Ch. civile A
ARRET No
du 27 NOVEMBRE 2013
R. G : 13/ 00527 R-JG
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Juge aux affaires familiales d'Ajaccio, décision attaquée en date du 13 Juin 2013, enregistrée sous le no 12/ 00370
X...
C/
Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE TREIZE
APPELANT :
M. Didier X...né le 25 Février 1963 à Saint Mandé ...20146 SOTTA
assisté de Me Philippe JOBIN de la SCP JOBIN, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Valérie GUISEPPI, avocat au barreau d'AJACCIO
INTIMEE :
Mme Frédérique Y...née le 18 Août 1963 à NICE ... 06000 NICE
assistée de Me Chantal FLORES SAGNET, avocat au barreau d'AJACCIO
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro du 27/ 08/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue en chambre du conseil du 23 septembre 2013, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Laetitia PASCAL, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2013
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé hors la présence du public par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
De l'union de M. Didier X...et de Mme Frédérique Y...est née une fille Paula Gabrielle le 18 avril 2001 à Nice.
M. X...et Mme Y...se sont séparés au mois de décembre 2010.
Saisi tant par M. Didier X...que par Mme Y...d'une demande tendant à voir fixer la résidence de Paula à leur domicile respectif, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d'Ajaccio a par décision du 12 juin 2012 joint les deux procédures et ordonné, avant dire droit :
- un examen psychologique des deux parents et de l'enfant confiée à M. Alain A...avec mission de :
se faire remettre tous documents médicaux permettant de retracer l'éventuel suivi psychologique ou psychiatrique de chacune des personnes sus-visées,
dire si chacune de ces personnes présente des anomalies psychiques, mentales ou des troubles du comportement,
indiquer le cas échéant la nature des éventuelles difficultés qui apparaissent chez chacune des personnes analysées, dans son comportement, dans ses relations avec ses parents pour Paula ou avec toute autre personne de l'entourage amenée à intervenir dans son éducation,
plus précisément dans le cas d'espèce,
dire si Mme Frédérique Y..., a par le passé, déjà fait l'objet d'un suivi psychologique, d'une hospitalisation, si elle a déjà fait une tentative de suicide,
préciser le suivi médical, psychologique ou psychiatrique dont a bénéficié Mme Frédérique Y...après les difficultés survenues à la fin de l'année 2011 et au début de l'année 2012,
préciser si possible la nature et l'origine de ces difficultés : conjoncturelles et résultant de la séparation du couple ou plus profondément liées à la structure de la personnalité de Mme Frédérique Y...,
dire si Mme Frédérique Y...est, d'un point de vue psychologique, en mesure de prendre en charge sa fille âgée de 11 ans, en résidence habituelle, ou dans le cadre de l'exercice d'un droit de visite et d'hébergement à son propre domicile,
dire s'il existe dans la personnalité de M. Didier X...des éléments de fonctionnement et de comportement susceptibles de déstabiliser ou de fragiliser son entourage et notamment sa compagne et de nature à susciter des épisodes dépressifs,
fournir le cas échéant au tribunal tout élément d'appréciation de nature à permettre de déterminer la résidence ou les modalités du droit de visite et d'hébergement dont peut bénéficier le parent chez qui la résidence de l'enfant n'est pas fixée,
- une expertise psychiatrique des deux parents et de l'enfant confiée au docteur Fabrice B...avec mission de :
se faire remettre tous documents médicaux permettant de retracer le suivi psychiatrique et psychologique des personnes sus-visées,
procéder à l'examen de celles-ci,
dire si chacune de ces personnes est atteinte d'une maladie psychiatrique, si oui préciser laquelle,
dire si chacune de ces personnes est atteinte de fragilités psychologiques, si oui préciser laquelle,
décrire si besoin l'évolution psychiatrique et psychologique de chacune de ces personnes depuis sa première prise en charge,
dire si elles font actuellement l'objet d'un suivi psychiatrique ou psychologique et si elles ne font plus l'objet d'un suivi, dire depuis quand,
dire si les troubles ou la maladie dont l'une ou l'autre de ces personnes est éventuellement atteinte sont susceptibles de variations dans le temps et sont de nature, lorsqu'ils se manifestent, à l'empêcher de se prendre en charge dans les différents actes de la vie familiale (résidence habituelle de l'enfant, droit de visite et d'hébergement),
- une enquête sociale avec mission de :
rencontrer chacun des parents ainsi recueillir tous renseignements utiles sur :
leur histoire personnelle, leur lieu de vie, leur situation matérielle,
les garanties que présentent chacun d'eux sur les plans affectifs, psychologiques, éducatifs, et le cas échéant, que présentent les personnes qui partagent leur existence,
les conditions d'entretien et d'éducation offertes à l'enfant,
rencontrer l'enfant :
au domicile en présence de chacun de ses deux parents, en leur présence et en dehors de celle-ci,
décrire ses attitudes et les relations qu'il entretient avec chacun des parents et les membres de la famille,
rencontrer toute personne proche de l'entourage familial (notamment les trois demi-frères de Paula), amical, scolaire ou professionnel susceptible de donner des renseignements pertinents,
faire toute proposition utile à la solution du litige,
en précisant qu'il n'entre pas dans la mission d'enquête sociale de recueillir les renseignements et sur les ressources et les charges de chacune des parties, celle-ci devant le cas échéant suivant la nature des demandes, en justifier au plus tard pour la date de l'audience de renvoi.
à titre provisoire,
- dit que l'autorité parentale sera exercée conjointement par les deux parents,
- dit que Paula résidera chez son père, M. Didier X...,
- accordé à Mme Frédérique Y...:
un droit de visite et d'hébergement qui se déroulera au domicile des grands-parents à Nice, durant la moitié des congés scolaires (grandes vacances et congés intermédiaires),
un droit de visite simple s'exerçant un week-end par mois en Corse (un samedi plus un dimanche), l'enfant devant rentrer dormir chez son père.
Après dépôt des rapports d'expertise et d'enquête, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d'Ajaccio a par
jugement du 13 juin 2013 :
- dit que l'autorité parentale sur l'enfant Paula sera exercée conjointement par ses deux parents, Mme Frédérique Y...et M. Didier X...,
- fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile de sa mère, Mme Frédérique Y...soit à Nice, ...,
- accordé à M. Didier X...un droit de visite et d'hébergement s'exerçant :
la totalité des congés de Toussaint, février et Pâques,
la moitié des congés d'été et de Noël, la première moitié les années impaires, la seconde moitié les années paires,
- dit que les frais de trajet (transport aérien) seront pris en charge par moitié par chacun des deux parents,
- dit que :
les dates de vacances à prendre en considération sont celles de l'académie dont dépend rétablissement scolaire de l'enfant,
l'enfant ne pourra quitter le territoire national avec l'un des parents qu'après autorisation écrite et photocopie de la carte nationale d'identité de l'autre parent, non présent,
- dit n'y avoir lieu à fixation d'une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'entant,
- dit qu'il sera fait masse des dépens dont les frais d'expertises psychologiques et psychiatriques qui seront supportés par moitié par chacune des deux parties,
- dit que chacune des parties conservera les frais irrépétibles qu'elle a pu exposer,
- dit que la présente décision sera notifiée par voie d'huissier à l'initiative des parties,
- ordonné la communication du présent jugement à M. le juge d'application des peines du'tribunal de grande instance d'Ajaccio.
M. X...a relevé appel de ce jugement par déclaration du 26 juin 2013.
Après y avoir été autorisé par ordonnance du 9 juillet 2013, il a assigné Mme Frédérique Y...à jour fixe pour l'audience du 26 septembre 2013 par acte du 19 juillet 2013 qui a été régulièrement déposé au greffe.
Paula X...a été entendue à sa demande le 5 septembre 2013.
En ses dernières écritures déposées le 17 septembre 2013 auxquelles il y a lieu de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. X...rappelle qu'il a récupéré l'enfant et l'a scolarisée en Corse en septembre 2011 à la demande de l'intimée dont l'état de santé psychologique était précaire et qui était dans l'incapacité de s'en occuper.
Il fait valoir que le premier juge a par une appréciation erronée de la situation mis en exergue la condamnation dont il a fait l'objet pour considérer qu'il n'était pas en mesure de donner à Paule l'éducation qui convient, alors que les faits dont il s'est rendu coupable sont vieux de plus de 10 ans et ont été commis dans un moment d'égarement.
I fait observer que le désir exprimé par l'enfant de rester vivre chez lui n'a pas été pris en considération, étant précisé qu'il ne remet nullement en question l'exercice conjoint de l'autorité parentale retenu à juste raison par le jugement déféré.
Il insiste sur le fait qu'il présente les meilleurs qualité éducatives et qu'il est le seul à pouvoir offrir à l'enfant un cadre de vie stable et sécurisant.
Il souligne qu'il a depuis plus de cinq ans la charge de son fils Jean Alexis âgé de 19 ans qui vit à son domicile et il affirme avoir été embauché en 2010 par une SCI familiale, tendant au développement d'un projet de résidences sur des terrains apportés par celle-ci.
Il précise que le magistrat de première instance n'a strictement pas tenu compte de la présence de Jean Alexis à son domicile alors que Paula vit avec son frère depuis ces cinq dernières années.
Il ajoute qu'il s'est toujours occupé de l'enfant qu'il a toujours accompagnée à l'école en adoptant avec elle l'attitude la plus adaptée alors que Mme Y...se montre intrusive et n'hésite pas à le dénigrer.
Le résultat de l'audition de l'enfant en étant la conséquence, il demande à la cour d':
- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a fixé la résidence de Paula X...au domicile de sa mère Mme Frédérique Y...,
- dire que la résidence habituelle de Paula sera au domicile de M. X...,
- accorder à Mme Y...un droit de visite et d'hébergement durant la moitié des vacances scolaires et d'un droit de visite simple un week end par mois en Corse,
- dire que Mme Y...paiera l'intégralité des frais de transport,
à titre subsidiaire,
- dire qu'il exercera son droit de visité et d'hébergement pendant :
la totalité des congés de Toussaint, février et Pâques,
la moitié des congés d'été et de Noël, la première moitié les années impaires, la seconde les années paires,
un week-end par mois du vendredi soir au dimanche soir à Nice,
- condamner Mme Y...aux entiers dépens d'instance dont les dépens d'appel.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 septembre 2013, auxquelles il sera référé pour Un exposé plus complet de ses moyens et prétentions, Mme Y...reconnaît avoir rencontré des problèmes de santé et avoir été hospitalisée.
Elle souligne qu'elle a repris son activité professionnelle de médecin gérontologue en mars 2012.
Elle fait observer que la présence de Jean Alexis au domicile de M. X...n'est pas déterminante pour fixer la résidence de Paula, puisqu'il est étudiant à Corte et se rend aussi en week-end chez sa mère.
Se fondant sur les rapports des experts A...et Sisco, elle soutient être tout à fait à même d'élever l'enfant et insiste sur le fait que l'appelant met en avant son travail et les enfants qu'il a à charge pour éviter un couperet pénal.
Elle demande en conséquence à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions la décision du 13 juin 2013
À titre subsidiaire,
- au cas où la résidence de l'enfant serait fixée en Corse chez le père, lui accorder les droits de visite et d'hébergement les plus larges et les plus libres pendant les vacances scolaires, auxquels sera ajouté un droit de visite et d'hébergement un week-end par mois, du vendredi après
l'école au dimanche 19 heures à charge pour le parent de se déplacer pour l'exercer,
- maintenir l'interdiction de sortie du territoire national sans autorisation des deux parents,
- dans tous les cas, condamner M. X...sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à payer à la concluante la somme de 2 500 euros et à assumer les entiers dépens de l'instance.
SUR CE :
Attendu que les dispositions du jugement déféré relatives à l'exercice en commun par les deux parents de l'autorité parentale concernant l'enfant qui ne pas critiquées seront confirmées ;
Sur la résidence de l'enfant :
Attendu qu'aux termes de l'article 373-2-11 du code civil, lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération :
1) la pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure,
2) les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1,
3) l'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre,
4) le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l'âge de l'enfant,
5) les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l'article 373-2-12,
6) les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre ;
Qu'en l'espèce l'enfant était lors de la séparation de ses parents restée avec sa mère jusqu'à ce que celle-ci pour des raisons impérieuses de santé ne la confie à son père ;
Qu'elle a ainsi vécu pendant deux années scolaires chez ce dernier où elle a été parfaitement accueillie et entourée ;
Attendu qu'il est démontré par les rapports d'expertise psychologique et psychiatrique qui ont été demandés par le premier juge que si Mme Y...qui, eu égard à la fragilité liée à la structure de sa personnalité a subi suite à la séparation du couple une décompensation importante, ses difficultés conjoncturelles sont apaisées et elle est à présent d'un point de vue psychologique en mesure de prendre en charge sa fille ;
Attendu qu'en ce qui concerne le rapprochement de la fratrie invoqué par M. X..., il sera remarqué que son fils Jean Alexis âgé de 19 ans et donc majeur est actuellement étudiant et qu'il a pour suivre son cursus universitaire quitté la maison familiale de Sotta, en Corse du Sud, entraînant de fait une séparation avec sa soeur ;
Qu'en conséquence cet argument ne peut jouer en faveur de la fixation de la résidence de Paula au domicile de l'appelant, d'autant que Mme Y...est elle-même mère de deux autres enfants majeurs eux aussi avec lesquels elle pourra même s'ils exercent leur activité professionnelle dans une autre région que les Alpes Maritimes plus facilement entretenir des liens en vivant au domicile maternel ;
Attendu que l'enfant âgée de 13 ans a clairement manifesté lors de son audition du 5 septembre 2013 son souhait de rester avec sa mère en insistant sur le fait qu'elle avait réalisé que celle-ci lui avait manqué pendant leur séparation ;
Qu'elle est inscrite à Nice dans un collège près de son domicile ainsi que dans un club hippique où elle peut continuer la pratique d'un sport initié par elle depuis plusieurs années ;
Qu'il apparaît de son intérêt, l'année scolaire étant bien entamée et Mme Y...étant comme M. X...apte à assumer ses devoirs et à respecter les droits de M. X...à l'égard de sa fille, de confirmer le jugement déféré qui a fixé la résidence de Paula chez sa mère ;
Sur le droit de visite et d'hébergement du père :
Attendu que les modalités d'exercice de ce droit fixé par le premier juge pendant les vacances scolaires qui n'ont pas donné lieu à critique seront confirmées ;
Qu'il en sera de même des frais de transport de l'enfant qui seront partagés entre les parents ;
Qu'il sera accordé en outre à M. X...un week-end par mois à Nice comme il le sollicite dans ses écritures, à charge de prévenir Mme Y...de l'exercice de ce droit dix jours à l'avance et de supporter les frais en découlant ;
Sur la contribution à l'entretien de l'enfant :
Attendu que la cour constate comme le premier juge qu'aucune contribution à l'entretien de Paula n'est sollicitée par Mme Y...;
Sur les frais non taxables et les dépens d'appel :
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que la procédure concernant l'enfant commun, les dépens d'appel seront partagés par moitié entre les parties ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit que M. Didier X...pourra exercer son droit de visite et d'hébergement à l'égard de Paula une fois par mois à Nice à charge pour lui de prévenir Mme Frédérique Y...dix jours à l'avance et de supporter les frais qui en découleront,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Fait masse des dépens d'appel et dit qu'ils seront supportés par moitié entre les parties.
LE GREFFIER LE PRESIDENT