Ch. civile A
ARRET No
du 27 NOVEMBRE 2013
R. G : 12/ 00982 C-LP
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Juge aux affaires familiales de TGI AJACCIO, décision attaquée en date du 22 Novembre 2012, enregistrée sous le no 12/ 00181
X...
C/
Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE TREIZE
APPELANTE :
Mme Céline X... née le 16 Juillet 1975 à BASTIA (20200) ...20145 SARI SOLENZARA
assistée de Me Monique CASIMIRI, avocat au barreau d'AJACCIO plaidant en visioconférence
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/ 3945 du 17/ 01/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
INTIME :
M. Franck Y... né le 28 Octobre 1971 à SAINT-DENIS (93200) ... 93200 SAINT-DENIS
Défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue en chambre du conseil du 23 septembre 2013, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Laetitia PASCAL, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2013.
ARRET :
Rendu par défaut,
Prononcé hors la présence du public par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Des relations entre Mme Céline X... et M. Franck Y... est issu Kylian X...-Y...né le 26 août 2005 à Saint Denis, lequel réside auprès de sa mère installée depuis 2008 en Corse.
Le 15 avril 2010, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a rendu un jugement, se fondant sur les expertises et l'enquête sociale ordonnées par jugement avant dire droit du 22 juin 2009, et prononçant l'exercice conjoint de l'autorité parentale, accordant un droit de visite et d'hébergement au profit de M. Y... pour la totalité des vacances de Noël, février, Pâques ainsi que durant le mois d'août de chaque année à charge pour les parents de supporter par moitié les frais de trajet de l'enfant et dispensant M. Y... de toute contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant.
Le 14 février 2012, Mme X... a saisi à nouveau le tribunal de grande instance d'Ajaccio qui, par jugement en date du 22 novembre 2012, a :
- débouté Mme X... de sa demande tenant à modifier l'exercice conjoint de l'autorité parentale,
- dit que l'autorité parentale continuera à être exercée conjointement par ses deux parents,
- débouté Mme X... de sa demande visant à modifier le droit de visite et d'hébergement dont bénéficie M. Y...,
- fixé à la somme mensuelle de 50 euros la part contributive que devra verser M. Y... à Mme X... pour l'entretien et l'éducation de leur fils,
- dit que les dépens seront supportés par le Trésor Public en raison de l'aide juridictionnelle totale accordée à Mme X....
Par déclaration en date du 17 décembre 2012 signifiée à étude à M. Y... le 7 février 2013, Mme X... a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions signifiées le 7 février 2013, elle demande à la cour d'appel de déclarer son appel régulier en la forme et amplement fondé et de réformer ledit jugement dans l'ensemble de ses dispositions, en conséquence de :
- lui attribuer l'autorité parentale exclusive,
- dire que M. Y... bénéficiera d'un droit de visite et d'hébergement la première moitié des vacances de Noël les années paires et la seconde moitié les années impaires, la totalité des vacances d'hiver ou la totalité des vacances de Pâques, les 15 premiers jours de juillet et les 15 premiers jours d'août,
- dire que les frais de trajet de l'enfant devront être pris en charge par le père et à défaut en cas de partage par moitié préciser que le père assumera les frais du billet aller, la mère assumant les frais de retour de l'enfant,
- dire que le droit de visite et d'hébergement continuera à s'exercer conformément à l'engagement pris par la mère sous la responsabilité de la grand-mère paternelle,
A titre subsidiaire,
- ordonner la mise en ¿ uvre d'un enquête sociale afin de vérifier l'état de santé de M. Y... et sa position de dépendance actuelle outre la mission habituelle en la matière,
- fixer le montant de la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant commun à la somme mensuelle de 250 euros indexée sur l'indice des prix des ménages urbains, série France entière, publié par l'INSEE,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
A l'appui de ses écritures, elle fait valoir que Mme A...dont la présence est considérée comme déterminante dans les conditions d'accueil de l'enfant, s'est installée dans le Nord de la France, près de Calais, que c'était elle qui exerçait de facto le droit de visite et d'hébergement de M. Y... à raison de deux fois par an, que M. Y... ne s'est pas investi auprès de son fils et n'a pas suivi les recommandations de l'enquête sociale quant à la mise en place d'une AEMO, qu'il aurait à ce jour noué une relation avec une dame résidant sur Nantes et que la naissance d'un enfant serait attendu, qu'il ne s'est jamais manifesté auprès de Mme X... concernant son suivi médical ou son cursus scolaire et qu'elle n'a comme interlocuteur que la grand mère paternelle.
Elle affirme que les deux parents ne s'associent plus depuis maintenant 2008 aux décisions qui concernent l'enfant, que le père néglige ses droits et ses devoirs et que l'absence ou le retard des autorisations paternelles a été préjudiciable à leur fils.
Elle insiste sur le fait que lors des droits de visite et d'hébergement du père, l'enfant est systématiquement accueilli par sa grand-mère, que c'est cette dernière qui organise avec elle les modalités de déplacement de l'enfant, qu'il est dans l'intérêt du mineur de limiter les déplacements à 3 voyages par an, ce d'autant plus qu'à la suite de sa nouvelle rencontre, M. Y... ne s'est plus rendu en Vendée pour voir son fils en vacances avec Mme A...comme il avait l'habitude de le faire.
Elle souligne la nécessité de dire que les droits de visite et d'hébergement continueront à s'exercer sous la responsabilité de la grand mère paternelle de l'enfant et qu'à défaut, il serait nécessaire d'ordonner une nouvelle enquête sociale afin de déterminer les conditions de vie actuelles de M. Y....
Elle indique enfin qu'elle a eu un autre enfant, qu'elle n'a pour ressources que le RSA majoré et les allocations familiales soit 1 460, 79 euros, que ses charges s'élèvent à 858, 25 euros et qu'elle doit assurer le suivi orthophonique et psychologique de Kylian. Elle rappelle que la contribution à l'entretien et à l'éducation du père doit être fixée in concreto, qu'il doit être tenu compte de l'exercice irrégulier du droit de visite et d'hébergement qui augmente ses charges, de ses efforts d'insertion et de la hiérarchie effectuée dans ses dépenses.
M. Y... n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été prise le 29 mai 2013 et a fixé l'audience de plaidoirie au 23 septembre 2013.
MOTIVATION
Attendu qu'en application de l'article 472 du code de procédure civile lorsque le défendeur ne comparaît pas, il doit néanmoins être statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée ;
Attendu qu'en matière familiale une nouvelle saisine du juge est possible à la suite d'une précédente décision, dès lors que la preuve est rapportée d'un élément nouveau modifiant la situation de l'enfant ;
Attendu qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention conformément à l'article 9 du code de procédure civile ;
Sur l'exercice de l'autorité parentale :
Attendu qu'il résulte de l'article 371-1 du code civil que l'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant, qu'elle appartient aux père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et
sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne, que les parents associent l'enfant aux décisions qui le concernent selon son âge et son degré de maturité ;
Attendu que les articles 372 et suivants prévoient que les père et mère exercent en commun l'autorité parentale, que la séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l'exercice de l'autorité parentale mais que si l'intérêt de l'enfant le commande le juge peut en confier l'exercice à l'un des deux parents ;
Qu'en l'espèce, il ressort des mesures ordonnées par la décision du 14 septembre 2009 que si Mme A...est un repère et un relai majeur pour Kylian, M. Y... présente des garanties nécessaires au niveau familial et au niveau de sa santé physique et psychologique pour accueillir son fils et qu'il souhaite prendre une part active dans l'éducation de ce dernier ;
Que le rapport de l'examen psychologique de Mme X... conclut à l'importance de permettre à M. Y... de conserver sa place auprès de Kylian ;
Que lors de l'audience devant le juge aux affaires familiales le 11 mars 2010 Mme X... et M. Y... étaient d'accord pour que l'autorité parentale soit exercée en commun ;
Que si Mme X... affirme que M. Y... ne s'investit ni affectivement ni matériellement à l'égard de son fils et qu'elle se trouve en difficulté lorsqu'elle doit obtenir son autorisation notamment pour des activités extra-scolaires, le juge de première instance a retenu à juste titre qu'elle n'en rapporte pas la preuve ;
Qu'il doit être rappelé au surplus que l'article 372-2 du code civil prévoit que pour les actes usuels concernant la personne de l'enfant, chacun des parents est réputé, vis à vis des tiers de bonne foi, agir avec le consentement de l'autre, ce qui emporte dispense de preuve de l'accord de l'autre parent et décharge de responsabilité des tiers de bonne foi ;
Qu'est un acte usuel celui qui s'inscrit dans la continuité du passé et qui n'engage pas l'avenir de l'enfant, un acte de la vie quotidienne sans gravité, comme l'accomplissement de démarches administratives, la réinscription dans un établissement scolaire ou l'autorisation d'effectuer des sorties scolaires ;
Que le déménagement de Mme A...ne saurait avoir une quelconque influence sur l'exercice de l'autorité parentale qui appartient aux seuls parents ;
Que la défaillance de M. Y... à l'instance en cours ne peut à elle seule démontrer qu'il est dans l'intérêt de l'enfant de lui retirer l'exercice de l'autorité parentale ;
Que dès lors c'est à bon droit que le juge aux affaires familiales a rejeté la demande de Mme X... tendant à lui attribuer l'exercice exclusif de l'autorité parentale ;
Sur la demande de modification du droit de visite et d'hébergement de Monsieur Y... :
Attendu que l'article 373-2 alinéa 2 du code civil prévoit que chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent ;
Attendu qu'en application de l'article 373-2-1 alinéa 2 du même code le droit de visite et d'hébergement du parent chez qui la résidence n'est pas fixée ne peut être refusé ou limité que pour des motifs graves ;
Qu'en l'espèce, Mme X... entend voir diminuer ce droit au motif que Mme A..., la grand-mère paternelle, a déménagé et que ce droit de visite et d'hébergement s'exerçait sous sa responsabilité ;
Que la décision du 15 avril 2010 ne conditionnait cependant pas l'exercice du droit de visite et d'hébergement de M. Y... à la présence de Mme A...mais faisait état d'un accord entre les parents sur un droit de visite et d'hébergement conforme à leur résidence respective et concernant la totalité des petites vacances scolaires ;
Que l'enquête sociale effectuée le 4 janvier 2010 décrit M. Y... comme ayant été au terme de son injonction thérapeutique, effectuant tous les mois un test démontrant l'absence de prise de substances et comme un père aimant et attentif à son enfant ;
Que cette mesure préconisait le maintien d'un droit de visite et d'hébergement au profit de M. Y... « indépendamment de la présence de la grand-mère de Kylian » mais avec la mise en place d'une mesure d'AEMO ;
Que la mise en place d'une mesure d'AEMO ne relève pas de la seule initiative des parents mais du pouvoir souverain du juge des enfants ;
Qu'il ne serait donc être reproché à M. Y... de ne pas avoir mis en place cette mesure éducative ;
Qu'il ressort des seules pièces versées aux débats que Mme A...est effectivement domiciliée dans le Nord-Pas-de-Calais à Ardres (62610) depuis le mois d'octobre 2010 sans pour autant que Mme X... n'ait eu besoin de saisir la juridiction avant le mois de février 2012 ;
Qu'aucun fait nouveau et grave de nature à justifier la diminution ou la modification du droit de visite et d'hébergement de M. Y... n'est rapporté par Mme X... ;
Que dès lors c'est à bon droit que la juridiction du premier degré a rejeté la demande de Mme X... relative au droit de visite et d'hébergement de M. Y... ;
Que le jugement du tribunal de grande instance sera en conséquence confirmé sur ce point ;
Attendu qu'il a déjà été ordonné une enquête sociale, une expertise médico-psychologique et un examen psychologique par ordonnance du 22 juin 2009 ;
Que ces mesures d'investigations ont été effectuées en décembre 2009 et janvier 2010 ;
Que Mme X... ne démontre pas l'existence d'éléments nouveaux qui justifieraient le prononcé d'une nouvelle enquête sociale ;
Que dès lors la demande subsidiaire formulée en cause d'appel sera rejetée ;
Sur la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant commun :
Attendu qu'en application de l'article 371-2 du code civil chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant, que cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur ;
Qu'en l'espèce M. Y... avait été dispensé de règlement de contribution au regard de la situation respective des parties par jugement du 15 avril 2010 ;
Que Mme X... justifie aujourd'hui du changement dans sa situation en faisant état de la naissance d'un second enfant et donc de l'augmentation de ses charges ;
Que sa demande tendant à la fixation de la contribution à l'entretien et à l'éducation de leur enfant de M. Y... à la somme mensuelle de 250 euros apparaît néanmoins manifestement excessive au regard de la situation matérielle de celui-ci ;
Que dès lors c'est à bon droit que le juge aux affaires familiales a fixé la contribution à l'entretien et à l'éducation à la somme mensuelle de 50 euros ;
Sur les demandes accessoires :
Attendu qu'en application de l'article 696 du code de procédure civile, il y a lieu de condamner Mme X... au paiement des dépens de l'instance ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré dans l'ensemble de ses dispositions,
Y ajoutant,
Rejette la demande formulée à titre subsidiaire tendant au prononcé d'une mesure d'enquête sociale,
Condamne Mme Céline X... aux dépens de l'instance.
LE GREFFIER LE PRESIDENT