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19/02/2014 | FRANCE | N°12/00308

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 19 février 2014, 12/00308


Ch. civile B

ARRET No
du 19 FEVRIER 2014
R. G : 12/ 00308 R-PL
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 20 Mars 2012, enregistrée sous le no 09/ 00335

X... Y...

C/
Z... LA CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTS ET INTIMES :
M. Alain X... né le 27 Janvier 1953 à Maison Carre (Algerie) ......20200 BASTIA

ayant pour avocat

Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, et Me Gilles SIMEONI, avocat au barreau de BASTIA,

M. Fra...

Ch. civile B

ARRET No
du 19 FEVRIER 2014
R. G : 12/ 00308 R-PL
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 20 Mars 2012, enregistrée sous le no 09/ 00335

X... Y...

C/
Z... LA CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE
APPELANTS ET INTIMES :
M. Alain X... né le 27 Janvier 1953 à Maison Carre (Algerie) ......20200 BASTIA

ayant pour avocat Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, et Me Gilles SIMEONI, avocat au barreau de BASTIA,

M. François-Xavier Y...né le 04 Mai 1981 à Marseille (13000) ...20200 BASTIA

assisté de Me Olivier PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMES :

M. Pierre Z... né le 23 Mai 1967 à Gap (05000) C/ o M. et Mme Z... ..., 20200 SAN MARTINO DI LOTA

ayant pour avocat Me Jocelyne COSTA, avocat au barreau de BASTIA

LA CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE prise en la personne de son représentant légal 1, Avenue Napoléon III 20000 AJACCIO

assistée de Me Christian GIOVANNANGELI, avocat au barreau de BASTIA, plaidant par Me Thomas VALERY, avocat au barreau de Bastia
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 décembre 2013, devant la Cour composée de :
M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre Mme Marie-Paule ALZEARI, Conseiller Mme Françoise LUCIANI, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 19 février 2014

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Mme Johanna SAUDAN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE

Le 16 mai 2006 la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Corse (la banque) a consenti un prêt à la SARL Jad Studios (la société).

M. Alain X..., M. Pierre Z..., M. François-Xavier Y...et M. Yannick B... se sont portés caution solidaires par acte sous seing privé du même jour.

La société a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du 11 mars 2008.

Par ailleurs, M. Z... est titulaire, sur les livres de la banque, de trois comptes présentant un solde débiteur.

La banque poursuit auprès des cautions le remboursement du prêt consenti à la société et auprès de M. Z... le recouvrement des soldes débiteurs constatés sur ces comptes.

Par jugement du 20 mars 2012, le tribunal de grande instance de Bastia, statuant au contradictoire des parties a :

- dit que la banque n'est pas fondée à se prévaloir de l'engagement de caution de M. B..., manifestement disproportionné à ses biens et revenus,
- condamné solidairement M. Z..., M. X... et M. Y..., en leur qualité de cautions de la société, à payer a la banque la somme de 85 394, 38 euros qui produira intérêts aux taux contractuel à compter du 7 mai 2008, date de mise en demeure,
- ordonné la capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil,
- condamné M. Z... à payer à la banque la somme de 54 394, 38 euros au titre des soldes débiteurs des comptes courants, avec intérêts au taux contractuel à compter du 17 septembre 2006,
- ordonné la capitalisation des intérêts,
- condamné M. Z..., M. X... et M. Y...à payer à la banque la somme de 1 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné M. Z..., M. X... et M. Y...aux dépens.

Par déclarations reçues au greffe de la cour le 6 avril 2012 et le 2 octobre 2012, M. X... et M. Y...ont respectivement relevé appel de ce jugement.

La jonction des deux instance a été prononcée par une ordonnance du conseiller de la mise en état du 2 mai 2013.

En ses dernières conclusions déposée le 4 juillet 2012, M. X... demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il prononce des condamnations à son encontre,

- principalement, constater la manquement de la banque à son obligation de mise en garde et la débouter en conséquence des demandes formées à son encontre,

- subsidiairement, constater l'irrégularité de l'acte de cautionnement et débouter en conséquence la banque des demandes formées à son encontre,
- à titre infiniment subsidiaire, le décharger de ses obligations en qualité de caution du fait de la privation de son recours subrogatoire ; prononcer la nullité de l'acte de cautionnement pour vice du consentement ; débouter en conséquence la banque de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre,
- à titre très infiniment subsidiaire, constater le manquement de la banque à son obligation d'information annuelle des cautions et prononcer en conséquence la déchéance du droit aux intérêts et des pénalités,
- dans tous les cas, condamner la banque au paiement de la somme de 85 000 euros de dommages-intérêts et de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées le 28 août 2012, M. Y...demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions prononçant des condamnations à son encontre et le déboutant de ses demandes,
- et statuant à nouveau, débouter la banque de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de M. Y...,
- au principal, condamner la banque à verser la somme de 85 306, 43 euros à M. Y...à titre de dommages et intérêts et frais éventuels y afférents ; opérer la compensation entre ces dommages et intérêts et les sommes auxquelles il serait tenu en sa qualité de caution de la société,
- au subsidiaire, décharger ou réduire à sa juste proportion la valeur de l'engagement de M. Y...en sa qualité de caution du fait de la privation de son recours subrogatoire ; prononcer la nullité de l " acte de cautionnement de pour vice de consentement ; débouter en conséquence la banque de l'ensemble de ses demandes,
- au plus que subsidiaire, constater le manquement de la banque à son obligation d " information annuelle des cautions ; prononcer en conséquence la déchéance du droit aux intérêts échus, pénalités et intérêts de retard,
- à titre infiniment subsidiaire, nommer tel expert qu'il plaira à la cour pour évaluer la valeur réelle des sommes dues au titre du prêt dont M. Y...s'est porté caution au regard de la généralité des sommes versées par la société et des divers prêts contractés dont ceux sans cautionnement,
- en tout état de cause, condamner la banque à payer à M. Y...la somme de 4 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.

En ses dernières conclusions déposées le 12 septembre 2012, M. Z..., formant appel incident, demande à la cour de :

- sur la cautionnement, à titre principal infirmer le jugement déféré ; dire et juger manifestement disproportionné l'engagement de caution de M. Z... et en conséquence que la banque ne saurait se prévaloir de l'acte de cautionnement à son égard,
- à titre subsidiaire, constater que la banque ne justifie pas avoir rempli les obligations d'information de la caution et en conséquence prononcer la déchéance du droit aux intérêts et pénalités,
- en tout état de cause, condamner la banque au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En ses dernières conclusions déposées le 4 septembre 2012, la banque demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions prononçant des condamnations à l'encontre de MM X..., Y...et Z... et rejetant les demandes indemnitaires formées par ces derniers ; elle sollicite en outre leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée par une ordonnance du 11 septembre 2013, fixant l'audience de plaidoiries au 12 décembre 2013.

SUR QUOI, LA COUR

La cour se réfère à la décision entreprise et aux conclusions récapitulatives susdites pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties.

Sur la demande relative aux comptes de M. Z...

Il ressort de la procédure que l'intéressé a sollicité I'ouverture de trois comptes de dépôt auprès de la banque les 29 mars 1991, 2 février 1996 et 2 juin 2004 et que ces comptes présentaient à la fin du mois

d'octobre 2008, les soldes débiteurs suivants :
-3 863, 79 euros pour le compte 1017036010,
-6 589, 54 euros pour le compte 31167012010,
-43 941, 05 euros pour le compte 73001613841,
soit au total la somme de 54 394, 38 euros.

Force est de constater, à la lecture des dernières conclusions susvisées déposées par M. Z..., que celui-ci n'invoque aucun moyen d'appel à l'encontre de la disposition du jugement le condamnant au paiement de ladite somme, disposition dont il ne sollicite d'ailleurs pas l'infirmation, le dispositif de ses conclusions ne contenant que des prétentions concentrées sur son engagement de caution exclusivement.

En l'absence de moyens d'appel, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a justement constaté que, contrairement à l'affirmation initiale de M. Z..., celui-ci a été régulièrement informé du montant des intérêts dus en cas de solde débiteur ainsi que des différents frais appliqués par la banque en pareil cas, ce par les mentions du taux pratiqué sur les conventions d'ouverture du compte qu'il a signées et qui lui ont été remises ainsi que par les renseignements régulièrement portés sur les relevés de compte qui lui on été adressés et qu'il ne conteste pas avoir reçus.

Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné M. Z... à payer à la banque la somme de 54 394, 38 euros au titre des soldes débiteurs des comptes courants, avec intérêts au taux contractuel à compter du 17 septembre 2006 et ordonné la capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

Sur la demande relative aux engagements de caution, la cour relève que M. B..., exclu des poursuites par le tribunal, n'a pas été intimé dans les déclarations d'appel et que la banque n'a pas formé appel provoqué à son encontre ; qu'en cohérence avec cette situation, aucune des parties n'a formé de demandes dirigées contre M. B... ni sollicité expressément l'infirmation des dispositions du jugement le concernant.

Dans ces conditions, la cour estime que la disposition du jugement déféré disant que la banque n'est pas fondée à se prévaloir de l'engagement de caution de M. B..., manifestement disproportionné à ses biens et revenus, est devenue définitive.

Il est constant que la banque a consenti à la société un prêt de 110 000 euros garanti notamment par les cautions solidaires de MM X..., Z... et Y...selon acte sous seing privé du 18 mai 2006 ; que les cautions ont renoncé au bénéfice de discussion et de division ; que chaque caution était associée ou gérante de la société.

Il est encore constant que la société a été mise en liquidation judiciaire le 11 mars 2008 ; que la banque a déclaré sa créance au passif pour un montant de 77 615, 93 euros à titre privilégié et de 14 259, 67 euros à titre chirographaire, dans des conditions dont la régularité n'a pas été contestée ; enfin que les cautions n'ont pas donné suite à la mise en demeure d'exécuter leur engagement qui leur a été notifiée le 7 mai 2008.

Pour obtenir l'infirmation de la décision qui les condamne solidairement à payer a la banque la somme de 85. 394, 38 euros en exécution de leur engagement de caution, MM X..., Y...et Z..., reprenant leurs moyens invoqués devant le tribunal, font valoir que la banque a manqué à son devoir de mise en garde alors qu'elle avait octroyé à la société un crédit excessif ; que leur engagement était disproportionné au sens de l'article L 341-4 du code de la consommation ; que les conditions dans lesquelles leur consentement a été obtenu sont dolosives ; que la mise hors de cause de M. B... leur a fait perdre leur recours subrogatoire ; enfin que la banque n'a pas respecté son obligation d'information annuelle imposée par l'article L 341-6 du même code. M. X... soutient en outre que la mention manuscrite exigée par l'article L 341-2 du code de la consommation ne figure pas sur son engagement de caution et que ses paraphes ne figurent pas sur l'acte de prêt.

Sur la régularité formelle des actes de caution, il résulte de l'examen de ces pièces produites aux débats que chaque caution a personnellement signé et paraphé de sa main son engagement contenant dans chaque cas avant sa signature la mention manuscrite légalement exigée ; que chaque engagement ainsi signé vise expressément, dans des termes ne présentant aucune équivoque, le prêt de 110 000 euros consenti à la société, prêt dont toutes les caractéristiques sont bien spécifiées. Ces constations suffisent à caractériser la régularité en la forme des engagements pris par chaque caution, nonobstant le moyen non fondé tiré par M. X... des dispositions de l'article L 341-2 du code de la consommation.

Sur le devoir de mise en garde, il appartient au créancier de mettre en garde la caution lors de la conclusion du contrat quant à sa capacité financière et aux risques d'endettement né de l'octroi de prêts au débiteur principal. Toutefois, la cour doit rechercher en premier lieu si le crédit octroyé peut être considéré comme excessif ou en tout cas s'il existait un risque réel de non-remboursement, ce qui est une condition de naissance du devoir de mise en garde.

Il résulte des justificatifs produits, en particulier l'état prévisionnel établi par un expert-comptable et dont les appelants ne critiquent pas le contenu, qu'au moment de l'octroi du prêt, les résultats escomptés dès la première année d'exercice et le volume de la masse salariale laissaient raisonnablement présager, comme le soutient justement la banque, que le remboursement d'échéances mensuelles à hauteur de 2 018, 38 euros, ce qui n'est pas excessif, ne poserait aucune difficulté particulière pour la société.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la société ne présentait pas un solde débiteur antérieurement à la conclusion du contrat de prêt litigieux ; en effet, la banque démontre que le solde débiteur invoqué n'était que la conséquence d'un virement de compte à compte à la demande de la société qui disposait de comptes bancaires dans deux établissements différents. Il n'apparaît pas, à la lecture des pièces produites, que la capacité de remboursement de la société était obérée par d'autres prêts qui lui auraient été consentis antérieurement au crédit litigieux, la réalité de ces prêts n'étant pas avérée. Par ailleurs, l'endettement personnel de M. Z... ne pouvait être pris en considération dès lors qu'il n'influait pas sur la capacité de remboursement de la société, seule bénéficiaire de la sûreté litigieuse.

Il est ainsi suffisamment établi que, comme le soutient la banque, il n'existait pas, lors de la conclusion du contrat de prêt et des contrats de caution, un risque d'endettement avéré. Même si l'on peut considérer qu'au regard de leur niveau de qualification, apparemment peu élevée, et de leur expérience des affaires, apparemment faible, les cautions n'étaient pas averties, elles étaient cependant en mesure d'apprécier la portée et les risques de leur engagement compte tenu de la grande simplicité de l'opération envisagée et de leur implication personnelle dans l'affaire, chacun étant gérant ou associé, comme déjà indiqué.

Il convient, par suite, d'écarter le moyen pris du manquement de la banque au devoir de mise en garde.

Sur le principe de proportionnalité, l'article L 341-4 du code de la consommation dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de la caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

En présence de cautions solidaires, le montant total de l'engagement est comparé aux ressources de chaque caution.

Il ressort des pièces produites que lorsqu'ils ont été interrogés par la banque sur leur situation personnelle avant leur engagement de caution, M. Z... a déclaré un revenu annuel de 54 000 euros (4 500 euros par mois), M. X... un revenu annuel de 58 567 euros (4 880 euros par mois) et M. Y...un revenu mensuel de 1 500 euros environ.

Il ne fait aucun doute que les facultés contributives de M. X..., qui n'invoque pas d'autres engagements ou dettes à la date considérée, lui permettait d'honorer l'engagement litigieux. La même observation doit être faite pour M. Z... dont les comptes personnels ouverts sur les livres de la banque n'étaient pas encore débiteurs au moment de la souscription du cautionnement, de sorte qu'il ne peut se prévaloir de cet endettement comme il tente de le faire.

MM X... et Z... ne sont en conséquence pas fondés dans leur moyen tiré du non-respect du principe de proportionnalité, comme l'a jugé à bon droit le tribunal.

En revanche pour M. Y..., cette disproportion est manifeste, contrairement à l'opinion du premier juge. En l'absence de patrimoine et alors qu'il supportait des mensualités de remboursement d'un prêt personnel de 545 euros déclarées la banque, les ressources dont il disposait, limitées à un salaire mensuel de 1 500 euros, ne lui permettait pas d'assurer l'exécution d'une garantie portant sur somme de 143 000 euros. Les justificatifs produits sur sa situation actuelle démontrent qu'il n'est pas revenu à meilleure fortune, les derniers revenus fiscalement déclarés étant de l'ordre de 5 500 euros par an.

Il convient donc de dire, par une disposition infirmative du jugement déféré, que la banque n'est pas fondée à se prévaloir de l'engagement de caution de M. Y...et de la débouter en conséquence des demandes formées à son encontre.

Sur le vice du consentement, MM X... et Y..., qui supportent sur ce point la charge de la preuve, échouent à démontrer, à travers les simples affirmations dont ils se contentent, que la banque leur aurait sciemment dissimulé des informations, notamment sur la situation de la société, pour obtenir leur engagement. En faisant souscrire à MM B... et Y..., un engagement disproportionné, la banque a certes commis une faute qui, cependant, ne présente pas un caractère délibéré, comme le prétendent M. X... et M. Y.... A défaut d'éléments complémentaires, il ne peut être soutenu que la banque a voulu tromper les cautions ni que le consentement de celles-ci a été vicié par l'imprudence qu'elle a commise. Il convient en effet de rappeler qu'en se portant caution, MM Z...X...et Y...ont renoncé au bénéfice de division, s'engageant ainsi à régler la totalité de la dette y compris en cas d'insolvabilité d'un des co-obligés.

En définitive, en l'absence de manoeuvres dolosives caractérisées, le vice du consentement allégué ne peut être retenu et les demandes d'annulation des cautionnements formées de ce chef par MM X... e Y...ont été en conséquence justement rejetées par le premier juge.

M. X... ne peut utilement exciper de la perte du recours contre les deux cautions déchargées prévu par l'article 2310 du code civil ; en effet, compte tenu de l'insolvabilité avérée tant de M. B..., au vu des constatations faites par le premier juge, que de M. Y..., la perte de ce recours ne constitue pas un moyen susceptible d'être retenu y compris au titre de la perte de chance.

En outre, la décharge prévue par l'article 2314 du code civil, est inutilement invoquée dès lors que, comme le soutient à bon droit la banque, elle ne peut être mise en oeuvre qu'en cas de perte d'un droit préférentiel, condition non remplie en l'espèce puisque la banque ne détenait qu'un droit de gage général envers MM B... et Y....

Sur l'obligation d'information annuelle des cautions, la banque apporte la preuve, en produisant d'une part la copie de procès-verbaux de constats d'huissier qui attestent de l'envoi annuel des lettres d'information à MM Z... et X... notamment, d'autre part une copie de ces lettres d'information, apporte suffisamment la preuve du respect de l'obligation qui lui est imposée par l'article L 341-6 du code de la consommation, aucune circonstance permettant de douter de l'envoi de ces lettres n'étant établie ni d'ailleurs invoquée.

Il résulte, de tout ce qui précède, qu'en conséquence de la défaillance du débiteur principal en liquidation judiciaire, la banque est fondée à réclamer à MM Z... et X..., en exécution de leur engagement de caution, le paiement de sa créance d'un montant justifié de 85 306, 43 euros outre intérêts au taux contractuel à compter de la mise en demeure du 7 mai 2008. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef ainsi que dans sa disposition ordonnant la capitalisation des intérêts dont les conditions légales sont réunies.

Enfin, ni M. Y...ni M. X... ne sont fondés dans leur demande de dommages-intérêts dirigée contre la banque. S'agissant du premier, le non-respect du principe de proportionnalité dont il a été victime trouve une sanction appropriée et suffisante dans la décharge de son engagement de caution qui a été prononcée. S'agissant du second, les constations ci-dessus effectuées démontrent que la banque n'a commis aucun manquement à son encontre. La disposition du jugement rejetant les demande de dommages-intérêts formées par les intéressés sera en conséquence confirmée.

Les dispositions du jugement déféré portant attribution à la banque de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et relatives aux dépens de première instance seront confirmées sauf à l'encontre de M. Y....

Les dépens de l'appel seront mis à la charge de MM Z... et X... solidairement. Aucune considération ne commande de faire application, dans cette instance, au profit de quiconque, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Constate que la disposition du jugement déféré disant que la Caisse Régionale de Crédit Mutuel de la Corse n'est pas fondée à se prévaloir de l'engagement de caution de M. Yannick B..., manifestement disproportionné à ses biens et revenus, est devenue définitive,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. François-Xavier Y...solidairement avec M. Z... et M. X..., en leur qualité de cautions de la société Jad Studios, à payer à la Caisse Régionale de Crédit Mutuel de la Corse la somme de 85 394, 38 euros qui produira intérêts aux taux contractuel à compter du 7 mai 2008,
Statuant à nouveau de ce chef,
Dit que la Caisse Régionale de Crédit Mutuel de la Corse n'est pas fondée à se prévaloir de l'engagement de caution de M. François-Xavier Y..., manifestement disproportionné à ses biens et revenus et la déboute en conséquence de la demande en paiement formée à son encontre,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :
- condamné solidairement M. Pierre Z... et M. Alain X..., en leur qualité de cautions de la société Jad Studios, à payer à la Caisse Régionale de Crédit Mutuel de la Corse la somme de 85. 394, 38 euros qui produira intérêts aux taux contractuel à compter du 7 mai 2008, date de mise en demeure,
- ordonné la capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil,
- condamné M. Z... à payer à la banque la somme de 54 394, 38 euros au titre des soldes débiteurs des comptes courants, avec intérêts au taux contractuel à compter du 17 septembre 2006,
- ordonné la capitalisation des intérêts,

- rejeté les demandes en paiement de dommages-intérêts dirigées contre la Caisse Régionale de Crédit Mutuel de la Corse et les demandes d'annulation du cautionnement formées par M. François-Xavier Y...et M. Alain X...,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. François-Xavier Y..., avec M. Z... et M. X..., à payer à la Caisse Régionale de Crédit Mutuel de la Corse la somme de 1 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance,
Statuant à nouveau de ce chef,
Dit que les condamnations prononcées aux titres de l'article 700 et des dépens de première instance seront supportées par M. Pierre Z... et M. Alain X..., solidairement,
Déboute les parties de leur demande tendant à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans l'instance d'appel,
Condamne M. Pierre Z... et M. Alain X..., solidairement, aux dépens de l'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 12/00308
Date de la décision : 19/02/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2014-02-19;12.00308 ?
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