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20/05/2015 | FRANCE | N°14/00131

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 20 mai 2015, 14/00131


Ch. civile A

ARRET No
du 20 MAI 2015
R. G : 14/ 00131 C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 14 Janvier 2014, enregistrée sous le no 12/ 01656

X...Compagnie d'assurances MACSF Y...

C/
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT MAI DEUX MILLE QUINZE
APPELANTS :
M. Alain X...né le 04 Septembre 1958 à MARSEILLE ...20200 BASTIA

ayant pour avocat Me Claude CRETY, avocat a

u barreau de BASTIA

Compagnie d'assurances MACSF prise en la personne de son représentant légal en exercice C...

Ch. civile A

ARRET No
du 20 MAI 2015
R. G : 14/ 00131 C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 14 Janvier 2014, enregistrée sous le no 12/ 01656

X...Compagnie d'assurances MACSF Y...

C/
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT MAI DEUX MILLE QUINZE
APPELANTS :
M. Alain X...né le 04 Septembre 1958 à MARSEILLE ...20200 BASTIA

ayant pour avocat Me Claude CRETY, avocat au barreau de BASTIA

Compagnie d'assurances MACSF prise en la personne de son représentant légal en exercice Cours du Triangle-10 Rue de Valmy 92800 PUTEAUX

ayant pour avocat Me Claude CRETY, avocat au barreau de BASTIA

M. Jean-Baptiste Y...né le 23 Juillet 1926 ...... 20200 BASTIA

assisté de Me Caroline GOEURY-GIAMARCHI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE prise en la personne de son représentant légal en exercice 5 Avenue Jean Zuccarelli-BP 501- Service contentieux 20406 BASTIA Cédex 9

défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 mars 2015, devant la Cour composée de :
Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre Mme Laetitia PASCAL, Conseiller Mme Judith DELTOUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 20 mai 2015.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée le et qui a fait connaître son avis, dont les parties ont pu prendre connaissance.

ARRET :

Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, et par Mme Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Jean-Baptiste Y...avait subi le 30 avril 2004 une laryngectomie totale suite à un diagnostic de cancer des cordes vocales. Le 6 juin 2005 il avait subi une dilatation de l'¿ sophage et s'exprimait depuis grâce à une « voix oesophagienne ».
Le 5 septembre 2010 il a été admis au centre hospitalier de Bastia en raison de douleurs à l'abdomen, puis admis à la clinique Maymard, au sein de laquelle il a subi une nouvelle dilatation de l'¿ sophage.
Expliquant que cette intervention, réalisée sans son consentement, était la cause de la perte de sa voix ¿ sophagienne et d'un préjudice corporel, M. Y...a fait assigner devant le tribunal de grande instance
de Bastia la compagnie d'assurances MACSF, le docteur Alain X...et la Caisse primaire d'assurance maladie de Haute Corse pour obtenir l'indemnisation de son préjudice, sur la base d'un rapport d'expertise judiciaire du docteur Bruno A....

Par jugement réputé contradictoire du 14 janvier 2014 cette juridiction a :

¿ condamné solidairement le docteur Alain X...et la compagnie d'assurances MACSF à payer à M. Y...la somme de 24 918 euros en réparation du préjudice subi du fait de la perte de sa voix ¿ sophagienne consécutive à l'opération subie le 15 septembre 2010 à la clinique Maymard,
¿ ordonné l'exécution provisoire,
¿ condamné solidairement le docteur X...et la compagnie MACSF à payer à M. Y...la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
¿ condamné solidairement le docteur X...et la MACSF aux dépens.

Alain X...et la MACSF ont formé appel de cette décision le 11 février 2014.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 13 octobre 2014, ils sollicitent l'infirmation totale du jugement et demandent à la cour, statuant à nouveau :
¿ au principal :
- de constater que le docteur X...n'a commis aucune faute technique ni dans la prescription ni dans l'exécution de l'acte ni dans les suites postopératoires, que M. Y...a donné un consentement libre et éclairé à la dilatation ¿ sophagienne, que la perte de voix ¿ sophagienne est une complication imprévisible et non répertoriée, de constater que le docteur X...n'a pas failli à son obligation d'information sur ce risque méconnu de la science et qu'il n'a donc commis aucune faute ; de débouter M. Y...de ses demandes et de le condamner à la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,
¿ subsidiairement :
si la cour devait retenir un défaut d'information ayant entraîné une perte de chance de se faire opérer par un autre médecin :
- de constater que le docteur X...n'a commis aucune faute technique, que le pourcentage de chances que la perte de voix ¿ sophagienne ne se soit pas produite si la dilatation avait été réalisée par un autre médecin est égal à zéro,
- de dire que M. Y...ne peut se prévaloir d'aucun préjudice réparable,
¿ à titre infiniment subsidiaire :
si la cour devait retenir un défaut d'information ayant entraîné une perte de chance de refuser l'intervention :
- de constater que M. Y...a accepté la visite pré-anesthésique de l'hôpital et s'est présenté volontairement au service de gastrologie de la clinique Maymard pour subir cette intervention plusieurs jours après que la prescription ait été posée et portée à sa connaissance par les médecins de l'hôpital de Bastia,
- de retenir l'estimation des préjudices faites par l'expert judiciaire de même que le taux d'imputabilité à l'état antérieur et le taux d'imputabilité à la hernie hiatale,
- de fixer ainsi que suit les préjudices :
avant consolidation :
. déficit fonctionnel temporaire : 20 % x 50 % = 918 euros. souffrances endurées 2/ 7 x 50 % = 1 500 euros

après consolidation :
. déficit fonctionnel permanent 30 %-10 % = 20 % x 50 % = 9 450 euros. préjudice d'agrément 3 000 euros x 50 % = 1 500 euros

-d'estimer le pourcentage de chances que M. Y...ait refusé l'intervention,
- d'appliquer ledit pourcentage à la liquidation des préjudices tels que ci-dessus pour arrêter le montant de la réparation,
- de débouter M. Y...de ses autres demandes,
- de le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions déposées le 11 septembre 2014 Jean-Baptiste Y...demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré le docteur X...responsable des conséquences dommageables de l'intervention du 15 septembre 2010 et de l'infirmer pour le surplus,

- de le condamner à verser au concluant en réparation de son préjudice la somme totale de 57 090 euros ;
- de le condamner en outre à lui payer 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et de le condamner aux dépens,

- de condamner la MACSF à se substituer à son assuré pour le paiement de ces condamnations,

- de déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la Caisse primaire d'assurance maladie de Haute Corse.

La Caisse primaire d'assurance maladie de Haute Corse, assignée le 27 mars 2014 à personne habilitée, n'a pas constitué avocat.

En application de l'article 473 du code de procédure civile, la présente décision sera réputée contradictoire.
Vu l'avis du ministère public du 21 novembre 2014.
Vu l'ordonnance de clôture du 12 février 2015.

SUR CE :

M. Y...estime que le docteur X...a engagé sa responsabilité en s'abstenant de recueillir son consentement libre et éclairé à l'intervention, en s'abstenant de l'informer sur les risques qu'elle comportait. Il soutient en outre que la dilatation n'était pas indiquée ni nécessaire.

Si c'est au médecin qu'il appartient de démontrer que l'information du patient a bien été réalisée, cette démonstration peut être faite par tout moyen.
En l'espèce, et comme le soulignent les appelants, la chronologie des faits établie par M. Y...lui-même indique que le service de gastro-entérologie de l'hôpital de Bastia, au sein duquel il a séjourné du 8 au 12 septembre 2010, l'a informé qu'un rendez-vous était pris à la clinique Maymard pour l'éventualité d'une dilatation de l'¿ sophage, l'hôpital n'étant pas équipé pour pratiquer une telle intervention ; M. Y...est resté à son domicile du 12 au 15 septembre et s'est rendu volontairement, donc pour y subir l'intervention, à la clinique Maymard ; un dossier anesthésique a été établi au sein de cette clinique, notamment une fiche d'identification du risque de transmission de la maladie de Creutzfeld-Jacob, comportant nécessairement un interrogatoire du patient en particulier sur les antécédents familiaux. L'expert judiciaire confirme d'ailleurs que la visite juste avant l'anesthésie a été pratiquée à la clinique, de sorte que le patient ne pouvait ignorer qu'il allait subir une intervention.
Même si le docteur X...ne produit aucun document écrit contradictoire démontrant qu'il a délivré au patient toutes les informations sur les risques possibles liés à la dilatation ¿ sophagienne, force est de constater, comme le souligne l'expert, que la perte de la voix ¿ sophagienne n'est pas rapportée dans les fiches du collège des endoscopistes comme une conséquence de cette intervention. Tant les recommandations de la société Française d'endoscopie digestive que l'avis du docteur B..., adressé le 7 février 2012 au docteur A..., ainsi que celui du professeur D...du 11 février 2012, démontrent que la perte d'une voix ¿ sophagienne ne fait pas partie des risques habituels et connus liés à l'intervention pratiquée. Dans ces conditions il ne peut être reproché au docteur X...de ne pas avoir informé M. Y...sur ce risque.
Mais encore, et surtout, il n'existe aucun lien de causalité entre le défaut d'information reproché et le préjudice subi puisque même si M. Y..., comme il le soutient, aurait préféré se faire opérer par un autre médecin, il n'est pas certain qu'il aurait conservé sa voix ¿ sophagienne, l'expert n'ayant relevé aucune faute médicale, ni dans l'indication (la dilatation lui semblant « logique »), ni dans sa réalisation et les appelants eux-mêmes ne soutenant pas que l'intervention avait été pratiquée dans de mauvaises conditions. C'est donc à tort que le premier juge a considéré que le défaut d'information du patient lui avait fait perdre la possibilité de se faire opérer par un autre médecin et que le lien de causalité entre la perte de la voix et l'intervention était certain et direct.
En conséquence le jugement sera infirmé, les demandes de M. Y...seront rejetées.
L'équité n'impose pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens seront laissés à la charge de M. Y....

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Infirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :
Rejette les demandes de Jean-Baptiste Y...,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de Jean-Baptiste Y....
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 14/00131
Date de la décision : 20/05/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2015-05-20;14.00131 ?
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