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08/07/2015 | FRANCE | N°13/00649

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 08 juillet 2015, 13/00649


Ch. civile B

ARRET No
du 08 JUILLET 2015
R. G : 13/ 00649 C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 24 Juin 2013, enregistrée sous le no 10/ 00930

SA MMA IARD
C/
Y...X... SARL SHOP BAGAGES

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
HUIT JUILLET DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
SA MMA IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice 14 Boulevard Marie et Alexandre Oyon 72030 LE MANS CEDEX 9

assistée de Me Martine CA

POROSSI POLETTI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMES :

Mme Catherine Y... épouse X... née le 13 Mai 1950 à E...

Ch. civile B

ARRET No
du 08 JUILLET 2015
R. G : 13/ 00649 C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 24 Juin 2013, enregistrée sous le no 10/ 00930

SA MMA IARD
C/
Y...X... SARL SHOP BAGAGES

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
HUIT JUILLET DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
SA MMA IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice 14 Boulevard Marie et Alexandre Oyon 72030 LE MANS CEDEX 9

assistée de Me Martine CAPOROSSI POLETTI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMES :

Mme Catherine Y... épouse X... née le 13 Mai 1950 à EPINAL (88000) ...88000 EPINAL

assistée de Me Jean Pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA

M. Jean Louis X... né le 19 Octobre 1947 à EPINAL (88000) ...88000 EPINAL

assisté de Me Jean Pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA

SARL SHOP BAGAGES prise en la personne de son représentant légal en exercice 17 Re Fesch 20000 AJACCIO

défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 mai 2015, devant la Cour composée de :

Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre Mme Françoise LUCIANI, Conseiller Mme Judith DELTOUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 08 juillet 2015.

ARRET :

Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, et par Mme Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte notarié des 19 mars et 6 mai 2004, M. Jean-Louis X... et Mme Catherine Y..., son épouse, ont acquis en l'état futur d'achèvement, une maison individuelle, lotissement « La Colline du Scudo », lot no22, route des Sanguinaires à Ajaccio, auprès de la S. A. R. L. Shop Bagages inscrite au RCS d'Ajaccio. L'acte faisait état d'une assurance responsabilité décennale souscrite auprès des Mutuelles du Mans Assurances. A défaut de respect de la date d'achèvement fixée au 30 août 2004, par acte d'huissier du 30 juin 2005, le maître d'ouvrage sommait la S. A. R. L. Shop Bagages " de bien vouloir délivrer le bien et notamment d'effectuer le remise des clés et le procès-verbal de réception des travaux sous quarante huit heures ". Suivant procès verbal d'huissier du 21 juin 2005, il faisait constater que le bâtiment était toujours en chantier et présentait des désordres, malfaçons et non façons.

Par ordonnance de référé du 20 décembre 2005, une expertise était ordonnée, sur requête de M. Jean-Louis X... et Mme Catherine Y..., un premier rapport déposé le 14 juin 2007, était suivi d'un second déposé le 22 avril 2010 portant sur la solidité de l'ouvrage et son éventuelle impropriété à sa destination.
Par acte d'huissier du 16 août 2010, M. Jean-Louis X... et Mme Catherine Y... assignaient la S. A. R. L. Shop Bagages et les Mutuelles du Mans Assurances devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio, au visa des articles 1134, 1147, 1601-1 et 1792-1 du code civil pour obtenir leur condamnation au paiement du coût des travaux de réparation et de dommages et intérêts.

Par jugement du 24 juin 2013, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a :

déclaré la S. A. R. L. Shop Bagages entièrement responsable à l'égard du maître de l'ouvrage des désordres décrits au rapport d'expertise et affectant la maison individuelle du lotissement « La Colline du Scudo », lot no22, route des Sanguinaires à Ajaccio propriété de M. Jean-Louis X... et son épouse née Catherine Y...,
condamné la S. A. R. L. Shop Bagages à payer à M. Jean-Louis X... et son épouse née Catherine Y... les sommes de :
-550 000 euros, au titre de la réfection complète, après démolition, de l'ouvrage,-90 000 euros au titre des préjudices financiers subis du fait de la non-livraison de l'ouvrage dans le délai contractuel,-100 000 euros à titre de réparation du préjudice de jouissance du fait de la non-livraison de l'ouvrage dans le délai contractuel,-70 000 euros à titre de remboursement des frais exposés pour les nécessités de la défense de leurs droits,

dit que la S. A. R. L. Shop Bagages avait souscrit une police d'assurance dommages et une assurance de responsabilité civile décennale auprès de la compagnie d'assurances Mutuelles du Mans Assurances,
condamné cette dernière à garantir la S. A. R. L. Shop Bagages de toutes les condamnations prononcées,
ordonné l'exécution provisoire du jugement uniquement en ce qui concerne la condamnation au paiement de la somme de 550 000 euros au titre de la réfection complète, après démolition, de l'ouvrage, et les garanties s'y rapportant,
condamné la S. A. R. L. Shop Bagages à payer à M. Jean-Louis X... et son épouse née Catherine Y... la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la S. A. R. L. Shop Bagages aux entiers dépens, y compris les frais des deux mesures d'expertise judiciaire.

Par déclaration reçue le 26 juillet 2013, les Mutuelles du Mans Assurances ont interjeté appel de la décision.

Par ordonnance du 29 janvier 2014, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de radiation fondée sur l'article 526 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions communiquées le 8 septembre 2014, la SA Mutuelles du Mans Assurances demande de :

- débouter les époux X... de leur appel incident,
- réformer le jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio en date du 24 juin 2013,
- de constater l'absence de réception expresse ou tacite des travaux,
- dire que la responsabilité décennale ne peut donc pas s'appliquer,
- dire au visa de l'article L 113-8 du code des assurances, que le contrat d'assurance dommages ouvrage souscrit par la S. A. R. L. Shop Bagages est nul et ne peut produire effets,
en tout état de cause,
- constater, au visa de l'article L121-10 alinéa 5 du code des assurances, l'absence de déclaration de sinistre,
- dire que de ce fait, l'assurance dommage ouvrage n'est pas mobilisable,
- constater au visa de l'article L 242-1 du code des assurances, l'absence de réception des travaux, l'absence de résiliation du marché par les époux X...-Y...,
- dire que le contrat d'assurance dommages ouvrage ne peut donc pas être appliqué avant la réception des travaux,
à titre subsidiaire, de :
- dire que l'assurance dommages ouvrage est limitée aux seuls désordres de nature décennale relatifs aux travaux réalisés prévus au contrat, déclarés à l'assureur et inclus dans l'assiette de cotisations, dans la limite du coût des travaux réalisés au jour du sinistre, soit 281 258 euros,
- dire que l'assurance dommages ouvrage ne concerne pas les travaux non réalisés prévus au contrat,
- dire que la piscine n'est pas couverte par l'assurance dommages ouvrage obligatoire,
- dire que le plafond de garantie du contrat d'assurance dommages ouvrage est limité à 281 258 euros et que la réparation de la privation de jouissance, du retard de livraison et des dommages matériels sont exclus de l'assurance dommages ouvrage obligatoire avant réception,

à titre infiniment plus subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour considérerait que les préjudices immatériels sont garantis par l'assurance Dommages Ouvrage obligatoire, de :

- limiter sa garantie à la somme de 28 126 euros,
- dire au visa de l'article 9 du code de procédure civile et de l'article 12 des conditions spéciales 883C de la responsabilité civile professionnelle, que les garanties responsabilité civile professionnelle ne peuvent produire effet en absence de preuve par les époux X...-Y...d'une faute de la S. A. R. L. Shop Bagages et d'un lien de cause à effet entre la faute alléguée et les dommages dont la réparation est réclamée,
- dire, en tout état de cause, que les conventions spéciales excluent les dommages incombant personnellement aux entrepreneurs, la non conformité de l'ouvrage avec les devis descriptifs, permis de construire, les retards de livraison, les dommages matériels, la garantie de bonne fin des travaux, le coût des travaux supplémentaires imputables à un vice imprévisible du sol et les dommages subis par l'opération de construction réalisée et désignée aux conditions particulières,
vu l'article L243-9 du code des assurances,
- dire que cet article n'est pas applicable en l'espèce,
- condamner conjointement et solidairement les intimés à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens y compris ceux de première instance.
Elle expose qu'à défaut de réception expresse ou tacite, la garantie dommage ouvrage ne peut être mobilisée ; que l'ouvrage inachevé ne pouvait faire l'objet d'une prise de possession. Elle ajoute que le contrat d'assurance est nul, en ce que l'architecte qui devait intervenir n'a pas été requis, qu'elle n'a pas été informée du remplacement de la S. A. R. L. Shop Bagages par M. Locarno ; qu'il n'y a pas eu de mise en demeure de finir les travaux, ni liquidation du constructeur, ni résiliation du marché. Elle ajoute que les travaux complémentaires ne sont pas compris dans l'assiette de l'assurance ; qu'elle ne couvre pas les travaux non réalisés et inachevés ; que le plafond de garantie est constitué par le montant actualisé du coût des travaux. Elle soutient s'agissant de la responsabilité civile hors décennale qu'elle ne s'applique pas à défaut de preuve d'une faute et d'un lien de causalité entre la faute et les dommages, qu'elle est exclue notamment pour les dommages incombant personnellement aux entrepreneurs, pour les retards de livraison, la garantie de bonne fin des travaux.

Par dernières conclusions communiquées le 3 juin 2014, M. X... et Mme Y... demandent de :

- confirmer le jugement,

statuant sur l'appel incident, de :

- condamner solidairement la S. C. I. Shop Bagages et les Mutuelles du Mans Assurances au paiement de 110 000 euros au titre des préjudices financiers subis du fait de la non livraison dans les délais contractuels,
- condamner solidairement la S. C. I. Shop Bagages et les Mutuelles du Mans Assurances au paiement de 100 000 euros au titre du préjudice de jouissance du fait de la non livraison dans les délais contractuels,
- condamner solidairement la S. C. I. Shop Bagages et les Mutuelles du Mans Assurances au paiement de 10 000 euros au titre des frais exposés pour leur défense,
- condamner solidairement la S. C. I. Shop Bagages et les Mutuelles du Mans Assurances au paiement de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les Mutuelles du Mans Assurances à garantir la S. C. I. Shop Bagages de l'ensemble des condamnations pouvant être prononcées tant dans la cadre de la garantie dommage ouvrage que dans le cadre de la garantie responsabilité civile,
- condamner solidairement la S. C. I. Shop Bagages et les Mutuelles du Mans Assurances au paiement des dépens.
Ils exposent que la maison est dangereuse et doit être détruite et reconstruite, que le jugement doit être confirmé en ce qu'il leur a alloué les sommes nécessaires à ce titre. Ils ajoutent que la fraude alléguée de la S. A. R. L. Shop Bagages n'est pas démontrée ; que les manquements de l'architecte sont étrangers à la souscription de l'assurance. Ils revendiquent une réception par la prise de possession de l'ouvrage même inachevé, la mention de réserves et le paiement de l'intégralité des factures. Ils exposent que la garantie dommage ouvrage peut être mobilisée à tous les désordres même révélés avant la réception, mais de nature décennale, qu'elle ne couvre pas les inachèvements même s'ils sont de nature décennale. Ils ajoutent que la S. A. R. L. Shop Bagages avait également souscrit une garantie responsabilité civile du constructeur non réalisateur ; qu'elle a commis une faute en faisant l'économie du recours à un BET, qu'en tout état de cause, ils peuvent agir directement contre l'assureur. Ils estiment que les plafonds de garantie opposés ne trouvent pas à s'appliquer et qu'ils peuvent réclamer qu'il soit fait droit à leurs demandes au titre des préjudices complémentaires.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appel ont été signifiées à la S. A. R. L. Shop Bagages en la personne de son gérant par actes des 23 septembre et 19 novembre 2014.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 décembre 2014.
L'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 21 mai 2015, mise en délibéré pour être rendu par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION

A défaut de constitution pour la S. A. R. L. Shop Bagages, l'arrêt rendu sera réputé contradictoire.

La critique du jugement porte sur l'étendue et les conditions de mise en oeuvre de la garantie due par l'assureur et l'appel incident porte sur les sommes allouées au titre des préjudices annexes.
La cour ne statue, par application de l'article 954 du code de procédure civile, que sur les prétentions reprises au dispositif.
Sur l'appel principal :
A défaut de réception expresse ou tacite, l'article 1646-1 du code civil qui dispose que le vendeur d'un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-3 du même code, ne trouve pas à s'appliquer. L'absence de réception expresse n'exclut pas, et, à l'inverse autorise, une réception tacite : ni l'une ni l'autre des parties ne pouvant par sa seule volonté empêcher la mise en oeuvre des garanties légales. Ni l'inachèvement de l'ouvrage ni l'existence de malfaçons n'empêchent la réception.
En l'espèce, par la sommation interpellative délivrée le 30 juin 2005, les époux X... Y...ont manifesté de manière dépourvue d'équivoque, leur volonté de recevoir l'ouvrage, fût-il inachevé, fût-ce avec les réserves reprises au procès verbal de constat d'huissier du 21 juillet 2005. Les réserves mentionnées ne caractérisent pas un refus de l'ouvrage mais un constat de son état à la prise de possession qui s'est accompagnée du paiement des factures.
Certes, il résulte du contrat de vente en état futur d'achèvement, que seul le vendeur peut procéder à la réception, mais que si les parties sont d'accord pour constater l'achèvement, après règlement du prix de vente restant à payer, il sera procédé à la remise des clefs pour valoir livraison et prise de possession. Tel est le cas en l'espèce, puisque la S. A. R. L. Shop Bagages, se s'était pas opposée à la réception, suivant procès verbal du 30 juin 2005 et qu'elle avait, dès le 2 juin 2005, " autorisé " les acquéreurs à payer directement les entreprises en ses lieu et place et qu'elle n'est plus intervenue pour obtenir des entreprises l'achèvement des travaux. Cette circonstance caractérise, sa volonté de leur remettre l'ouvrage et de les en rendre maîtres. Il en résulte qu'il y a eu une réception tacite avec les réserves figurant au procès verbal de constat du 21 juillet 2005 et que la S. A. R. L. Shop Bagages est tenue des garanties prévues aux articles 1792 et suivants du code civil.
Le contrat prévoyait qu'il appartenait au vendeur de déclarer la réception de l'immeuble et à l'acquéreur, en cas de sinistre " de dénoncer le dommage dans un court délai ". En l'espèce, les Mutuelles du Mans Assurances, qui sont dans la cause depuis le 3 avril 2007, n'ont jamais opposé un défaut de déclaration de sinistre pendant tout le cours de la procédure et pendant les expertises auxquelles elles ont participé, de sorte que l'argument n'est pas pertinent.
L'assureur invoque la nullité du contrat d'assurance souscrit par la S. A. R. L. Shop Bagages au motif qu'elle a accordé sa garantie sur la foi de l'intervention à l'opération de construction d'un architecte chargé d'une mission complète assuré par la MAF. Le contrat d'assurance souscrit, par la S. A. R. L. Shop Bagages, constructeur non réalisateur, mentionne effectivement un maître d'oeuvre, M. C...avec une mission complète. Un contrat d'architecte a été signé le 20 octobre 2002 et communiqué à l'assureur qui ne le conteste pas, de sorte qu'aucune nullité du contrat d'assurance ne peut être invoquée. Si l'architecte n'est pas intervenu effectivement sur le chantier, il est virtuellement fautif, mais cette circonstance n'est pas cause de nullité du contrat.
Postérieurement à la réception, les époux X... Y..., devenus maîtres de l'ouvrage n'avaient pas l'obligation de résilier les marchés de travaux pour mettre en jeu la garantie contractuelle. Les allégations de l'assureur sur la situation matérielle de la S. A. R. L. Shop Bagages pendant l'exécution du contrat et sur le rôle de M. D...constituent des supputations qui ne sont pas vérifiées et ne sont surtout pas opposables aux époux X... Y....
L'assurance dommages ouvrage permet, sans recherche de responsabilité des constructeurs le paiement du coût de réparation des dommages susceptibles d'engager cette responsabilité dans les conditions prévues par les articles 1792 et 1792-2 du code civil et l'indemnisation s'étend aux travaux accessoires nécessairement liés à la réparation, telle la démolition en l'espèce et aux travaux non exécutés, mais non aux travaux inachevés. Elle s'étend aux travaux supplémentaires indispensables à la réalisation de l'ouvrage, même si leur coût n'a pas été pris en compte pour le calcul de la prime.
A l'inverse de ce qui a été retenu par le premier juge, et sans considération pour les dispositions de l'article L 243-9 du code des Assurances qui ne s'appliquent pas à l'espèce, le contrat d'assurance prévoyait expressément des plafonds de garantie, tels que le coût de la construction indexé sur l'indice BT01 entre la date de souscription et celle de réparation, plafonds de garantie qui sont opposables au maître d'ouvrage.
La nature décennale des désordres n'est pas contestée, pas plus que les montants alloués au titre de la réfection de l'ouvrage. L'acte de vente mentionne un prix de 391. 800 euros, coût du terrain sur la commune d'Ajaccio compris. Le coût de construction déclaré dans le contrat d'architecte est de 209. 520 euros, montant cohérent avec le coût du terrain à bâtir. Les Mutuelles du Mans Assurances doivent donc leur garantie s'agissant de la réfection de l'ouvrage à hauteur de 209 520 euros, avec indexation sur l'indice BT 01 entre le 1er septembre 2003 et la date de paiement. De même, s'agissant des dommages immatériels et plus précisément du préjudice financier résultant du retard de livraison, les
Mutuelles du Mans Assurances doivent leur garantie dans la limite de 22 087 euros avec indexation sur l'indice BT 01 entre le 1er septembre 2003 et la date de paiement.
S'agissant de la responsabilité civile du constructeur, elle comprend :
- une assurance responsabilité civile d'exploitation qui garantit l'assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile lui incombant en cas de dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels garantis et subis à l'occasion de l'opération de construction, les conséquences de l'utilisation d'un véhicule, d'un vol, du recours de la Sécurité sociale, d'une pollution accidentelle, d'une intoxication alimentaire,
- une assurance responsabilité civile professionnelle qui garantit les préjudices subis par autrui du fait des fautes professionnelles de l'assuré, elle suppose la démonstration d'une faute de l'entrepreneur, d'un dommage causé à autrui et d'un lien de causalité, étant relevé que sont notamment exclus les retards de livraison.
Le rapport d'expertise met en évidence le non respect des règles de l'art et des DTU, s'agissant notamment de la profondeur des fondations, de l'absence de maîtrise des eaux pluviales, de l'absence d'ancrage des fondations, de l'absence de mur de soutènement et du défaut de contrôle de la pente, fautes d'exécution qui contribuent à l'instabilité de l'ouvrage. La nécessité d'une reprise totale fait suite aux fautes de l'assuré et à ses erreurs de fait, garanties par cette assurance, qui a causé aux maîtres de l'ouvrage un préjudice de jouissance, dommage immatériel qui n'est pas exclu par les conditions spéciales, pour lesquels le plafond de garantie est de 421 000 euros.
Les Mutuelles du Mans Assurances doivent donc leur garantie à ce titre. Elles seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires.
Sur l'appel incident :
S'agissant des sommes de 110 000 euros et 100 000 euros réclamées au titre des préjudices financiers subis du fait de la non livraison dans les délais contractuels et du remboursement des frais exposés pour la défense des droits des requérants, l'appel n'est pas motivé. S'agissant de la somme de 100 000 euros réclamée au titre du préjudice de jouissance, ce montant a d'ores et déjà été alloué par le premier juge.
M. X... et Mme Y... seront déboutés de leur appel incident.

Chacune des parties succombe pour une part, chacune des parties supportera ses propres dépens. L'économie de la décision n'exige pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision réputée contradictoire et en dernier ressort,

- Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il condamné les Mutuelles du Mans Assurances à garantir la S. A. R. L. Shop Bagages de toutes les condamnations prononcées,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
- Constate la réception tacite de l'ouvrage avec les réserves figurant au procès verbal de constat du 21 juillet 2005,
- Dit que la S. A. R. L. Shop Bagages est tenue des garanties prévues aux articles 1792 et suivants du code civil,
- Condamne les Mutuelles du Mans Assurances à garantir la S. A. R. L. Shop Bagages s'agissant de la réfection de l'ouvrage à hauteur de deux cent neuf mille cinq cent vingt euros (209 520 euros), avec indexation sur l'indice BT 01 entre le 1er septembre 2003 et la date de paiement,
- Condamne les Mutuelles du Mans Assurances à garantir la S. A. R. L. Shop Bagages s'agissant du préjudice financier résultant du retard de livraison, à hauteur de vingt deux mille quatre vingt sept euros (22. 087 euros) avec indexation sur l'indice BT 01 entre le 1er septembre 2003 et la date de paiement,
- Condamne les Mutuelles du Mans Assurances à garantir la S. A. R. L. Shop Bagages s'agissant du préjudice de jouissance dans la limite de quatre cent vingt et un mille euros (421. 000 euros),
- Déboute les Mutuelles du Mans Assurances de leurs demandes plus amples ou contraires,
- Déboute M. Jean Louis X... et Mme Catherine Y... de leur appel incident,
- Dit que chacune des parties supportera ses propres frais et dépens,
- Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/00649
Date de la décision : 08/07/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2015-07-08;13.00649 ?
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