Ch. civile A
ARRET No
du 02 OCTOBRE 2013
R. G : 12/ 00419 R-C-JG
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 30 Mars 2010, enregistrée sous le no 09/ 1887
X...X...
C/
Y... SYNDICAT INTERCOMMUNAL DU DOMAINE D'ALZITONE COMMUNE GHISONACCIA COMMUNE DE GHISONI COMMUNE DE POGGIO DI NAZZA COMMUNE LUGO DI NAZZA
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DEUX OCTOBRE DEUX MILLE TREIZE
ARRET MIXTE
APPELANTS :
M. Dominique X...né le 13 Mai 1928 à GHISONACCIA (20240) ...20240 GHISONACCIA
assisté de Me Claude VOITURIEZ, avocat au barreau de BASTIA
M. Pierre Jean X...né le 28 Février 1960 à BASTIA (20200) ... 20240 GHISONACCIA
assisté de Me Claude VOITURIEZ, avocat au barreau de BASTIA
INTIMES :
Mme Marie Catherine Y... épouse A... née le 16 Novembre 1910 à GHISONI (20227) ...13007 MARSEILLE
assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, Me Caroline PERES-CANALETTI, avocat au barreau d'AJACCIO
SYNDICAT INTERCOMMUNAL DU DOMAINE D ALZITONE pris en la personne de son président en exercice. Mairie de Ghisonaccia 20240 GHISONACCIA
ayant pour avocat Me Antoine MERIDJEN, avocat au barreau de BASTIA
COMMUNE DE GHISONACCIA prise en la personne de son maire en exercice Mairie 20240 GHISONACCIA
ayant pour avocat Me Antoine MERIDJEN, avocat au barreau de BASTIA
COMMUNE DE GHISONI Prise en la personne de son maire en exercice Mairie 20227 GHISONI
Défaillante
COMMUNE DE POGGIO DI NAZZA Prise en la personne de son maire en exercice Mairie 20240 POGGIO DI NAZZA
Défaillante
COMMUNE DE LUGO DI NAZZA prise en la personne de son maire en exercice Lieu dit Casa della chiesa 20240 LUGO DI NAZZA
ayant pour avocat Me Antoine MERIDJEN, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 juin 2013, devant Mme Julie GAY, Président de chambre, et Madame Marie BART, Vice-président placé près M. le premier président, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Madame Marie BART, Vice-président placé près M. le premier président
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 02 octobre 2013.
ARRET :
Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par arrêt réputé contradictoire du 7 décembre 2011, la cour de ce siège statuant sur l'action en revendication immobilière introduite par Mme Marie Catherine A... née Y... à l'encontre du Syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone a infirmé le jugement du 30 mars 2010 la déboutant de sa demande et statuant à nouveau :
- dit que Mme A... née Marie Catherine Y... est devenue propriétaire par voie d'usucapion des parcelles sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia recensées au cadastre de cette commune sous les numéros 11, 13, 15, 16 de la section AH au lieu dit Ciarlino et sous le numéro 71 de la même section au lieu dit Listingone,
- dit que le présent arrêt vaudra titre de propriété,
- ordonné sa publication au service de la publicité foncière de Bastia,
- laissé les entiers dépens à la charge de l'intimé.
Par assignations des 2 et 14 mai 2012, Dominique X...et Pierre-Jean X...ont formé tierce opposition contre l'arrêt du 2 décembre 2011 en appelant à la procédure outre Mme A... et le président du Syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone les communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Poggio di Nazza et Lugo di Nazza qui sont propriétaires dudit domaine.
Ils exposent en leurs dernières conclusions déposées par voie électronique le 28 mai 2013 auxquelles il sera référé pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions que la religion de la cour a été surprise notamment par la production de pièces non conformes à la réalité et qui sont constitutives de faux.
Ils précisent que les parcelles AH 13, AH15, AH16 et AH71 font partie du domaine privé des communes en cause gérées par le Syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone et que dès lors qu'elles sont closes et cultivées, elles peuvent faire l'objet d'usucapion de la part de toute personne démontrant les qualités de sa possession.
Ils font observer que Dominique X...a occupé de façon publique et continue les parcelles cadastrées :
- AH15 pour 1 ha 29a 40ca,
- AH16 pour 75a 90ca,
- AH71 (ex 53) pour 4ha 19a 6ca,
- AH 13 pour 65a 57 ca,
soit pour une superficie totale de 6ha 89a 13ca qu'il a mis en culture et clôturées, avant que son fils Pierre-Jean ne lui succède, suite à la cession sous seing privé de tous ses droits opérée à son profit le 22 mars 1982 par M. H...déclarée en mairie et validée par le Syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone dont le président a confirmé le même jour la prise de possession des lieux.
Ils soulignent que Mme A... qui avait elle-même cédé tous ses droits à M. H...par un document daté du 7 janvier 1980 ne peut venir réclamer de droits sur les parcelles AH13, 15, 16 et 71 (ex 53), 32 ans après les avoir cédées et ce d'autant qu'elle ne saurait se prévaloir d'une usucapion puisqu'elle n'a jamais exploité ni directement ni par personne interposée.
Ils font observer que depuis la retraite de son père, Pierre-Jean X...continue l'exploitation en qualité de propriétaire et non de simple possédant, et que les parcelles AH 53, AH13, AH15 et AH16 sont bien portées au nom de X...Dominique sur le registre du Domaine d'Alzitone, tenu en mairie de Ghisonaccia et contenant les noms des divers occupants.
Ils indiquent que les parcelles litigieuses font partie d'une exploitation d'un seul tenant et sont cloturées, que la AH16 est complantée en clémentiniers et que si les kiwis qui avaient été plantés ont été arrachés sur les parcelles AH15 et AH13, ces parcelles sont entretenues et clôturées et qu'une prochaine mise en culture est prévue.
Ils soutiennent que cela ne saurait démontrer un abandon de leur part de ces parcelles et qu'en tout état de cause, il ressort que la possession invoquée par Mme A... s'est interrompue lors de la vente de ses droits à M. H..., d'autant que depuis le procès-verbal de constat dressé par huissier le 16 mars 2012, des clémentiniers y ont été plantés.
Ils précisent que Mme A... qui les avait assignés en expulsion en 1983 a été déboutée de ses demandes par jugement du 22 janvier 1986 confirmé par arrêt du 12 décembre 1991 et qu'elle ne peut utilement soutenir avoir agi comme propriétaire alors qu'elle n'a fait aucun acte de possession utile contre les exploitants.
Ils ajoutent que Mme A...-Y...n'a jamais ignoré que les consorts X...avaient acquis leurs droits de Raphaël H...et qu'ils exploitaient les parcelles AH13, 15, 16 et 71 issue de la parcelle AH53, mais s'est bien gardée de 2009 à 2011 de poursuivre sa revendication à l'égard des communes et des occupants tirant profit d'une attestation malencontreuse et erronée du président du syndicat intercommunal du 30 août 2006 qui n'avait aucune qualité pour la délivrer.
Mme A... ayant été déclarée propriétaire en fraude de leurs droits et suite à une tromperie, ils demandent en conséquence à la cour de :
- vu les dispositions des articles 582 et suivants du code de procédure civile, accueillir M. M. X...Dominique et Pierre-Jean en leur tierce opposition,
- vu l'article 2272 du code civil,
- dire et juger que Madame A... ne saurait être propriétaire des parcelles AH13, 15, 16, 71 de la commune de Ghisonaccia par le jeu de l'usucapion, cette dernière ayant cédé ses droits à l'auteur des assignants par acte du 7 janvier 1980 ces derniers exploitant effectivement les lieux depuis cette date, leur occupation paisible publique et à titre de propriétaire s'ajoutant à celle de leur auteur,
- constater que la religion de la cour de céans a été trompée par la production de faux documents et des réticences dolosives de Madame A...,
- en tirant conséquence, rétracter l'arrêt du 7 décembre 2011,
- dire et juger que M. M. Dominique et Pierre-Jean X..., pour avoir occupé pendant plus de 30 ans sont désormais propriétaires, par usucapion, des parcelles AH13- AH15- AH16 et AH71 sur la Commune de Ghisonaccia,
- dire et juger que l'arrêt à intervenir vaudra titre de propriété,
- condamner la requise à la somme de 10 000 euros de dommages intérêts ainsi qu'à celle de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens sur le fondement des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées par voie électronique le 18 mars 2012 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé plus complet de leurs moyens et prétentions, la commission syndicale des biens indivis du Domaine d'Alzitone, la commune de Ghisonaccia et la commune de Lugo di Nazza rappellent que les parcelles revendiquées sont la propriété indivise des communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Lugo di nazza et Poggio di Nazza et qu'en application de l'article L 5222-1 du code des collectivités territoriales la gestion de leur bien a été confiée par un arrêté préfectoral du 2 novembre 1971 à la commission syndicale des biens indivis du Domaine d'Alzitone.
Elles soutiennent que l'action en revendication devait être nécessairement introduite contre les propriétaires indivis des parcelles revendiquées et pas seulement à l'encontre de la commission syndicale qui n'en assure que l'administration et la mise en valeur et que force est de constater que la procédure en revendication immobilière engagée par Mme A... qui n'a pas été introduite au contradictoire des communes propriétaires mais simplement de la commission, laquelle n'a pas vocation à défendre seule dans le cadre d'une telle action était manifestement mal dirigée.
Elles précisent avoir pris acte le 22 mars 1982 de la cession par Raphaël H...à Dominique X...des droits qu'il détenait sur les parcelles cadastrées AH13, 15, 16 et 53, que le 17 novembre 1982 le maire de Ghisonaccia ès qualités de président de la commission avait indiqué à Mme A... que M. H...avait cédé les parcelles AH15, 16, 53 et 13 pour 6ha 89a 93ca à Dominique X..., que c'était à sa demande et avec sa signature légalisée qu'il avait porté tous ces terrains au nom de H...Raphaël sur le registre des occupants du Domaine d'Alzitone et que c'était à ce titre que ce dernier avait cédé ses droits sur ces parcelles.
Elles ajoutent que le 2 décembre 1982 le président avait confirmé à Dominique X...la réalité de la cession des droits de Mme A... à M. H...et la déclaration écrite faite en mairie le 22 mars 1982 portant cession à son profit des droits dont il s'agit, confirmant la mise en valeur et l'exploitation des mêmes parcelles par Dominique X...puis par son fils Pierre-Jean ainsi que ces derniers en justifient.
Mme A... n'ayant pu initier une telle procédure sans mettre en cause les véritables propriétaires, elles demandent à la cour de :
- dire la tierce-opposition de consorts X...recevable et bien fondée,
- constater leur qualité d'exploitants sur les parcelles revendiquées par Mme A...,
en conséquence,
- rétracter l'arrêt rendu le 7 décembre 2011,
- confirmer le jugement du 30 mars 2010 en ce qu'il avait débouté Mme A... de ses fins et prétentions,
- la condamner au paiement de la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
En ses dernières conclusions de défense à tierce-opposition déposées le 20 février 2013 auxquelles il y a lieu de renvoyer pour un exposé plus exhaustif de ses moyens et prétentions, Mme Marie Catherine Y... veuve A... conteste aux consorts X...toute qualité à agir, dans la mesure où ils ne se prévalent pas de la qualité de propriétaires,
ainsi que tout intérêt à agir puisqu'ils se prétendent exploitants de terres dont la propriété lui a été reconnue sans qu'elle n'ait initié à leur égard de procédure d'expulsion de sorte qu'ils ne subissent aucun préjudice.
Elle maintient qu'elle est propriétaire des parcelles AH11, 13, 15 et 16 par prescription et est répertoriée en qualité de propriétaire de ces mêmes parcelles au registre foncier de la commune de Ghisonaccia et que le nom de X...y a été rajouté par la suite comme y avaient été rajoutés les noms de H...et Cirelli.
Elle fait observer que la copie certifiée conforme en a été remise à l'acquéreur de la parcelle AH14 à qui le Syndicat intercommunal et les quatre communes ont vendu une servitude qui traverse les parcelles numérotées AH13, 15 et 16.
Elle fait valoir que son action a été justement dirigée contre le syndicat intercommunal qui est mentionné comme propriétaire sur la fiche hypothécaire versée aux débats et que ce dernier comme les communes de Ghisonaccia et Lugo di Nazza ne revendiquent rien d'autre que le bien fondé de l'action des consorts X..., les dispositions de l'article 583 faisant échec à l'intervention en tierce-opposition principale voire incidente étant donné que le syndicat intercommunal était déjà partie à l'instance et la commune de Ghisonaccia parfaitement avisée puisque le président du syndicat est son maire.
Elle soutient par ailleurs n'avoir jamais rien cédé ni concédé et dénie aux consorts X...la qualité de possesseurs des parcelles dont elle revendique la propriété.
Elle demande en conséquence à la cour de :
au principal,
- déclarer l'action intentée par les consorts X...irrecevable,
- dire et juger que l'intervention volontaire du syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone, et des communes de Ghisonaccia et de Lugo di Nazza est irrecevable puisque déjà parties à l'instance,
- débouter purement et simplement le syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone, la commune de Ghisonaccia et la commune de Lugo di Nazza de toutes leurs demandes fins et conclusions,
- confirmer en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel en date du 7 décembre 2011,
- condamner solidairement tous les défendeurs au paiement de la somme de 5. 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens,
subsidiairement, si par extraordinaire l'action des consorts X...devait être déclarée recevable,
- constater que la tierce-opposition est particulièrement infondée,
- dire et juger qu'ils n'ont démontré ni qualité ni intérêt à agir,
- débouter les consorts X..., le syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone, la commune de Ghisonaccia et la commune de Lugo di Nazza de toutes leurs demandes fins et conclusions,
- condamner solidairement tous les défendeurs au paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
Les communes de Ghisoni et Poggio di Nazza assignées à personne habilitée à recevoir l'acte n'ont pas constitué avocat.
Il sera dès lors statué par arrêt réputé contradictoire.
L'instruction de la procédure a été déclarée close par ordonnance du 29 mai 2013.
SUR CE :
Sur la recevabilité de la tierce opposition :
Attendu qu'il résulte des articles 54 et 587 du code de procédure civile que la tierce opposition formée à titre principal est portée devant la juridiction dont émane la décision attaquée par voie d'assignation ou de remise d'une requête conjointe au secrétariat de la juridiction ;
Qu'en outre l'article 585 de ce même code dispose que tout jugement est susceptible de tierce opposition si la loi n'en dispose autrement et son article 584 précise qu'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties au jugement attaqué, la tierce opposition n'est recevable que si toutes ces parties sont appelées à l'audience ;
Que par ailleurs, en application des dispositions de l'article 583 du code de procédure civile est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt à condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ;
Qu'en l'espèce, Dominique et Pierre-Jean X...ont intérêt à former tierce opposition à l'arrêt du 7 décembre 2011, lequel leur porte un préjudice certain en ce qu'il a déclaré Mme A... propriétaire par usucapion de parcelles dont ils soutiennent avoir la possession et assurer l'exploitation ;
Que n'ayant été ni parties ni représentés à l'instance ayant donné lieu à l'arrêt précité, ils sont recevables en leur tierce opposition formée par assignation des 2 et 14 mai 2012 ;
Qu'ils ont, eu égard aux dispositions de l'article 584 précité, à juste raison appelé à la procédure sur tierce opposition les quatre communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Lugo di Nazza et Poggio di Nazza, propriétaires indivises du Domaine d'Alzitone dont font partie les parcelles dont la propriété a été reconnue à Mme A... et qui à tort n'avaient pas été mises en cause lors de l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 7 décembre 2011 ;
Attendu que la procédure est ainsi régulière et les communes de Ghisonaccia et de Lugo di Nazza ont elles-mêmes intérêt à faire observer que l'action en revendication immobilière initiée par Mme A... qui n'avait pas été engagée contradictoirement à leur égard, avait été mal dirigée à l'encontre de la commission syndicale qui n'avait pas vocation à défendre seule dans le cadre d'une telle instance ;
Que leurs droits de propriété indivis étant en cause, elles sont elles-mêmes recevables à se joindre avec la commission syndicale des biens indivis du Domaine d'Alzitone à la tierce opposition des consorts X...et à solliciter dans leurs écritures la rétractation de l'arrêt du 7 décembre 2011 ;
Que les conclusions de Mme A... tendant à l'irrecevabilité de la présente tierce opposition seront rejetées et cette dernière déclarée recevable comme les demandes des communes de Ghisonaccia et de Lugo di Nazza ainsi que de la commission syndicale du Domaine d'Alzitone ;
Sur le fond :
Attendu qu'il importe de faire observer que le tiers opposant est dans une situation semblable à celle où il se serait trouvé s'il était intervenu à l'instance pour résister à l'action et que le juge doit se déterminer d'après les circonstances particulières du procès et non par voie de référence au jugement dont il est fait tierce opposition auquel les tiers opposants n'étaient pas parties ;
Qu'il s'ensuit que comme dans toute action en revendication, la charge de la preuve incombe au demandant soit en l'espèce Mme A... qui se prévaut d'une usucapion et qui est tenue de rapporter la preuve de la possession trentenaire qu'elle invoque ;
Qu'en effet, en application des articles 711 et 712 du code civil, la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, donation entre vifs ou testamentaire, par l'effet des obligations de même que par accession, incorporation ou prescription ;
Attendu qu'aux termes de l'article 2261 du code civil pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire ;
Attendu que si l'on peut joindre sa possession à celle de son auteur pour compléter la prescription conformément à l'article 2265 du code civil, l'article 2266 dispose toutefois que ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais par quelques laps de temps que ce soit ;
Qu'ainsi le locataire, le dépositaire, l'usufruitier et tous autres qui détiennent précairement le bien ou le droit du propriétaire ne peuvent le prescrire ;
Attendu que les modes de preuve de la propriété immobilière étant libres, il appartient au juge de rechercher le droit applicable au regard des faits et des éléments produits et d'apprécier la portée des preuves qui lui sont soumises lorsqu'elles peuvent entrer en contradiction ;
Attendu que si les terrains du Domaine d'Alzitone propriétés indivises des communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Lugo di Nazza et Poggio di Nazza peuvent faire l'objet de prescription acquisitive, encore faut-il que la possession du revendiquant réponde aux critères cumulatifs mentionnés à l'article 2261 sus-indiqué ;
Attendu qu'il n'est en l'espèce nullement contesté que les parcelles dont Mme A... a revendiqué la propriété par usucapion sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia et cadastrées AH 11, 13, 15, 16 et 71 font partie du Domaine d'Altizone dont les communes sus-mentionnées sont propriétaires indivises et qui sont gérées par application de l'article L 5222-1 du code général des collectivités territoriales par une commission syndicale ;
Que si celle-ci a qualité pour agir et défendre en justice, il n'en demeure pas moins que l'action de Mme A... qui mettait en cause les droits de propriété indivis de ces quatre communes devait être dirigée contre ces dernières et que l'intéressée a à tort choisi de ne pas les assigner et de n'intenter sa procédure qu'à l'encontre du syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone ;
Qu'elle ne peut se retrancher derrière la mention de la fiche immobilière établie certes en ce qui concerne les parcelles faisant partie du domaine au nom de ce syndicat intercommunal, mais qui précise bien que ce syndicat est le représentant des quatre communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Poggio di Nazza et Lugo di Nazza ;
Qu'ayant fait citer le seul syndicat intercommunal du domaine, sans préciser cette qualité, alors que ce dernier n'est pas propriétaire en son nom personnel des parcelles revendiquées, ni appeler à la procédure les quatre communes, Mme A... a mal dirigé son action en revendication ;
Que les communes de Lugo di Nazza et Ghisonaccia concernées en leur qualité de propriétaires indivis sont fondées à se joindre, avec la commission syndicale qui n'avait pas constitué avoué, à la tierce opposition des consorts X...et à solliciter avec la rétractation de l'arrêt du 7 décembre 2011 qui n'a pas pris en compte leurs droits, la confirmation du jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010 qui avait débouté Mme A..., élargissant ainsi les demandes des tiers opposants qui ne portent que sur les parcelles AH 13, 15, 16 et 71 sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia ;
Attendu que l'action en revendication ayant pour objet d'opposer le revendiquant à celui qui se dit aussi propriétaire du même bien, le manquement procédural commis par Mme A... qui n'avait pas attrait
au procès les quatre communes propriétaires indivises doit avoir de ce seul fait pour conséquence la rétractation de l'arrêt du 7 décembre 2011 qui a fait droit à son action en prenant en compte l'attestation du président de la commission syndicale du Domaine d'Alzitone du 30 août 2006 reconnaissant à Mme A... la qualité de propriétaire des parcelles revendiquées par celle-ci, attestations corroborées par les témoignages de Mme J...et de Mme K..., attestant de sa possession sur ces mêmes biens ;
Que s'ajoute à cet argument, ceux invoqués par les consorts X...qui à l'appui de leur tierce opposition, contestent l'usucapion dont se prévaut Mme A..., et justifient par les documents qu'ils versent aux débats et notamment par une attestation du maire de Ghisonaccia du 2 décembre 1982 que celle-ci avait cédé le 7 janvier 1980 en interrompant ainsi sa possession à cette date, ses droits sur les parcelles AH 15, AH 16, AH 53 et AH 13 à M. H..., lequel en avait fait de même au profit de Dominique X...qui les a exploitées à compter du 22 mars 1982 avant de les céder lui-même à son fils Pierre-Jean ;
Attendu que le président de la commission syndicale du Domaine d'Altizone a d'ailleurs attesté le 17 février 2005 que les parcelles AH 19, 53, 15 et 16 sont exploitées par M. X...;
Que Mme A... ne peut soutenir que ce dernier exploite celles-ci pour son compte ou qu'elle a été lésée par la cession au profit de M. H...qui ne résulte d'aucun document alors qu'est produite aux débats une lettre du maire de Ghisonaccia du 17 novembre 1982 lui indiquant que c'était à sa demande et avec sa signature légalisée qu'il avait porté les terrains au nom de H...;
Attendu que la possession alléguée par Mme A... à l'appui de son action en revendication qui est déniée par les tiers opposants eux-mêmes en possession des parcelles, ne répond nullement aux critères cumulatifs imposés par l'article 2261 du code civil ;
Qu'en conséquence l'arrêt infirmatif du 7 décembre 2011 en ce qu'il a dit Mme A... devenue propriétaire par voie d'usucapion des parcelles sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia recencées au cadastre de cette commune sous les numéros 11, 13, 15, 16 de la section AH au lieudit Ciarlino et sous le numéro 71 de la même section au lieudit Listingone, dit que cet arrêt vaudra titre de propriété et ordonné sa publication au service de la publicité foncière, ne peut qu'être rétracté ;
Que le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010 qui a débouté Mme Catherine Y... épouse A... de son action en revendication sera dès lors confirmé ;
Attendu que la publicité foncière de l'arrêt rétracté ayant été ordonnée, la même mesure de publicité sera prise en ce qui concerne la présente décision ;
Sur les dommages-intérêts, les frais irrépétibles et les dépens exposés à ce jour :
Attendu que Mme A... qui a introduit une action en revendication alors qu'elle ne pouvait ignorer avoir cédé ses droits sur les parcelles litigieuses en 1980 et qu'elle n'exploitait plus ces dernières depuis cette date, a contraint les consorts X...à une tierce opposition, leur occasionnant ainsi un préjudice moral qui sera réparé par la mise à sa charge au bénéfice de ces derniers d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Qu'elle les a en outre mis dans l'obligation d'exposer des frais non taxables dont il est équitable de leur accorder compensation dans la limite de 1 500 euros ;
Attendu que de même l'équité commande de la condamner à payer aux communes de Lugo di Nazza et de Ghisonaccia comme à la commission syndicale du Domaine d'Alzitone, la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que la réclamation que Mme A... forme au titre du remboursement de ses frais non taxables sera elle-même rejetée et cette dernière qui succombe supportera les entiers dépens exposés à ce jour ;
Sur la demande en revendication présentée par les consorts X...:
Attendu que l'effet dévolutif de la tierce opposition, voie de recours extraordinaire est limité à la remise en question relativement à son auteur des points jugés qu'elle critique, sans pouvoir par une demande nouvelle être à l'origine d'un nouveau litige ;
Qu'ainsi toute demande qui aurait pour conséquence de nouer un nouveau litige serait irrecevable ;
Que tel pouvant être le cas de la demande présentée in fine par les consorts X...tendant à se voir déclarer eux-mêmes propriétaires des parcelles litigieuses, il convient, aucune des parties n'ayant répliqué sur ce point, de leur demander de conclure sur la recevabilité de cette demande, de renvoyer à cette fin la procédure à audience de mise en état et de surseoir à statuer sur ce point dans cette attente, étant précisé que la procédure sera radiée si les parties ne présentaient pas leurs observations sur ce point ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Déclare les consorts X...recevables en leur tierce opposition à l'arrêt du 7 décembre 2011,
Déclare recevables le demandes de la commission syndicale du Domaine d'Alzitone et des communes de Lugo di Nazza et de Ghisonaccia,
Rétracte l'arrêt de la cour de ce siège du 7 décembre 2011 infirmant le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010, disant que Mme A... née Marie-Catherine Y... est devenue propriétaire par voie d'usucapion des parcelles sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia recensée au cadastre de cette commune sous les numéros 11, 13, 15, 16 de la section AH au lieu dit Ciarlino et sous le numéro 71 de la même section au lieu dit Listingone, disant que cet arrêt vaudra titre de propriété, ordonnant sa publication au Service de la publicité foncière de Bastia et laissant les entiers dépens à la charge de l'intimé,
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Mme Marie Catherine Y... veuve A... à payer à Dominique et Pierre Jean X...ensemble la somme de deux mille euros (2 000 euros) à titre de dommages-intérêts,
La condamne en outre à leur payer la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme Marie Catherine A... à payer à la commission syndicale du Domaine d'Alzitone comme aux communes de Lugo di Nazza et Ghisonaccia, ensemble, la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande formée sur le fondement de ce même article par Mme A...,
Ordonne la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière de Bastia,
Condamne Mme A... aux entiers dépens exposés à ce jour,
Sursoit à statuer sur l'action en revendication formée par les consorts X...,
Invite les parties à s'expliquer sur la recevabilité de cette action,
Renvoie à cette fin la cause et les parties à l'audience de mise en état du mercredi 22 janvier 2014,
Dit que la procédure fera l'objet d'une radiation à défaut de remise par les parties de leurs observations sur ce point,
Réserve les dépens ultérieurs.
LE GREFFIER LE PRESIDENT