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21/10/2015 | FRANCE | N°14/00466

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 21 octobre 2015, 14/00466


Ch. civile A

ARRET No
du 21 OCTOBRE 2015
R. G : 14/ 00466 R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de Bastia, décision attaquée en date du 22 Avril 2014, enregistrée sous le no 10/ 01884

Y...
C/
A...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT ET UN OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
Mme Charlyne Berthe Y... épouse Z...née le 17 Décembre 1944 à Nice ......06700 Saint Laurent du Var

assistée de Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au b

arreau de BASTIA

INTIMEE :

Mme Annick A... épouse B... prise en sa qualité d'héritière de Mme Joséphine A......

Ch. civile A

ARRET No
du 21 OCTOBRE 2015
R. G : 14/ 00466 R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de Bastia, décision attaquée en date du 22 Avril 2014, enregistrée sous le no 10/ 01884

Y...
C/
A...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT ET UN OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
Mme Charlyne Berthe Y... épouse Z...née le 17 Décembre 1944 à Nice ......06700 Saint Laurent du Var

assistée de Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

Mme Annick A... épouse B... prise en sa qualité d'héritière de Mme Joséphine A... née le 06 Juillet 1949 à Nice ...20290 BORGO

assistée de Me Frédérique GENISSIEUX de la SCP GENISSIEUX BALESI-ROMANACCE, avocat au barreau de BASTIA, substituée par Me Anne-Marie GIORGI, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 septembre 2015, devant la Cour composée de :
Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller Mme Marie BART, vice-président placé près M. le premier président

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Martine COMBET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2015

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. Emmanuel Y... et Mme Joséphine A... se sont mariés sous le régime de la séparation des biens en vertu d'un contrat de mariage du 5 septembre 1956. Par acte des 21 et 23 février 1973, ils ont acquis en indivision un terrain sis à Bastia (Haute-Corse) lieudit Pastoreccia sur lequel a été édifié en 1984 un immeuble. Leur divorce a été prononcé par le tribunal de grande instance de Bastia le 20 mai 1976. M. Emmanuel Y... est décédé le 22 mai 1984.

Par acte du 14 juin 2007, Mme Charlyne Y..., unique héritière de son père Emmanuel Y..., a assigné Mme Joséphine Louise A... en liquidation-partage du bien immobilier indivis.

Par jugement contradictoire du 13 novembre 2008, le tribunal a dit que le bien situé lieudit Pastoreccia figurant au cadastre de la commune de Bastia sous le numéro no199 (au lieu de 119) de la section BK est un bien indivis, ordonné le partage de ce bien, dit que Mme A... est redevable de la moitié des fruits et revenus qu'elle a perçus de l'exploitation de ce bien depuis le 14 juin 2002, commis le président de la chambre départementale des notaires de Haute Corse et le juge de la mise en état de la chambre spécialisée en matière de successions et de partages en qualité de juge commissaire, ordonné une expertise du bien immobilier confiée à M. Serge E..., fixé la consignation à la charge de Mme Y... à la somme de 1 500 euros, débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 14 avril 2010, le jugement a été confirmé par la cour de céans. Par arrêt du 11 janvier 2012, la cour a complété son arrêt en disant que Mme B...A... en sa qualité d'héritière de Joséphine A... peut prétendre au remboursement des sommes engagées par celle-ci au titre de l'acquisition, de la conservation et de l'entretien du bien excédent la moitié de la somme payée de ce chef et en disant que ces sommes pourront être compensées avec celles qui devront être rapportées au titre des loyers perçus depuis le 14 juin 2002.

Par arrêt du 23 octobre 2013, la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt du 11 janvier 2012 mais seulement en ce qu'il a dit que Mme B...A... en sa qualité d'héritière de Joséphine A... peut prétendre au remboursement des sommes engagées par celle-ci au titre de l'acquisition, de la conservation et de l'entretien du bien excédent la moitié de la somme payée de ce chef et en ce qu'il a dit que ces sommes pourront être compensées avec celles qui devront être rapportées au titre des loyers perçus depuis le 14 juin 2002. L'affaire a été renvoyée à la cour d'appel d'Aix en Provence laquelle n'a toujours pas été saisie.

Mme Annick B... A... est intervenue aux droits de Mme A... décédée le 18 février 2010.

L'expert a déposé son rapport le 16 septembre 2011.

Par ordonnance du 20 décembre 2011, il a été ordonné à Mme B...A... de déposer entre les mains du greffier en chef les originaux des factures de travaux et d'impenses en sa possession et autorisation a été donnée à Mme Z...de les consulter.

Par ordonnance du 16 mai 2013, le juge de la mise en état a débouté Mme Y... de sa demande tendant à juger que les pièces 2, 13, 20, 21, 22, 23, 24, 30, 35, 36, 37, 38, 39 et 40 sont des faux et qu'elles doivent être retirées des débats, ce point n'étant pas de sa compétence.

Par jugement du 22 avril 2014, le tribunal de grande instance de Bastia a :

- dit n'y avoir lieu à annulation de l'expertise aux frais de l'expert,
- dit la demande en remboursement des impenses de Mme Annick B... A... non prescrite,
- ordonné le sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence soit dessaisie de la requête en omission de statuer de Mme Charlyne Y...,
- dit que l'instance sera poursuivie à l'initiative de la partie la plus diligente,
- ordonné la radiation de l'affaire du rôle des affaires en cours de la juridiction,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- dit que les dépens, y compris les frais et honoraires de l'expert seront compris en frais privilégiés de partage.

Le tribunal a rappelé qu'il n'est pas de la compétence de l'expert de se substituer aux parties dans l'administration de la preuve qui leur incombe et de rechercher ainsi des éléments de preuve qui doivent être versés aux débats par les parties à leur initiative et à défaut sur injonction de la juridiction saisie par la partie la plus diligente. Il a considéré que l'expert avait respecté le principe du contradictoire, les réunions et les déplacements sur les lieux avec la prise de métrées ayant eu lieu en présence des parties ou de leurs représentants et les premières conclusions ayant été communiquées aux conseils. Il a considéré qu'il n'était pas compétent pour statuer sur une procédure de faux au visa des articles 441-1 et 313-3 du code pénal en ce qui concerne les dépenses de construction de l'immeuble présentée par Mme Charlyne Y....

Il a estimé qu'il devait surseoir à statuer sur les impenses relativement au bien objet du litige dans l'attente de la décision de la cour d'appel saisie d'une requête en omission de statuer.

Mme Charlyne Y... a relevé appel du jugement du 22 avril 2014 par déclaration déposée au greffe le 2 juin 2014.

En ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 23 juin 2014 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Mme Charlyne Y... demande à la cour de :

- la recevoir en son appel et la dire bien fondée,
- infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,
- constater, au besoin en se faisant représenter les pièces litigieuses, que les pièces suivantes : 2, 3, 4, 13, 20, 21, 22, 23, 24, 30, 35, 36, 37, 38, 39, 40, déposées au greffe par Mme B...A... sont des originaux où des mentions ont été masquées au " Blanco " pour en tirer des photocopies falsifiées produites à l'expert et des devis présentés comme factures,
- constater que les copies falsifiées ainsi produites à l'expert représentent des factures ou des devis présentés comme factures, pour un montant total de 200 598 euros,
- dire et juger que les originaux maquillés et les copies falsifiées sont des faux qui seront écartés des débats,
- déclarer nul et de nul effet le rapport d'expertise de M. Serge E...,
- dire et juger que le coût de l'expertise devra rester à la charge de 1'expert qui devra procéder au remboursement des sommes perçues pour cette mission,

- dire et juger que la prétendue créance résultant d'un paiement du terrain par la seule dame A... n'est en rien établie par des preuves sans valeur au regard de l'article 1331 du code civil, qui ne peuvent contredire l'acte authentique du 21/ 23 février 1973,

- dire et juger qu'en tout état de cause cette preuve serait sans intérêt puisque cette créance éventuelle entre époux divorcés depuis 1976 est définitivement prescrite,
- dire et juger que la dépense de construction de l'immeuble ne peut être revendiquée à titre de récompense par Mme B...A... puisqu'elle a été exposée après le divorce de 1976,
- dire et juger que cette dépense ne peut être retenue car elle ne constitue pas une dépense d'acquisition de conservation ou d'entretien du bien indivis, qu'est le terrain acquis en 1973, seul visé par le jugement du 13 novembre 2008 ayant force de chose jugée,
à titre subsidiaire,
- dire et juger que la dépense de construction n'a pas été exposée par la dame A... sur ses deniers personnels, les pièces produites à l'expert ayant été falsifiées pour masquer le fait qu'elle a été exposée par Sodielec, ce que confirme l'aveu judiciaire de Mme A...,
- dire et juger qu'en tout état de cause la discussion de cette créance éventuelle est sans intérêt puisqu'elle est définitivement prescrite,
à titre éminemment subsidiaire et si par extraordinaire la Cour n'accueillait pas ces demandes,
- dire et juger qu'en toute hypothèse cette dépense de construction a été engagée sans le consentement de son co-indivisaire en violation de l'article 815-3 du code civil, objet de sa requête en omission de statuer et qu'il sera sursis à statuer jusqu'à ce que la cour d'appel d'Aix en Provence soit dessaisie de cette requête sur renvoi après cassation,
- s'agissant des éventuelles dépenses d'entretien et de conservation, dire et juger que l'indivisaire qui les a exposées doit tenir un état à la disposition de l'autre indivisaire en vertu de l'article 815-8 du code civil, qu'il est constant que tel n'a pas été le cas en 1'espèce, que la violation de cet article ne peut qu'être sanctionnée par l'irrecevabilité des demandes présentées sans état, l'absence de sanction aboutissant nécessairement à priver de tout effet cette disposition légale,
à titre encore plus subsidiaire et si la cour ne retenait pas la sanction qu'impose cette inexécution,
- dire et juger que ne pourront être retenues que les dépenses d'entretien et de conservation dont la preuve du paiement sur ses deniers personnels par Mme A... sera établie, et que seront exclues de ces dépenses l'impôt personnel que constitue la CSG ainsi que les honoraires de l'agence Corse avenir appartenant à la fille de Mme B... A... , intervenue sans son mandat et qui ne lui sont pas opposables en vertu des articles 815-3 et 815-11 du code civil,
- nommer un nouvel expert en précisant que sa mission, définie par le jugement du 13 novembre 2008, implique de calculer les revenus tirés de l'exploitation de cet immeuble, en l'absence de justificatifs, comme ils le seraient pour des locaux similaires, sur la base des loyers de l'année 2011 non contestés, corrigés par un taux de vacance qu'il jugera acceptable et sous déduction des charges effectivement payées opposables aux deux indivisaires,
- dire et juger que l'expert devra estimer la valeur de cet immeuble conformément à sa destination d'immeuble de rapport,
- dire et juger qu'à partir de la valeur de l'immeuble, du revenu brut qu'il aura calculé, des revenus retirés de l'exploitation de cet immeuble et des dépenses de conservation et d'entretien de chaque indivisaire, l'expert établira le compte entre les parties et sa proposition d'allotissement à la date de clôture de son rapport,
- dire et juger qu'il indiquera dans son rapport les bases et modalités de calcul qu'il estimera nécessaires à une éventuelle actualisation de ses conclusions à la date du partage de sorte que le notaire commis puisse procéder à la liquidation des comptes entre les parties,
- condamner Mme B...A... à 8 000 euros de dommages et intérêts outre 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 8 août 2014 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Mme Annick A... épouse B... prise en sa qualité d'héritière de Mme Joséphine A... demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement appelé rendu le 22 avril 2014 par le tribunal de grande instance de Bastia
à titre subsidiaire et si par extraordinaire la cour venait à infirmer le jugement appelé,
à titre principal,
- constater que les pièces fondant le rapport d'expertise sont parfaitement conformes à la réalité et corroborées par les pièces bancaires versées aux débats,
- constater et au besoin dire et juger que l'expert s'est fondé sur des pièces exemptes de vice pour effectuer ses opérations d'expertise,
- homologuer purement et simplement le rapport de M. E...,
- dire et juger qu'il conviendra de faire application des dispositions de la loi du 23 décembre 1985 et de l'article 1543 du code civil s'agissant de l'évaluation de la créance personnelle entre époux,
- débouter Mme Z...de l'intégralité de ses demandes,
à titre subsidiaire,
- dire qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la question du consentement du co-indivisaire, question qui doit nécessairement être jugée par la cour de renvoi d'Aix en Provence en application de l'arrêt de la Cour de cassation du 23 octobre 2013,
- dire que les conclusions du rapport E...serviront de base aux opérations de partage et liquidation du notaire précédemment désigné,
- condamner Mme Z...à payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 février 2015 et l'affaire renvoyée pour être plaidée au 7 septembre 2015.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- sur la prétendue falsification des pièces déposées par Mme A... :

Mme Charlyne Y... expose qu'en comparant les pièces produites par Mme A... dans la procédure initiale de 2008 avec celles déposées au greffe dans le cadre de la présente procédure, la cour constatera qu'elles ont été falsifiées. Elle soutient que :

- les pièces 2, 3 et 4 sont à comparer avec la pièce 10 et que la facture G...de 937 096 francs initialement présentée comme datée du 14 mai 1985 est en réalité un devis établi le 14 mai 1984 et non une facture,
- la pièce 13 est à comparer avec la pièces 20 et que sur cette facture EDF du 5 septembre 1986 de 52 650 francs la mention Sodielec a été masquée,
- les pièces 20 et 21 sont à comparer avec la pièce 13 et que la facture Sole du 2 décembre 1986 de 13 007 francs n'est pas un original mais une copie où des écritures ont été masquées et où manque l'adresse du destinataire réel,
- les pièces 22, 23 et 24 sont à comparer avec la pièce 18 et que le devis de la miroiterie Consoferm du 21 juin 1985 de 186 439 francs a été présenté faussement comme une facture,
- la pièce 30 est à comparer avec la pièce 22 et que sur la facture K... du 5 octobre 1986 de 45 992 francs, la mention Sodielec a été masquée et complétée par le nom de Mme A... par une autre écriture,
- les pièces 35 et 36 sont à comparer avec la pièce 14 et que sur cette facture Cecarelli du 10 avril1987 de 25. 124 francs a été masquée la mention " pour le compte (...) SODIELEC ",
- la pièce 38 est à comparer avec la pièce 15 et que sur cette facture Cecarelli du 1er juillet 1987 de 14. 539 francs, la mention " pour le compte (...) SODIELEC " a été masquée,
- sur les trois factures 37, 39 et 40 de l'entreprise Cecarelli pour des montants de 9 658, 24 284 et 7 048 francs, le nom de Sodielec a été masqué avec du correcteur blanc après la mention pour le compte.

Elle en déduit que ces copies remises à l'expert à partir d'originaux maquillés sont des faux et conteste que ces manoeuvres soient de simples rectifications d'erreur matérielle comme le soutient Mme B....

Sur les nouvelles pièces portant le numéro 48, elle indique que ces relevés bancaires et ces talons de chèques n'ont jamais été produits à l'expert et dénoncent également leur falsification.

Elle considère que le total des prétendus règlements des factures " Falsifiées " se monte à 17 814 euros et que les devis G...dont de 36 588 euros soit la somme de 54 402 euros bien inférieure à celle 200 598 euros en cause.

Elle critique le jugement ayant rejeté cet incident de faux au prétexte que la juridiction n'est pas compétente pour statuer sur le fondement des articles 441-1 et313-3 du code pénal alors qu'elle a fondé son action sur les articles 287 à 295 et 299 du code de procédure civile pour demander que ces pièces soient écartées des débats.

En réponse, Mme B...A... indique que tant le terrain que la construction y édifiée ont été entièrement financés par feue Joséphine A.... Elle admet que les pièces en cause ont été rectifiées de sa main parce qu'elles contenaient des erreurs.

Elle explique que :

- sur le devis G...figure la date du 14 mai 1984 mais qu'en réalité il s'agit du 14 mai 1985, date de la fin des travaux de gros oeuvre et que M. G...confirme que c'est sa mère qui a réglé cette facture en plusieurs versements à compter du 17 octobre 1985. Elle indique que les
relevés de compte versés confirment le paiement des différentes sommes par sa mère,
- sa mère a réglé toutes les échéances du prêt souscrit pour la réalisation des travaux de construction de la maison,
- la pièce 48 n'a pas été falsifiée et elle traduit la situation bancaire de sa mère à l'époque de la construction,
- les pièces 40, 47 et 48 ont été rectifiées car elle comprenaient une erreur matérielle de date,
- les factures H...(35 et 36 et 14) comportent par erreur l'adresse de Sodielec qu'elle a rectifiée mais que c'est bien sa mère qui les a réglées.
- la facture Consoferm (41) est effectivement un devis mais la facture adressée par commodité au siège de son entreprise a bien été réglée par sa mère,
- la facture K... (30) a été adressée au nom de la Sodielec mais elle a bien été réglée par sa mère sur ses fonds personnels,
- la facture EDF et la facture Sole (20) sont établies au nom de sa mère mais adressée au siège de la Sodielec.

Elle explique n'avoir communiqué les relevés bancaires de sa mère qu'à l'issue des opérations d'expertise et pour répondre à Mme Y... car il a fallu du temps à sa banque pour rechercher ses documents vieux de 30 ans. Elle considère que les documents bancaires corroborent les documents produits auparavant.

SUR CE :

Les articles 287 à 295 du code de procédure civile sur lesquels se fonde Mme Y... concernent la procédure de vérification d'écriture dans le cas où une partie dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur.

En l'espèce, la procédure en vérification d'écriture ne peut trouver à s'appliquer dans la mesure où les pièces litigieuses n'ont pas été écrites par Mme A... de sorte que la cour n'a pas à les comparer avec des échantillons d'écriture de cette dernière.

Mais, l'intimée reconnaît avoir rectifié certaines des pièces qu'elle a produites à l'appui de sa demande en remboursement des sommes engagées par sa mère au titre du bien indivis. Il incombe donc à la cour de vérifier la sincérité des pièces soumises à son appréciation.

A ce titre, comme l'a dit le premier juge :

- les factures de M. G...contestées par Mme Charlyne Y... comportent nécessairement une erreur de date puisqu'elles sont antérieures à la délivrance du permis de construire. De plus, l'erreur est confirmée par l'attestation de M. G...lequel témoigne avoir été intégralement payé par Mme A... sur ses fonds propres (compte personnel et espèces). Quant aux relevés de compte annexés à la pièce 40, ils permettent de s'assurer que les sommes correspondant à ces travaux ont bien été payés par Mme A...,
- M. H...atteste que c'est par inexactitude qu'il a mentionné la Sodielec sur les factures alors qu'elles étaient destinées à Mme Joséphine A.... Cette attestation est confirmée par celle de Mme I..., comptable de la société Sodielec à l'époque laquelle indique ne jamais avoir " entré en comptabilité de factures ni de règlements au nom de Sodielec afférents à l'immeuble de la zone industrielle construit par Mme Joséphine A... ",
- M. J...atteste également que les travaux réalisés ont été payés par Mme A.... Les talons des chèques et les relevés de compte correspondant à la facturation de travaux de cet entrepreneur sont produits par Mme B...,
- Il est également produit les souches de carnet de chèques et relevés de compte s'agissant notamment de diverses sommes versées au plombier F..., au menuisier K..., de la somme de 26 415, 18 francs à EDF et d'un versement de 150 000 francs le 27 février 1986 correspondant aux factures produites.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que les pièces produites par Mme B...A... ne peuvent être écartées des débats, leur sincérité ne pouvant être mise en doute. Mme Charlyne Y... sera déboutée de ce chef.

2- sur la demande d'annulation de l'expertise et sur la prescription des demandes de Mme B...A... en qualité d'ayant droit de sa mère :

Mme Charlyne Y... soutient que l'expert n'a pas respecté le principe du contradictoire en évaluant le bien immobilier à 1 032 800 euros en ne lui communiquant aucun élément permettant de discuter cette estimation. Elle admet toutefois que l'expert a expliqué sa méthode d'évaluation à savoir que l'immeuble étant classé dans la catégorie des immeubles de rapport, l'évaluation se fait par référence aux revenus qu'il procure. Mais, elle lui reproche d'avoir choisi le mode comparatif au lieu du taux de rendement. Elle reproche encore à l'expert d'avoir retenu une valeur supérieure à la valeur réelle déterminée par l'ouvrage de référence, cote annuelle des valeurs vénales immobilières et foncières et considère qu'elle n'a pu faire valoir ses arguments lors des opérations menées par M. E....

Quant aux fruits civils procurés par l'immeuble indivis, elle fait observer que M. E...a retenu les données fournies par la fille de Mme B... laquelle est la gestionnaire du bien dont elle conteste la sincérité. Elle explique que le taux de vacance des appartements et studios meublés mentionné par l'agence immobilière corse avenir est invraisemblable et suppose que certains logements ont pu être mis à disposition gratuitement de l'entourage de l'intimée ou réglés en espèces. Elle en déduit que les revenus tirés du bien indivis sont faussés et que l'expert n'a pas apporté la réponse adaptée en indiquant ne pas avoir de moyen de contrôle des déclarations faites par l'intimée. Elle conclut au manque d'objectivité de l'expert qui a validé les seules informations fournies par Mme B... et sa fille et qui n'a fait figurer ni les paiements de la taxe foncière de 2008 à 2010 auxquels elle a procédé ni la récupération des taxes d'ordures ménagères sur les locataires ni encore la compensation des loyers avec les travaux réalisés par la bailleresse. Elle reproche encore à l'expert son manque de conscience au motif qu'il a isolé les dépenses grevant la gestion du bien indivis pour en faire une créance personnelle de Mme A... sur elle. Selon elle, l'expert aurait dû retenir une somme de 215 833, 77 euros comme revenus de l'immeuble de 2002 à 2011 et non celle de 151 871, 53 euros. Elle s'estime lésée de 125 000 euros.

Elle critique encore la méthode de calcul de la valeur des droits des parties en rappelant que seul le solde entre créances et dettes doit intervenir dans le partage. Quant à la proposition d'allotissement, elle l'estime injustifiée compte tenu des calculs erronés de l'expert qui a créé un déséquilibre entre les parties en excluant la compensation.

Sur le compte entre les parties, elle fait observer que les seules impenses à prendre en considération sont celles exposées par l'indivisaire sur ces deniers personnels et celles justifiées par des pièces non falsifiées. Elle considère que l'expert a retenu à tort la photocopie de talons de chèques pour contredire l'acte authentique de vente ; que la créance éventuelle résultant du paiement du terrain par la seule Mme A... est née pendant le mariage et se trouve prescrite depuis 2006, aucun acte n'ayant interrompu la prescription. Elle ajoute que Mme B...A... ne peut lui réclamer de récompense pour des dépenses exposées postérieurement à la dissolution du mariage. Elle en déduit que l'expert a ajouté à sa mission en incluant des dépenses d'amélioration à savoir les dépenses de construction du fonds indivis d'autant que la construction a été édifiée par la société Sodielec et non par Mme A.... Elle reproche enfin à l'expert de ne pas avoir répondu à son dire relatif aux dépenses de conservation et d'entretien et de n'y faire aucune référence dans son rapport.

En réponse, Mme B...A... expose que Mme Charlyne Y... a pu discuter les conclusions de l'expert en transmettant ses observations ; que les pièces qu'elle a transmises à l'expert lui ont été communiquées concomitamment et qu'elles ne sont pas des faux ; que la construction et les dépenses d'amélioration ou de conservation de l'immeuble n'ont pas été faites à son insu.

Elle fait observer que Mme Charlyne Y... demande à la cour de statuer sur le point qui relève de la compétence de la cour d'Aix en Provence à savoir le consentement du co-indivisaire pour la construction du bien litigieux. Elle en déduit que Mme Charlyne Y... doit saisir la cour de renvoi et que dans l'attente et en l'état, sa demande de remboursement ne peut être rejetée. Elle ajoute que l'expert n'avait pas à attendre la décision de la cour de renvoi pour exécuter sa mission et qu'il a eu raison de poursuivre ses calculs sans avoir à donner la solution juridique qui n'incombe qu'au juge.

Elle conteste les reproches faits à l'expert par Mme Y... en considérant que M. E...a rempli sa mission et appliqué la règle fixée par l'article 815-13 du code civil pour différencier les impenses qui octroient une plus value au bien immobilier et les dépenses qui n'assurent que sa conservation. Elle indique que la méthode de revalorisation proposée par l'expert doit être retenue pour calculer la somme dont est redevable Mme Y....

Elle estime que la prescription de son action en remboursement n'est pas acquise, la procédure de partage et les opérations d'expertise ayant interrompu tout délai.

SUR CE :

Comme l'a dit le premier juge, la partialité de l'expert ne peut être mise en cause. En effet, M. E...a répondu à sa mission en recherchant les éléments techniques applicables au litige. Il a ainsi recueilli les éléments pour faire le compte entre les parties après avoir recherché les éventuelles impenses engagées pour l'acquisition, la conservation et l'entretien du bien indivis et les récompenses dues. Il ne lui appartenait pas de rechercher les éléments de preuve, ce qui incombe aux parties ni de les apprécier, ce qui incombe à la juridiction étant observé que Mme Y... a saisi le juge de la mise en état de plusieurs demandes sur ce point.

En ce qui concerne le contradictoire, le premier juge a à juste titre relevé qu'une première réunion avait eu lieu en janvier 2011 en présence du conseil de Mme Y... et de Mme B...A... en personne ; qu'une deuxième réunion est intervenue le 10 février 2011 en présence de M. Z...époux de Mme Y... mandaté par elle et de Mme B...A... ; que les quatre déplacements sur les lieux ont été faits en la seule présence de Mme B...A... mais qu'ils correspondaient à la prise de métrés et au relevé des prestations ; que les avocats des parties ont été destinataires des premières conclusions relatives à la consistance et à l'évaluation de la masse active indivise, sur l'allotissement et sur le chiffrage de la créance entre époux et des impenses. Mme Y... s'est manifestée le 5 juillet 2011 pour demander à l'expert de se faire remettre les relevés bancaires de gestion du compte de l'immeuble puis a fait un dire le 29 août 2011 pour dénoncer une dissimulation de recettes de la part de Mme B... et pour demander le sursis au dépôt du rapport dans l'attente du résultat de la procédure en omission de statuer. Contrairement à ce qu'elle prétend, elle a pu discuter des pièces fournies par sa contradictrice devant l'expert qui a apporté la réponse qu'il estimait juste. En effet, pour les fruits civils, l'expert a exploité les données fournies par le conseil de Mme B...A... qui ont été discutées par le conseil de Mme Y... dans son dire du du 29 août 2011. Elle est donc mal fondée à reprocher à M. E...le non respect du principe du contradictoire.

En ce qui concerne l'évaluation de la propriété immobilière, M. E...a expliqué sa méthode de calcul et proposé des valeurs vénales qui peuvent être discutées contradictoirement, comme tous les éléments soumis à l'appréciation d'une juridiction sans que les compétences d'un expert soient en cause.

Dés lors, comme l'a dit le premier juge rien ne justifie l'annulation de l'expertise pour défaut d'objectivité et non respect du contradictoire aux frais de M. E....

Le jugement querellé sera confirmé sur ce point.

Quant à l'action en paiement des impenses engagées par Mme Joséphine A..., le premier juge a à juste titre et par des motifs pertinents que la cour adopte, estimé qu'elle n'était pas entachée de prescription.

Le jugement querellé sera également confirmé sur ce point.

3- sur les impenses de Mme B...A... relativement au bien indivis :

Mme Y... fait valoir que la dépense de construction de l'immeuble ne peut être revendiquée à titre de récompense puisqu'elle a été exposée après le divorce et qu'elle n'a pas été réalisée avec le consentement du co-indivisaire.

La cour d'appel d'Aix-en-Provence est saisie, comme juridiction de renvoi, de la requête en omission de statuer formée par Mme Y....

A ce jour, les parties ne justifient pas que la cour de renvoi ait rendu sa décision laquelle a une incidence sur le présent litige puisque la créance de Mme B...A... est fonction de son droit au remboursement des sommes engagées par sa mère au titre de l'acquisition, de la conservation et de l'entretien du bien indivis.

C'est donc à bon droit que le premier juge a ordonné le sursis à statuer jusqu'à ce que la cour d'appel d'Aix en Provence soit dessaisie de la requête en omission de statuer de Mme Y... et a dit que l'instance sera poursuivie à l'initiative de la partie la plus diligente.

Le jugement querellé sera encore confirmé sur ce point.

4- sur les autres demandes :

Compte tenu de la solution donnée au litige, Mme Charlyne Y... est mal fondée à prétendre à des dommages et intérêts. Elle sera déboutée de sa demande.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme Annick B... A... les frais non compris dans les dépens. Mme Charlyne Y... sera condamnée au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant, Mme Charlyne Y... sera tenue aux dépens d'appel et le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que les dépens, y compris les frais et honoraires de l'expert seront compris en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bastia le 22 avril 2014 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,
Déboute Mme Charlyne Y... de sa demande tendant à écarter des débats les pièces 2, 3, 4, 13, 20, 21, 22, 23, 24, 30, 35, 36, 37, 38, 39, 40 produites par Mme Annick B... A...,
Déboute Mme Charlyne Y... de sa demande en dommages et intérêts,
Condamne Mme Charlyne Y... à payer à Mme Annick B... A... la somme de DEUX MILLE EUROS (2 000 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme Charlyne Y... aux dépens d'appel,
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 14/00466
Date de la décision : 21/10/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2015-10-21;14.00466 ?
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