Ch. civile A
ARRET No
du 19 FEVRIER 2014
R. G : 12/ 00993 CR-JG
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 08 Octobre 2012, enregistrée sous le no 10/ 00749
X...
C/
X...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE
APPELANT :
M. Jean Baptiste X... né le 26 Septembre 1935 à Sainte Lucie de Porto-vecchio (20137) ...20250 CORTE
assisté de Me Joseph SAVELLI, avocat au barreau d'AJACCIO
INTIME :
M. Guelfe X... né le 01 Novembre 1934 à Sainte Lucie de Porto-vecchio (20137) ...20137 PORTO-VECCHIO
assisté de Me Jean-Pierre BATTAGLINI de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Dominique CASANOVA, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 décembre 2013, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 19 février 2014.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Johanna SAUDAN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Du mariage de M. Pierre X... décédé le 9 août 1966 et Mme Catherine Marie Noélie B...décédée le ler juin1998 sont issus deux enfants :
- M. Guelfe Toussaint X... né le ler novembre 1934,
- M. Jean Baptiste X... né le 26 septembre 1935.
Par acte notarié en date du 20 septembre 1971, Mme Catherine Marie Noélie B...veuve X... a fait donation à son fils Jean Baptiste X... en avance d'hoirie des biens suivants :
- trois parcelles de terre sises sur le territoire de la commune de Zonza (2A), lieudit Poggio Rosso et cadastrées Section F no 32 (6a 14ca), no35 (1ha 88a 30ca), et no 36 (12a l0ca),
- une parcelle de terre sur la commune de Conca, lieudit Poggio Rosso cadastrée Section I no 298 d'une contenance de 67a 68ca.
Par acte de donation-partage de Mme Catherine B...veuve X... du 28 mai 1998, ces mêmes biens évalués à 110 000 francs ont été attribués à Jean-Baptiste X... et il a été attribué à Guelfe Toussaint X...pour le remplir de ses droits à hauteur de 110 000 francs (16 769, 39 euros) :
- trois parcelles de terre sises lieudit Favale et cadastrées Section F no 110 pour l6a 30ca, no111 pour 8a 30ca, no112 pour 5a 21ca,
- une parcelle de terre lieudit Fontanelle cadastrée Section F no 624 pour 3ha 32a 68ca,
- une parcelle de terre lieudit Fontanelle cadastrée Section F no 625 pour 2a 53ca,
cet acte précisant que la présente donation-partage était consentie en totalité en avancement d'hoirie, conformément à l'article 1077 du code civil, en ce comprises les donations antérieures y incorporées, l'imputation des donations incorporées sur la succession de la donatrice se faisant dans les mêmes conditions que celle des biens présentement donnés.
Aux termes d'un jugement en date du 28 juillet 2003, le Tribunal de grande instance d'Ajaccio saisi par M. Jean Baptiste X... en annulation de l'acte de donation-partage du 28 mai 1998 et du partage par moitié des biens composant les successions confondues des deux parents, a :- rejeté l'exception de nullité de l'assignation,
- rejeté les demandes de Jean-Baptiste X... aux fins d'annulation de la donation-partage du 28 mai 1998, de partage des successions confondues de Mme Catherine B...veuve X... et de M. Pierre X..., de réduction de la donation-partage du 28 mai 1998 et d'expertise,
- condamné Jean-Baptiste X... à payer à Guelfe X...la somme de 3. 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné Jean-Baptiste X... à payer à Guelfe X...la somme de 2 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Jean-Baptiste X... aux dépens en ce compris les dépens afférents aux incidents de mise en état.
Suite à l'action introduite par Jean-Baptiste X... à l'encontre de Guelfe Toussaint X...par acte d'huissier de Justice en date du 2 juillet 2010 sur le fondement des articles 815 et suivants du code civil pour obtenir le partage des biens meubles et immeubles non encore partagés de la succession de feus M. Pierre X... et de Mme Catherine Marie Noélie B...épouse X..., savoir :
- sur la commune de Conca, une parcelle de terre cadastrée Section E no 320, lieudit Vangone ou Acquella, pour une contenance totale de 23h 42a 02ca dépendant de la succession maternelle,
- sur la commune de Zonza, une parcelle de terre Section L no1408, lieudit Pinarello d'une contenance de 14a 95ca dépendant de la succession maternelle,
- sur la commune de Zonza, une parcelle de terre lieudit Perelli no 1092 pour une contenance de 2a 53ca dépendant de la succession maternelle,
- sur la commune de Zonza, une parcelle de terre Section 1 no3493, lieudit Pinarello d'une contenance de 95a 35ca dépendant de la succession maternelle,
- dans une construction à usage d'habitation, sise commune de Zonza, hameau ..., cadastrée Section G no416, le lot no3 consistant en un appartement au rez-de-chaussée de 4 pièces, ainsi que la moitié du grenier, et tous droits indéterminés dans la propriété du sol et des parties communes du bien (garage et terrain attenant) dépendant de la succession paternelle, et des meubles (mobilier, bijoux et effets personnels des défunts),
le tribunal de grande instance d'Ajaccio a par jugement du 8 octobre 2012, vu le jugement de ce tribunal en date du 28 juillet 2003 :
- constaté l'identité des parties, cause et objet du présent litige avec celui ayant fait l'objet du jugement du 28 juillet 2003 précité,
- constaté que la présente instance se heurte donc à l'autorité de la chose jugée,
en conséquence
-déclaré M. Jean Baptiste X... irrecevable en ses demandes, fins et conclusions,
- condamné M. Jean Baptiste X... à payer à M. Guelfe Toussaint X... la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné M. Jean Baptiste X... à payer à Monsieur Guelfe Toussaint X... la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné M. Jean Baptiste X... aux entiers dépens.
M. Jean-Baptiste X... a relevé appel de ce jugement par déclaration du 19 décembre 2012.
En ses dernières écritures transmises par voie électronique le 23 janvier 2013, auxquelles il sera référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Jean-Baptiste X... rappelle les biens dont ses parents Pierre X... et Catherine Marie Noëlie B...étaient propriétaires avant leur décès et précise que si sa mère a procédé à deux donations les 20 septembre 1971 et 28 mai 1998, les biens dont il sollicite le partage, ne sont visés par aucun de ces actes de donation et sont donc restés dans l'indivision entre son frère Guelfe et lui-même.
Il fait observer que si le tribunal avait considéré dans sa décision du 28 juillet 2003 qu'il ne rapportait pas la preuve que les biens dont il faisait état étaient restés dans l'indivision, il verse à ce jour tous documents à cet effet et ajoute que la persistance de cette indivision est reconnue par ailleurs par l'intimé dans un courrier du 23/ 01/ 1999, comme par Mes Grimaldi et Santoni, notaires, et Me A..., notaire à Corte.
Il souligne qu'aucune disposition du jugement du 28 juillet 2003 ne justifie de l'attribution de ces immeubles à l'un ou l'autre des coindivisaires, et que s'il n'entend pas remettre en cause les dispositions de ce jugement, il sollicite simplement que les biens encore dans l'indivision soient définitivement partagés, d'autant que toutes les tentatives amiables pour y parvenir ont avorté.
Il soutient que l'intimé ne saurait se prévaloir de l'autorité de la chose jugée sauf à considérer que les immeubles objets des débats devront rester indéfiniment dans l'indivision surtout que l'article 1351 du code civil dispose que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement, et que le jugement du 28 juillet 2003 n'a jamais résolu le sort des biens, objets des débats.
Il précise qu'il ne peut y avoir autorité de la chose jugée sur les questions omises ou non résolues et que l'omission de statuer sur une demande ne peut être considérée comme un rejet implicite ayant autorité de la chose jugée.
Il fait valoir que si la donation-partage cumulative qui ne repose sur aucune source légale renferme deux conventions, une donation-partage portant sur les biens transmis par le survivant d'une part, un partage successoral intervenant entre les descendants et portant sur les biens qui leur proviennent du prédécédé d'autre part, rien ne permet d'établir que l'acte de donation signé entre les parties portait sur l'intégralité de la succession, puisque les biens objets des débats ne figurent dans aucune des deux donations pas plus que dans le jugement du 28 juillet 2003 et qu'étant restés dans l'indivision, il est en droit d'en demander le partage.
Il ajoute qu'aucune des deux parties n'est en mesure d'entrer en possession de ces biens non partagés pas plus que d'en revendiquer leur propriété et que le jugement du 28 juillet 2003 ne désignant ni notaire ni juge commissaire afin de procéder à la liquidation des biens en cas de désaccord entre les parties, il est dans l'impossibilité de résoudre la difficulté des opérations de partage proprement dites des biens restés dans l'indivision et qu'il n'a donc en engageant son action commis aucun abus de droit.
Il demande en conséquence à la cour, au principal de :
- dire et juger qu'il rapporte la preuve que les biens ci-après énumérés sont restés dans l'indivision,
- dire et juger que la donation partage cumulative n'a pas réglé le sort des biens non partagés.
- dire et juger que la décision du tribunal de grande instance d'Ajaccio en date du 28 juillet 2003 n'a pas statué sur la propriété des biens indivis ci-après énumérés,
- débouter M. Guelfe X... de son argumentation portant sur l'autorité de la chose jugée,
- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- ordonner qu'il soit procédé aux opérations de compte liquidation et partage des biens meubles et immeubles non encore partagés de la succession de feus M. Pierre X... et de Mme Catherine Marie Noélie B...épouse X..., ci-après mentionnés :
sur la Commune de Conca, une parcelle de terre cadastrée section E numéro 320, lieudit Vangone ou Acquella, pour une contenance totale de 23 hectares 42 ares 02 centiares dépendant de la succession maternelle,
sur la Commune de Zonza, une parcelle de terre section I, numéro 1408, lieudit Pinarello d'une contenance de 14 ares 95 centiares dépendant de la succession maternelle,
sur la Commune de Zonza, une parcelle de terre lieudit Perelli, no 1092, pour une contenance de 2 ares 53 centiare, dépendant de la succession maternelle,
sur la Commune de Zonza, une parcelle de terre section I, no 3493, lieudit Pinarello, pour une contenance de 95 ares 35 centiares, dépendant de la succession maternelle,
dans une construction à usage d'habitation, sise commune de Zonza, Hameau ..., cadastrée section G, numéro 416, le lot no 3, consistant en un appartement au rez-de-chaussée de quatre pièces, ainsi que la moitié du grenier, et tous droits indéterminés dans la propriété du sol et des parties communes du bien (garage et terrain attenant) dépendant de la succession paternelle, et des meubles (mobilier, bijoux et effets personnels des défunts),
- désigner M. le Président de la chambre des notaires de la Corse du Sud ou son délégataire aux fins de liquider les droits respectifs de chacun des co-indivisaires,
- commettre tel juge du tribunal pour surveiller les opérations de partage et faire rapport sur l'homologation de la liquidation,
- ordonner le partage en nature ou la licitation des meuble et des immeubles dépendants de l'indivision dont s'agit, selon qu'il sera jugé d'y avoir lieu ou non,
- dans le cas de la licitation, ordonner la vente aux enchères publiques sur licitation soit devant notaire, soit à la barre du tribunal de grande instance d'Ajaccio, ce sur la mise à prix déterminée,
- dire que le prix de la vente sur licitation sera versé entre les mains de tel notaire ou séquestre qu'il plaira au tribunal de commettre pour être réparti entre les parties en proportion de leurs droits respectifs.
- préalablement et pour y parvenir, désigner tel expert qu'il plaira au tribunal de céans avec la mission ci-après définie :
rechercher la composition active et passive de l'indivision et en dresser l'inventaire tant en ce qui concerne les biens meubles et immeubles,
déterminer la consistance des biens dépendants de l'indivision,
visiter les lieux se trouvant dans l'indivision entre les parties en cause ; dire si les biens sont partageables en nature eu égard aux droits respectifs des parties et, dans l'affirmative, composer des lots, dans la négative donner tous les éléments permettant de fixer les mises à prix en cas de licitation,
évaluer les différents biens composant la succession à la date la plus proche du dépôt du rapport d'expertise,
chiffrer l'indemnité d'occupation des immeubles qui devra être mise à la charge de M. Guelfe X...,
déterminer l'éventuel passif de l'indivision ; de tout dresser rapport,
- ordonner l'emploi des frais, en frais de privilégiés de partage, sauf ceux de mauvaise contestation qui seront mis à la charge personnelle du contestant,
- condamner l'intimé au paiement de la somme de 3 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, distraits au profit de Me Joseph Savelli, avocat au barreau d'Ajaccio,
subsidiairement, de :
- constater que les parties sont dans l'impossibilité de résoudre la difficulté d'exécution portant sur les biens non partagés en l'état des dispositions du jugement déféré,
- désigner M. le Président de la Chambre des Notaires de la Corse-du-Sud ou son délégataire aux fins de liquider les droits respectifs des parties sur les biens encore dans l'indivision,
- commettre tel juge du tribunal pour surveiller lesdites opérations et faire rapport sur l'homologation de la liquidation,
- ordonner le partage en nature ou la licitation des immeubles dépendants de la succession, selon qu'il sera jugé y avoir lieu ou non,
- et préalablement à ces opérations et pour y parvenir, désigner tel expert qu'il plaira au tribunal de céans avec pareille mission en la matière qui devra s'accomplir conformément aux dispositions du code de procédure civile,
- ordonner l'emploi des frais, en frais de privilégiés de partage, sauf ceux de mauvaises contestations qui seront mis à la charge personnelle du contestant.
En ses écritures transmises par voie électronique le 16 avril 2013, auxquelles il y a lieu de renvoyer pour un exposé plus complet de ses moyens et prétentions, M. Guelfe X... fait valoir que le jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 28 juillet 2003 qui n'a fait l'objet d'aucun recours est passé en force de chose jugée et qu'il a donc suite à la nouvelle assignation de son frère, opposé à ce dernier la fin de non recevoir tirée de l'article 122 du code de procédure civile pour défaut de droit d'agir en raison de la chose jugée.
Il fait valoir que M. Jean-Baptiste X... tente de faire juger une nouvelle fois une affaire qui a déjà fait l'objet d'une décision judiciaire définitive et que si des biens subsistent postérieurement au partage, il s'agit d'une difficulté d'exécution des opérations de partage mais qu'aucun nouveau partage ne peut être ordonné.
Il précise que la demande de liquidation et partage formulée à titre subsidiaire pour la première fois devant la cour pour régler ce qu'il considère comme une difficulté d'exécution constitue une demande nouvelle, irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile.
Il soutient que la demande de M. Jean-Baptiste X... se heurte à l'autorité de la chose jugée, l'objet de la demande, sa cause, puisqu'il lui appartenait de concentrer ses moyens et fondements juridiques, et les parties étant les mêmes que dans l'instance ayant donné lieu au jugement du 28 juillet 2003.
Il demande en conséquence à la cour,
vu les articles 1350 et 1351 du code civil,
vu l'article 1075 du code civil,
vu les articles 122 et 123 du code de procédure civile,
vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Ajaccio le 28 juillet 2003,
de :
- constater que les demandes formulées par M. Jean Baptiste X... opposent les mêmes parties et portent sur les mêmes choses et causes que celles qui ont fait l'objet du jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Ajaccio le 28 juillet 2003,
- constater que la présente instance se heurte donc à l'autorité de la chose jugée,
En conséquence,
- confirmer purement et simplement le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Ajaccio le 08 octobre 2012 en ce qu'il a déclaré M. Jean Baptiste X... irrecevable en ses demandes, fins et conclusions,
- débouter M. Jean Baptiste X... de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- déclarer irrecevable la demande formulée à titre subsidiaire de désignation d'un notaire aux fins de liquidation et partage des droits respectifs des parties,
- infirmer le jugement sur le surplus,
Statuant de nouveau,
- condamner M. Jean Baptiste X... à lui payer une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner M. Jean Baptiste X... à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'instruction de la procédure a été déclarée close par ordonnance du 23 octobre 2013.
SUR CE :
Sur l'autorité de la chose jugée :
Attendu qu'aux termes de l'article 815 du code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention ;
Attendu que si les dispositions de l'article 1350 du code civil érigent en présomption légale l'autorité que la loi attribue à la chose jugée, celles de l'article 1351 précisent que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement et ajoute " il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause et que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité " ;
Attendu que si l'identité des parties entre la décision déférée et le jugement du 28 juillet 2003 ne peut être contestée, il convient d'examiner en l'espèce le double rapport entre l'objet du jugement et l'objet de la demande d'une part, entre l'objet du jugement et la cause de la demande d'autre part, étant précisé de surcroît que l'autorité de la chose jugée n'est attachée qu'à ce qui a été tranché dans le dispositif du jugement du 28 juillet 2003 ;
Attendu que si l'on définit l'objet de la demande comme étant la prétention qu'une partie soumet au juge au sens de l'article 4 du code de procédure civile, à savoir le résultat concret que l'auteur de cette prétention demande au juge de lui reconnaître ou de lui attribuer, et la cause de la demande comme étant, par référence à l'article 6 du même code, les faits allégués par les parties et propres à fonder leurs prétentions, il résulte de l'application de ces définitions, qu'en l'espèce, si les faits allégués par les parties restent identiques, l'objet de leurs litiges successifs est différent ;
Qu'en effet, aux termes de son acte introductif d'instance du 12 janvier 2000, M. Jean Baptiste X... avait attrait son frère Guelfe devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio à l'effet de voir :
- dire et juger nul et de nul effet l'acte de donation-partage du 28 mai 1998 établi par Mme Catherine X... née B...et ce compte tenu de la différence de valeur réelle des lots entre ses deux fils dont elle n'a entendu favoriser aucun,
- ordonner le partage des biens des successions confondues de M. X... Pierre (père) et Catherine Marie B...(son épouse, mère) qui seront partagés par moitié entre leurs deux enfants et ce par application des dispositions des articles 815 et suivants du code civil,
et pour y parvenir,
- désigner tel notaire aux opérations de compte, liquidation, partage et désigner tel expert avec outre la mission d'usage, celle d'incorporer l'avancement d'hoirie fait en 1971 en évaluant au jour du décès ;
Attendu que si dans le dispositif de son jugement du 28 juillet 2003 non frappé d'appel et passé en force de chose jugée, le tribunal de grande instance d'Ajaccio, rejetant les demandes de M. Jean Baptiste X... tendant à l'annulation de la donation-partage du 28 mai 1998, comme à la réduction de cette même donation-partage, a rejeté ainsi la demande en partage, aucune mention de ce dispositif emportant l'autorité de la chose jugée ne fait référence aux biens non visés par cette donation-partage qui sont restés en indivision ;
Attendu que la demande introduite par M. Jean Baptiste X... par acte du 8 décembre 2010 a pour objet d'obtenir le partage des biens meubles et immeubles qui ne figurent ni dans la donation en avancement d'hoirie de Catherine X...du 20 septembre 1971 ni dans la donation-partage de cette dernière du 28 mai 1998 et qui sont demeurés en indivision, toutes les tentatives de partage initiées par l'appelant à l'encontre de son frère étant restées vaines ;
Que l'objet des deux actions étant différent, la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée opposée par Guelfe X...à son frère ne saurait être accueillie ;
Qu'y faire droit aboutirait d'ailleurs, alors qu'il est justifié par les documents produits de l'existence de ces biens omis des actes de donation de Catherine X..., à contraindre les parties, voire leurs héritiers, à rester dans une indivision dont Jean Baptiste X... veut sortir, ce qui est contraire aux dispositions d'ordre public de l'article 815 du code civil ;
Attendu que le jugement déféré qui a constaté que la présente instance se heurte à l'autorité de la chose jugée sera infirmé sur ce point ;
Sur le partage des biens indivis :
Attendu que l'assignation ayant été introduite postérieurement au 1er janvier 2007, les dispositions de la loi du 23 juin 2006 et son décret d'application du 23 décembre 2006 ont vocation à s'appliquer au litige ;
Que l'article 840 du code civil dispose que le partage est fait en justice lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ce qui est le cas en l'espèce ;
Que l'article 841 du même code précise qu'à tout moment les copartageants peuvent abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage amiable ;
Attendu que M. Jean Baptiste X... ayant satisfait aux obligations de l'article 1360 du code de procédure civile qui dispose qu'à peine d'irrecevabilité, l'assignation en partage :
- contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager,- précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens à partager,- précise les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable,
il y a lieu en application de l'article 1361 d'ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage dans les conditions indiquées au dispositif ;
Qu'il se déduit des pièces produites une complexité potentielle des opérations qui justifie la désignation d'un notaire mais également celle d'un juge commissaire pour surveiller les opérations de partage et faire rapport au tribunal en cas de difficultés, conformément aux disposition de l'article 1364 du code de procédure civile ;
Qu'en l'absence d'accord sur le nom d'un notaire, M. le président de la chambre des notaires de Corse du Sud sera désigné avec faculté de délégation, à charge pour lui de faire parvenir au juge et aux parties le nom du notaire commis ;
Qu'il y a lieu, afin d'éviter tout retard dans le traitement du dossier, de prévoir dès à présent le versement d'une provision de 700 euros entre les mains du notaire liquidateur qui sera désigné afin qu'il puisse entamer au plus vite ses opérations ;
Attendu que les dispositions nouvelles prévoient désormais que le partage en valeur est désormais la règle, le partage en nature ne s'imposant plus y compris lorsqu'il est possible ;
Qu'il sera demandé au notaire liquidateur de procéder ou faire procéder à l'évaluation des biens, afin de composer les lots et de calculer le montant des indemnités d'occupation éventuellement dues, sans qu'il apparaisse nécessaire à ce stade de la procédure de commettre à cette fin un expert comme le sollicite M. Jean Baptiste X... ;
Qu'en présence de toutes difficultés ou contestations à venir, notamment quant à la forme de partage ou au montant des évaluations retenues dans le projet du notaire liquidateur, il appartiendra aux parties ou au notaire de saisir le juge commissaire désigné au dispositif du présent arrêt pour veiller au bon déroulement des opérations de partage ;
Que par application des articles 1368 et 1369 du code de procédure civile dans leurs rédactions issues du décret du 26 décembre 2006, le notaire est tenu de dresser un état liquidatif établissant les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir dans le délai d'un an suivant sa désignation, ce délai étant notamment suspendu en cas de désignation d'un expert par la juridiction ou le juge commissaire ;
Sur la demande de dommages-intérêts :
Attendu qu'aucun abus de procédure ne pouvant être reproché à Jean Baptiste X..., le jugement déféré qui l'a condamné à payer à Guelfe X...des dommages-intérêts sera infirmé et la demande formée par l'intimée de ce même chef devant la cour, rejetée ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage, et ainsi répartis in fine entre les copartageants à proportion des droits de chacun dans ce partage.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant de nouveau,
Rejette la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée soulevée par Guelfe X...,
Constate que des biens non compris dans la donation en avancement d'hoirie consentie par Mme Catherine B...veuve X... à son fils Jean Baptiste le 20 septembre 1971 et dans la donation-partage du 28 mai 1998, savoir :
¿ sur la commune Conca, une parcelle de terre cadastrée section E no 320, lieudit Vangone ou Acquella, pour une contenance totale de 23 h 42 a 02 ca dépendant de la succession maternelle,
¿ sur la commune de Zonza, une parcelle de terre section L no 1408, lieudit Pinarello, d'une contenance de 14 a 95 ca dépendant de la succession maternelle,
¿ sur la commune de Zonza, une parcelle de terre lieudit Perelli no 1092, pour une contenance de 2 a 52 ca dépendant de la succession maternelle,
¿ sur la commune de Zonza, une parcelle de terre section I no 3493, lieudit Pinarello, d'une contenance de 95 a 35 ca dépendant de la succession maternelle,
¿ dans une construction à usage d'habitation, sise commune de Zonza, hameau ..., cadastrée section G no 416, le lot no 3 consistant en un appartement au rez-de-chaussée de quatre pièces, ainsi que la moitié du grenier et tous droits indéterminés dans la propriété du sol et des parties communes du bien (garage et terrain attenant) dépendant de la succession paternelle, et des meubles (mobilier, bijoux et effets personnels des défunts),
sont restés dans l'indivision,
Ordonne l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage les concernant,
Désigne pour y procédure M. le président de la chambre des notaires de la Corse du Sud avec faculté de délégation à l'un de ses confrères, et renvoie d'ores et déjà les parties devant ce notaire, qui devra procéder à ses opérations en déterminant les droits des parties, les biens meubles et immeubles composant la masse partageable et réaliser un état liquidatif après avoir procédé ou fait procéder à l'évaluation de ces biens, comme au calcul des indemnités d'occupation éventuellement dues,
Invite le président de la chambre des notaires au vu de la copie de la décision qui lui sera transmise par le greffe ou sur requête de Jean Baptiste X..., à faire connaître au plus vite au juge commissaire et aux parties le nom du notaire liquidateur délégué,
Dit que Jean Baptiste X... devra verser directement entre les mains du notaire liquidateur une provision de SEPT CENTS EUROS (700 euros) et cela dans le délai d'un mois suivant sa désignation à charge pour le notaire d'informer immédiatement le juge commissaire de tout retard dans le versement,
Commet le vice-président du tribunal de grande instance d'Ajaccio chargé des successions-partages ou son suppléant en tant que juge commis à la surveillance des opérations de partage,
Rejette la demande de dommages-intérêts formée par Guelfe X...à l'encontre de son frère,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
LE GREFFIER LE PRESIDENT