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01/04/2015 | FRANCE | N°13/00881

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 01 avril 2015, 13/00881


Ch. civile A

ARRET No
du 01 AVRIL 2015
R. G : 13/ 00881 C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 31 Octobre 2013, enregistrée sous le no 12/ 00407

Commune CHIATRA DI VERDE
C/
X...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
PREMIER AVRIL DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
COMMUNE DE CHIATRA DI VERDE prise en la personne de son maire en exercice Maison Commune 20230 CHIATRA DI VERDE

assistée de Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILI

PPE JOBIN, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :

M. Pierre Vincent Gabriel X...né le 16 Mai 1944 à MARSEI...

Ch. civile A

ARRET No
du 01 AVRIL 2015
R. G : 13/ 00881 C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 31 Octobre 2013, enregistrée sous le no 12/ 00407

Commune CHIATRA DI VERDE
C/
X...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
PREMIER AVRIL DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
COMMUNE DE CHIATRA DI VERDE prise en la personne de son maire en exercice Maison Commune 20230 CHIATRA DI VERDE

assistée de Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :

M. Pierre Vincent Gabriel X...né le 16 Mai 1944 à MARSEILLE (13000) ...

assisté de Me Jean Pierre SEFFAR, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 3339 du 05/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 février 2015, devant la Cour composée de :
Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre Mme Laetitia PASCAL, Conseiller Mme Marie BART, Vice-Président placé près M. le Premier Président

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 01 avril 2015.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par exploit d'huissier du 15 février 2012, la commune de Chiatra di Verde (Haute Corse) a demandé au tribunal de grande instance de Bastia de condamner M. Pierre X... au paiement de la somme de 15. 800, 40 euros en réparation de son préjudice au motif qu'il avait démonté le 13 février 2011 le paratonnerre qu'elle avait fait installer en 1974 sur la parcelle cadastrée 329 section B, la mise à la terre se faisant sur la parcelle 334 section B.

Par jugement du 31 octobre 2013, le tribunal de grande instance de Bastia a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la commune de Chiatra di Verde,
- rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de M. Pierre X...,
- débouté la commune de Chiatra di Verde de l'ensemble de ses demandes,
- déclaré recevable la demande reconventionnelle de M. Pierre X...,
- condamné la commune de Chiatra di Verde à payer à M. Pierre X... la somme de 10. 000 euros en réparation de son préjudice,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la commune de Chiatra di Verde à payer à M. Pierre X... la somme de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la commune de Chiatra di Verde aux entiers dépens.

Le tribunal a estimé que M. Pierre X... avait intérêt à agir pour obtenir l'indemnisation de son préjudice puisqu'il était le propriétaire de la parcelle litigieuse au jour de l'introduction de la demande et qu'il était toujours propriétaire de celle où est implanté le paratonnerre et il s'est estimé compétent pour examiner la demande reconventionnelle de M. Pierre X....

Il a indiqué qu'il n'était pas possible de dater l'installation du paratonnerre et de la prise de terre sur la parcelle B 329 (aujourd'hui B 787) par la commune de Chiatra di Verde qui n'en avait pas reçu l'autorisation. Il en a déduit que cette installation procédait d'un acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'autorité administrative. Il a ajouté que le paratonnerre présentait un danger réel pour les personnes en l'absence de protection contre la dispersion de la décharge dans le sol et du risque de brûlures ou d'arrêts respiratoires et cardiaques provoqués par la prise de terre. Il a justifié le démontage par M. Pierre X... de l'ouvrage dangereux qui avait été installé en toute illégalité par la commune de Chiatra di Verde. Il a estimé que M. Pierre X... avait subi un préjudice indéniable depuis 2001, puisqu'il s'était trouvé privé de l'usage de sa parcelle et qu'il avait du faire face à la ténacité de la commune contre lui.

La commune de Chiatra di Verde a relevé appel du jugement du 31 octobre 2013 par déclaration déposée au greffe le 12 novembre 2013.

En ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 15 septembre 2014 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la commune de Chiatra di Verde demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris,
- condamner l'intimé à lui payer la somme de 15. 800, 40 euros en réparation de son préjudice et 3. 000, 00 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- se déclarer incompétent sur ses demandes reconventionnelles au profit du tribunal administratif de Bastia,
subsidiairement et sur lesdites demandes reconventionnelles,
- débouter M. Pierre X...,
- le condamner aux dépens,
- ordonner l'exécution provisoire,
très subsidiairement,
- ordonner une expertise pour déterminer son préjudice.

Elle fait valoir que le hameau de Chiatra di Verde est bâti sur une arête rocheuse et, de ce fait, est fortement exposé à la foudre ; qu'en 1974, elle a fait installer un paratonnerre sur le pic rocheux cadastré sous le no 329 de la section B ; que cette installation a toujours été entretenue jusqu'au 13 février 2011, date où M. Pierre X... l'a démontée en en détériorant certaines éléments. Elle explique que la nécessité de cette installation n'est pas à l'appréciation de M. Pierre X... mais qu'elle relève de sa responsabilité et de l'obligation qu'a le maire d'assurer la sécurité de ses concitoyens. Elle fait observer que M. Pierre X... n'a été propriétaire des parcelles occupées par l'ouvrage public que pendant quelques années et qu'il les a vendues ; qu'il n'établit pas l'existence d'un préjudice dont la connaissance échappe à la cour puisqu'il relèverait de la responsabilité d'une collectivité publique du fait de l'existence ou du fonctionnement d'un ouvrage public. Il fait valoir que toute action en réparation du préjudice qu'aurait causé une voie de fait administrative est prescrite depuis 1974 et dénie à M. Pierre X... toute qualité pour agir puisqu'il n'est plus propriétaire de la parcelle dont s'agit.

Elle critique le jugement qui met en doute la date d'installation du paratonnerre en1974 et qui préfère l'avis de Franklin Sud-Est à ceux qu'elle produit. Elle affirme ne pas avoir commis de voie de fait en installant ce paratonnerre, l'opération s'étant faite à la demande de la population et avec l'accord du propriétaire de l'époque.

En ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 25 novembre 2014 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. Pierre X... demande à la cour de :

- constater la voie de fait commise par la la commune de Chiatra di Verde,
- constater le caractère dangereux de l'installation,
- constater que l'installation ne respecte pas les obligations réglementaires relatives aux normes de sécurité,
- constater encore que le paratonnerre est à la disposition de la commune,
- confirmer le jugement entrepris,
Subsidiairement et non autrement,
- dire que le préjudice subi par la commune de Chiatra di Verde est de 432, 00 euros,
- condamner la commune de Chiatra di Verde à lui payer la somme de 3. 000, 00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la commune de Chiatra di Verde aux dépens.
Il expose que l'installation du paratonnerre est dangereuse en raison des risques de brûlures, d'arrêts respiratoires et cardiaques pour les êtres humains ; que la commune de Chiatra di Verde n'a pas satisfait à toutes les obligations prévues à l'arrêté du 19 juillet 2011 qui exige une analyse du risque foudre par un organisme compétent pour l'installation d'un paratonnerre ; que la date d'installation est incertaine mais que la commune de Chiatra di Verde a commis une voie de fait en posant le paratonnerre sur sa propriété sans l'autorisation du propriétaire, ce que confirme M. A...ancien propriétaire.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 décembre 2014 et l'affaire renvoyée pour être plaidée au 9 février 2015.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- Sur la responsabilité de M. Pierre X... :

Aux termes de l'article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

En démontant le paratonnerre appartenant à la commune de Chiatra di Verde le 13 février 2011, M. Pierre X... a commis une faute qu'il justifie en reprochant à la victime d'avoir commis une voie de fait lors de l'installation de l'ouvrage litigieux et en invoquant la dangerosité du même ouvrage.
La commune de Chiatra di Verde démontre suffisamment que le paratonnerre litigieux a été installé le 26 mars 1975 par l'entreprise SAE Annecy suivant la fiche d'installation et la copie du mandat de paiement du 5 mai 1975.
M. Pierre X... a acheté le 14 septembre 2000 aux consorts A...la parcelle B 329 sur laquelle est posé le paratonnerre. La parcelle B 329 a été divisée en quatre parcelles et M. Pierre X... est resté propriétaire de la parcelle B 787 sur laquelle est érigé le paratonnerre.
Il a acheté la parcelle B 334 sur laquelle est installée la prise de terre suivant actes des 22 décembre 2005 et 7 avril 2008.
Il en résulte que sans conteste au jour de l'acquisition de la parcelle B 329 devenue B 787, l'ouvrage était installé et que M. Pierre X... en connaissait l'existence. Il n'est donc pas légitime à reprocher une voie de fait à la commune de Chiatra di Verde puisqu'au jour de sa prise de possession, l'ouvrage litigieux était déjà installé.
Devant la cour, M. Pierre X... produit notamment le rapport qualifoudre de la société Franklin qui indique après son déplacement le 14 novembre 2014 sur site, que " l'implantation de la prise de terre située

derrière la maison lot no 334 constitue un danger pour les êtres vivants pouvant provoquer des brûlures ou des arrêts respiratoires et cardiaques du à la tension de pas ". La lecture de ces pièces fait apparaître que le danger provient du choix de l'endroit pour implanter la prise de terre et non de l'installation d'un paratonnerre étant rappelé que la commune de Chiatra di Verde est située dans une zone à risque élevé de foudre. Le danger invoqué ne venant pas du paratonnerre, M. X... ne peut invoquer une faute commise par la commune pour s'exonérer de sa responsabilité dans le démontage de cet ouvrage.

Faute de fait justificatif, M. Pierre X... doit être déclaré responsable du dommage qu'il a causé en démontant le 13 février 2011 le paratonnerre installé par la commune de Chiatra di Verde.
La cour s'estimant suffisamment informée pour fixer le montant de l'indemnisation, le recours à l'expertise n'apparaît pas opportun.
Le devis du 5 mai 2011 produit par la commune de Chiatra di Verde ne peut être retenu pour fixer l'indemnisation du préjudice puisqu'il correspond à l'installation d'un nouveau paratonnerre et non à sa remise en état. Le devis produit par M. X... correspond aux dommages qu'il a causés et sera retenu pour fixer à la somme de 432, 00 euros le coût de la remise en état du paratonnerre démonté par l'intéressé. M. Pierre X... sera condamné à payer à la commune de Chiatra di Verde la somme de 432, 00 euros en réparation du préjudice matériel subi.
Le jugement querellé sera infirmé sur ce point.

2- Sur les autres demandes :

L'article 515 du code de procédure civile n'a pas à s'appliquer au présent arrêt et la commune de Chiatra di Verde est déboutée de ce chef de demande.

Il ne paraît pas équitable de laisser à la charge de la commune de Chiatra di Verde les frais non compris dans les dépens tant en première instance qu'en appel. M. Pierre X... sera condamné à payer à la commune de Chiatra di Verde la somme de 1. 500, 00 euros au titre des frais irrépétibles avancés devant le tribunal de grande instance et la même somme au titre des mêmes frais avancés devant la cour.
Le jugement querellé sera infirmé en ce qu'il avait mis à la charge de la commune de Chiatra di Verde la somme de 2. 000, 00 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il n'avait pas accordé d'indemnité sur ce fondement à la commune de Chiatra di Verde.
Succombant, M. Pierre X... sera condamné aux dépens tant de première instance que d'appel. Le jugement querellé sera également infirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bastia le 31 octobre 2013 en toutes ses dispositions,

Dit que M. Pierre X... a commis une faute en démontant le 13 février 2011 le paratonnerre installé sur la parcelle sise à Chiatra di Verde cadastrée section B numéro 329 devenue B numéro 787 et le déclare entièrement responsable,
Condamne M. Pierre X... à payer à la commune de Chiatra di Verde prise en la personne de son maire en exercice la somme de quatre cent trente deux euros 432, 00 euros en réparation de son préjudice matériel,
Condamne M. Pierre X... à payer à la commune de Chiatra di Verde prise en la personne de son maire en exercice la somme de mille cinq cents euros (1. 500, 00 euros) par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles avancés devant le tribunal de grande instance,
Condamne M. Pierre X... à payer à la commune de Chiatra di Verde prise en la personne de son maire en exercice la somme de mille cinq cents euros (1. 500, 00 euros) par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais avancés devant la cour,
Condamne M. Pierre X... aux entiers dépens tant de première instance que d'appel,
Y ajoutant,
Déboute la commune de Chiatra di Verde prise en la personne de son maire en exercice de sa demande tendant à prononcer l'exécution provisoire du présent arrêt.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/00881
Date de la décision : 01/04/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2015-04-01;13.00881 ?
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