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09/04/2014 | FRANCE | N°12/00786

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 09 avril 2014, 12/00786


Ch. civile A

ARRET No
du 09 AVRIL 2014
R. G : 12/ 00786 C-MB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'Ajaccio, décision attaquée en date du 16 Juillet 2012, enregistrée sous le no 06/ 00085

X...
C/
X...X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
NEUF AVRIL DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTE :
Mme Mauricette X...née le 15 Juin 1941 à TARASCON (13150) ......06200 NICE

assistée de Me Jacques VACCAREZZA de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, av

ocat au barreau de BASTIA, Me Christophe DUPONT, avocat au barreau de NICE

INTIMES :

M. René X...né le 01 Ju...

Ch. civile A

ARRET No
du 09 AVRIL 2014
R. G : 12/ 00786 C-MB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'Ajaccio, décision attaquée en date du 16 Juillet 2012, enregistrée sous le no 06/ 00085

X...
C/
X...X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
NEUF AVRIL DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTE :
Mme Mauricette X...née le 15 Juin 1941 à TARASCON (13150) ......06200 NICE

assistée de Me Jacques VACCAREZZA de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA, Me Christophe DUPONT, avocat au barreau de NICE

INTIMES :

M. René X...né le 01 Juin 1938 à VILLEFRANCHE SUR MER (06230) ...06400 CANNES

ayant pour avocat Me Joseph SAVELLI, avocat au barreau d'AJACCIO

Mme Anna-Marinette X...née le 01 Juin 1931 à VILLEFRANCHE SUR MER (06230) ...13007 MARSEILLE 07

ayant pour avocat Jean-Pierre BATTAGLINI de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 février 2014, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller

Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 09 avril 2014.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. Jean Paul X...et Mme Emilie Z...se sont mariés le 26 octobre 1929 à Nice, sous l'ancien régime de la communauté légale de biens " meubles et acquêts ".

Suivant acte reçu le 05 novembre 2001 par Me A..., notaire associé, les époux X...ont fait donation en avancement d'hoirie à leur fille, Mme Anna-Marinette X...de la pleine propriété des biens et droits immobiliers formant le lot no 7 (un appartement) d'un immeuble en copropriété situé à Nice, ....
Un testament olographe du 1er octobre 2004, au nom de M. Jean Paul X..., stipulant divers legs au profit de ses trois enfants, a été déposé en l'étude de Me C..., notaire associé, du vivant du testateur.
M. et Mme X...sont décédés, respectivement, le 21 juin 2005 et le 1er décembre 2004, en laissant pour recueillir leurs successions, leurs trois enfants, Réné, Anne-Marie (également dénommée Anna-Marinette) et Mauricette X....
Suivant acte reçu le 15 janvier 2005, par Me C..., notaire associé, M. Jean Paul X...a accepté le bénéfice de la donation entre époux, consentie par son épouse par acte notarié du 02 septembre 1996, et a opté pour le quart en pleine propriété et les trois quarts en usufruit.
Contestant la validité du testament olographe du 1er octobre 2004 susvisé, M. Réné X...a, par actes d'huissier des 23 et 25 décembre 2005, assigné Mmes Anne Marie et Mauricette X...devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio aux fins de désignation d'un expert en vue d'établir si ce testament a été écrit en entier, daté et signé de la main de M. Jean Paul X....

Par jugement du 20 décembre 2007, le tribunal a ordonné la comparution personnelle des parties pour produire divers documents dans le but d'une vérification d'écriture ou d'une expertise et a réservé les autres demandes.

Par jugement du 11 février 2008, le tribunal a ordonné une expertise graphologique du testament litigieux, confiée à Mme B...et a réservé les autres demandes.

L'expert, Mme B..., a déposé son rapport le 1er octobre 2008 et a conclu que le testament olographe critiqué a été rédigé et signé par l'auteur des documents qui lui ont été soumis pour comparaison, soit M. Jean Paul X....

Par jugement contradictoire du 22 mars 2010, le tribunal a, notamment :

- rejeté la demande de nullité du testament olographe établi par M. Jean Paul X..., le 1er octobre 2004, sollicitée par M. René X...,
- rejeté la demande relative à un recel successoral de Mme Mauricette X..., portant sur une fraude dans l'établissement du testament, sur la dissimulation et l'utilisation frauduleuse du compte joint CCP et la vente frauduleuse du véhicule Renault 5, formulée par M. René X...,
- rejeté les demandes de dommages et intérêts de M. René X...et de Mme Mauricette X...,
- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'universalité des biens composant les successions des époux X...et la liquidation de leur régime matrimonial,
- désigné pour y procéder, le président de la chambre départementale des notaires de Corse du Sud avec faculté de délégation,
- commis un expert, Mme Jocelyne E..., aux fins d'évaluation des biens immobiliers, de proposition d'une évaluation du montant mensuel d'une indemnité d'occupation des biens de Solenzara et d'avis sur les impenses, si elles sont invoquées par les parties.
Me Cécile F..., notaire à Porto Vecchio, a été déléguée par le président de la chambre départementale des notaires de Corse du Sud.

L'expert, Mme E..., a déposé son rapport le 25 mai 2011.

Par jugement contradictoire du 16 juillet 2012, le tribunal a :

- rappelé que le jugement du 22 mars 2010 a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'universalité des biens composants les successions des époux X...et la liquidation de leur régime matrimonial,
- rappelé que Me Cécile F..., notaire à Porto Vecchio, a été déléguée par le président de la chambre départementale des notaires de Corse du Sud,
- rappelé que la procédure de partage judiciaire relève des dispositions antérieures à la loi du 23 juin 2006 et son décret de procédure et relève notamment des dispositions des articles 969 et suivants de l'ancien code de procédure civile,
- renvoyé les parties devant Me Cécile F...pour qu'il soit procédé aux opérations de comptes, liquidation et partage desdites successions en tenant compte des évaluations des biens immobiliers faites par l'expert judiciaire, Mme E..., dans son rapport du 23 mai 2011, dont copie lui sera remise par les parties, au plus tard lors de la réunion d'ouverture des opérations,
- dit que le testament de M. Jean Paul X...du 1er octobre 2004 doit recevoir application s'agissant des legs qui y sont stipulés,
- rejeté la demande de licitation des biens immobiliers,
- condamné Mme Anna Marinette X...à rembourser à M. René X...la somme de 3. 336 euros et Mme Mauricette X...la somme de 4. 337, 86 euros, et ce en exécution du legs dont M. René X...est bénéficiaire,
- rejeté la demande de majoration à hauteur de 38. 000 euros des biens de Solenzara,
- fixé l'indemnité d'occupation à la charge de Mme Mauricette X...à la somme de 63. 244 euros, due du 21 juin 2005 avec cours arrêté au 30 avril 2011,
- fixé à la somme de 5. 253, 42 euros, le montant des impenses dues par Mme Mauricette X...pour les biens de Solenzara,
- rejeté la demande de fixation de la soulte et dit que Me F...en déterminera le montant à l'issue de son état liquidatif,
- rejeté la demande formée par Mme Anna Marinette X...au titre des impenses,
- rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mme Mauricette X...,
- rejeté la demande d'exécution provisoire,
- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de partage, en ce compris les frais d'expertise.

Par déclaration reçue le 12 octobre 2012, Mme Mauricette X...a interjeté appel de cette décision, à l'encontre de M. René X...et de Mme Anna-Marinette X....

Par ses dernières conclusions reçues le 21 octobre 2013, l'appelante, au visa des articles 815 et suivants, 1351, 1356, 1382, 1304 et 2262 du code civil, des articles 500, 564 et suivants du code de procédure civile ainsi que du jugement définitif du 22 mars 2010, sollicite la réformation partielle du jugement querellé.

Elle demande à la cour de :
à titre principal,
- fixer la date de jouissance divise au décès de M. Jean Paul X...,
par voie de conséquence,
- dire et juger qu'elle n'est redevable d'aucune indemnité d'occupation,
à titre subsidiaire,
- fixer l'indemnité d'occupation due par elle au 30 avril 2011, à la somme de 7. 905, 50 euros,
en tout état de cause,
sur la demande de nullité du testament :
- à titre principal, déclarer prescrite l'action en nullité du testament formulée par M. René X..., en cause d'appel,
- à titre subsidiaire, déclarer irrecevable la demande de nullité du testament formulée par M. René X...,
pour le surplus,
- débouter M. René X...de toutes ses autres demandes, fins et conclusions,
- condamner les intimés au paiement d'une somme de 15. 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- confirmer le jugement querellé en toutes ses autres dispositions,
- condamner les intimés au paiement d'une somme de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en ceux y compris les frais d'expertise, distraits au profit de la SCP Tomasi-Santini-Vaccarezza-Bronzini de Caraffa, aux offres de droit.

Par ses dernières conclusions reçues le 03 juin 2013, Mme Anna-Marinette X..., sur le fondement de l'article 815 du code civil, au vu du rapport d'expertise du 23 mai 2011 de Mme E...et du jugement du 16 juillet 2012, sollicite la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a que dit que le testament de M. Jean Paul X...du 1er octobre 2004 doit recevoir application s'agissant des legs qui y sont stipulés et en ce qu'il a condamné Mme Anna Marinette X...à rembourser à M. René X...la somme de 3. 336 euros et Mme Mauricette X...la somme de 4. 337, 86 euros, et ce en exécution du legs dont M. René X...est bénéficiaire.

Elle demande à la cour de :
- dire que les biens sis à Solenzara évalués par l'expert judiciaire, Jocelyne E...et par M. D... devront être évalués à la somme de 277. 050 euros en considération de la valorisation des parcelles AB 260 et A44 omises dans le rapport,
- dire que le montant de l'indemnité d'occupation dont est redevable Mme Mauricette X...ne saurait être inférieur à la somme totale de 123. 833, 04 euros, arrêtée au 1er février 2013 et majorée des intérêts de retard,
- dire que cette somme sera à parfaire au jour du prononcé de l'arrêt à intervenir sur la base d'une indemnité mensuelle qui ne saurait être inférieure à la somme de 1. 356, 40 euros,
- débouter Mme Mauricette X...de sa demande de condamnation au titre des dommages et intérêts,
- condamner Mme Mauricette X...au paiement d'une somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, en application des dispositions de l'article 696 du même code, distraits au profit de Me Battaglini, avocat au barreau de Bastia.

Par ses dernières conclusions reçues le 10 septembre 2013, M. René X...sur le fondement des articles 815 et suivants du code civil, au vu du rapport d'expertise du 23 mai 2011 de Mme E...et du jugement du 16 juillet 2012, sollicite la réformation du jugement querellé, l'annulation du testament du 1er octobre 2004, ayant procédé au partage de bien indivis d'une communauté dissoute, ainsi que le renvoi des parties devant le notaire désigné afin qu'il soit procédé aux opérations de comptes, liquidation et partage selon les règles légales de la dévolution successorale.

Il demande à la cour de dire et juger que :
- l'expert n'a pas accompli la mission qui lui avait été confiée par le jugement rendu le 22 mars 2010, en omettant de donner une valeur aux parcelles situées sur la commune de Solenzara cadastrées AB 260 et A 44,
- la valeur donnée à ces parcelles devra augmenter le montant de l'actif successoral qui ne saurait être inférieur à la somme de 392. 062, 50 euros,
- le montant de l'indemnité d'occupation dont est redevable Mme Mauricette X...ne saurait être inférieur à la somme totale de 123. 833, 04 euros arrêtée au 1er février 2013 et majorée des intérêts de retard,
- cette somme sera à parfaire au jour du prononcé de l'arrêt à intervenir sur la base d'une indemnité mensuelle qui ne saurait être inférieure à la somme de 1. 356, 40 euros.
L'intimé sollicite la condamnation de Mme Mauricette X...au paiement d'une somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, en application des dispositions de l'article 696 du même code, distraits au profit de Me Joseph Savelli, avocat au barreau d'Ajaccio.
Subsidiairement, il demande de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de débouter l'appelante de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions sus-visées et au jugement déféré.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 2014.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'indemnité d'occupation

Le tribunal a relevé qu'il n'était pas discuté que Mme Mauricette X...a eu la jouissance exclusive des biens de Solenzara durant la période d'indivision.
Il a donc considéré que cette indemnité était due depuis la date du décès, soit le 21 juin 2005.
L'appelante fait valoir que les juges du fond ont fixé la date de jouissance divise au décès de M. Jean-Paul X...et qu'ainsi M. René X...s'est vu attribuer l'ensemble des économies au jour du décès de son père, alors que cette date n'a pas été retenue concernant l'attribution préférentielle du bien à son profit.

Elle soutient que la date de jouissance divise des biens de Solenzara doit être également fixée au jour du décès du défunt, et que, par conséquent, elle ne saurait être redevable d'une quelconque indemnité d'occupation.

Les intimés concluent respectivement à une augmentation de l'indemnité d'occupation mise à la charge de Mme Mauricette X....

*

* *
Il résulte des dispositions de l'article 724 du code civil que les héritiers légaux sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.
Par ailleurs, le légataire particulier, héritier saisi, n'a pas à demander la délivrance de son legs particulier et il a la jouissance immédiate du bien légué à compter de l'ouverture de la succession. Il ne peut donc être condamné à verser une indemnité d'occupation pour utilisation privative d'un bien indivis.
En l'espèce, Mme Mauricette X..., tout comme M. René X..., en sa qualité d'héritier réservataire a eu la saisine de son legs particulier, à la date de l'ouverture de la succession du défunt, soit le 21 juin 2005. Elle ne doit, par conséquent, aucune indemnité d'occupation car les biens de Solenzara, objet dudit legs, ne sont pas indivis entre les parties.
Il convient donc d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé l'indemnité d'occupation due par Mme Mauricette X...à la somme de 63. 244 euros, due du 21 juin 2005 avec cours arrêté au 30 avril 2011 et de dire que l'appelante n'est redevable d'aucune indemnité d'occupation.
Les demandes respectives des intimés tendant à l'actualisation de cette indemnité d'occupation seront, en conséquence, rejetées.

Sur la demande de M. René X...tendant à la nullité du testament du 1er octobre 2004

M. René X...demande à la cour, en invoquant la jurisprudence de la Cour de Cassation, de prononcer la nullité du testament-partage du 1er octobre aux motifs, qu'il porte sur des biens indivis d'une communauté dissoute.

Il fait valoir qu'en l'espèce l'ascendant testateur a confondu les biens en une masse unique globalement répartie, dépouillant ainsi unilatéralement, certains copropriétaires des droits hérités de l'ascendant prédécédé.

En réplique à l'appelante qui lui oppose, outre la prescription de son action en nullité dudit testament, l'irrecevabilité de sa demande au titre de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 22 mars 2010, il soutient que ce jugement a rejeté sa demande de nullité fondée sur une contestation d'écriture et de date, alors que dans le cadre de la présente instance, sa demande n'est pas formulée sur la même cause, et qu'en pareille matière, lorsque les vices sont de nature différente, ils constituent autant de causes distinctes.

Mme Anna-Marinette sollicite sur ce point la confirmation du jugement entrepris, considérant que le testament dont s'agit n'est affecté d'aucune nullité.
La cour constate qu'il résulte du jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 22 mars 2010, que, d'une part, M. René X...a demandé la nullité du testament olographe en date du 1er octobre 2004 au motif que le 1er octobre 2004, M. Jean Paul X...ne pouvait disposer des biens de son épouse, cet élément intrinsèque établissant, selon lui, la fausseté de la date du testament, que d'autre part, le tribunal a statué sur ce moyen, en précisant notamment : " Pour autant, si au 1er octobre 2004, M. Jean-Paul X...n'avait pas plus de droit sur l'appartement de Nice que ceux résultant de la liquidation de son régime matrimonial, il pouvait certainement prétendre à ceux-ci. Or, le testament a notamment pour but de faire le partage des biens en répartissant les actifs mobiliers et immobiliers entre les héritiers selon la volonté exprimée par le testateur. "
La demande de nullité du testament susvisé n'étant pas nouvelle, l'appelante ne peut valablement opposer à M. René X...la prescription de cette action.
En outre, au vu de cette décision devenue définitive, qui a rejeté la demande de nullité du testament olographe établi par M. Jean Paul X..., le 1er octobre 2004, les moyens présentés par M. René X...en cause d'appel au soutien de sa demande de nullité du testament sus-visé, ont déjà été formulés par ce dernier devant le tribunal et analysés en première instance.
Par ailleurs, faute d'avoir respecté le principe de concentration des moyens, en l'état de l'identité d'objet et des actions opposant les mêmes parties, la seule différence de fondement juridique de l'action est bien insuffisante à écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 22 mars 2010 sus-visé.
Au regard des dispositions des articles 1351 du code civil et 565 du code de procédure civile, il convient de débouter M. René X...de sa demande de nullité du testament du 1er octobre 2004, qui se heurte à l'autorité de la chose jugée.
Sur l'attribution de M. René X...
Le tribunal a relevé que M. René X...était bien fondé à solliciter l'attribution du numéraire portée au solde positif des comptes de la succession, en vertu du testament du défunt aux termes duquel il lui a fait le legs de ses économies.

Il a retenu que Mme Mauricette X...avait justifié de l'utilisation d'une somme totale de 10. 010 euros sur les fonds disponibles sur le compte CCP du défunt (3. 380 euros frais d'obsèques, 330 euros fleurs, 300 euros notaire, 6. 000 euros avance sur succession répartie entre les 3 héritiers) et avait indiqué que le solde dudit compte qui s'élevait à 1. 001, 86 euros avait été automatiquement mis à son nom à la Poste.

Il a estimé en conséquence, que d'une part, Mme Anna Marinette X...devait payer à son frère la somme de 3. 336 euros (10. 010/ 3) en remboursement de sa part de charges successorales et de l'avance consentie sur la succession des fonds dont son frère était en réalité attributaire par testament, que d'autre part, Mme Mauricette X...devait lui payer la somme de 3. 336 euros + 1. 001, 86 euros, soit un total de 4. 337, 86 euros.
En cause d'appel, Mme Mauricette X...soutient que le tribunal ne pouvait la condamner au paiement de cette somme de 4. 337, 86 euros, sans violer l'autorité de la chose jugée attachée au jugement qu'il avait lui-même rendu le 22 mars 2010.
Elle fait valoir que le tribunal avait constaté dans son jugement définitif sus-visé qu'elle justifiait aisément de l'emploi de ces 10. 108, 50 euros et reprend les déclarations de cette décision.
De son côté, M. René X...conteste avoir donné son accord à sa soeur, l'appelante, contrairement à ce qu'elle prétend, pour disposer des sommes sur le compte CCP no 012232X029 du défunt, qui au jour du décès, s'élevait à 11. 110, 36 euros.
Il fait valoir qu'il avait conclu au recel successoral afin d'obtenir la restitution des sommes prélevées par Mme Mauricette X..., sur ce compte et que suivant jugement du 22 mars 2010, sa demande avait été rejetée.
Il soutient que le jugement du 22 mars 2010 a statué sur la demande de recel successoral et ses conséquences sur le partage, tandis que le second jugement du 16 juillet 2012 a statué sur la demande de remboursement de sa part successorale, de sorte qu'il ne saurait y avoir autorité de la chose jugée au sens des dispositions de l'article 1351 du code civil.
M. René X...souligne que, du reste, l'appelante n'ayant pas soulevée cette fin de non-recevoir avant tout moyen au fond, sa demande est dès lors, manifestement irrecevable en application de l'article 122 du code de procédure civile.
Mme Anna-Marinette ne formule aucune observation particulière sur ce point et sollicite la confirmation du jugement déféré sur l'attribution de M. René X....

*

* *

L'article 123 du code de procédure civile prévoit que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause.

Par ailleurs les fins de non-recevoir peuvent être soulevées après qu'il ait été conclu au fond.
En l'espèce, l'irrecevabilité de la demande de M. René X...tendant au remboursement par Mme Mauricette X...de la somme de 4. 337, 76 euros, soulevée par l'appelante devant la cour est donc parfaitement recevable.
La cour constate qu'il résulte du jugement du 22 mars 2010, que :
- d'une part, M. René X...a demandé au tribunal de constater que Mme Mauricette X...a commis un recel successoral et la condamner à lui restituer ainsi qu'à sa soeur, la somme de 11. 009, 50 euros,
- d'autre part, le tribunal, statuant sur cette demande, a considéré que Mme " Mauricette X...justifiait du fonctionnement de ce compte postérieurement à la date du décès de son père pour le paiement des dettes héréditaires et des charges héréditaires occasionnées par le décès, ainsi que pour le retrait d'une somme de 6. 000 euros répartie équitablement entre les trois héritiers, cette explication étayée par des attestations n'ayant pas été contredite. L'utilisation du compte ne porte dès lors aucune atteinte à l'égalité du partage. Les héritiers sont tenus au passif successoral qui vient nécessairement s'imputer sur l'actif. La valeur du lot de M. René X...n'est aucunement atteinte. "
Au regard des dispositions de l'article 1351 du code civil et au vu du jugement du 22 mars 2010, sus-visé, devenu définitif, qui a rejeté, notamment, les demandes relatives à un recel successoral de Mme Mauricette X...portant sur la dissimulation et l'utilisation frauduleuse du compte CCP, la demande, en cause d'appel, de M. René X...à l'encontre de l'appelante, tendant à être crédité du solde du compte CCP au jour du décès, soit à hauteur de 11. 110, 36 euros, est irrecevable, car elle se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 22 mars 2010 susvisé.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné Mme Mauricette X...à rembourser à M. René X...la somme de 4. 337, 86 euros, et ce en exécution du legs dont M. René X...est bénéficiaire.
Sur le montant de l'actif successoral, du passif successoral et des impenses
La cour constate que les parties ne soulèvent aucune contestation sur la valeur des constructions situées à Nice et à Solenzara, composant l'actif successoral, telle que chiffrées par l'expert judiciaire dans son rapport.
Il conviendra d'y ajouter, la valeur du terrain non bâti de la propriété située à Solenzara, soit 38. 000 euros, ainsi qu'il résulte de la présente décision.

Au vu de leurs écritures, les parties sont également d'accord sur le montant des impenses fixé par le jugement querellé dues par Mme Mauricette X...(5. 253, 42 euros) et aucune d'entre elles ne formule de prétentions à ce sujet.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur l'évaluation des terrains de Solenzara :
Le tribunal a relevé que les biens immobiliers de Solenzara étaient constitués d'une maison et de deux bungalows, qu'il ressortait du document d'arpentage 367 Y que ces constructions avaient leur emprise principalement sur la parcelle AB 44 et partiellement sur la AB 260 pour l'un des bungalows et qu'il n'était pas démontré que le terrain libre serait facilement détachable, compte tenu de la configuration des parcelles et de l'implantation des constructions.
Il a retenu que l'expert, Mme E..., avait proposé une évaluation pour ces biens qui reposait sur une évaluation de la superficie habitable appropriée compte tenu de la nature des biens, sans qu'il n'y ait lieu dès lors d'évaluer le terrain libre d'emprise dont il n'est pas démontré qu'il puisse être aisément individualisé pour une revente séparée.
En cause d'appel, les intimés réitèrent respectivement leurs demandes de majoration des biens de Solenzara en considération de la valeur des parcelles de terre, en reprenant leurs moyens et arguments de première instance et en se basant sur l'avis de valeur donné en avril 2003, par l'expert, M. D...qui évalue le terrain à la somme de 38. 000 euros.
L'appelante réplique que l'expert, répondant au dire adressé par M. René X...a indiqué que " le terrain sur lequel sont édifiés la maison d'habitation et les deux bungalows a une superficie de 1. 720 m2. C'est pourquoi, la valeur des biens construits comprend celle du terrain... "
La cour constate, au vu des pièces versées aux débats, que les biens immobiliers de Solenzara comprennent les terrains cadastrés section A no 44 et AB no 260, d'une superficie, respectivement de 17 ares 20 centiares, et de 3 a 50 ca, soit au total 20 ares 70 centiares, et les constructions y édifiés, à savoir, une maison principale et deux bungalows.
Il résulte du rapport d'expertise de Mme E..., que la maison a une superficie pondérée de 123, 875 m2, le premier bungalow une superficie pondérée de 19, 505 m2 et le deuxième bungalow une superficie pondérée de 24, 880 m2, soit une superficie totale pondérée de 168, 260 m2, de sorte, que ces constructions ne recouvrent pas la superficie de l'ensemble des deux terrains ci-dessus désignés (20 ares 70 centiares).
Par ailleurs, l'expert sus-nommé, a, en page 14 de son rapport, fait une évaluation des biens de Solenzara sur la base de la surface pondérée de chacune des constructions et à aucun moment n'y a intégré la valeur

du reste de la propriété, représentant le solde du terrain nu que ledit expert décrit par ailleurs, page 8, comme étant un jardin arboré de résineux, oliviers et arbres fruitiers.

Au vu de ces éléments, ainsi que du rapport d'expertise de M. Michel D..., du 07 avril 2003, produit par les intimés, qui fait une description précise de la propriété de Solenzara et propose une valeur de 38. 000 euros pour le terrain non bâti, il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de majoration à hauteur de cette même somme des biens de Solenzara et de dire que l'évaluation des biens situés à Solenzara faite par l'expert judiciaire, Mme E..., doit être majorée de la somme de 38. 000 euros correspondant à la valeur du terrain non bâti.

Sur la demande de dommages et intérêts formulée par Mme Mauricette X...

L'appelante réitère, sa demande et ses moyens de première instance tendant au paiement de la somme de 15. 000 euros, par les intimés, sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

Mme Mauricette X...fait valoir que l'action de M. René X...a dégénéré en abus de droit, aux motifs qu'il s'oppose à l'application du testament depuis le 21 juin 2005, et ce malgré le jugement définitif du 22 mars 2010 ayant tranché le problème de la nullité du testament et qu'il persiste à solliciter l'attribution des sommes figurant sur le compte bancaire au jour du décès.
Elle ne présente aucun argument à l'encontre Mme Anna-Marinette X....
Les éléments invoqués par l'appelante n'établissent pas un comportement fautif de la part de M. René X..., dans l'exercice de son droit d'agir en justice pour contester la validité d'un testament olographe attribué à son père.
En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée Mme Mauricette X....

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de sorte, qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ses dispositions sur ce point et de débouter l'ensemble des parties de leurs demandes respectives à ce titre, pour la procédure d'appel.

Les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Vu le jugement contradictoire du 22 mars 2010 du tribunal de grande instance d'Ajaccio,

Déclare irrecevable la demande de nullité du testament olographe du 1er octobre 2004, formulée par M. René X...,

Déclare recevable la fin de non-recevoir fondée sur l'autorité de la chose jugée présentée par Mme Mauricette X...,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il en a :

- fixé l'indemnité d'occupation due par Mme Mauricette X...à la somme de soixante trois mille deux cent quarante quatre euros (63. 244 euros), due du 21 juin 2005 avec cours arrêté au 30 avril 2011
- rejeté la demande de majoration à hauteur de trente huit mille euros (38. 000 euros) des biens de Solenzara,
- condamné Mme Mauricette X...à rembourser à M. René X...la somme de quatre mille trois cent trente sept euros et quatre vingt six centimes (4. 337, 86 euros), et ce en exécution du legs dont M. René X...est bénéficiaire et de dire que la demande de ce dernier à l'encontre de l'appelante, tendant à être crédité du solde du compte CCP au jour du décès, soit à hauteur de onze mille cent dix euros et trente six centimes (11. 110, 36 euros), est irrecevable, au titre de l'autorité de la chose jugée,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Constate que Mme Mauricette X..., instituée légataire particulier par M. Jean-Paul X..., a la qualité d'héritière saisie,

Dit qu'en conséquence, Mme Mauricette X...n'est redevable d'aucune indemnité d'occupation,

Déboute M. René X...et Mme Anna-Marinette X...de leurs demandes respectives tendant à l'actualisation de cette indemnité d'occupation,

Dit que l'évaluation des biens situés à Solenzara faite par l'expert judiciaire, Mme E..., doit être majorée de la somme de trente huit mille euros (38. 000 euros) correspondant à la valeur du terrain non bâti,

Dit irrecevable, au titre de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 22 mars 2010 par le tribunal de grande instance d'Ajaccio, la demande de M. René X...à l'encontre de Mme Mauricette X...tendant à créditer le solde du compte CCP au jour du décès, soit à hauteur de onze mille cent dix euros et trente six centimes (11. 110, 36 euros),

En conséquence,

Déboute M. René X...de sa demande de remboursement à l'encontre de Mme Mauricette X..., du solde créditeur du compte de CCP au jour du décès du défunt,

Y ajoutant,

Renvoie les parties devant Me Cécile F...pour qu'il soit procédé aux opérations de compte, liquidation et partages desdites successions en tenant compte du présent arrêt,

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel,

Déboute les parties de tous autres chefs de demande,

Dit que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 12/00786
Date de la décision : 09/04/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2014-04-09;12.00786 ?
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