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24/06/2015 | FRANCE | N°13/00404

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 24 juin 2015, 13/00404


Ch. civile B

ARRET No
du 24 JUIN 2015
R. G : 13/ 00404 R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce d'AJACCIO, décision attaquée en date du 25 Mars 2013, enregistrée sous le no 2012000116

SARL BIANC'et NERU
C/
X...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT QUATRE JUIN DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
SARL BIANC'et NERU prise en son gérant en exercice Mme Y...Z...Martine ......20220 MONTICELLO

ayant pour avocat Me Marie Rose CITOLLEUX, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE

:

Mlle Marie Pierre X...née le 15 octobre 1982 à Marseille ...20137 PORTO VECCHIO

ayant pour avocat Me Valéri...

Ch. civile B

ARRET No
du 24 JUIN 2015
R. G : 13/ 00404 R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce d'AJACCIO, décision attaquée en date du 25 Mars 2013, enregistrée sous le no 2012000116

SARL BIANC'et NERU
C/
X...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT QUATRE JUIN DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
SARL BIANC'et NERU prise en son gérant en exercice Mme Y...Z...Martine ......20220 MONTICELLO

ayant pour avocat Me Marie Rose CITOLLEUX, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

Mlle Marie Pierre X...née le 15 octobre 1982 à Marseille ...20137 PORTO VECCHIO

ayant pour avocat Me Valérie GUISEPPI, avocat au barreau d'AJACCIO

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 avril 2015, devant Mme Cécile ROUY-FAZI, Conseiller, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre Mme Françoise LUCIANI, Conseiller Mme Cécile ROUY-FAZI, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Jeanne ORSINI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 24 juin 2015

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre, et par Mme Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A la suite de la livraison de vêtements, dans le cadre de « contrats de partenariat » passés en avril et novembre 2010 entre Mlle Marie-Pierre X...et la SARL Bianc'et Neru, aux termes desquels Mlle X...s'engageait à commercialiser, dans sa boutique de Bonifacio, les produits de la marque Bianc'et Neru, une ordonnance d'injonction de payer rendue le 29 novembre 2011 par le président du tribunal de commerce d'Ajaccio, la condamnait à payer à la SARL Bianc'et Neru la somme principale de 24 750, 69 euros, outre les intérêts et frais de procédure.

Mlle Marie-Pierre X...formait opposition à cette injonction dans les formes et délais légaux. Elle soutenait devant le tribunal que le contrat était nul pour absence de cause, au sens des dispositions de l'article 1131 du code civil, en raison d'une contrepartie insuffisante par la société contractante, à son obligation d'approvisionnement exclusif. A titre subsidiaire, elle faisait valoir la violation des normes européennes en matière de fixation de prix, de la part de la SARL Bianc'et Neru, en lui imposant des prix de revente. Au final, elle sollicitait la somme de 22 812, 57 euros, à titre de dommages intérêts, à compenser avec les sommes restant éventuellement dues à la SARL Bianc'et Neru.

Dans le jugement déféré du 25 mars 2013, le tribunal de commerce d'Ajaccio a :

- déclaré nul le contrat de partenariat passé entre Mlle X...et la SARL Bianc'et Neru,
- condamné la SARL Bianc'et Neru à payer à Mlle X...la somme de 22. 812, 57 euros à titre de dommages intérêts,
- ordonné la compensation des sommes à devoir au titre des marchandises,
- débouté la SARL Bianc'et Neru de toutes autres demandes fins et conclusions,

- rejeté toutes autres demandes fins et conclusions contraires à la présente décision.

La SARL Bianc'et Neru a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du 17 mai 2013.

Par ordonnance du magistrat de la mise en état du 2 janvier 2014, Me Janie A... huissier de justice à Bonifacio, a été désigné pour procéder à l'inventaire du stock de marchandises détenues par Mlle X.... Il y procédait le 5 avril 2014.

Dans ses dernières écritures du 10 novembre 2014, la SARL Bianc'et Neru sollicite l'infirmation du jugement et la condamnation de Mlle X...au paiement, au principal, de la somme de 24 750, 69 euros assortie des intérêts légaux, depuis la sommation de payer du 23 septembre 2011, et à titre de dommages intérêts distincts des intérêts moratoires, la somme de 211, 38 euros. A titre subsidiaire, elle sollicite la condamnation de l'appelante au paiement de la somme de 19 266, 24 euros assortie des intérêts légaux, depuis la sommation de payer en date du 23 septembre 2011, et à titre de dommages intérêts distincts des intérêts moratoires, la somme de 211, 38 euros. Elle fait notamment valoir qu'il n'existe aucune cause de nullité du contrat, le défaut éventuel de sa part d'animation d'une opération commerciale, à le supposer établi, et de son fait, n'étant pas une cause de nullité du contrat, pas plus que les prétendus retards ou erreurs de livraison, et qu'elle a respecté les termes du contrat. Elle ajoute que l'intimée reste redevable d'un solde de factures demeurées impayées, d'un montant de 24 750, 69 euros, ou de 19 266, 24 euros si le montant des invendus 2011 devait en être déduit.

Dans ses écritures du 9 septembre 2014, Mlle Marie-Pierre X...demande à la Cour de confirmer la décision, de dire qu'il y a lieu à remise en état par équivalant, à titre infiniment subsidiaire, de constater que la SARL Bianc'et Neru a violé l'article de l'article 4a du règlement no 330/ 2010 de l'UE en lui imposant des prix de revente, de fixer à la somme de 22 812, 57 euros les dommages intérêts dus en réparation de son préjudice, et d'ordonner la compensation de cette somme avec les sommes éventuellement dues, de débouter l'appelante du surplus de ses demandes, et de la condamner à lui payer une indemnité de procédure de 2 000 euros.

L'instruction a été clôturée par une ordonnance en date du 11 février 2015 qui a fixé l'audience de plaidoiries au 17 avril 2015. A cette date, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 24 juin 2015.

SUR CE

Sur la nullité du contrat :

Mlle X...invoque deux moyens à l'appui de sa demande de nullité : à titre principal, l'absence de cause au sens des dispositions de l'article 1131 du code civil, en ce qu'il y a aurait un déficit de contrepartie par la société contractante de l'obligation d'approvisionnement exclusif, et à titre subsidiaire, la violation des normes européennes en matière de fixation de prix, l'intimée lui ayant imposé des prix de revente.

Sur le premier moyen, il se déduit des « accords de partenariat » passés successivement en avril et novembre 2010 entre les parties, qualifiés de contrat de distribution exclusive à juste titre par le tribunal, que l'appelante s'engageait, en contrepartie de l'exclusivité que lui concédait Mlle X...aux obligations suivantes qui n'apparaissent, a priori, ni dérisoires ni déséquilibrées :

- mettre à disposition l'enseigne de la marque,
- lui faire bénéficier de la communication sur la marque contre rémunération de 500 euros,
- communiquer son savoir faire et ses techniques de vente (agencement, tenue de boutique...),
- lui proposer l'appui d'une agence de conseil en développement commercial contre participation de 1 000 ou 1 500 euros,
- lui assurer « un dialogue permanent » pour recueillir partager et traiter les informations,
- livrer dans les délais selon le référencement déterminé,
- sous réserve de possibilité de déstockage, reprendre les fins de séries en état à raison de 2 euros TTC la pièce,
- sous certaines conditions, reprendre les invendus.

Le tribunal ne pouvait annuler le contrat au seul motif que Mme X...n'aurait pas bénéficié de l'action commerciale de l'agence de conseil, bien qu'elle prétende, sans d'ailleurs en justifier, qu'elle ait payé 500 euros à cette fin, en considération du paiement a minima très partiel de cette prestation, de la visite le 17 juin 2011 sur site de ladite agence dont il est produit le compte rendu, et surtout, s'agissant d'une obligation de « proposition » de la part de la société, du caractère facultatif de cette prestation.

Il n'est pas, par ailleurs, justifié d'un retard de livraison de la SARL Bianc'et Neru, qui démontre que 3459 articles des 4705 commandés pour la saison estivale 2011 avaient été livrés avant Pâques, et même, pour la moitié d'entre eux, avant le 23 mars 2011, alors encore qu ¿ il est pareillement justifié que les commandes de Mme X...se sont étalées pour la même saison du 8 février jusqu'au 26 mai 2011.

Le second moyen sera également écarté, puisque l'article 4a du règlement 330/ 2010 de la Commission du 20 avril 2010, qui interdit les accords qui restreignent la capacité de l'acheteur de déterminer son prix de vente « sans préjudice de la possibilité pour le fournisseur d'imposer un prix de vente maximal ou de recommander un prix de vente, à condition que ces derniers n'équivalent pas à un prix de vente fixe ou minimal sous l'effet de pressions exercées ou d'initiatives par l'une des parties » ne s'applique pas lorsque, comme en l'espèce, le distributeur bénéficie, en vertu du contrat qui le lie à son fournisseur, de la liberté de fixer le prix de revente de ses produits, et que les circonstances de l'espèce n'apportent pas la preuve de l'existence d'une contrainte, exercée par le fournisseur, dans la fixation du prix de revente par son distributeur, cette contrainte n'étant ni justifiée ni même invoquée.

Le jugement qui a prononcé la nullité du contrat sera donc infirmé.

Sur la résolution du contrat :

Il est établi et non contesté par les parties que le contrat de partenariat qu'elles ont conclu n'a pas survécu au delà du refus de paiement des lettres de changes survenus au cours de l'été 2011.

La SARL Bianc'et Neru en demande la résolution, en considération de l'inexécution fautive par Mlle X...de son obligation de payer les marchandises livrées. Elle poursuit en effet, le paiement deux factures demeurées partiellement impayées, correspondant à des livraisons de commandes non discutées par l'intimée :

- l'une, du 3 mai 2011, d'un montant de 46 065, 88 euros pour le paiement de laquelle, seules deux lettres de change de 9 213, 17 euros chacune, ont été payées, la troisième du même montant ayant été rejetée le 16 août 2011 pour provision insuffisante, et les autres non payées, soit un solde de 27 639, 54 euros,
- l'autre, du 22 juin 2011, d'un montant de 19 795, 74 euros, payée à l'aide de trois lettres de change de 6 598, 58 euros chacune, la première ayant été rejetée le 27 juillet 2011 pour provision insuffisante, et les autres non payées, soit un solde de 19 795, 74 euros.

Il convient de déduire du solde de ces deux factures demeurées impayées :

- l'avoir de 19. 684, 59 euros établi le 8 septembre 2011 après retour d'invendus 2011,
- la somme de 3 000 euros payée le 26 septembre 2011par Mme X....

Il est donc justifié que Mlle X..., qui, au demeurant, ne conteste ni le principe ni le montant de sa dette dans un courrier du 15 septembre 2011 adressé à la SARL Bianc'et Neru (exception faite de la valeur des marchandises 2010 non reprises soit la somme de 2 143, 11 euros), reste redevable envers la société appelante de la somme de 24 750, 69 euros, productive des intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer du 23 septembre 2011.

Il sera donc fait droit à la demande de résolution du contrat, aux torts de Mlle Marie-Pierre X..., la remise en état des parties comme si le contrat n'avait jamais existé impliquant, notamment, la restitution par celle ci des marchandises conservées, à savoir celles qui ont fait l'objet de l'inventaire contradictoire de Me Janie A..., huissier de justice, commis par ordonnance du 2 janvier 2014 du conseiller de la mise en état, contre déduction, après restitution effective, de la valeur de cet ultime stock, évalué par l'appelante à la somme, non discutée par Mlle X..., de 5 485, 45 euros.

Enfin, la résolution fautive aux torts de Mlle X...du contrat justifie qu'il soit fait droit à la demande en paiement de 211, 38 euros à titre de dommages intérêts, dont il est justifié par l'appelante au titre des frais d'huissier engagés.

Sur les autres demandes :

L'équité commande de condamner Mlle X...au paiement d'une indemnité de procédure de 1 000 euros à la société appelante.

Mlle X...qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,
Déclare recevable et mal fondée l'opposition formée par Mlle Marie-Pierre X...de l'ordonnance d'injonction de payer, prise le 29 novembre 2011, par le président du tribunal de commerce d'Ajaccio,
Prononce la résolution du contrat passé entre SARL Bianc'et Neru et Mlle Marie-Pierre X...aux torts de celle-ci,
Condamne Mlle Marie Pierre X...à payer à la SARL Bianc'et Neru la somme de VINGT QUATRE MILLE SEPT CENT CINQUANTE EUROS ET SOIXANTE NEUF CENTIMES (24 750, 69 euros) assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2011,
Condamne Mlle Marie-Pierre X...à payer à la SARL Bianc'et Neru la somme de DEUX CENT ONZE EUROS ET TRENTE HUIT CENTIMES (211, 38 euros) à titre de dommages intérêts,
Ordonne la restitution à la SARL Bianc'et Neru de la marchandise inventoriée le 5 avril 2014 par Me Janie A..., contre paiement par SARL Bianc'et Neru de la somme de 5 485, 45 euros,
Condamne Mlle Marie Pierre X...à payer à la SARL Bianc'et Neru une indemnité de MILLE EUROS (1 000 euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mlle Marie Pierre X...aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/00404
Date de la décision : 24/06/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2015-06-24;13.00404 ?
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