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24/06/2015 | FRANCE | N°14/00443

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 24 juin 2015, 14/00443


Ch. civile B

ARRET No
du 24 JUIN 2015
R. G : 14/ 00443 C
Décision déférée à la Cour : Ordonnance Au fond, origine Tribunal de Commerce d'Ajaccio, décision attaquée en date du 05 Mai 2014, enregistrée sous le no 2014000589

Consorts X...Société PRECIOUS COM

C/
A...SA PRECIOUS COM

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT QUATRE JUIN DEUX MILLE QUINZE
APPELANTS :
Mme Ariane Isabelle X...Présidente du Conseil d'Administration de la Société PRECIOUS COM 6 Rue Diaz 92100 BOULOGNE BILLANCOURT/ FRANCE

a

ssistée de Me Jacques VACCAREZZA de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau...

Ch. civile B

ARRET No
du 24 JUIN 2015
R. G : 14/ 00443 C
Décision déférée à la Cour : Ordonnance Au fond, origine Tribunal de Commerce d'Ajaccio, décision attaquée en date du 05 Mai 2014, enregistrée sous le no 2014000589

Consorts X...Société PRECIOUS COM

C/
A...SA PRECIOUS COM

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT QUATRE JUIN DEUX MILLE QUINZE
APPELANTS :
Mme Ariane Isabelle X...Présidente du Conseil d'Administration de la Société PRECIOUS COM 6 Rue Diaz 92100 BOULOGNE BILLANCOURT/ FRANCE

assistée de Me Jacques VACCAREZZA de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA, Me Rémi MOUZON de la SCP MOUZON et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

M. Patrick X...Directeur Général de la Société PRECIOUS COM 6 Rue Diaz 92100 BOULOGNE BILLANCOURT/ FRANCE

assisté de Me Jacques VACCAREZZA de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA, Me Rémi MOUZON de la SCP MOUZON et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

M. Patrick X...agissant à titre personnel en tant qu'actionnaire de la Société PRECIOUS COM 6 Rue Diaz 92100 BOULOGNE BILLANCOURT/ FRANCE

assisté de Me Jacques VACCAREZZA de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA, Me Rémi MOUZON de la SCP MOUZON et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

Société PRECIOUS COM par son conseil d'administration composé de X...Ariane, X...Patrick et Z...Pascal Punta d'Oro 20137 PORTO VECCHIO

assistée de Me Jacques VACCAREZZA de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA, Me Rémi MOUZON de la SCP MOUZON et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

M. Alain A...né le 23 Juin 1957 à TUNIS ...78600 LE MESNIL LE ROI/ FRANCE

assisté de Me Michèle RICHARD LENTALI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence

SA PRECIOUS COM agissant en son représentant légal en exercice Punta d'Oro 20137 PORTO-VECCHIO

défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 avril 2015, devant Mme Cécile ROUY-FAZI, Conseiller, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre Mme Françoise LUCIANI, Conseiller Mme Cécile ROUY-FAZI, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 24 juin 2015.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée le 23 mars 2015 et qui a fait connaître son avis, dont les parties ont pu prendre connaissance.

ARRET :

Rendu par défaut,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre, et par Mme Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La SA Precious Com dont le siège social est situé à Porto Vecchio 20137 Punta d'Oro, présidée par Mme Ariane B...épouse X..., dont Patrick X...est le directeur général, a pour commissaire aux comptes depuis le 1er juin 2010 M. Alain A..., et pour objet la création l'édition la distribution de livres photographies et films, la vente et l'achat de minéraux pierres et bijoux.
Par acte d'huissier délivré le 21 février 2014, Mme Ariane B...épouse X...et M. Patrick X..., tant en sa qualité de directeur général de la société, qu'en sa qualité qu'actionnaire de celle ci, et le conseil d'administration de la SA Precious Com, ont assigné M. Alain A..., et la SA Precious Com, devant le président du tribunal de commerce d'Ajaccio, statuant en la forme des référés, aux fins de relèvement de celui ci de ses fonctions pour faute, et de condamnation au paiement de divers dommages intérêts.
Par ordonnance de référé du 5 mai 2014, le tribunal de commerce d'Ajaccio a débouté les consorts X...et le conseil d'administration de la société de toutes leurs demandes, a condamné la SA Precious Com à payer à M. A...un solde d'honoraires de 4 124 euros, et a condamné les demandeurs au paiement à celui ci d'une indemnité de procédure de 2 000 euros.
Mme X...en sa qualité de présidente du conseil d'administration de la SA Precious Com, M. X...tant en sa qualité de directeur général et d'actionnaire de celle ci et le conseil d'administration de la dite société ont relevé appel de cette décision par déclaration du 21 mai 2014.
En l'état de leurs dernières écritures du 9 janvier 2015, ils demandent à la cour :
« Dire et juger les appelants recevables et bien fondés en leur appel de l'ordonnance de référé rendue le 5 mai 2014 par M. le président du tribunal de grande instance d'Ajaccio,
Y faisant droit,
Voir M. le Conseiller de la mise en état, ou la Cour, rejeter la demande de M. A...intimé tendant au prononcé de la radiation de l'affaire du rôle de la Cour sur le prétendu fondement de l'article 526 du Code de Procédure Civile modifié, dès lors que cette demande est tout à la fois irrecevable et dénuée de fondement, étant au surplus rappelé que la décision dont appel n'a pas été signifiée par l'intimé aux appelants et qu'elle n'est en conséquence par exécutoire.
Vu les articles L 823-7 et R 823-5 du Code de Commerce, ainsi que les articles 485, 487 et 492- l, 562, 905 du Code de Procédure Civile, et l'article 1382 du Code Civil,
Fixer à bref délai l'audience à laquelle l'affaire sera appelée compte tenu de la contrainte résultant de l'article R 823-5 du Code de Commerce qui prescrit que l'appel est formé et jugé « selon les règles applicables à la procédure abrégée » à laquelle correspond le circuit court ou la procédure à bref délai de l'article 905 du code de procédure civile,
Annuler l'ordonnance de référé rendue le 5 Mai 2014 par le Président du Tribunal de Commerce, dont appel ; en tant que de besoin, l'infirmer en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :
Vu l'urgence, vu les périls affectant les droits des appelants et de la société Precious Com, résultant notamment des entraves délibérées de M. A...en sa qualité de Commissaire aux comptes, au fonctionnement normal de la vie sociale de la société Precious Com et en particulier de l'impossibilité pour celle-ci de déposer ses comptes annuels de l'exercice 2012, compte tenu de sa rétention abusive de son rapport général de cet exercice,
Vu les fautes dénoncées ci-dessus, délibérément commises par M. A...en sa qualité de Commissaire aux comptes de la société Precious Com, résultant de sa méconnaissance grave et persistante des règles de gestion des droits d'auteur audiovisuels auprès de la SCAM et des recettes d'exploitation,
Vu la prise de position motivée, transmise par le co-Commissaire aux comptes titulaire, la société AMV AUDIT ET COMMISSARIAT représentée par M. Jean C..., le 03/ 11/ 2014 (pièce 45), précisant, après examen de l'ensemble des textes applicables ressortant du Code de la Propriété Intellectuelle, notamment des articles L 121-1 à L 122-12 ainsi que des articles L 123-1, L131-1 et L 131-4 du CPI ainsi qu'après examen de la jurisprudence y afférente :
- que la perception et la répartition des droits d'auteur de M. X...sont gérées par la SCAM à laquelle M. X...a adhéré,
- que compte tenu de l'apport-cession des droits de M. X...sur ses films à la société Precious Com, celle-ci doit en contrepartie donner a M. X...(par le biais de la SCAM) une participation proportionnelle aux recettes provenant de l'exploitation de ces mêmes fins,
- et qu'en conséquence, cette rémunération ne peut (pas) être cédée à la société Precious Com,
Constater, dire et juger que cette prise de position ainsi motivée par la référence faite par le co-commissaire aux comptes à ces différents textes applicables du CPI et leur exacte interprétation par référence à la jurisprudence, ainsi faite en pièce 45 prévalent de façon fondée et documentée sur l'exigence réitérée mais dénuée de fondement de M. A...tendant à obtenir de la part de M. X...la rétrocession à la société Precious Com des rémunérations de droits d auteurs perçues par celui ci de la part de la SCAM,
Relever M. A...de ses fonctions de Commissaire aux comptes avec effet immédiat à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, ou subsidiairement à compter de la signification,
Dire et juger qu'en application de l'article R 823-5 dernier alinéa du Code de Commerce, M. A..., commissaire aux comptes titulaire ainsi relevé de ses fonctions, sera remplacé par le Commissaire aux comptes suppléant, avec effet immédiat,
Dire et juger que M. A...est, par ses fautes multiples, délibérément perpétrées, directement responsable des préjudices subis par les dirigeants appelants, au sens de l'article 1382 du code civil et ce par un lien de cause à effet directement établi entre ces fautes de M. A...et les préjudices ainsi subis par les appelants,
Condamner en conséquence M. A...à réparer ces multiples préjudices et le condamner par suite à payer les dommages-intérêts suivants :
A M. Patrick X...:
-100 000 euros en sa qualité d'actionnaire prétendument titulaire d'un compte courant d'actionnaire débiteur et ainsi exposé à des poursuites pénales pour abus de biens sociaux,
- et des dommages-intérêts de 100 000 euros en sa qualité de Directeur Général exposé à des poursuites pénales et à des sanctions ainsi qu à une procédure d'enquête de la part du Tribunal pour défaut de dépôt des comptes annuels de l'exercice 2012 auprès du Greffe alors que ce défaut résulte uniquement de la retenue délibérée mais injustifiée et abusive, de la part du Commissaire aux comptes, de son rapport général et de son rapport spécial,
A Mme Ariane B...épouse X...:
- des dommages intérêts d'un montant de 100 000 euros puisqu'elle est elle aussi exposée à des poursuites pénales pour défaut de
dépôt des comptes annuels de la société au titre de l'exercice 2012 en raison de ces mêmes fautes caractérisées du Commissaire aux comptes et notamment de la rétention abusive de son rapport général alors qu'il dispose de tous les éléments nécessaires pour prendre position sur les comptes annuels de l'exercice 2012, en devant reconnaître les règles applicables en matière de droits d'auteur telles qu'elles lui ont été rappelées par la SCAM elle-même directement.
Au Conseil d'Administration : 50. 000 euros de dommages-intérêts, en tant qu'organe collégial,
Débouter M. A...de l'ensemble de ses demandes, défenses, fins et conclusions, infondées,
Débouter notamment M. A...de ses demandes de paiement, d'honoraires et de dommages-intérêts de respectivement 4. 124 euros et 20 000 euros ainsi que de sa demande de sursis à statuer, dés lors que l'action commerciale des demandeurs en relèvement de fonctions du Commissaire aux comptes est totalement distincte et indépendante des dénonciations et de la plainte pénale déposée auprès des Parquets par A..., et que sa demande de sursis à statuer tend uniquement à poursuivre la paralysie actuelle du fonctionnement de l'entreprise Precious Com,
Dire et juger qu'il n'existe aucune justification à cette demande de sursis, contrairement aux exigences, non respectées en l'espèce, ressortant des articles 378 à 380-1 du code de procédure civile,
Dire et juger qu'en application de l'article R 823-6 du Code de Commerce, le Greffier de ce Tribunal informera le Conseil Régional ou la Compagnie Régionale des Commissaires aux comptes de Versailles, établie 23 bd du Roi 78000 VERSAILLES de ce relèvement des fonctions de M. A..., dans le délai de 8 jours par lettre recommandée AR suivant le prononcé de ce jugement à intervenir,
Donner acte à M X...de ce qu'il n'a pas à rétrocéder à la société Precious Com les droits d'auteur qu'il perçoit régulièrement de la SCAM, sur la base des relevés de droits d'auteur établis par cette société civile des auteurs multimédias immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro D 323 077 479 dont M. X...est membre depuis le mois de septembre 2004, ainsi qu'il ressort du relevé de droits d'auteur établi par la SCAM le 20/ 09/ 2004 (PJ 35).
Condamner M. A...à payer respectivement à Mine Ariane B..., à M. Patrick X...agissant, d'une part, en tant que Directeur Général, d'autre part, en tant qu'actionnaire, ainsi qu'au Conseil d'Administration, une indemnité de 4 000 euros soit une indemnité totale de 16 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et condamner de même M. A...au paiement des entiers frais et dépens de 1re instance et d appel. »
Ils font principalement valoir que l'intimé a commis plusieurs fautes dans l'accomplissement de sa mission, à l'origine d'un préjudice, justifiant son relèvement et sa condamnation au paiement de dommages intérêts.

Dans ses dernières écritures du 5 janvier 2015, M. Alain A...demande à la cour :

« Vu l'article 526 du code de procédure civile modifié par Décret no 2005-1678 du 28 décembre 2005,
Se voir M. le Conseiller de la mise en état prononcer la radiation de l'affaire du rôle de la Cour faute pour la société Precious Com d'avoir exécuté la décision frappée d'appel,
A défaut, se voir la Cour confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,
Y ajoutant,
Se voir la Cour solidairement condamner Mme Isabelle Ariane X..., M. Patrick X...et M. Pascal Z...au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et injustifiée et atteinte à l'honneur et à la réputation du commissaire aux comptes,
Subsidiairement,
Avant dire droit,
Surseoir à statuer sur le mérite des demandes dans l'attente d'une décision passée en force jugée sur le mérite des plaintes et révélations déposées le 13 décembre 2013 et 18 mars 2014 par le commissaire aux comptes entre les mains de Messieurs les procureurs de la république de Paris et d'Ajaccio,
En tous les cas,
Se voir les appelants condamnés au paiement de la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. »

L'instruction a été clôturée par une ordonnance en date du 26 mars 2015, fixant l'audience de plaidoiries au 17 avril 2015.

A cette date, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 juin 2015.

SUR CE

Sur la radiation de l'affaire :

M. Alain A...sollicite, en l'état de ses dernières écritures, au visa des dispositions de l'article 526 du code de procédure civile, la radiation de l'affaire du rôle de la cour, pour non exécution de la décision
déférée, alors qu'en application de ce texte, seul le premier président, ou le conseiller de la mise en état s'il est saisi, ont compétence pour l'ordonner.
Faute de l'avoir fait avant l'ordonnance de clôture, cette demande est sans objet devant la juridiction du fond.
Sur la capacité à agir du conseil d'administration de la société :
Si l'organe ayant en charge l'administration ou la direction de la société est compétent pour prendre la décision sociale de demander le relèvement juridique du commissaire aux comptes, il ne saurait en revanche être partie au procès, puisqu'il est dépourvu de personnalité juridique. L'action en justice doit être intentée par l'intermédiaire du représentant légal de la société.
L'action, et partant l'appel, du conseil d'administration de la SA Precious Com est donc irrecevable pour défaut de capacité à agir, cette fin de non recevoir étant au nombre de celle que la cour doit relever d'office en application des dispositions de l'article 125 du code de procédure civile.
Sur la nullité de la décision :
Au soutien de leur demande de nullité de l'ordonnance, les appelants indiquent, notamment, que cette décision fait mention qu'elle a été rendue par le seul Président du Tribunal de commerce, alors que l'affaire a été débattue en formation collégiale à l'audience de plaidoirie du 7 Avril 2014, ainsi que cela figure, en haut de la page 4 qui indique : « que le tribunal de commerce a été saisi en formation collégiale, en la forme des référés selon l'article R 823-5 du code de commerce ; que les demandeurs l'ont sollicité dès la 1re audience à laquelle l'affaire a été appelée... » et que le nom des deux autres juges n'y figure pas.
Il est constant que cette décision ne fait pas mention du nom de tous les juges qui l'ont rendue, contrairement aux exigences de l'article 454 du code de procédure civile.
La décision doit donc être annulée, avec toutes les conséquences de droit, en application des dispositions de l'article 458 du code de procédure civile, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres causes de nullité invoquées par les appelants.
Sur le relèvement du commissaire aux comptes :
Il incombe aux commissaires aux comptes de certifier, en justifiant de leurs appréciations, que les comptes annuels de l'entité qu'ils contrôlent, sont réguliers et sincères, et donnent une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé, ainsi que de la situation financière et du patrimoine de la personne ou de l'entité, à la fin de cet exercice, en application des dispositions de l'article L823-9 alinéa premier du code de commerce.

L'article L823-7 du même code énonce : « En cas de faute ou d'empêchement, les commissaires aux comptes peuvent, dans les conditions fixées par décret en conseil d'État, être relevés de leurs fonctions avant l'expiration normale de celle-ci, sur décision de justice, à la demande de l'organe collégial chargé de l'administration, de l'organe chargé de la direction, d'un ou plusieurs actionnaires ou associés représentant au moins 5 % du capital social, du comité d'entreprise, du ministère public ou de l'autorité des marchés financiers pour les personnes dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé et entités. »

L'article R 823-5 du même code ajoute : « Dans les cas prévus aux articles L823-6 et L823-7, le tribunal de commerce statue en la forme des référés sur la récusation ou le relèvement des fonctions de commissaire aux comptes. La demande de récusation ou de relèvement de fonction est formée contre le commissaire aux comptes et la personne ou l'entité auprès de laquelle il a été désigné. ¿. Le délai d'appel est de 15 jours. L'appel est formé et jugé selon les règles applicables à la procédure abrégée ou à la procédure à jour fixe. Lorsque le commissaire aux comptes est relevé de ses fonctions, il est remplacé par le commissaire aux comptes suppléant. ».
La faute du commissaire aux comptes qui justifie de le relever de ses fonctions, si elle n'est pas définie par la loi, est celle qui se rattachant à l'exercice de sa mission, révèle son inaptitude à la poursuivre jusqu'au terme prévu. Elle n'est pas constituée par le seul constat d'irrégularités, mais résulte de la preuve d'un manquement délibéré de ce professionnel à son devoir de contrôle et de vigilance et doit présenter un caractère d'évidence et de gravité.
En l'espèce, les appelants reprochent à Alain A..., commissaire aux comptes titulaire, quatre séries de fautes : une méconnaissance grave et persistance des règles de gestion des droits d'auteur audiovisuels auprès de la SCAM et des recettes d'exploitation, le défaut de dépôt de ses rapports dans les délais légaux, la dénonciation sans mise en demeure préalable d'infractions infondées ou d'irrégularités inexistantes, et le non respect de certaines règles déontologiques et le dépassement d'honoraires.
- Sur la faute relative aux règles de gestion des droits d'auteur :
Les appelants soutiennent que le commissaire aux comptes a commis une erreur dans l'appréciation des droits d'auteur en demandant à M. X...de réintégrer dans les comptes sociaux les droits d'auteur qui lui revenaient personnellement. Ayant eu connaissance en sa précédente qualité de commissaire aux apports désigné à cette fin en avril 2010 pour évaluer la valeur des apports en nature que M. Patrick X...se proposait d'effectuer auprès de la société, il ne pouvait ignorer la répartition des droits d'auteur effectuée par la SCAM le 28 février 2010 au profit de M. X...auprès duquel il aurait insisté de manière abusive pour qu'il y ait rétrocession.
Alain A...soutient qu'il n'a jamais demandé à M. X...la réintégration de ses droits d'auteur dans la société.
Aucune des pièces produites par les appelants ne permet de retenir, comme ils le soutiennent que le commissaire aux comptes a, de façon abusive et injustifiée, insisté auprès de M. X...pour lui faire réintégrer des sommes de façon indue. Le mail adressé le 18 décembre 2012 à M. X...par lequel il lui demande s'il est d'accord avec son calcul et s'il confirme le versement « du différentiel » ne sort pas du périmètre du rôle du commissaire aux comptes pas plus que les échanges électroniques avec maître Mouzon au sujet de la position de la SCAM.
Il n'appartient pas à la présente juridiction saisie d'une action en relèvement et en responsabilité de déterminer les règles comptables relatives aux droits d'auteur dont la contestation relève d'autres instances et d'un autre contentieux, l'erreur d'appréciation du commissaire aux comptes, à la supposer même établie, ne pouvant constituer la faute grave justifiant son relèvement.
- Sur la faute relative au défaut de dépôt par le commissaire aux comptes de ses rapports dans les délais légaux :
Les appelants soutiennent que :
- pour l'exercice 2010, le rapport général n'a été déposé que le 17 novembre 2011, et qu'il n'est pas venu ni à la délibération du 12 mai 2011, ni à l'assemblée générale annuelle d'approbation des comptes de l'exercice 2010 tenue le 30 juin 2011 auxquelles il était régulièrement convoqué,
- pour l'exercice 2011, il n'a rédigé et déposé ses rapports général et spécial que le 8 octobre 2012, et qu'il ne s'est pas présenté lors de la délibération du conseil d'administration du 23 avril 2012 et de l'assemblée générale des 11 et 29 juin 2012 auxquelles il était régulièrement convoqué, « ayant donné son accord verbal pour qu'il soit noté sa présence... malgré son absence »,
- pour l'exercice 2012, il a refusé de remettre son rapport général pour l'exercice 2012 et de venir à la réunion du conseil administration du 27 novembre 2013 et à l'assemblée générale du 16 janvier 2014,
- pour l'exercice 2013, il ne s'est pas davantage déplacé à la délibération du conseil administration du 9 mai 2014 et à l'assemblée générale du 15 mai 2014 bien qu'il y ait été régulièrement convoqué, manifestant le plus grand désintérêt pour la vie sociale de la société.
Alain A...fait valoir, dans le courrier qu'il adresse à la compagnie régionale, que :
- pour l'exercice 2010, la facture d'honoraires qu'il établie le 24 juin 2011 n'a été payée que le 9 mai 2012,
- pour l'exercice 2011, les documents comptables lui ont été transmis entre juin et septembre 2012, aucune requête n'avait été faite pour demander le report de la tenue de l'AG d'approbation des comptes, qui s'est tenue le 29 juin 2012, soit 4 mois avant la finalisation des rapports intervenue le 8 octobre 2012, ses honoraires ont été payés le 18 novembre 2013,

- pour l'exercice 2012, la lettre de mission accompagnée d'un acompte de 2 500 euros lui a été adressée le 21 novembre 2013, alors que depuis le 18 octobre 2013 une partie des documents seulement nécessaires à son intervention avait été reçue.

Si le commissaire aux comptes est tenu d'une obligation de ponctualité, l'irrespect du calendrier ne saurait être constitutif d'une faute, s'il est établi qu'il n'a pas été rendu destinataire de tous les documents utiles à l'accomplissement de sa mission lui permettant d'attester que les comptes sont sincères, réguliers et donnent des indications fidèles sur le patrimoine, la situation financière et le résultat de l'entreprise.
La cour relève notamment, que pour l'exercice 2010, les procès verbaux d'assemblée générale des 12 mai 2011 et 30 juin 2011 portent sur l'approbation des comptes 2010 et mentionnent la présence de M. A..., que pour l'exercice 2011, les comptes ont été déposés en octobre 2012, bien que l'assemblée générale les approuvant ait fait l'objet d'un procès verbal du 14 mai 2012 et que par la suite, de nombreux échanges de mail entre le commissaire aux comptes et/ ou la société et M. Mouzon portent sur les documents utiles à la certification des compte de l'année 2013, et au paiement des honoraires du commissaire aux compte dont le dernier acompte versé de 2 500 euros l'a été le 21 novembre 2013.
Enfin, si le commissaire doit obligatoirement être invité aux assemblées générale d'approbation des comptes, sa venue effective n'est toutefois pas obligatoire, et ne peut être invoquée par la société ni pour justifier un refus de paiement d'honoraires, ni davantage pour demander son relèvement.
Il résulte de cette chronologie et de ces éléments que faute pour le commissaire aux comptes d'avoir reçu tous les éléments comptables utiles à sa mission de certification, et aussi en temps et en heure ses lettres de mission et honoraires, il ne peut être retenu à son égard quelconque manquement ou inaptitude fautifs.
- Sur la faute constituée par la dénonciation sans mise en demeure préalable d'infractions infondées ou d'irrégularités inexistantes :
Il n'appartient pas à la cour d'apprécier la pertinence des procédures pénales pendantes depuis le 18 mars 2014 au parquet de Paris et depuis le 18 décembre 2014 auprès du doyen des juges d'instruction du TGI d'Ajaccio, notamment pour faux, relativement au procès verbal d'assemblée générale d'approbation des comptes au titre de l'exercice 2011 du 29 juin 2012 qui mentionnerait à tort sa présence, ce que semblent d'ailleurs admettre, au moins au plan matériel, les appelants dans leurs écritures selon lesquelles l'intimé aurait donné son accord verbal pour qu'il soit procédé ainsi.
Le commissaire aux comptes n'a pas l'obligation de s'entretenir au préalable avec les dirigeants dont il veut dénoncer les agissements, même s'il peut le faire. Lorsqu'il dénonce un fait lui paraissant délictueux, il n'engage pas sa responsabilité en cas d'erreur sur la réalité de l'infraction. Cette immunité prévue en cas de mauvaise analyse des faits à l'origine de la dénonciation, qui est destinée à permettre aux commissaires aux comptes d'effectuer leur mission auprès du Parquet, sans être soumis à une pression de la part des sociétés contrôlées ou de leurs dirigeants, empêche donc d'en faire une cause de relèvement comme d'accueillir l'action en dommages et intérêts formée contre lui.
Il en résulte aussi qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente du sort réservé à ces procédures pénales, puisque, même en cas d'erreur, elles sont insusceptibles de constituer une faute du commissaire aux comptes qui les a initiées, en considération de cette immunité de l'article L823-12 alinéa 2 du code de commerce.
- Sur la faute de non respect de certaines règles déontologiques et le dépassement d'honoraires :
Le prétendu dépassement d'honoraires, à le supposer établi, ne peut constituer la faute d'inaptitude ou d'incurie de l'article L. 823-7 du code de commerce justifiant le relèvement du commissaire aux comptes, et ce d'autant que ce type de contestation, qui doit être porté en conciliation devant le président de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes, ne relève pas de la compétence du juge judiciaire.
Les appelants sont par ailleurs mal fondés de venir, pour la première fois en février 2014, discuter la compatibilité des fonctions de commissaire aux comptes qu'ils ont librement décidé de confier à Alain A..., le 1er juin 2010, avec celles de commissaire aux apports qu'il venait d'assurer le 24 mai 2010 à leur demande, lesquelles, en toute hypothèse, ne portent pas atteinte à l'indépendance de celui ci dans l'exercice de sa mission de commissaire aux comptes.
En l'absence de faute commise par Alain A...au sens des dispositions de L 823-7 du code de commerce, M. et Mme X...seront déboutés de leur demande de relèvement, et subséquemment de leur demande en paiement de dommages intérêts.
Bien que les missions du commissaire aux comptes doivent normalement être remplies de manière continue, l'abandon de ses fonctions avant la fin de son mandat par Alain A..., comme il indique le souhaiter dans ses écritures, s'il devait se confirmer, ne saurait être générateur de préjudice pour la société, et ne pourrait que s'avérer licite et légitime, en considération de la désignation d'un second commissaire aux comptes titulaire depuis le mois de juillet 2014, du défaut persistant de paiement de ses honoraires, et de la présente procédure.
Sur les demandes reconventionnelles de l'intimé :
L'initiation par les consorts X...d'une action en relèvement et en responsabilité contre le commissaire aux compte en considération de fautes auxquelles ils ont, a minima, contribué, en particulier en ce qu'il est établi qu'ils n'ont pas acquitté ses honoraires, et ne lui ont pas permis d'obtenir en temps et en heure tous les éléments utiles à l'accomplissement de sa mission, permettent de caractériser à leur encontre une procédure abusive, à l'origine d'un préjudice pour le commissaire aux comptes, qu'ils seront condamnés à réparer par le paiement de 5 000 euros de dommages intérêts de ce chef.
M. A...sera en revanche débouté de sa demande en paiement de ses honoraires qui ne ressort pas de la présente juridiction.
Sur les autres demandes :
L'équité commande de condamner les consorts X...au paiement d'une indemnité de procédure de 2 000 euros à Alain A....
Les consorts X...qui succombent supporteront les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Déboute M. Alain A...de ses demandes de radiation de l'affaire du rôle de la cour et de sursis à statuer,

Déclare le conseil d'administration de la SA Precious Com irrecevable en son action,
Annule la décision déférée,
Déboute Mme Ariane B...épouse X...et M. Patrick X...tant en sa qualité de directeur général de la société qu'en sa qualité d'actionnaire de la SA Precious Com de toutes leurs demandes,
Déboute M. Alain A...de sa demande en paiement de ses honoraires,
Condamne Mme Ariane B...épouse X...et M. Patrick X...à payer à M. Alain A...la somme de cinq mille euros (5 000 euros) de dommages intérêts pour procédure abusive,
Condamne Mme Ariane B...épouse X...et M. Patrick X...à payer à M. Alain A...la somme de deux mille euros (2 000 euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Mme Ariane B...épouse X...et M. Patrick X...aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 14/00443
Date de la décision : 24/06/2015
Sens de l'arrêt : Annule la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2015-06-24;14.00443 ?
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