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19/03/2014 | FRANCE | N°12/00881

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 19 mars 2014, 12/00881


Ch. civile A

ARRET No
du 19 MARS 2014
R. G : 12/ 00881 C-JG
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 08 Novembre 2012, enregistrée sous le no 11/ 00935

SCI PARADISU
C/
X...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF MARS DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTE :
SCI PARADISU représentée par sa gérante en exercice Mme Martine Y... épouse Z... ... 20000 AJACCIO

ayant pour avocat Me Myriam CARTA, avocat au barreau de BASTIA

IN

TIME :

M. Mathieu X... né le 16 Mars 1953 à AJACCIO... 20090 AJACCIO

ayant pour avocat Me Antoine-Paul ALBERTINI...

Ch. civile A

ARRET No
du 19 MARS 2014
R. G : 12/ 00881 C-JG
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 08 Novembre 2012, enregistrée sous le no 11/ 00935

SCI PARADISU
C/
X...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF MARS DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTE :
SCI PARADISU représentée par sa gérante en exercice Mme Martine Y... épouse Z... ... 20000 AJACCIO

ayant pour avocat Me Myriam CARTA, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :

M. Mathieu X... né le 16 Mars 1953 à AJACCIO... 20090 AJACCIO

ayant pour avocat Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 janvier 2014, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Johanna SAUDAN.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 19 mars 2014.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par acte du 21 novembre 2002 passé en l'étude de Me A..., notaire à Ajaccio, la SCI Paradisu a acquis de M. C... une propriété bâtie sise à Ajaccio au lieudit Pietralba, d'une contenance de 57 a 60 ca recensée au cadastre de cette commune sous le no 24 de la section AL.
M. Mathieu D..., propriétaire des parcelles cadastrées section AL no 20, 22, 102 et 103 ayant déposé un permis de construire auprès des services de l'urbanisme de la ville d'Ajaccio, la SCI Paradisu l'a attraint devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio par acte d'huissier du 13 septembre 2011 pour voir dire et juger qu'elle est fondée à agir en négation de la servitude de passage dont ce dernier semble se prévaloir, lui faire interdiction sous astreinte d'utiliser la tolérance qui lui a été consentie pour accéder à ses parcelles en sa qualité de propriétaire apparent et obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
M. X... a rappelé avoir signé en l'étude de Me F..., un compromis de vente aux fins d'acquérir des consorts E..., les parcelles cadastrées AL 20, 102 et 103 ainsi que les deux tiers indivis de la parcelle cadastrée AL no 22 sises à Ajaccio, chemin de Pietralba, compromis assorti d'une condition suspensive d'obtention d'un permis de construire. Il a indiqué que cet acte n'a pas été réitéré mais que le fonds des consorts E... étant en situation d'enclave, une procédure a opposé ces derniers aux consorts C..., auteur de la SCI Paradisu et que par jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 21 février 1973 confirmé par arrêt de cette cour du 14 janvier 1975, il a été jugé que les parcelles litigieuses autrefois cadastrées 60 p et 61 p de la section A étaient grevées d'une servitude de passage au profit de la parcelle portant le no 60 de la même section et que l'assiette de cette servitude est celle constituée par le chemin litigieux.
Il a en conséquence conclu au déboutement de la SCI Paradisu et sollicité 2 500 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile et 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 8 novembre 2012, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a :

- débouté la SCI Paradisu de son action en négation d'une servitude de passage concernant la parcelle cadastrée section AL no 24 sur la commune d'Ajaccio,

- débouté la SCI Paradisu de sa demande visant à voir interdire, sous astreinte, à M. Mathieu X... d'utiliser la servitude de passage grevant la parcelle cadastrée section AL no 24 sur la commune d'Ajaccio au bénéfice des parcelles 20, 21, 22, 102 et 103,
- débouté M. Mathieu X... de sa demande formée sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- condamné la SCI Paradisu prise en la personne de son représentant légal à payer à M. Mathieu X... la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes comme inutiles ou mal fondées,
- condamné la SCI Paradisu prise en la personne de son représentant légal à supporter les dépens de l'instance.

La SCI Paradisu a relevé appel de ce jugement par déclaration du 15 novembre 2012.

En ses dernières écritures transmises par voie électronique le 8 février 2013, auxquelles il y a lieu de se référer pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la SCI Paradisu se retranche derrière les mentions de l'acte de vente, le vendeur ayant déclaré expressément qu'il n'a créé aucune servitude sur l'immeuble vendu et qu'à sa connaissance, il n'en existe pas d'autres que celles résultant de la situation des lieux, de la loi ou de l'urbanisme.
Elle soutient que si elle a consenti postérieurement à son acquisition une tolérance à Mme E... pour les besoins de l'entretien de son jardin potager, M. X... ne peut toutefois prétendre bénéficier d'aucune servitude, qui constituerait une violation de son droit de propriété.
Elle souligne que le jugement déféré est critiquable en ce qu'il a considéré que les parcelles, propriétés de l'intimé étaient enclavées, alors que le tribunal n'avait pas été saisi pour statuer sur l'accès des biens de l'intimé à la voie publique mais sur la dénaturation d'une tolérance de passage consentie aux propriétaires précédents des parcelles en cause.
Elle ajoute que les servitudes établies par le fait de l'homme ne sont opposables aux acquéreurs que si elles sont mentionnées dans le titre de propriété ou si elles font l'objet d'une publicité en ce sens, que les actes soumis à publicité sont, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers et qu'en tout état de cause l'intimé n'a produit aucun élément démontrant qu'elle connaissait l'existence de cette servitude à la date du 21 novembre 2002, date de l'acquisition du bien.
Elle fait observer qu'il ne peut lui être opposé que la servitude légale a été acquise par prescription, puisque le bien a été acquis en 2002 et qu'en outre l'arrêt de la cour d'appel de Bastia qui lui est étranger, ne peut être créatif de droit à son égard, faute d'avoir été publié.
Elle demande en conséquence à la cour :
Vu les articles 682, 691 et 1165 du code civil,
Vu son titre de propriété,
Vu l'absence de servitude grevant la parcelle section AL no 24, lieudit Pietralba,
- de dire et juger son appel recevable et bien fondé,
- d'infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 8 novembre 2012 en toutes ses dispositions,
- de dire et juger que la SCI Paradisu, prise en la personne de son représentant légal, est fondé à agir en négation de la servitude dont semble se prévaloir M. Mathieu X...,
En conséquence,
- de faire interdiction à M. Mathieu X... d'utiliser la tolérance qu'elle lui a consentie pour accéder aux parcelles section AL no 20, 21, 22 et 23, en sa qualité de propriétaire apparent,
- d'assortir cette interdiction, en cas de non-respect, d'une astreinte de 1 000 euros par jour à compter du prononcé de la décision à intervenir,
- de condamner M. Mathieu X... à lui payer la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

En ses dernières écritures transmises par voir électronique le 5 avril 2013, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus complet de ses moyens et prétentions, M. Mathieu X... précise avoir signé le 4 juillet 2011 en l'étude de Maître F..., un compromis de vente avec les consorts E... portant sur les parcelles cadastrées AL 20, 21, 102 et 103 et les deux tiers de la parcelle no 22 sises à Ajaccio, chemin de Pietralba, assorti d'une condition suspensive d'obtention d'un permis de construire et que depuis lors, la vente a été réitérée.

Il précise que par jugement du 21 février 1973 confirmé par arrêt du 14 janvier 1975, le fonds des consorts E... a été déclaré enclavé, le fonds des consorts C... grevé d'une servitude de passage pour cause d'enclave au profit de celui des consorts E... et que l'assiette de cette servitude est celle constituée par le chemin litigieux.
Il fait valoir qu'en conséquence les consorts E... sont titulaires d'une servitude de passage pour cause d'enclave et non d'une simple tolérance, cette servitude légale étant acquise par prescription.
Il ajoute que cette servitude légale figure sur le plan cadastral et que l'action de la SCI Paradisu est dès lors sans fondement.
Il demande en conséquence à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI U Paradisu prise en la personne de son représentant légal en exercice, de l'intégralité de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SCI U Paradisu prise en la personne de son représentant légal en exercice au paiement d'une somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'infirmer pour le surplus et reconventionnellement,
- condamner la SCI U Paradisu prise en la personne de son représentant légal en exercice au versement des sommes suivantes :
. 2 500 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil,. 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'instruction de la procédure a été déclarée close par ordonnance du 20 novembre 2013.

SUR CE :

Attendu que la SCI Paradisu soutient à l'appui de son action en dénégation de servitude que le jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 21 février 1973 comme l'arrêt confirmatif de cette cour du 14 janvier 1975 grevant la parcelle qu'elle a acquise de M. C... d'une servitude de passage ne lui sont pas opposables pour ne pas avoir été publiés et que la simple tolérance de passage consentie par ses soins à l'auteur de l'intimé ne peut être transmise à ce dernier ;

Attendu que si conformément à l'article 2262 du code civil, les actes de pure faculté ou de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni prescription, la SCI Paradisu ne justifie toutefois nullement que les auteurs de l'intimé n'aient bénéficié que d'une simple tolérance de passage sur le fonds qu'elle a acquis ;
Qu'elle ne verse en effet aux débats aucun élément susceptible d'établir que la propriété de l'intimé dispose d'un accès suffisant à la voie publique par un autre chemin que celui qu'il emprunte et qui traverse la parcelle cadastrée sous le numéro AL 24 ;

Attendu que si son acte d'achat du 21 novembre 2002 ne comporte aucune mention relative au jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 21 février 1973, ni à l'arrêt confirmatif de cette cour du 14 janvier 1975, grevant la parcelle d'une servitude de passage et si le vendeur a déclaré n'avoir créé aucune servitude, il a cependant ajouté dans la même déclaration " autre que celle résultant de la situation des lieux, de la loi ou de l'urbanisme " ;

Attendu que des éléments du dossier et notamment du plan de situation des propriétés des parties, il ressort que les parcelles AL 20, 21, 102 et 103 et 22 de l'intimé qui ne disposent pas d'autre accès à la voie publique, se trouvent en situation d'enclave au sens de l'article 682 du code civil ;
Attendu que les auteurs de l'intimé dont le fonds était ainsi enclavé et qui ne bénéficiaient nullement d'une simple tolérance de passage ont en empruntant le chemin litigieux pendant plus de trente années, et en joignant leur possession à celle de leurs propres auteurs, prescrit par ces trente ans d'usage continu, conformément aux dispositions de l'article 685 du code civil, l'assiette et le mode de la servitude légale dont ils disposaient sur la parcelle AL 24 et qui avait été reconnue par l'arrêt de cette cour du 14 janvier 1975 ;
Qu'en l'état de cette situation d'enclave des parcelles litigieuses et de la prescription de l'assiette de la servitude grevant le fonds de l'appelante par ceux dont il tient ses droits, les demandes formulées par la SCI à l'encontre de M. Mathieu X... ne sauraient être accueillies ;
Attendu que le jugement déféré rejetant l'action en dénégation de servitude formulée à l'encontre de M. X... sera confirmé par motifs substitués et la demande de la SCI Paradisu tendant à voir interdire à M. X... l'utilisation de la tolérance qui lui a été consentie pour accéder à sa propriété rejetée ;
Attendu qu'il ne peut être fait grief à l'appelante d'avoir fait un usage abusif de son droit d'ester en justice ou d'avoir fait dégénérer en abus son droit d'user du double degré de juridiction ;
Que la demande de dommages-intérêts de M. Mathieu X... sera dès lors rejetée ;
Attendu que ce dernier a en revanche été contraint d'exposer des frais non taxables dont il est équitable de lui accorder compensation ;
Que le jugement déféré lui allouant la somme de 700 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sera confirmé ;
Qu'il lui sera accordé au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel une somme supplémentaire de 1 800 euros ;
Attendu que la SCI Paradisu qui succombe sera déboutée de la demande qu'elle formule au titre des frais non taxables par elle engagés et supportera les entiers dépens d'instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,
Rejette la demande de la SCI Paradisu tendant à faire interdiction à M. Mathieu X... d'utiliser la tolérance qui lui a été consentie pour accéder aux parcelles section AL no 20, 21, 22, 102 et 103,
Rejette la demande de dommages-intérêts de M. Mathieu X...,
Condamne la SCI Paradisu prise en la personne de son représentant légal à payer à M. Mathieu X... la somme de mille huit cents euros (1 800 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
La condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 12/00881
Date de la décision : 19/03/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2014-03-19;12.00881 ?
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