Ch. civile A
ARRET No
du 12 FEVRIER 2014
R. G : 12/ 00585 C-MB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 29 Mai 2012, enregistrée sous le no 09/ 01783
X...
C/
Y...SARL CABINET SAINT NICOLAS SA COVEA RISKS
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DOUZE FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE
APPELANT :
M. Ange Félix X...né le 10 Avril 1942 à FELCE (20234) ...20200 BASTIA
ayant pour avocat Me Martine CAPOROSSI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMES :
M. Paul Y...né le 16 Août 1938 à BASTIA (20200) ...20200 BASTIA
ayant pour avocat Me Jean Louis RINIERI, avocat au barreau de BASTIA
SARL CABINET SAINT NICOLAS prise en la personne de son représentant légal en exercice 44 Boulevard Graziani 20200 BASTIA
ayant pour avocat Me Jean Pierre SEFFAR, avocat au barreau de BASTIA
SA COVEA RISKS prise en la personne de son représentant légal en exercice 14 Boulevard Alexandre Oyon-B. P 26166 72008 LE MANS
ayant pour avocat Me Olivier PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 novembre 2013, devant Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 29 janvier 2014, prorogée par le magistrat par mention au plumitif au 12 février 2014.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Johanna SAUDAN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. Ange X...était propriétaire d'un appartement au 2ème étage d'un immeuble situé à Bastia, ..., au dessus duquel se trouve un appartement en location administré par la SARL Cabinet Saint-Nicolas, appartenant à M. Paul Y....
Par un acte sous seing privé du 23 juin 2008, M. X...a signé un compromis de vente avec M. E...-F...portant sur son appartement ci-dessus désigné.
Suivant acte authentique reçu, le 16 avril 2009, par Me Patrick A..., notaire associé, M. X...a vendu ledit appartement à Mme C...veuve D..., moyennant le prix de 190 000 euros.
Estimant que les époux E...-F...se sont rétractés de leur acquisition convenue au prix de 249 000 euros, en raison des conséquences d'un dégât des eaux survenu dans l'appartement de M. Y..., M. X...a, par acte d'huissier du 05 octobre 2009 assigné ce dernier, en responsabilité, devant le tribunal de grande instance de Bastia.
Puis, la SARL Cabinet Saint-Nicolas ainsi que la compagnie d'assurances Covea Risks ont été, successivement, appelées en la cause et ces différentes procédures ont été jointes.
Par jugement contradictoire du 29 mai 2012, le tribunal de grande instance de Bastia a :
- débouté M. Ange X...de l'ensemble de ses demandes,
- condamné M. Ange X...à payer à, M. Paul Y..., la SARL Cabinet Saint-Nicolas et à la compagnie Covea Risks, chacun, la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civil,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné M. X...aux dépens.
Par déclaration reçue le 18 juillet 2012, M. X...a interjeté appel de ce jugement à l'encontre de, la SARL Cabinet Saint-Nicolas, M. Paul Y...et la compagnie Covea Risks.
Par ses dernières conclusions reçues le 03 octobre 2012, l'appelant sollicite la réformation du jugement déféré et, au visa des articles 1382 et 1383 du code civil, la condamnation de M. Y...à lui payer les sommes suivantes :
-59 000 euros au titre de la perte de la valeur vénale de l'appartement du ...à Bastia,
-13 333 euros au titre de son préjudice de jouissance,
-3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens incluant ceux de première instance.
Par ses dernières conclusions reçues le 22 octobre 2012, M. Y...sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Par ses dernières conclusions reçues le 19 novembre 2012, la SA Covea Risks demande à la cour, au principal, de confirmer le jugement
entrepris en toutes ses dispositions, au subsidiaire, si par extraordinaire, la responsabilité du cabinet Saint-Nicolas était engagée, de dire et juger que sa garantie est acquise audit cabinet et que sa garantie sera limitée au surplus de la franchise qui restera à la charge du cabinet Saint-Nicolas à hauteur de 10 % du montant du sinistre, avec un minimum de 1, 07 euros et un maximum de 4 573, 00 euros.
Elle demande en tout état de cause, la condamnation de MM. Y...et X...à lui payer la somme de 2 000 euros chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens et de dire que, conformément à l'article 699 du même code, Me Olivier Pellegri, pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.
Par ses dernières conclusions reçues le 03 décembre 2012, la SARL Cabinet Saint-Nicolas sollicite, principalement, au visa des articles 544 et 1382 du code civil, la confirmation du jugement querellé en toutes ses dispositions et la condamnation de MM Y...et X...à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Subsidiairement, elle demande à la cour de prendre acte de ce que la SA Covea Risks reconnaît lui devoir sa garantie de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées contre elle.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions sus-visées et au jugement déféré.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 juin 2013.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les demandes principales de l'appelant
Le tribunal a considéré que les demandes de M. X...devaient s'apprécier sur le fondement des articles 544 et 1382 du code civil et qu'il n'avait donc pas à caractériser la faute de son voisin, mais devait prouver l'existence d'un trouble dépassant les inconvénients normaux du voisinage.
Il a estimé que les pièces produites par M. X...n'établissaient pas la preuve que le dégât des eaux survenu en octobre 2008 était la raison de la renonciation par les époux E... F... à l'achat de son appartement, ni que ce sinistre aurait perduré dans le temps.
En cause d'appel, M. X...fait valoir que le jugement querellé procède d'une véritable erreur d'appréciation et réitère, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, ses prétentions, moyens et arguments de première instance.
Il soutient que quelle que soit la valeur vénale de son appartement à la date de la vente réalisée au profit de Mme D..., il suffit qu'il n'ait pu le vendre au prix de 249 000 euros, accepté par les époux E... F..., du fait de l'inertie de M. Y..., pour entrer en voie de condamnation.
L'appelant allègue que son appartement était impropre à sa destination, la deuxième fuite ayant endommagé également la cuisine et affirme que c'est la raison pour laquelle les époux E... F..., ont jugé plus prudent de renoncer à l'investissement locatif projeté.
Il précise que les dégâts relevés par les experts ne sont pas des désordres mineurs et ont fait l'objet d'un devis de plus de 2 000 euros.
M. Y...conclut que le préjudice allégué par l'appelant n'est pas prouvé et que sa responsabilité ne peut découler des articles 1382 et 1383 du code civil, dès lors qu'il n'a commis aucune faute.
Il réplique que l'attestation du 18 octobre 2008, de Me B..., produite par l'appelant, n'a aucun caractère probant dès lors qu'elle ne relate pas un fait et n'établit pas que les époux E... F... ont renoncé à leur acquisition pour l'unique raison que l'appartement concerné avait subi un dégât des eaux, que M. G...ne produit pas d'attestation émanant de ces derniers et qu'il n'établit pas davantage avoir accompli des démarches pour solutionner le problème.
L'intimé affirme que le prix de 190 000 euros, auquel a été vendu l'appartement à Mme D..., soit une différence de 60 000 euros, correspond en réalité au prix du marché.
Il précise que les réparations ont été effectuées dans son appartement le 18 octobre 2008 et que l'appelant avait eu le temps de faire procéder à ses propres travaux, estimés à 4 013, 54 euros selon le rapport EUREXO et pris en charge par les assureurs.
La SA Covea Risks conclut, essentiellement, que l'appelant avait eu le temps de se faire indemniser par la compagnie d'assurance MAIF du coût des travaux de remise en état de son appartement et qu'il avait d'ailleurs dû toucher cette somme (4 013, 54 euros), probablement avant la vente à Mme D....
Elle déclare que l'appelant a délibérément et en toute conscience, baissé le prix de 59 000 euros et ce sans aucune faute de qui que ce soit.
De son côté, la SARL Cabinet Saint-Nicolas déclare que l'appelant ne rapporte la preuve, ni d'une perte de valeur vénale ni d'un préjudice de jouissance.
Elle fait valoir que selon le compromis de vente du 23 juin 2008, l'acte de vente aux époux E...-F...devait être passé au plus tard le 23 septembre 2008, qu'il n'a pas été régularisé et que rien ne permet de dire que ces derniers ont renoncé à cette acquisition.
L'intimée précise que la dernière fuite a été réparée en octobre 2008 et que l'appartement de M. X...ne présentait aucun désordre lorsqu'il a été vendu à Mme D...et donc, que le prix n'en a pas été minoré de ce fait.
Elle ajoute que le préjudice de jouissance allégué n'est pas démontré, et qu'en outre les fuites n'ont occasionné que des désordres minimes qui n'ont pas empêché la location de l'appartement.
La cour relève que l'appelant qui fonde sa demande de paiement à l'encontre de M. Y..., sur les articles 1382 et 1383 du code civil, doit, conformément à ces textes, prouver l'existence d'une faute commise par celui-ci, avoir subi des préjudices ayant un caractère certain et un lien de causalité également certain entre cette faute et ses préjudices, sans qu'une autre cause soit envisageable.
Or, en l'espèce, au vu des pièces versées aux débats, ni la faute de M. Y..., ni même les préjudices invoqués par l'appelant ne sont démontrés.
En effet, l'appelant ne produit aucune attestation des époux E...-F...déclarant personnellement avoir renoncé à l'acquisition de l'appartement de M. X..., en raison de l'existence d'un dégât des eaux.
Par ailleurs, la cour observe que le compromis de vente du 23 juin 2008, signé entre M. X...et M. E...-F..., stipule :
- un prix de vente par M. X...de son appartement de 246 000 euros et non 249 000 comme l'indique l'appelant, ce compromis portant également sur la vente, au même acquéreur, par Mme H...représentée par M. X..., de deux caves (lots 32 et 33), moyennant le prix de 3 000 euros,
- une commission d'agence de 14 000 euros mise à la charge de M. X...qui a donné mandat au notaire de verser cette somme directement à Eden Immobilier, donc sur le prix de 246 000 euros,
- une régularisation de la vente par acte authentique au plus tard trois mois à compter de la date de ce compromis, par le notaire, de l'acquéreur, chargé d'établir cet acte, Me Béatrice Dominici, le notaire du vendeur étant Me Marthe B...,
- différentes conditions suspensives et notamment l'obtention d'un prêt par M. E...-F....
L'attestation du 13 octobre 2008 de Me Marthe B..., notaire de M. X..., indiquant que le compromis de vente entre M. X...et M. E...-F..." a été rompu par l'acquéreur, du fait de l'existence d'un dégât des eaux dans l'appartement ", n'est pas un acte authentique ayant force probante, et ne suffit pas, à défaut d'être corroboré par d'autres éléments, à prouver que le dégât des eaux était la seule raison pour la quelle M. E...-F...a renoncé à son acquisition, qui, au demeurant, devait être régularisée par la signature des parties de l'acte authentique de vente, au plus tard le 23 septembre 2008, soit avant le dégât des eaux survenu en octobre 2008.
En outre, l'acte notarié du 16 avril 2009, de vente par M. X...à Mme C...veuve D..., moyennant le prix de 190 000 euros, ne mentionne aucune déclaration particulière sur l'état de l'appartement vendu, notamment sur l'existence du dégât des eaux invoqué par M. X..., ni d'une réduction du prix pour cette même raison.
Enfin, les intimés, justifient par les pièces qu'ils produisent, que ce sinistre a été pris en charge par les assureurs respectifs de M. X...et M. Y...et que les travaux de réparation ont été réalisés dans l'appartement de ce dernier, auquel aucune faute de négligence ou d'imprudence ne peut être reprochée.
Au vu de l'ensemble des éléments et pièces soumis à son appréciation, c'est donc à juste titre que les premiers juges ont débouté M. X...de ses demandes.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes subsidiaires formulées par la SA Covea Risks et la SARL Cabinet Saint-Nicolas.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
L'équité commande de confirmer le jugement querellé en ses dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner l'appelant à payer à la SA Covea Risks et la SARL Cabinet Saint-Nicolas, la somme de 1 000 euros, en application de ce même texte pour la procédure d'appel.
L'appelant, succombant en son recours, supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Vu les articles 1382 et 1383 du code civil,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. Ange X...à payer tant à la SA Covea Risks qu'à la SARL Cabinet Saint-Nicolas, la somme de mille euros (1 000 euros), au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de tous autres chefs de demande ;
Condamne M. Ange X...aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT