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19/02/2014 | FRANCE | N°12/00381

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 19 février 2014, 12/00381


Ch. civile B

ARRET No
du 19 FEVRIER 2014
R. G : 12/ 00381 C-FL
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 05 Avril 2012, enregistrée sous le no 11/ 00075

X...Y...

C/
Z...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTS :
M. Stéphane X...né le 05 Juillet 1969 à AUBERVILLIERS (93000) ...20137 PORTO VECCHIO

ayant pour avocat Me Gilles ANTOMARCHI, avocat au barreau de BASTIA
Mme Marie FranÃ

§oise Y...épouse X...née le 12 Octobre 1970 à AJACCIO (20000) ...20137 PORTO VECCHIO

ayant pour avocat Me Gilles A...

Ch. civile B

ARRET No
du 19 FEVRIER 2014
R. G : 12/ 00381 C-FL
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 05 Avril 2012, enregistrée sous le no 11/ 00075

X...Y...

C/
Z...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTS :
M. Stéphane X...né le 05 Juillet 1969 à AUBERVILLIERS (93000) ...20137 PORTO VECCHIO

ayant pour avocat Me Gilles ANTOMARCHI, avocat au barreau de BASTIA
Mme Marie Françoise Y...épouse X...née le 12 Octobre 1970 à AJACCIO (20000) ...20137 PORTO VECCHIO

ayant pour avocat Me Gilles ANTOMARCHI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

Mme Magali Z...née le 28 Avril 1969 à NICE (06000) c/ o M. A...Paul ...20114 FIGARI

ayant pour avocat Me Jean Pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 décembre 2013, devant la Cour composée de :
M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre Mme Marie-Paule ALZEARI, Conseiller Mme Françoise LUCIANI, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 19 février 2014.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Mme Johanna SAUDAN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Un compromis de vente a été signé le 6 décembre 2006 entre les époux X..., vendeurs, et Magali Z..., acquéreur, portant sur le bien immobilier ainsi décrit : « sur le territoire de la commune de Figari (Corse-du-Sud) dans un ensemble immobilier sis sur ladite commune au lieu-dit ..., cadastré section H no 506 pour une contenance de 233 m ², un appartement occupant tout le premier étage, composé d'un séjour/ coin cuisine, d'une salle d'eau/ WC, d'une chambre, et des combles aménagés ¿ » Le prix convenu était de 130 000 euros.

L'acte authentique de vente a été établi le 29 mars 2007, le bien vendu étant ainsi désigné :
« sur la commune de Figari (Corse-du-Sud) : un appartement sis à Figari 20114 lieu-dit ...comprenant : dans une maison en copropriété sise sur ladite commune, lieu-dit ...cadastrée savoir H no506 contenance 2a33ca, ladite maison élevée d'un sous-sol, un rez-de-chaussée, un premier étage et combles au-dessus ¿ Les biens et droits immobiliers suivants : le lot numéro 3 : un appartement composé de trois pièces principales au premier étage. »

Expliquant avoir appris a posteriori que les combles aménagés, constituant la troisième pièce principale, était en réalité en copropriété avec des tiers, Magali Z...a saisi le tribunal de grande instance d'Ajaccio pour obtenir la résolution de la vente, la restitution du prix, les intérêts de l'emprunt immobilier qu'elle a contracté pour l'acquisition du bien, la somme forfaitaire de 1 000 euros en remboursement des impenses d'amélioration de l'appartement, la somme de 5 000 euros au titre du déménagement et de l'éventuel gardiennage des meubles, outre la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire du 5 avril 2012 le tribunal de grande instance d'Ajaccio a :
- annulé la vente passée le 29 mars 2007,
- condamné les époux X...à restituer à Mme Z...la somme de 130 000 euros correspondant au prix de la vente, annulée, du lot 3,
- condamné les époux X...à payer à Mme Z...la somme de 56 932 euros correspondant au coût du crédit contracté pour l'acquisition du bien,
- débouté Mme Z...de sa demande d'indemnisation de la somme de 50 000 euros au titre des impenses,
- condamné les époux X...à payer à Mlle Z...la somme de 2 500 euros au titre des frais de déménagement,
- débouté Mme Z...de sa demande d'indemnisation des éventuels frais de gardiennage des meubles,
- condamné les époux X...à payer à Mme Z...la somme de 650 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné les époux X...aux dépens,
- ordonné la publication du jugement à la conservation des hypothèques d'Ajaccio.

Les époux X...ont formé appel de ce jugement suivant déclaration du 2 mai 2012.

Vu les dernières conclusions des appelants déposées le 1er août 2012, sollicitant :

- la réformation du jugement excepté en ce qu'il a débouté Mme Z...de sa demande tendant à la condamnation des concluants à lui payer une somme de 50 000 euros en remboursement des impenses d'amélioration de l'appartement,
- statuant à nouveau sur les autres chefs le rejet de toutes les demandes de Mme Z...,
- la condamnation de celle-ci au paiement d'une somme de 5 980 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions déposées par Magali Z...le 28 janvier 2013, sollicitant :

- la confirmation du jugement en ce qu'il a considéré que M. X...avait commis un dol, en ce qu'il a prononcé la nullité de l'acte du 29 mars 2011 et condamné les époux X...au remboursement de l'intégralité du prix de vente et au paiement de la somme de 56 932 euros à titre de dommages-intérêts, à payer la somme de 2 500 euros au titre des frais de déménagement,

- à titre subsidiaire qu'il soit dit que les époux X...ont vendu le bien d'autrui et en conséquence le prononcé de la nullité de l'acte du 29 mars 2011, la condamnation des vendeurs au remboursement de l'intégralité du prix de vente, au paiement de la somme de 56 932 euros à titre de dommages-intérêts ainsi que la somme de 2 500 euros au titre des frais de déménagement.
Formant appel incident, elle sollicite la condamnation des époux X...à lui payer la somme de 50 000 euros aux fins de réparer les préjudice moraux, financiers (frais notariés et bancaires) en ce compris l'intégralité des sommes engagées à l'occasion de l'opération immobilière litigieuse ; elle sollicite encore la condamnation des appelants au paiement de la somme de 4 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu l'arrêt avant dire droit du 3 juillet 2013, invitant Mme Z...à produire aux débats les deux assignations des 10 janvier et 9 décembre 2011 régulièrement publiées au service de la publicité foncière d'Ajaccio.

Vu les pièces transmises par RPVA le 11 septembre 2013.
Vu l'ordonnance de clôture du 11 septembre 2013.

SUR CE :

1) Sur la recevabilité de la demande principale :
Mme Z...a produit les assignations du 10 janvier et 9 décembre 2011 régulièrement publiées au service de la publicité foncière d'Ajaccio.
Elle a ainsi justifié de la recevabilité de sa demande en nullité de la vente.
2) Sur la demande principale en nullité de la vente :
Le premier juge a considéré que la tromperie des vendeurs réside dans le fait d'avoir promis de vendre les combles aménagés, alors que ces combles ne figurent pas dans l'acte authentique et que le prix de vente est cependant resté inchangé ; il a souligné que, professionnel de l'immobilier, M. X...ne pouvait pas ignorer que les combles ne lui appartenaient pas.
Il est avéré en cause d'appel, et reconnu par les vendeurs, que les « combles aménagés », visés au compromis de vente, et comptant dans les trois pièces principales mentionnées à l'acte authentique, n'appartenaient pas aux époux X..., mais étaient en copropriété avec les héritiers C....
Il est également reconnu que ces combles aménagés qui constituent en réalité la chambre principale du bien vendu ne sont accessibles que par l'appartement en question.
Il n'y a aucune discordance entre le bien visé dans le compromis de vente et le bien visé dans l'acte authentique, les combles aménagés dans le premier correspondant à une pièce principale dans le second. Mais, à l'évidence, la vente porte en partie sur un bien qui n'appartient pas au vendeur.
Mme Z...estime avoir été victime d'un dol, le vendeur, expert immobilier, ayant lui-même réalisé le rapport d'expertise et le diagnostic immobilier préalables à la vente, ne pouvant pas se méprendre sur l'étendue de ses droits sur l'immeuble, ce d'autant qu'il avait fait établir par sa société un état descriptif de division au moment où il a lui-même acquis l'appartement litigieux. Elle fait valoir que sans cette tromperie, elle n'aurait jamais acheté le bien.
Subsidiairement la vente devrait être annulée sur le fondement de l'article 1599 du code civil, s'agissant du bien d'autrui.
Les appelants affirment qu'au moment de l'achat du bien Mme Z...n'ignorait pas la consistance de celui-ci et avait été préalablement informée par le notaire de la difficulté relative aux combles. S'ils reconnaissent que les combles sont en copropriété avec les consorts C..., ils prétendent que c'est l'agent immobilier rédacteur du compromis qui a pris l'initiative de mentionner les combles aménagés. Ils excipent de leur bonne foi et dénient tout caractère intentionnel à l'erreur contenue dans l'acte. Enfin, ils indiquent que la situation pourrait être régularisée à l'amiable avec les consorts C...par le biais d'une « prescriptive » selon leur propos.
Le dol, cause de nullité de la convention aux termes de l'article 1116 du code civil, est caractérisé dès lors que le vendeur a volontairement trompé l'acquéreur sur la consistance du bien vendu, et que s'il ne l'avait pas fait l'acquéreur n'aurait pas conclu la convention. En l'espèce, il y a indiscutablement une tromperie sur la consistance du bien vendu, les vendeurs ne pouvant pas ignorer que les combles aménagés, devenus pièce principale dans l'acte authentique, ne leur appartenaient pas puisque :

- ils ne le soutiennent pas dans leurs écritures,
- un état descriptif de division dressé devant notaire le 1er décembre 2005, et régulièrement publié, précisait que les combles de l'immeuble font partie du lot numéro 4, et que les propriétaires sont « indéterminés »,
- cet état descriptif a été dressé le même jour que l'acte de vente du lot numéro 3 aux consorts X...par Mme C...,
- M. X..., professionnel de l'immobilier, avait fait réaliser par sa propre société, préalablement au compromis, un rapport d'expertise portant sur le bien vendu, dénommé lot numéro 3. Il y avait inclus les combles aménagés ou plutôt la « chambre 2 » alors que cette pièce faisait partie du lot numéro 4 comme cela ressort clairement de l'état descriptif de division,
- les vendeurs ne produisent pas leur propre titre de propriété, ce qui permet de mettre sérieusement en doute leur bonne foi.
Dans ces conditions il n'est pas concevable qu'il s'agisse d'une simple erreur, imputable au seul agent immobilier rédacteur du compromis, voire au seul notaire. Par ailleurs à la lecture de l'acte il ne ressort nullement que l'acquéreur ait été informé de la difficulté concernant les combles aménagés, la simple visite des lieux ne lui permettant pas de s'en rendre compte.
Si l'acheteur avait su que les combles aménagés-ou chambre 2- auquel on ne peut accéder que par l'appartement qu'elle achetait, appartenaient à des tiers copropriétaires, elle aurait très certainement renoncé à cette acquisition.
La tromperie opérée par le vendeur a donc déterminé le consentement de l'acheteur et, par suite, en application de l'article1116 du code civil la vente doit être annulée.
En conséquence de quoi l'acheteur doit restituer le bien et le vendeur doit restituer le prix soit 130 000 euros, comme l'a dit le tribunal.
Rien n'indique qu'en conséquence de l'annulation de la vente, Mme Z...a dû rembourser l'intégralité du prêt accordé pour l'acquisition du bien, ou qu'elle ait cessé d'en bénéficier. Par conséquent le préjudice allégué par Mme Z...sur ce point ne présente aucune certitude ; par suite, sa demande de remboursement du montant des intérêts du prêt, soit la somme de 56 932 euros, doit être rejetée. Le jugement sera donc infirmé sur ce point.
Sur l'appel incident :
Le premier juge a rejeté la demande de remboursement des dépenses d'amélioration du bien et la demande de frais de gardiennage des meubles, mais a fait droit à la demande de remboursement de frais futurs de déménagements pour 2 500 euros.
En cause d'appel Mme Z...abandonne la demande de remboursement des dépenses d'amélioration du bien et la demande de remboursement des frais de gardiennage. Elle maintient sa demande concernant les frais futurs de déménagement. Elle demande aussi :
- le remboursement des frais notariés liés à l'acte de vente : 9 552 euros,
- les frais engendrés par les prêts bancaires : 500 + 12 267 + 987 euros,
- des dommages intérêts pour préjudice moral : 26 694 euros.
Les appelants concluent au rejet des demandes concernant les frais de déménagement, qui ne seraient pas justifiés.
Sur la demande de remboursement des frais de déménagement :
Le premier juge a exactement estimé que le déménagement de Mme Z...était futur mais certain, puisqu'elle devra forcément quitter les lieux une fois la vente annulée ; il a chiffré les frais à 2 500 euros, chiffre que la cour estime justifié au vu des éléments d'appréciation disponibles.
Sur la demande de remboursement des frais notariés :
L'extrait de compte de Me B... du 30 novembre 2007 démontre que le total des frais notariés s'élève à 9 552, 40 euros. La demande de remboursement du montant de ces frais, en ce qu'elle est justement causée par l'annulation de la vente aux torts du vendeur, doit être accueillie.
Sur la demande de remboursement des frais engendrés par les prêts bancaires :
Ces frais liés à l'emprunt contracté pour l'acquisition du bien devront rester à la charge de Mme Z..., dans la mesure où, comme déjà indiqué, l'intéressée ne démontre pas ni même ne soutient qu'elle a perdu le bénéfice de ce prêt ou qu'elle renonce à le réemployer.
Sur la demande concernant le préjudice moral :
Il est certain que Mme Z...subit un préjudice moral du fait d'avoir dû renoncer à la propriété d'une pièce essentielle de l'appartement qu'elle avait acheté, ce qui l'a conduite à agir en nullité de la vente, et à devoir par conséquent quitter l'appartement qu'elle comptait aménager. Ce préjudice est d'autant plus important qu'elle a été sciemment trompée sur la consistance de la chose vendue par un professionnel de l'immobilier en qui elle devait avoir toute confiance. La cour estime que ce préjudice doit être réparé par une somme de 10 000 euros.
Les dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens méritent confirmation. Les époux X..., qui succombent, seront condamnés aux dépens d'appel.
Ils seront également condamnés à payer à Mme Z...la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné les époux X...à payer à Mme Z...la somme de cinquante six mille neuf cent trente deux euros (56 932 euros) correspondant au coût du crédit contracté pour l'acquisition du bien,

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Déboute Mme Magali Z...de cette demande,
Y ajoutant :
Condamne les époux X...à payer à Mme Magali Z...:
- la somme de neuf mille cinq cent cinquante deux euros et quarante centimes (9 552, 40 euros) au titre du remboursement des frais notariés,
- la somme de dix mille euros (10 000 euros) au titre du préjudice moral,
- la somme de trois mille euros (3 000 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne les époux X...aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 12/00381
Date de la décision : 19/02/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2014-02-19;12.00381 ?
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