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04/06/2014 | FRANCE | N°12/00540

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 04 juin 2014, 12/00540


Ch. civile B
ARRET No du 04 JUIN 2014 R. G : 12/ 00540 R-PL

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 21 Mai 2012, enregistrée sous le no 11/ 00257
SCI LES RESIDENCES DE SANTA LINA C/ X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE ARRET DU QUATRE JUIN DEUX MILLE QUATORZE

APPELANTE : SCI LES RESIDENCES DE SANTA LINA Prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant et domicilié ès qualité au dit siège Hôtel Sun Beach Route des Sanguinaires 20000 AJAC

CIO assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Jean Lou...

Ch. civile B
ARRET No du 04 JUIN 2014 R. G : 12/ 00540 R-PL

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 21 Mai 2012, enregistrée sous le no 11/ 00257
SCI LES RESIDENCES DE SANTA LINA C/ X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE ARRET DU QUATRE JUIN DEUX MILLE QUATORZE

APPELANTE : SCI LES RESIDENCES DE SANTA LINA Prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant et domicilié ès qualité au dit siège Hôtel Sun Beach Route des Sanguinaires 20000 AJACCIO assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Jean Louis SEATELLI de l'Association SEATELLI-GASQUET, avocat au barreau de BASTIA, plaidant par Me Francesca SEATELLI, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :
M. Eric X... né le 01 Janvier 1965 à Ajaccio (20000) ...20000 AJACCIO

assisté de Me François FABIANI, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Jean Dominique LOVICHI, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Stéphanie TISSOT, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 avril 2014, devant la Cour composée de : M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre Mme Marie-Paule ALZEARI, Conseiller Mme Françoise LUCIANI, Conseiller qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Martine COMBET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 04 juin 2014
ARRET :
Contradictoire, Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Mme Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 21 mai 2012 qui, statuant au contradictoire des parties :- dit et juge M. Eric X... recevable en ses demandes,- condamne la SCI les Résidences de Santa Lina (plus loin : la société) à rembourser à M. X... le solde créditeur de son compte courant associé soit la somme principale de 421 850 euros majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation, et ce en application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil,- condamne la société à payer à M. X... la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,- condamne la société aux dépens.

Vu l'appel formé par la société contre cette décision suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 3 juillet 2012.
Vu les dernières conclusions déposées par l'appelante le 28 mars 2013, demandant à la cour de :
- à titre liminaire, prononcer la nullité de l'acte de cession de parts sociales en date du 23 décembre 1999 et en conséquence la nullité de l'acte de cession de parts sociales et de création de compte courant d'associé du 24 décembre 2003,- à titre principal, constater que M. X... ne rapporte pas la preuve du paiement des parts litigieuses de la société et le caractère frauduleux de l'acte de cession de parts du 23 décembre 1999,

- à titre subsidiaire, constater l'abandon de compte courant consenti par M. X... au profit de la société au sein de l'acte du 24 décembre 2003,- dans tous les cas, débouter M. X... de toutes ses demandes et le condamner au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.

En ses dernières conclusions déposées le 11 juin 2013, M. X... demande à la cour de confirmer le jugement déféré et, y ajoutant, de condamner l'appelante au paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 8 janvier 2014, fixant l'audience de plaidoiries au 3 avril 2014.
SUR QUOI
Le litige a pour objet le paiement du prix des parts sociales cédées par M. X....
La société a été constituée par les consorts Y... le 27 avril 1983.
Par acte authentique du 23 décembre 1999, M. X... a acquis de M. Pascal Y..., son beau-père, 42 parts sociales pour le prix de 4 200 francs (640, 29 euros).
Par un acte authentique du 24 décembre 2003 portant sur des cessions de parts sociales plus larges, M. X... a rétrocédé 41 parts pour le prix de 421 890 euros, le même acte prévoyant l'apport par les consorts Y..., autres cédants, et M. X... du produit de la vente de l'ensemble de leurs parts sociales, représentant la somme de 504 209, 76 euros en compte courant d'associé.
M. X... a introduit la présente action afin d'obtenir la condamnation de la société à lui payer la somme de 421 850 euros représentant le produit de la cession de ses parts sociales et il a été entièrement fait droit à cette demande par le jugement déféré.
Pour obtenir l'infirmation de cette décision, l'appelante argue de la nullité de l'acte du 23 décembre 1999 par lequel l'intimé a acquis les parts sociales litigieuses. Elle fait valoir à cet égard le caractère dérisoire du
prix sans aucune mesure avec la valeur réelle des parts cédées. Elle soulève également l'illicéité de la cause en soutenant qu'en vendant ses parts à son gendre, M. Pascal Y... a voulu dissimuler une partie de son actif au moment où il faisait l'objet d'une procédure collective. Selon l'appelante, la nullité absolue de l'acte de cession du 23 décembre 1999 entraîne celle de l'acte de rétrocession du 24 décembre 2003 dont l'intimé ne peut dès lors réclamer l'exécution.
Dans un deuxième moyen, l'appelante prétend que le prix stipulé dans l'acte de cession n'a pas été réglé par M. X... qui, en tout cas, ne justifie pas du paiement alors que la charge de la preuve lui incombe. Selon l'appelante, l'absence de paiement apparente l'acte à une donation déguisée qui renforce son caractère frauduleux.
Dans un troisième moyen, subsidiaire, l'appelante soutient que la convention de cession du 24 décembre 2003 contient une clause implicite d'abandon de compte courant empêchant la réclamation des sommes apportées. Elle se prévaut en ce sens d'abord d'une clause de l'acte dont il résulterait que l'apport en compte courant a été consenti en vue d'apurer les dettes de la société, ensuite de l'absence d'un compte individualisé au nom de M. X... dans les bilans de la société.
La cour constate que la disposition du jugement déféré déclarant M. X... recevable en sa demande n'est pas querellée en appel, la société n'ayant pas repris devant la cour la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir du demandeur qu'elle avait soulevée en première instance. En l'absence de moyens d'ordre public, la cour confirmera le jugement de ce chef.
Sur le moyen, nouveau, tiré de la nullité de l'acte de cession de parts sociales du 23 décembre 1999 pour vileté du prix, l'intimé réplique à bon droit que dans la mesure où elle relève d'un intérêt privé, cette nullité pour défaut de cause est relative et ne peut dès lors être invoquée que par le vendeur. La société, qui n'était pas partie à l'acte de cession qu'elle incrimine, est en conséquence sans droit pour soulever cette exception. Par surcroît, l'intimé fait valoir à bon escient que la remise avérée des titres cédés équivaut à l'exécution du contrat et que, par suite, l'exception de nullité ne peut plus être soulevée. Enfin, les arguments invoqués par l'appelante pour conclure au caractère dérisoire du prix, à savoir la vente par la société, quatre ans avant la cession, de droits à bâtir pour un montant de 823 225 euros et la plus-value réalisée par M. X... quatre ans après, ne sont pas à eux seuls suffisamment significatifs ; en l'absence d'éléments plus amples, l'appelante échoue à rapporter la preuve, dont la charge lui incombe, d'une discordance réelle à la date de la cession entre la valeur des 42 parts cédés et leur prix de vente fixé à 4 200 francs (640, 29 euros).
Sur le moyen, nouveau, tiré de la nullité du même acte de cession pour cause illicite, l'intimé relève à juste titre que la fraude que l'appelante impute au vendeur ne relève que de ses seules affirmations alors qu'elle supporte le fardeau de la preuve. En effet, il n'existe dans les productions de l'appelante aucun élément de nature à constituer ne serait-ce que le moindre commencement de preuve de son allégation selon laquelle à travers l'acte de cession litigieux le vendeur n'aurait voulu que soustraire des actifs à la procédure collective dont il faisait alors l'objet. A l'inverse la cour relève, à l'instar de l'intimé, que cette procédure était en cours depuis plus de quatre ans avant la conclusion de l'acte incriminé et que rien ne permet de caractériser l'intérêt qu'aurait eu le vendeur de dissimuler au représentant des créanciers une cession de parts sociales pourtant conclue à vil prix si l'on en croit l'appelante.
Sur le moyen, nouveau, tirée de l'absence de paiement du prix, il convient de relever, à l'instar de l'intimé, que l'acte authentique de cession contient une clause intitulée " paiement du prix " ainsi libellée : " le cessionnaire a payé ce prix comptant dès avant ce jour et hors la comptabilité de l'office notarial ainsi que le cédant le reconnaît et lui en consent quittance sans réserve. DONT QUITTANCE ". L'intimé fait valoir à bon droit que la mention, dans un acte notarié, d'un paiement du prix intervenu hors la vue ou hors la comptabilité du notaire mais dont le vendeur a donné quittance dans l'acte, fait foi jusqu'à preuve contraire et que, dès lors, il incombe au tiers à l'acte qui la conteste de démontrer par tous moyens l'absence de paiement effectif. Or il n'est versé aux débats aucun élément de nature à contredire les énonciations de l'acte litigieux en sorte que l'appelante n'établit pas que l'intimé a bénéficié d'une donation déguisée. La cour relève que le prix, compte tenu de son montant, a pu faire l'objet d'un règlement en espèces de sorte qu'aucune signification ne peut être attribuée aux constatations d'ordre comptable dont l'appelante se prévaut et que l'affirmation de Mme Nicole Y..., selon laquelle l'intimé n'aurait jamais procédé au paiement des parts, est totalement gratuite.
De ce qui précède, il ressort que l'appelante n'est fondée dans aucun de ses moyens invoqués au soutien de sa demande reconventionnelle en nullité de l'acte de cession de parts sociales du 23 décembre 1999 ; il convient dès lors de rejeter cette demande ainsi que celle tendant à l'annulation de l'acte de cession de parts sociales du 24 décembre 2003 qui ne serait que la conséquence de l'anéantissement de la cession précédente.
Sur le moyen tiré de l'abandon de compte courant consenti par M. X... au profit de la société dans l'acte du 24 décembre 2003, le premier juge a justement relevé, par des motifs pertinents, que les termes de cet acte ne démontrent pas, comme le soutient l'appelante, une affectation des sommes perçues au règlement des dettes de la société mais seulement la mise à disposition de ces sommes par les associés sur leur compte-courant. En effet, il résulte des stipulations de l'acte authentique que M. X... a apporté le prix retiré de la cession de ses parts, soit
la somme de 421 500 euros, au compte-courant inscrit dans les livres de la société et le fait que l'acte mentionne " à l'effet du règlement d'une partie du passif de la SCI Les Résidences de Santa Lina (...) les consorts Y... et X... apportent au compte courant celle de 504 209, 79 euros " ne caractérise pas la volonté des cédants de renoncer à leur compte-courant. En effet, il résulte clairement de cette clause non pas que les cédants ont accepté de prendre à leur charge les dettes de la société mais qu'ils se sont engagés à lui avancer cette somme contre remboursement. Comme l'a relevé à bon droit le premier juge, l'apport en compte courant d'associé constitue une avance consentie par un associé à la société, avance qui est remboursable à tout moment en l'absence de convention particulière ou statutaire.
L'intimé fait justement valoir que le fait que son compte-courant n'ait pas été individualisé dans les livres de la société ne saurait être assimilé à une renonciation. En effet, il est constant que le produit de toutes les cessions de parts réalisées dans l'acte du 24 décembre 2003, y compris le prix de 421 890 euros concernant M. X..., a été porté au crédit d'un compte-courant ouvert sous la dénomination " compte-courant famille Y... ". Cette dénomination, purement comptable ne lie pas la juridiction quant aux bénéficiaires réels des sommes portées audit compte, comme l'a justement indiqué le tribunal. De plus, la dénomination retenue doit être appréciée à l'aune des liens familiaux unissant les cédants, M. X... étant le beau-frère de M. Jean-Dominique Y... et de son épouse Nicole qui sont les deux autres bénéficiaires du compte courant.
L'existence d'un compte courant associé au bénéfice de l'intimé dans les livres de la société est en conséquence suffisamment établie par les constatations qui précèdent ainsi que par celles effectuées sur ce point par le premier juge. Dès lors, en l'absence de toutes dispositions fixant les conditions de remboursement de ce compte, M. X... était fondé à en réclamer le montant ; la disposition du jugement déféré faisant droit à sa demande en condamnant la société à lui payer la somme de 421 850 euros majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation sera en conséquence confirmée.
Les dispositions portant attribution à M. X... de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et relatives aux dépens de première instance seront également confirmées.
La société, qui succombe dans son recours, supportera les dépens de l'appel. Il est en outre équitable de la condamner, par une nouvelles application dans cette instance des dispositions légales précitées, au paiement d'une indemnité de 3 000 euros.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Déboute la SCI les Résidences de Santa Lina de sa demande reconventionnelle, La condamne à payer à M. Eric X... la somme de TROIS MILLE EUROS (3 000 euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, La condamne aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 12/00540
Date de la décision : 04/06/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2014-06-04;12.00540 ?
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