de la construction. L'acte prévoyait expressément cependant que les travaux modificatifs ou complémentaires devaient être demandés au vendeur qui devait établir avec l'acquéreur par voie d'avenant écrit préalable, la nature des travaux supplémentaires, leur coût, les conditions de paiement et leur incidence sur les délais de livraison, le vendeur donnant les instructions aux entrepreneurs et architectes, le coût des travaux étant exclu du prix de vente.

Si Mme X... ne conteste pas avoir passé commande de travaux le 9 juillet 2007 et le 8 novembre 2007 à M. René Y..., pour la confection d'une terrasse, la confection de deux piliers destinés à la pose d'un portail, elle conteste une commande de travaux supplémentaires, portant le coût total des travaux à 178 443, 85 euros. La S. C. I. La Padule, quant à elle, ne produit aucun avenant au contrat initial. Si elle a produit un document unilatéral daté du 12 février 2007, faisant état d'un montant initial de 178 443, 85 euros, dans le courrier portant mise en demeure jusqu'en avril 2007, elle visait le montant de 140 000 euros pour le coût de la construction, de sorte que les pièces qu'elle produit au soutien de sa réclamation non signées par Mme X..., ne sont pas probantes. S'il existait des relations de confiance, quasi familiales, entre les parties au moment de la signature du contrat, elles ne leur interdisaient ni de suivre les dispositions du contrat qu'elles avaient cependant pris la précaution de rédiger, ni d'établir un écrit pour valoir preuve de leurs engagements réciproques. Le silence de Mme X... sur ce point au début de la procédure, ne suffit pas à caractériser son acceptation ou une contradiction.
L'action en remboursement de l'indû est fondée en absence de preuve d'une cause du règlement, elle se prescrit par cinq ans à compter du paiement. Mme X... avait payé 174 000 euros au 30 juin 2007, elle pouvait en solliciter le remboursement par acte du 30 mai 2012. Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande mais par substitution de motifs.
Toutes les parties succombent au moins partiellement en leur appel. Cependant en présence d'une réouverture des débats sur la demande de dommages et intérêts soutenue par la S. C. I. La Padule, il ne peut être statué définitivement sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort, par dispositions réformant le jugement, substitutives et nouvelles,

- Condamne la S. C. I. La Padule à payer à Mme Valentina X... la somme de cent trois mille huit cent vingt huit euros et cinquante centimes (103 828, 50 euros) TTC au titre des désordres affectant la construction vendue par acte du 15 mars 2004, avec indexation sur l'indice BT 01 du coût de la construction à compter du dépôt du rapport d'expertise et jusqu'à parfait paiement,
- Déboute la S. C. I. La Padule de ses demandes à l'encontre du GAN,
- Condamne la S. C. I. La Padule à payer à Mme Valentina X... la somme de trois mille euros (3 000 euros) de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance, jusqu'aux travaux,
- Condamne la S. C. I. La Padule à payer à Mme Valentina X... la somme de trois mille six cents euros (3 600 euros) de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance pendant les travaux,
- Condamne la S. C. I. La Padule à payer à Mme Valentina X... la somme de trente quatre mille euros (34 000 euros) au titre de la répétition de l'indu,
- Condamne M. René Y... à payer à Mme Valentina X... la somme de neuf mille sept cent soixante et un euros et quatre vingt neuf centimes (9 761, 89 euros) TTC au titre des désordres de nature décennale affectant la terrasse,
- Condamne le GAN à garantir M. René Y... du montant de cette condamnation,
- Déboute Mme Valentina X... du surplus de ses demandes au titre du trouble de jouissance et au titre de la dépréciation de l'immeuble,
Avant dire droit sur les dommages et intérêts dus par Mme Valentina X... à la S. C. I. La Padule,
- Ordonne la réouverture des débats et la production de la pièce 3 bis visée au bordereau de communication des pièces de la S. C. I. La Padule, à l'audience du 19 mai 2016 à 8 heures 30,

- Réserve les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/00548
Date de la décision : 23/03/2016
Sens de l'arrêt : Autre décision avant dire droit
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2016-03-23;13.00548 ?
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