Ch. civile A
ARRET No
du 21 OCTOBRE 2015
R. G : 14/ 00617 R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Juge aux affaires familiales de BASTIA, décision attaquée en date du 30 Juin 2014, enregistrée sous le no 13/ 01850
X...
C/
Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT ET UN OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE
APPELANT :
M. Agostinho X... né le 05 Juin 1971 à Ponte di Lima (Portugal)... 20200 BASTIA
ayant pour avocat Me Claude VOITURIEZ, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
Mme Eva Marie Y... née le 28 Janvier 1977 à BASTIA (20200)... 20600 FRANCE
ayant pour avocat Me Claudine ORABONA, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue en chambre du conseil du 07 septembre 2015, devant la Cour composée de :
Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller Mme Marie BART, vice-président placé près M. le premier président
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2015
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé hors la présence du public par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Du mariage de M. Agostinho X... et de Mme Eva Y... sont issus deux enfants :
- Andréa ..., née le 17 décembre 2002,
- Killian ..., né le 23 août 2006.
Par jugement en date du 11 mai 2012, le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Bastia a prononcé le divorce, et s'agissant des enfants a fixé, sous l'exercice conjoint de l'autorité parentale, la résidence habituelle des enfants au domicile de la mère, avec droit de visite et d'hébergement classique accordé au père, s'exerçant les 1er, 3ème et 5ème fins de semaine de chaque mois, du vendredi, sortie des classes au dimanche 18 heures, ainsi que la moitié des vacances scolaires, en alternance des périodes.
La contribution mensuelle du père, l'entretien et à l'éducation des enfants a été fixée à 300 euros par enfant, indexée annuellement.
Mme Y... a saisi le juge aux affaires familiales d'une requête tendant à ce que le droit de visite et d'hébergement de week-end du père ne commence qu'après les activités extra-scolaires (danse pour Andréa, et Judo pour Killian), dans la mesure où il refuse d'y conduire les enfants ou d'aller les chercher au motif qu'il est désapprouve leur inscription dans ces écoles.
M. X... demande en réponse une modification de son droit de visite et d'hébergement pendant les vacances d'été, de fin juillet à fin août tous les ans, et une extension de ses droits de week-end, jusqu'au lundi matin, et un milieu de semaine sur deux.
Par jugement du 30 juin 2014, le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Bastia a :
- débouté Mme Y... de ses demandes,
- débouté M. X... de ses demandes,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a exposés.
Le juge a estimé que seule la volonté des parents d'entretenir le conflit entre eux, pour des motifs financiers et affectifs, sans respect pour l'intérêt des enfants, expliquait la saisine de la juridiction et les demandes reconventionnelles, et qu'il n'y avait dès lors pas lieu d'y donner une suite favorable.
Par déclaration du 17 juillet 2014, M. X... a interjeté appel de cette décision.
La clôture de la procédure a été prononcée le 25 février 2015, et l'affaire fixée pour être plaidée le 07 septembre 2015.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions récapitulatives du 09. 12. 2014, M. Agostinho X... demande à la cour de :
- infirmer le jugement dont appel,
- dire et juger que ses droits de visite et d'hébergement s'exerceront selon les modalités suivantes :
une fin de semaine sur deux, du vendredi à la sortie de la classe, jusqu'au lundi matin à la rentrée en classe,
en alternance une semaine sur deux du mardi soir sortie des classes au jeudi matin à la rentrée des classes,
la première moitié des vacances scolaires hors période estivale les années paires et la seconde moitié les années impaires,
pendant les vacances scolaires d'été, les années impaires, du 20 juillet au 31 août, la mère les gardant avec elle du 1er au 20 juillet, puis du 1er septembre à la rentrée des classes, et inversement les années paires,
- condamner Mme Y... à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les entiers dépens.
Il fait valoir que depuis la séparation, en mars 2011, la mère n'a jamais respecté le caractère conjoint de l'autorité parentale, et a toujours pris seule toutes les décisions concernant les enfants, sans même l'en aviser, et sans tenir compte de l'avis des enfants, et que ce comportement s'est accentué depuis qu'il a eu un autre enfant avec sa nouvelle compagne.
Il en veut pour exemples :
- le fait qu'à Pâques 2013, sa fille a eu un gala de danse sur le continent, auquel la mère l'a accompagnée, sans même l'en aviser, et que pendant son absence, elle a préféré confier Killian à sa soeur plutôt qu'au père,
- le fait que le 18 avril 2014 alors qu'il devait partir en bateau à Rome pour passer Pâques avec sa famille, elle ne lui a remis les enfants qu'au moment du départ du bateau,
- qu'au début des vacances scolaires, elle n'accepte de lui laisser les enfants qu'à la date officielle des vacances, soit le 9 juillet, alors que depuis la fin juin ils ne sont plus scolarisés,
- qu'il part tous les 20 juillet avec sa famille au Portugal, jusque fin août, qu'à l'été 2014, il lui a proposé de lui emmener directement les enfants sur son lieu de vacances en Espagne, ce qu'elle a refusé, exigeant un retour des enfants en avion fort onéreux, le 09 août 2014,
- qu'à la rentrée de septembre 2013, Killian qui était manifestement en souffrance, a refusé de rentrer chez sa mère, et que c'est à l'occasion de ce séjour, que le père a appris que son fils était suivi au CMPP, ce qui ne lui avait jamais été dit, pas plus qu'il n'a été informé de la décision maternelle en septembre 2014 de mettre fin à cette prise en charge, pour commencer un suivi avec une psychomotricienne,
- qu'il est conducteur de travaux et non gérant de société, et qu'il ne travaille pas le samedi,
- qu'il vit dans un appartement spacieux et confortable,
- qu'il est nécessaire pour les enfants, qu'ils voient régulièrement leur petite soeur de 22 mois,
- que contrairement à ce qu'elle affirme, la mère travaille le mercredi, comme lui,
- que pour profiter pleinement de ses enfants, et en accord avec eux, il ne les a inscrits dans aucune activité extra-scolaire depuis la
rentrée, et que d'ailleurs Andréa ne peut plus pratiquer la danse puisqu'elle a un problème au genou.
Mme Eva Y..., par conclusions récapitulatives du 14 novembre 2014, demande à la cour :
- d'infirmer le jugement du juge aux affaires familiales de Bastia,
- de fixer le droit de visite et d'hébergement du père à une fin de semaine sur deux du vendredi soir après les activités extra-scolaires au dimanche soir 20 heures,
- subsidiairement de confirmer toutes les dispositions du jugement,
- de condamner M. X... à lui payer la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de le condamner aux dépens.
Elle expose qu'il refuse depuis la séparation de l'indemniser de la valeur des parts de la société, qu'il lui adresse chaque mois avec retard sa contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants, qu'il a commencé à s'opposer aux activités extra-scolaires des enfants lors qu'elle lui a demandé de la payer en début de mois, alors même que du temps du mariage, les enfants pratiquaient ces activités, qu'il ne lui répond plus au téléphone, qu'il n'a pas donné sa nouvelle adresse, qu'alors qu'elle se rendait le 9 juillet 2014, au bas de l'immeuble de M. X..., pour remettre des lunettes à sa fille, elle a été agressée par la nouvelle épouse de ce dernier, que l'extension de droit de visite et d'hébergement sollicitée par le père ne correspond à aucune utilisé au regard de l'intérêt des enfants, mais qu'il s'agit seulement d'une mesure de rétorsion aux demandes initiales de la mère.
Elle rappelle que le juge aux affaires familiales, doit notamment prendre en compte " la pratique que les parents avaient précédemment suivi ", qu'Andréa pratique la danse depuis qu'elle a 4 ans, et Killian le judo depuis l'année 2011/ 2012.
MOTIFS
Par application de l'article 373-2 du alinéa 2 du code civil, chacun des père et mère soit maintenir des relations personnes avec l'enfant, et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent.
L'exercice conjoint de l'autorité parentale suppose une information préalable mutuelle, des choix et décisions importantes concernant l'enfant, mais non pas pour les actes habituels de la vie courante.
Force est de constater en l'espèce, comme l'a fait le juge aux affaires familiales, que chacun des deux parents s'arc-boute sur ses prérogatives chaque fois qu'il le peut, sans considération pour l'intérêt des enfants, pour nuire à l'autre dans le cadre du conflit qui les oppose.
Ce comportement fait des enfants les otages d'un conflit de loyauté, très destructeur pour eux.
Ainsi résulte il des pièces du dossier, que Mme Y... :
- inscrit Killian dans un club sportif sans en parler préalablement au père,
- refuse que le père lui ramène les enfants directement sur son lieu de vacances, à la fin de sa période d'hébergement,
- consulte le CMPP pour Killian en octobre 2012, sans en parler au père, ni lui proposer de participer à ce suivi,
- prend l'initiative en juin 2014, au motif que Killian passe en classe supérieure, d'arrêter la prise en charge psychothérapeutique de l'enfant, c'est à dire comme le souligne le compte rendu du CMPP, la partie " soin " de cette prise en charge, sans d'avantage consulter le père, et pas forcément en conformité avec l'intérêt de l'enfant, dont les angoisses suscitées par la problématique familiale, nécessitaient visiblement selon Mme C... psychologue du centre, un soutien sérieux.
M. X... :
- croit utile de ne pas organiser les déplacements des enfants pour des activités extra-scolaires qui leur plaisent, au motifs qu'il n'a pas été consulté préalablement, et que ces activités " empiètent " sur son droit de visite et d'hébergement, sans comprendre le bénéfice que les enfants auraient à voir leurs deux parents investir sereinement ces activités,
- demande que les enfants partent avec lui 5 semaines d'affilée au Portugal au moins un été sur deux, au motif qu'une " tradition familiale " exigerait que toute la famille parte ensemble, du 20 juillet au 31 août, alors qu'une telle exigence est sans rapport avec l'intérêt des enfants, et qu'on comprend mal pourquoi il ne serait pas en mesure de partir avec ses enfants, mais sans nécessairement ses frères et soeurs, au Portugal ou ailleurs, en juillet ou en août, pendant la durée qu'il lui conviendra pendant sa période d'hébergement.
Sa demande tendant à pouvoir garder les enfants du 20 juillet au 31 août les années impaires sera donc rejetée.
Les passages des enfants d'un foyer à l'autre sont l'occasion de multiples accrochages et reproches (absence de linge, invectives, altercation violente du 9 juillet 2014, crises nerveuses de Killian,...), et sont extrêmement stressants pour Andréa et Killian.
En réclamant un droit de visite et d'hébergement supplémentaire de milieu de semaine en alternance avec les week-end, M. X... demande à multiplier ces passages de bras. L'intérêt des enfants, compte tenu de la vivacité du conflit, commande de rejeter cette demande.
Mme Y..., dans le cadre de son appel incident, maintient sa demande tendant à ce que le droit de visite et d'hébergement de fin de semaine du père ne commence le vendredi qu'après les activités extra-scolaires. Il semble cependant, à la lecture des courriers échangés par les parties en juillet 2014, que la situation des enfants aient changé en ce qui concerne les activités extra-scolaires, puisque M. X... indique dans ses conclusions qu'il ne les a inscrits dans aucune activité. Cette affirmation n'est pas contestée par la mère.
Il n'y a dès lors pas lieu de faire droit à cette demande.
Le jugement sera donc entièrement confirmé.
M. X..., qui succombe en son appel, devra supporter les dépens.
Il n'est pas inéquitable de condamner l'appelant, partie tenue aux dépens, à payer 1 500 euros à Mme Y... au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement en date du 30 juin 2014 du juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Bastia,
Y ajoutant,
Déboute Mme Eva Y... sa demande tendant à voir fixer le début du droit de visite et d'hébergement du père en fin de semaine, après les activités extra-scolaires,
Condamne M. X... Agostinho à payer à Mme Y... Eva la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 500 euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. X... Agostinho aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT