Ch. civile B
ARRET No
du 23 OCTOBRE 2013
R. G : 12/ 00320 C-MB
Décision déférée à la Cour : Ordonnance Référé, origine Tribunal d'Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 06 Février 2012, enregistrée sous le no 12/ 000658
X...
C/
Association CONCORDE-LES AMIS DE LA MISSION CATHOLIQUE POLONAISE EN FRANCE
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT TROIS OCTOBRE DEUX MILLE TREIZE
APPELANT :
M. Philippe X...né le 09 Octobre 1951 à Sidi Bel Abbes (Algérie)... 20200 SANTA MARIA DI LOTA
assisté de Me Angeline TOMASI de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA-TABOUREAU, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
ASSOCIATION CONCORDE : LES AMIS DE LA MISSION CATHOLIQUE POLONAISE EN FRANCE prise en la personne de son représentant légal 263 Bis Rue Saint Honoré 75001 PARIS 01
assistée de Me Frédérique GENISSIEUX de la SCP RETALI GENISSIEUX, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 juin 2013, devant Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre Mme Marie-Paule ALZEARI, Conseiller Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 25 septembre 2013, prorogée par le magistrat par mention au plumitif au 23 octobre 2013.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Mme Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte d'huissier du 09 août 2011, l'Association Concorde-Les Amis de la Mission Catholique Polonaise en France a assigné en référé M. Philippe X...devant le juge des référés du tribunal d'instance de Bastia, aux fins d'expulsion du logement occupé par ce dernier et dont il avait la jouissance en qualité de salarié de ladite association, et de paiement d'une indemnité d'occupation, outre des frais irrépétibles.
Par ordonnance de référé, rendue contradictoirement, le 06 février 2012, le juge des référés du tribunal d'instance de Bastia a :
- dit valable l'assignation en application de l'article 114 du code de procédure civile,
- dit le juge des référés compétent pour connaître de la demande tendant à l'expulsion du défendeur et au paiement d'une indemnité d'occupation,
- dit que M. X...était occupant sans droit ni titre du logement qu'il occupe, lieudit ... 20200 Miomo depuis le 14 décembre 2010 à 24 heures,
- dit qu'à défaut par M. X...d'avoir quitté le logement qu'il occupe ci-dessus désigné, dans les quatre mois de la notification de sa décision, il pourra être procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique, si besoin, et au transport des meubles laissés dans les lieux au frais des expulsés, dans tel garde meubles ou local approprié,
- condamné M. X...à payer à l'Association Concorde-Les Amis de la Mission Catholique Polonaise en France, en deniers ou quittances valables et à titre provisionnel, la somme de 2 273, 09 euros au titre des indemnités d'occupation échues au 1er septembre 2011 inclus,
- fixé l'indemnité d'occupation due par M. X...à compter du 1er octobre 2011 jusqu'au départ effectif des lieux à la somme de 529, 48 euros par mois,
- rejeté toutes les autres demandes,
- condamné M. X...au paiement de la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration reçue le 11 avril 2012, M. X...a interjeté appel de cette décision.
Par ses conclusions déposées le 06 juillet 2012, l'appelant, sur le fondement de la loi du 1er juillet 1901, des articles 114, 117, et 648 du code de procédure civile et invoquant l'existence de contestations sérieuses, demande à la cour de, le recevoir en son appel, le déclarer bien fondé, de réformer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et de :
A titre principal,
- déclarer nulle la citation délivrée le 09 août 2011,
A titre subsidiaire,
- déclarer la juridiction des référés incompétente pour connaître du litige en l'état de l'existence de contestations sérieuses relevant du fond,
En conséquence,
- débouter l'intimée de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- renvoyer l'intimée à mieux se pourvoir,
En tout état de cause,
- condamner l'intimée à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par ses conclusions déposées le 23 août 2012, l'Association Concorde-Les Amis de la Mission Catholique Polonaise en France, sur le fondement des articles R 221-5 et 849 du code de procédure civile, de l'article 1134 du code civil, demande à la cour de constater et au besoin,
dire et juger que, d'une part, l'exception de nullité soulevée par l'appelant est inopérante car radicalement infondée et non pertinente, d'autre part, la transaction signée par les parties est partiellement nulle.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions sus-visées et à l'ordonnance déférée.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 06 mars 2013.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'exception de nullité de l'assignation
Le juge des référés a retenu que M. X...avait soulevé la nullité de l'assignation en invoquant le défaut de visa du numéro SIRET de l'association et de ses derniers statuts et en raison de l'indication de la mention du représentant légal de l'association.
Le juge des référés a considéré que M. X...ne rapportait pas la preuve que le défaut du numéro SIRET, de visa de l'acte de révision des statuts de l'association et de la mention du représentant légal lui avait causé un grief, alors qu'il avait pu valablement constituer avocat et faire valoir ses moyens de défense.
En cause d'appel, ce dernier estime que c'est à tort que le premier juge a retenu que les irrégularités relevaient d'une irrégularité de forme et non de fond et que même à supposer ces irrégularités de forme, celles-ci l'ont mis dans l'impossibilité de vérifier, d'une part, l'identité de l'organe agissant pour le compte de l'association et, d'autre part, les statuts applicables, pour lui permettre la vérification du pouvoir d'ester en justice.
M. X...réitère devant la cour, l'exception de nullité de l'assignation du 09 août 2011, en reprenant ses moyens et arguments de première instance.
Il soutient que ladite citation est entachée des irrégularités suivantes, constituant un défaut de pouvoir du représentant et donc, d'irrégularités de fond :
- la référence erronée aux statuts de 1973 alors que ceux-ci ont été modifiés le 03 juillet 2006, cette indication erronée générant l'impossibilité pour lui de vérifier la capacité à agir en justice de l'association au regard des statuts,
- le défaut de l'immatriculation de l'association alors qu'il existe deux associations identiques n'ayant pas les mêmes statuts, l'empêchant ainsi de pouvoir identifier l'association dont il s'agit,
- le défaut d'indication de l'organe représentant légalement l'association.
L'Association Concorde-Les Amis de la Mission Catholique Polonaise en France conclut que les irrégularités invoquées par l'appelant ne lui ont causé aucun grief, en faisant valoir, essentiellement, que, ce dernier ayant lui-même produit les statuts modifiés de l'association, il a bien été en mesure de procéder à la vérification de la capacité à agir de l'association, qu'ayant travaillé pendant six ans pour l'intimée avec laquelle il a conclu une transaction et signé un acte notarié de vente, il ne peut valablement soutenir ne pas être en mesure de l'identifier, ni de pouvoir déterminer l'organe appelé à la représenter en justice.
A défaut d'élément nouveau, la cour estime que le premier juge a fait une juste appréciation des faits de la cause et du droit des parties, en rejetant l'exception de nullité de l'assignation soulevée par M. X...et, dès lors, dit recevable ladite assignation.
En effet, l'appelant ne peut valablement soutenir qu'il n'était pas en mesure d'identifier l'association qui l'avait assigné, ni de vérifier que le représentant légal de l'association avait bien les pouvoirs de l'assigner au nom de ladite association, alors que ce dernier :
- d'une part, l'acte de citation en référé délivré le 09 août 2011, personnellement à M. X..., aux termes duquel il est notamment mentionné la dénomination exacte de l'association intimée, outre sa date de déclaration à la préfecture de Paris et de publication au Journal Officiel, la précision suivante " agissant sur poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège ", de l'inventaire de sept pièces, joint ladite assignation faisant état, notamment, d'une transaction en date du 15 novembre 2006, d'un acte notarié de vente du 15 mars 2007, deux lettres de l'association qui lui ont été adressées,
- d'autre part, il était en possession des statuts modifiés produits par lui-même, (pièce no 3), lesquels précisent à l'article 15, que le président représente l'association en justice, était en mesure de vérifier que le représentant légal de l'association avait bien les pouvoirs de l'assigner au nom de ladite association.
Au surplus, compte tenu de ces éléments, M. X...n'a subi aucun grief.
En conséquence, la cour confirmera l'ordonnance querellée en ce qu'elle dit recevable l'assignation sus-visée.
Sur l'incompétence du juge des référés
Des dispositions conjuguées des articles 848 et 849 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge du tribunal d'instance peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou, qui s'imposent, même en présence d'une contestation sérieuse, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Par l'ordonnance déférée, le juge des référés s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande présentée par l'Association Concorde-Les Amis de la Mission Catholique Polonaise en France en expulsion de M. X...du logement ci-dessus désignée avec fixation d'une indemnité d'une indemnité d'occupation.
Il a estimé que la transaction entre les parties en date du 15 novembre 2006, aux termes de laquelle celles-ci étaient d'accord sur le caractère accessoire au contrat de travail de l'attribution du logement et dont le salarié en conservait la jouissance pendant une durée de cinq années soit jusqu'au 14 décembre 2010 avec paiement d'une indemnité d'occupation indexée pendant toute la durée de l'occupation des lieux, était claire et non équivoque.
Il a aussi considéré que la rupture du contrat de travail était acquise et que les dispositions de la loi du 06 juillet 1989 relative au maintien dans les lieux et aux conditions du congé n'étaient pas applicables.
En cause d'appel, M. X...conteste la décision du juge des référés qui, selon lui, a tranché une question de fond sur la nature juridique du logement.
Il soutient qu'il est en droit de solliciter une requalification des dispositions de la transaction portant sur le logement en contrat de bail soumis à la loi du 06 juillet 1989 et, en conséquence, la nullité, pour partie, de ladite transaction relative à la qualification juridique donnée à l'occupation des lieux.
L'appelant se prévaut des dispositions légales sus-visées et fait valoir, que si logement était à l'origine, l'accessoire de son contrat de travail, ce contrat a été rompu par son licenciement en décembre 2005 et qu'à compter de cette date, il a dû, pour demeurer dans les lieux, verser un loyer et payer les charges récupérables, ce qu'il ne faisait pas lors de l'exécution du contrat de travail.
Au vu des éléments soumis à son appréciation, la cour constate l'existence d'une contestation sérieuse sur la nature juridique du lien contractuel entre les parties en ce qui concerne le logement occupé par M. X...et appartenant à l'association intimée ; or, il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés d'interpréter et de qualifier ce contrat, pour déterminer l'existence du droit à expulsion dont se prévaut Association Concorde-Les Amis de la Mission Catholique Polonaise en France, et la présence d'une contestation sérieuse au fond s'oppose au caractère manifestement illicite de l'occupation litigieuse.
Il convient, en conséquence, d'infirmer l'ordonnance querellée en toutes ses dispositions et de dire qu'il n'y a pas lieu à référé.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Compte tenu de sa présente décision, la cour infirmera l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné M. X...au paiement de la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Il n'est pas inéquitable de ne pas faire application des dispositions du texte précité, tant pour la procédure de première instance que pour celle d'appel.
Chacune des parties, supportera ses entiers dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Dit n'y avoir lieu à référé ;
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant pour la procédure de première instance que pour celle d'appel ;
Dit que chacune des parties, supportera ses entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT