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16/07/2014 | FRANCE | N°12/00579

France | France, Cour d'appel de Bastia, Ch. civile a, 16 juillet 2014, 12/00579


Ch. civile A
ARRET No du 16 JUILLET 2014 R. G : 12/ 00579 R-MB

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 29 Mai 2012, enregistrée sous le no 10/ 00152
X... C/ CONSORTS Y... Z... X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE ARRET DU SEIZE JUILLET DEUX MILLE QUATORZE

ARRET MIXTE
APPELANT : M. Jean X... né le 26 Mars 1962 à Corte (20250)... 20219 ROSPIGLIANI assisté de Me Claudine CARREGA, avocat au barreau de BASTIA (bénéficie d'une aide juridictionnelle numéro 201

2/ 2104 du 02/ 08/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

INTIMES...

Ch. civile A
ARRET No du 16 JUILLET 2014 R. G : 12/ 00579 R-MB

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 29 Mai 2012, enregistrée sous le no 10/ 00152
X... C/ CONSORTS Y... Z... X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE ARRET DU SEIZE JUILLET DEUX MILLE QUATORZE

ARRET MIXTE
APPELANT : M. Jean X... né le 26 Mars 1962 à Corte (20250)... 20219 ROSPIGLIANI assisté de Me Claudine CARREGA, avocat au barreau de BASTIA (bénéficie d'une aide juridictionnelle numéro 2012/ 2104 du 02/ 08/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

INTIMES :
Mme Jacqueline Y... épouse X... 20219 ROSPIGLIANI
assistée de Me Chantal FLORES SAGNET, avocat au barreau D'AJACCIO
Mme Catherine Z... née le 26 décembre 1968 à Bastia... 20222 BRANDO assistée de Me Nelly LABOURET, avocat au barreau de BASTIA, substituée par Me Pierre-Louis MAUREL, avocat au barreau de BASTIA, (bénéficie d'une aide juridictionnelle numéro 2012/ 1913 du 28/ 06/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

Mme Marie Jeanne X... épouse A...
... 20129 BASTELICACCIA
assistée de Me Chantal FLORES SAGNET, avocat au barreau D'AJACCIO
M. Etienne X... né le 01 Janvier 1943 à Solaro (20240) 20219 ROSPIGLIANI assisté de Me Chantal FLORES SAGNET, avocat au barreau D'AJACCIO

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 mai 2014, devant Mme Julie GAY, Président de chambre, et Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Marie-Jeanne ORSINI. Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 09 juillet 2014, prorogée par le magistrat par mention au plumitif au 16 juillet 2014.

ARRET :
Contradictoire, Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE
M. Jean X... et Mme Catherine Z... ont vécu en concubinage pendant plusieurs années (de 2000 à 2006) et, pendant leur vie commune, ont exploité une propriété agricole sur une parcelle de terre appartenant à M. Etienne X... et Mme Jacqueline Y... épouse X..., parents de M. Jean X..., située sur la commune de Rospigliani (Haute Corse), cadastrée section B no 568 lieudit " Croce ", parcelle sur laquelle des travaux ont été réalisés.
Par acte notarié du 19 février 2010, M. Etienne X... et Mme Jacqueline Y... épouse X... ont vendu à leur fille, Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., la propriété ci-dessus désignée, moyennant un prix de 20 000 euros
Soutenant avoir financé de ses deniers personnels une partie du coût des travaux réalisés sur cette propriété, pendant son concubinage avec M. Jean X..., ainsi qu'un véhicule acquis au profit de M. Etienne X..., Mme Catherine Z... a, par acte d'huissier du 18 janvier 2010, assigné les époux X... et M. Jean X... devant le tribunal de grande instance de Bastia, sur le fondement des articles 555 et 1371 du code civil.
Elle sollicitait la désignation d'une expertise pour évaluer, d'une part, l'augmentation de valeur de la propriété en raison des aménagements réalisés par elle et M. Jean X... et d'autre part, le coût des matériaux et de la main d'oeuvre, ainsi que la condamnation des époux X... au paiement de diverses sommes.
M. Jean X..., soutenant avoir fait édifier sur la propriété de ses parents, avec leur accord, un bâtiment agricole, un appartement de 4 pièces et une ferme auberge et que sa soeur, Mme Marie-Jeanne X... épouse A... a bénéficié de toutes les améliorations apportées à la propriété, a, par acte d'huissier du 25 mai 2010, assigné cette dernière devant le tribunal de grande instance de Bastia aux fins d'expertise pour évaluer le montant de l'indemnité qui lui est due en qualité de tiers de bonne foi évincé.
La jonction de ces deux procédures a été prononcée le 12 juillet 2010.
Par jugement contradictoire du 29 mai 2012, le tribunal a, au visa des articles 555, 1371 et 1382 du code civil, a :- débouté Mme Catherine Z... de l'ensemble de ses demandes,

- débouté M. Jean X... de l'ensemble de ses demandes,- condamné Mme Catherine Z... à payer à M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., ensemble la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,- condamné Mme Z... à payer à M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., ensemble la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A... du surplus de leurs demandes,- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,- condamné Mme Catherine Z... aux dépens.

Par déclaration reçue le 16 juillet 2012, M. Jean X... a interjeté appel de cette décision.
Par ses dernières conclusions reçues le 16 février 2013, l'appelant demande à la cour :- d'accueillir son appel, le dire bien fondé,- de débouter les intimés de leur appel incident,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de ses demandes, à titre principal, en application des articles 555 et suivants du code civil,- de constater qu'il a édifié des constructions sur le terrain sis section B 568 à savoir une maison d'habitation, une chèvrerie, une fromagerie, un hangar à fourrage, une ferme auberge,

- en conséquence, de dire et juger qu'il est fondé à solliciter la condamnation de l'intimée Marie-Jeanne X... épouse A... à lui régler une indemnité compensatrice sur le fondement de l'article 555 du code civil-de condamner cette dernière à lui régler une indemnité compensatrice sur le fondement de l'article 555 précité,- de s'entendre l'intimée Marie-Jeanne X... épouse A... condamner à lui régler la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts,

avant dire droit,- d'ordonner une expertise judiciaire afin d'évaluer le montant qui lui sera dû en fonction de l'option choisie par le propriétaire, à titre subsidiaire, et si la cour devait considérer que l'article 555 n'est pas applicable,

vu l'article 1371 du code civil,- de constater que les consorts Etienne et Jacqueline X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A... se sont enrichis à son détriment, en conséquence, de les condamner à lui rembourser l'indemnité qui lui est due, laquelle sera évaluée par expertise, avant dire droit,

- d'ordonner une expertise judiciaire afin d'évaluer le montant de l'indemnité qui lui est due sur le fondement de l'article 1371 du code civil, à titre infiniment subsidiaire, faisant application des articles 1871 et suivants du code civil,- de constater l'existence d'une société de fait entre lui-même et les intimés,

- de constater que cette société est aujourd'hui dissoute, en conséquence,- de condamner les intimés à lui payer une indemnité correspondant au montant de ses apports ainsi que de la plus-value apportée au bien,

avant dire droit,- d'ordonner une expertise judiciaire afin d'évaluer le montant de l'indemnité qui lui est due, en tout état de cause,

- de débouter les consorts X... de leur appel incident et de leur demande de remboursement de la somme de 20 000 euros,- de débouter Mme Z... de son appel incident et de ses demandes dirigées contre lui, à savoir sa demande de condamnation de l'appelant avec ses parents à lui verser la somme de 58 737 euros,- de prononcer sa mise hors de cause,- de dire et juger que l'intimée A... devra le garantir de toutes condamnations pouvant être mises à sa charge dans le cadre du dossier l'opposant à Mme Z...,

- de s'entendre les intimés X... et A... condamner à lui payer la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions reçues le 16 décembre 2012, Mme Z... demande à la cour, sur le fondement des articles 555, 1371 et 1382 du code civil, de faire droit à son appel incident, d'infirmer la décision entreprise dans toutes ses dispositions et, statuant à nouveau de : au principal,- constater qu'elle a édifié des constructions sur le terrain cadastré section B no 568, constituées par une maison d'habitation et une ferme auberge,

- dire et juger qu'elle a la qualité de tiers évincé de bonne foi,- en conséquence, dire et juger qu'elle est fondée à solliciter la condamnation de Mme X... épouse A..., acquéreur de la parcelle, à lui régler une indemnité compensatrice telle que prévue à l'article 555 du code civil,- de désigner tel expert qu'il plaira à la cour pour évaluer l'indemnité compensatrice selon la méthode choisie par Mme A... et à défaut de choix après une mise en demeure d'exercer celui-ci dire que l'expert fera application des critères d'évaluation les plus favorables,- constater l'enrichissement sans cause de M. Etienne X... à hauteur d'au moins 9 937 euros et corrélativement son appauvrissement du même montant,- condamner M. Etienne X... à lui payer la somme de 9 937 euros avec intérêt de droit à compter de la décision à intervenir,- condamner les époux X... à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, subsidiairement, si par impossible la cour devait considérer que les dispositions de l'article 555 du code civil ne sont pas applicables, vu les dispositions de l'article 1371 du code civil,- dire et juger qu'elle a fourni des fonds pour réaliser un appartement et une ferme auberge appartenant à Mme X... épouse A..., qu'elle a financé l'acquisition d'un véhicule automobile au nom des époux X...,- constater l'enrichissement sans cause de M. Jean X..., des époux X... et de Mme X... épouse A... de la somme de 58 737 euros et corrélativement son appauvrissement,- les condamner, en conséquence, à lui verser la somme de 58 737 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- condamner solidairement les " défendeurs " au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par leurs dernières conclusions reçues le 17 décembre 2012, les époux X... et Mme X... épouse A... demandent à la cour, sur le fondement des articles 555, 1371, 1236 et 1382 du code civil, de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté Mme Z... et M. Jean X... de leurs demandes fondées sur les articles 555 et 1371 du code civil et condamné Mme Z... en paiement de dommages-intérêts et versement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils sollicitent l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande des parents X... en remboursement de la somme payée à la banque et la condamnation de M. Jean X... à leur payer la somme de 20 000 euros augmentée des intérêts de droit à compter du paiement et des frais qu'ils ont dû assumer, ainsi que la condamnation de l'appelant à payer à ces intimés la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens d'appel.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions sus-visées et au jugement déféré.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 mars 2014. MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes de M. Jean X... fondées sur l'article 555 du code civil Le tribunal a relevé que les époux X... affirmaient que le hangar litigieux avait été édifié par eux et leur fils, ensemble, sur leur terrain acquis en 1989.

Il a considéré, d'une part, qu'aucune pièce probante ne venait démentir cette allégation et, d'autre part, que les travaux réalisés par M. Jean X... à compter de l'année 1991, puis par lui et sa concubine, Mme Z..., à compter de l'année 2003, avaient consisté en des aménagements du bâtiment existant, au sein duquel une fromagerie et une ferme auberge avaient été créées.
Il a rejeté les demandes de M. Jean X..., et de Mme Z..., fondées sur les dispositions de l'article 555 du code civil, qui ne s'appliquent pas aux cas ou les travaux sont des réparations ou des améliorations de bâtiments existants.
En cause d'appel, M. Jean X... reprend ses moyens et arguments de première instance, estimant que le tribunal n'a pas examiné les nombreuses pièces qu'il avait versées aux débats, lesquelles établissent qu'il est bien l'auteur des constructions.
L'appelant expose que ses parents ont mis à sa disposition un terrain situé à Rospigliani, que ce terrain était nu et qu'avec leur autorisation, il y a construit un hangar agricole, puis une chèvrerie, une fromagerie, un appartement à l'étage ainsi qu'une ferme auberge.
Il affirme que les travaux qu'il a réalisés consistent en l'édification des différents de corps de bâtiments et non en de simples aménagements et, au soutien de cette allégation, produit diverses pièces (attestation du 12 juillet 2006 de Me E..., notaire, permis de construire délivré le 09 avril 1990, plans et au titre des éléments financiers, dossiers de gestion depuis 1990 de son exploitation agricole, attestation de l'ODARC indiquant les subventions perçues, deux prêts de 170 000 francs par le crédit agricole suivant actes notariés, respectivement, en date du 27 septembre 1991 et du 26 novembre 1998).
Il se prévaut également de l'aveu judiciaire des époux X..., dans leurs conclusions prises lors d'une audience de référé du 31 janvier 2007, aux termes desquelles ils ont déclaré que les bâtiments avaient été construits par lui.
Il fait état d'un contexte familial de violence à son égard durant son enfance et au-delà et de jalousie de sa réussite.
Il précise qu'il était prévu que ses parents lui feraient donation du terrain sur lequel il a édifié lesdites constructions et que ceux-ci ont vendu le bien à sa soeur pour le prix dérisoire de 20 000 francs.
L'appelant souligne que sa mère, employée par l'ADMR, était de ce fait immatriculée auprès de la MSA, puis qu'elle s'est trouvée en invalidité mais n'a jamais exercé la profession d'agricultrice.
De leur côté, les époux X... et Mme A... contestent l'affirmation de M. Jean X... selon laquelle il aurait, sur le terrain nu de ses parents, réalisé la construction du hangar.
Ils exposent que M. et Mme X... ont acquis une parcelle de terre située à Rospigliani cadastrée section B no 568 lieudit " Croce ", qu'ils ont commandé et payé le terrassement préalablement nécessaire à l'édification du hangar.
Ils affirment que les époux X... ont construit un hangar agricole de 344 m ² en 1990/ 1992, avoir payé les travaux de terrassement à la SARL Corse Terrassement et que cet ouvrage a été réalisé des propres mains de M. Etienne X... aidé par un ami de la famille, M. B..., qui était hébergé chez eux.
Ils font valoir que l'appelant ne fournit aucune preuve de la prise en charge de travaux initiaux dans la période 90/ 91, que ce dernier n'a perçu des subventions qu'à partir de l'année 1991 et a bénéficié d'un prêt bancaire, de primes qu'il va employer à l'achat de bêtes, de matériel, à l'installation de son exploitation et aux aménagements à l'intérieur du hangar de 344 m ².
Ils ajoutent que M. Jean X... a toujours été aidé par ses parents compte tenu de ses temps d'inactivité prolongée, qu'il a bénéficié du transfert gratuit de l'exploitation agricole de sa mère, a continué l'activité d'élevage en bénéficiant des moyens de production de ses parents et que ces derniers payaient très fréquemment des factures dues par leur fils dans le cadre de son exploitation d'une ferme auberge, ouverte en 2004.
Ils font valoir qu'en 1998, M. Jean X... a contracté un prêt auprès du crédit agricole pour aménager dans le bâtiment initial (le hangar), un logement (appartement) et agrandir son exploitation, ces travaux ayant été réalisés par l'entreprise de M. C....
Les intimés soulignent que l'appelant n'a pas été capable de gérer l'exploitation, qu'il a tout abandonné, a cessé d'être agriculteur en 2008 et n'a pas remboursé le prêt du crédit agricole.
Ils précisent que ce prêt était garanti par un cautionnement hypothécaire de leur propriété et que, pour éviter la saisie immobilière de leur bien, après avoir reçu un commandement de payer, ils l'ont vendu à leur fille Marie-Jeanne et que quand la famille de l'appelant s'est disloquée, Mme Z... est partie, en laissant tout derrière elle, sa fille y-compris dont ils ont dû s'occuper.
Mme Z... fait observer, en ce qui concerne les constructions, que M. Jean X... avait fait édifier un bâtiment agricole d'une superficie de 344 m ², en partie grâce à la dotation jeune agriculteur dont il a bénéficie en 1989 et 1990, l'autre partie ayant été financée notamment par un prêt de 170 000 francs consenti par le crédit agricole, suivant un acte notarié du 27 septembre 1991 au remboursement duquel les époux X... se sont portés cautions hypothécaires.
Elle affirme que durant son concubinage avec M. Jean X..., de 2000 à 2006, ils ont construit un appartement de 4 pièces en 2000 et une ferme-auberge en 2004.
L'analyse des pièces versées aux débats et notamment de celles ci-dessus visées, produites par M. Jean X..., permet de démontrer la véracité des allégations de l'appelant.
En effet, s'il est constaté que les époux X... ont acquis la parcelle concernée nue et ont fait des travaux de terrassement, aucune des pièces produites par ces derniers n'établit toutefois qu'ils aient construit les bâtiments litigieux.
Le permis de construire déposé, au nom de M. Jean X..., en 1990, et accordé pour la construction d'un bâtiment agricole (fromagerie, chèvrerie, fourrage) démontre au contraire, avec les plans de situation, d'ensemble et de masse joints audit permis qu'il n'existait pas de bâtiments sur le terrain. Les documents permettent de constater le financement des travaux de cette construction, notamment au moyen d'un prêt de 170 000 francs consenti par le crédit agricole, ainsi qu'il résulte de l'attestation délivrée le 12 juillet 2006 par Me Robert E..., notaire, comme l'avis de réalisation émanant de la caisse locale du crédit agricole de Corte, précisent que l'objet dudit prêt de 170 000 francs consistait en la réalisation de " Bâtiments professionnels ".
Par ailleurs, le permis de construire déposé le 18 août 1997 par M. Jean X... et délivré sous le no PC26397G1027 le 03 novembre 1997, porte sur l'extension d'un bâtiment agricole pour une surface de 250 m ². Ce permis ainsi que les plans qui y sont joints, prouvent la réalisation d'une construction nouvelle contiguë au bâtiment existant et non celle de seuls travaux d'aménagement. L'acte notarié de prêt du 26 novembre 1998, permet de constater que le financement de cette construction a été opéré au moyen de deniers provenant d'un prêt de 205 000 francs consenti par le crédit agricole à M. Jean X..., que les époux X... ont garanti par le cautionnement hypothécaire de leur propriété située à Rospigliani, ledit acte précisant au paragraphe OBJET : " la construction d'une bergerie sur la commune de Rospigliani section B no 568 lieudit Croce ". Au vu de ces éléments, il convient de constater que M. Jean X... a édifié les constructions ayant fait l'objet des deux permis de construire sus-visés, qu'il est un constructeur de bonne foi, ses parents étant parfaitement informés de la réalisation de ces ouvrages, de sorte qu'il peut donc valablement se prévaloir des dispositions de l'article 555 du code civil.

En conséquence, la cour infirmera le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. Jean X... de ses demandes fondées sur le fondement de ce texte et, avant dire droit, conformément aux dispositions du ce dernier, invitera Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., propriétaire actuelle du bien immobilier concernée, à manifester son choix entre la conservation des constructions nouvelles réalisées par M. Jean X..., et la suppression de celles-ci.
A ce stade, la demande d'expertise judiciaire formée par M. Jean X... aux fins d'évaluation de l'indemnité compensatrice qui lui serait due, est prématurée et sera donc réservée.
La demande de dommages et intérêts de l'appelant à l'encontre de Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., n'est ni fondée ni justifiée. Il en sera, dès lors, débouté.
Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes formulées par M. Jean X..., à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 1371 du code civil, et à titre infiniment subsidiaire par application des articles 1871 et suivants du même code.
Sur les demandes de Mme Z...
Sur les demandes fondées sur l'article 555 du code civil à l'encontre de Mme A...
Mme Z... reprend ses moyens et arguments de première instance. Cependant, contrairement aux pièces produites par l'appelant, les documents versés aux débats par cette dernière, qui a vécu en concubinage avec M. Jean X..., à partir de 2000 et jusqu'en 2006, permettent de constater qu'elle a financé des travaux d'aménagement, mais n'établissent pas qu'elle ait participé au financement des nouveaux bâtiments sus-visés, édifiés sur la parcelle de terre située à Rospigliani, cadastrée section B no 568 lieudit " Croce ".
Par ailleurs, l'article 555 qui ne concerne que des constructions nouvelles n'a vocation à s'appliquer que dans les rapports du propriétaire du sol, qui en l'espèce est Mme A..., et l'auteur des ouvrages nouveaux, de sorte que Mme Z... ne peut valablement fonder ses demandes à l'encontre des époux X..., sur les dispositions de ce texte.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme Z... de ses demandes fondées sur l'article 555 du code civil, qui comme l'ont retenu, à juste titre, les premiers juges, ne s'applique pas au cas où les travaux sont des réparations ou des améliorations de bâtiments existants.
Sur les demandes fondées sur l'article 1371 du code civil
Le tribunal a relevé que selon Mme Z... les sommes qu'elle avait investies dans l'exploitation agricole provenaient des primes dont elle avait bénéficié en qualité de jeune agricultrice et a estimé que telle était la destination naturelle de ces primes qui n'ont pas vocation à être épargnées mais bien à participer au fonctionnement de l'exploitation.
Il a aussi retenu que cette exploitation avait périclité alors qu'elle était gérée par M. Jean X... et Mme Z..., alors en concubinage, et a considéré qu'en tout état de cause il n'était pas établi que les époux X... s'étaient enrichis.
En ce qui concerne le véhicule " Berlingo " de marque Citroën acheté au nom de M. Etienne X... et payé par Mme Z..., le tribunal a constaté que les époux X... avaient prouvé lui avoir restitué le montant total du prix de revente, soit 4 500 euros, celle-ci ayant encaissé personnellement le chèque établi par le nouvel acquéreur.
A défaut d'élément nouveau, la cour estime que les premiers juges ont fait une juste appréciation des faits de la cause et du droit des parties et ont pour de justes motifs qu'elle approuve, considéré que les conditions d'application de l'action de in rem verso n'étaient pas réunies en l'espèce.
En effet, au vu des éléments et pièces versées aux débats, les dépenses faites par Mme Z... tant pour l'aménagement de l'appartement qu'elle occupait avec M. Jean X... et leur enfant commun, que pour l'entreprise qu'ils exploitaient et qui a périclité, ont été faites dans leur intérêt personnel, dans le cadre de leur habitation principale et pour leur activité professionnelle, sans qu'il soit établi que les consorts X... en aient tiré un quelconque enrichissement, et qu'il en ait de même pour M. Jean X....
Par ailleurs, s'agissant du véhicule acheté au prix de 14 437 euros, le paiement par Mme Z... sans explication, corrobore les allégations des époux X..., selon lesquelles, seule cette dernière utilisait cette voiture que M. Etienne X... avait accepté de commander à son nom pour des questions d'immatriculation et d'assurance et lui permettre notamment de bénéficier d'un bonus de 50 %.
Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme Z... de ses demandes fondées sur l'article 1371 du code civil.
Sur la demande tendant à l'infirmation de sa condamnation au paiement de dommages et intérêts au bénéfice des époux X...
Le tribunal a relevé que les époux X... soutenaient que Mme Z... leur avait causé un préjudice moral en les mettant en cause dans l'instance et a considéré que ce préjudice était incontestable, estimant que cette dernière en conflit avec son ex-concubin, les avait attraits devant cette juridiction de façon abusive et était manifestement animée à leur endroit d'une intention malveillante.
Mme Z... conteste cette décision, qu'elle trouve surprenante dans la mesure où cette procédure a été diligentée contre M. Jean X... et ses parents en leur qualité de propriétaire des biens immobiliers et du véhicule réglé pour leur compte.
Elle fait valoir qu'il ne s'agit pas d'une procédure abusive au sens où l'entend la jurisprudence et ce d'autant que les consorts X... n'ont pas formulé de demande à ce titre.
La cour constate, au vu des écritures des intimés X..., que leur demande de dommages et intérêts formulée tant en première instance qu'en cause d'appel, n'est pas fondée sur le caractère abusif de l'action intentée par Mme Z... à leur encontre.
Par ailleurs, les consorts X... ne justifie d'aucun préjudice pouvant justifier leur demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil.
En conséquence, la cour infirmera le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Catherine Z... à payer à M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., ensemble la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et déboutera ces derniers de leur demande à ce titre.
Sur les demandes des époux X... et de Mme A...
Les consorts X..., intimés, sollicitent à nouveau le remboursement par M. Jean X..., de la somme de 20 000 euros correspondant à la dette de ce dernier envers le crédit agricole.
Le tribunal a relevé que les époux X... avaient également bénéficié du prêt litigieux dont la souscription dans une opération complexe entamée en 1991 et terminée en 2008 et les a déboutés de leur demande à ce titre.
Les intimés soutiennent devant la cour qu'ils ont payé la date de leur fils et non la leur, que ce paiement est générateur d'une obligation nouvelle, car ayant payé la dette d'autrui sans y être tenu, ils ont un recours contre leur débiteur en application de l'article 1236 du code civil.
De son côté, M. Jean X... fait valoir que la banque a été réglée de par la volonté des époux X... et non de la sienne, et qu'il appartenait à ces derniers de vendre le bien à un prix plus élevé.
Il affirme, d'une part, que la vente de la propriété litigieuse par ses parents à sa soeur, pour un prix de 20 000 euros constitue une donation déguisée au profit de leur fille et, d'autre part, qu'il ne doit aucune somme aux époux X....
La cour constate, au vu des pièces produites par les intimés, que la Caisse de Crédit Agricole a fait commandement aux époux X... d'avoir à payer la somme en principal de 17. 969, 35 euros sous réserve des intérêts et frais divers ou d'avoir à délaisser leur propriété située à Rospigliani lieudit Croce section B no 568, que le crédit agricole, d'une part, ne s'est pas opposé à la vente amiable proposée par les époux X..., en réponse à la dénonciation des commandement et sommation qui leur ont été adressés, sous réserve d'un règlement net à son profit à hauteur de 20. 000 euros, soit la totalité du prix de la vente envisagée et, d'autre part, a précisé que les formalités de publication au bureau des hypothèques de Bastia de la dénonciation valant commandement étaient en cours.
Par ailleurs, il est justifié qu'un chèque de 20 000 euros a été adressé au crédit agricole, le 16 mars 2010, par le notaire rédacteur de l'acte de vente du 19 février 2010, pour le compte des vendeurs, les époux X..., pris en leur qualité de caution de M. Jean X....
Dans ces circonstances et au regard des dispositions de l'article 1236 du code civil, il convient de condamner M. Jean X..., à qui un commandement de payer bien été signifié le 08 octobre 2009, à rembourser à ses parents, la somme de 20 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2012, date des conclusions de première instance aux termes desquelles ces derniers ont réclamé cette somme. Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
En conséquence, la cour infirmera le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Z... à payer à M. Etienne X..., Mme Jacqueline
Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., ensemble la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et déboutera les parties de leurs demandes respectives à ce titre tant pour la procédure de première instance que pour celle d'appel.
Les dépens seront réservés, en raison du renvoi de l'affaire à la mise en état pour les motifs ci-dessus.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :- débouté M. Jean X... de ses demandes fondées sur l'article 555 du code civil,- condamné Mme Catherine Z... à payer à M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., ensemble la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,- débouté M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A... de leur demande de remboursement de la somme de 20 000 euros par M. Jean X...,- condamné Mme Z... à payer à M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., ensemble la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, Le confirme pour le surplus, Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Constate que M. Jean X... a construit les bâtiments édifiés sur le terrain situé sur la commune de Rospigliani (Haute Corse) cadastré section B no 568 lieudit " Croce " pour une superficie de 46 ares 30 centiares, En conséquence, Dit que M. Jean X... peut se prévaloir des dispositions de l'article 555 du code civil, Avant dire droit, Renvoie l'affaire à la mise en état du 24 septembre 2014,

Invite Mme Marie-Jeanne X... épouse A..., propriétaire de l'immeuble et bénéficiaire de l'accession, à manifester son choix, conformément aux dispositions de l'article 555 du code civil, entre la suppression ou la conservation des constructions nouvelles réalisées par M. Jean X..., et, dans le cas où elle opterait pour la conservation de ces constructions, à exprimer le choix qui lui est réservé par les alinéas 3 et 4 du texte précité, sur le mode de calcul de l'indemnisation qui serait à sa charge, Déboute M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A... de leur demande de dommages et intérêts à l'encontre de Mme Catherine Z..., Déboute M. Etienne X..., Mme Jacqueline Y... épouse X... et Mme Marie-Jeanne X... épouse A... de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de Mme Catherine Z..., Condamne M. Jean X... à payer à M. Etienne X... et Mme Jacqueline Y... épouse X... la somme de VINGT MILLE EUROS (20 000 euros) augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2012, Y ajoutant, Déboute les parties de tous autres chefs de demande,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, Réserve les dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Ch. civile a
Numéro d'arrêt : 12/00579
Date de la décision : 16/07/2014
Sens de l'arrêt : Autre décision avant dire droit
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2014-07-16;12.00579 ?
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