Ch. civile A
ARRET No
du 11 SEPTEMBRE 2013
R. G : 11/ 00986 C-MAB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 15 Novembre 2011, enregistrée sous le no 10/ 01564
X...B...
C/
Y...F...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
ONZE SEPTEMBRE DEUX MILLE TREIZE
APPELANTS :
M. Antoine X...né le 24 Octobre 1938 à CASABLANCA (MAROC) ...20620 BIGUGLIA
assisté de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, Me Jean Louis SEATELLI, avocat au barreau de BASTIA
Mme Mathilde B... épouse X...née le 26 Août 1944 à ORAN (ALGÉRIE) ...20320 BIGUGLIA
assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMES :
M. Bernardin Vladimir Y...né le 11 Janvier 1934 à BASTIA (20200) ...20620 BIGUGLIA
assisté de Me Jean Louis RINIERI, avocat au barreau de BASTIA
Mme Ghislaine Raymonde F... épouse Y...née le 01 Décembre 1937 à SAINT MICHEL DE CHAVAIGNES ...20620 BIGUGLIA
assistée de Me Jean Louis RINIERI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 juin 2013, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Madame Marie BART, Vice-président placé près M. le premier président
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 11 septembre 2013.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... sont propriétaires d'une maison d'habitation édifiée sur une parcelle située à Biguglia au lieudit ... cadastrée section B no 945. M. Bernardin Y...et son épouse Mme Ghislaine F... sont propriétaires de la parcelle de terre voisine cadastrée section B no 944 sur laquelle est bâtie une maison.
M. Bernardin Y...et son épouse Mme Ghislaine F... ont consenti lors de l'acquisition de leur parcelle une servitude de passage aux propriétaires des parcelles cadastrées section B no 992 et 993, savoir M. I...et M. J.... Le passage se fait sur le chemin de desserte de leur propriété côté Est.
Au cours du printemps 2010, M. Bernardin Y...et son épouse Mme Ghislaine F... ont fait poser une chaîne cadenassée pour barrer l'accès au chemin de servitude situé sur leur propriété aux époux X.... Ces derniers ont obtenu le 23 août 2010 du juge des référés une ordonnance constatant l'existence d'une voie de fait créée par la pose de la chaîne cadenassée les empêchant d'accéder à leur villa et enjoignant aux époux Y...de ne pas rétablir la chaîne jusqu'à la décision définitive sur l'instance engagée au fond.
Considérant que leur propriété était enclavée, M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... ont saisi le tribunal de grande instance de Bastia afin d'obtenir une servitude de passage sans indemnité.
Par jugement en date du 15 novembre 2011, le tribunal de grande instance de Bastia a :
- débouté M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... de leurs demandes principale et subsidiaire,
- condamné M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... à payer à M. Bernardin Y...et son épouse Mme Ghislaine F... une indemnité de 1 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- constaté qu'il a déjà été statué sur les dépens de l'instance en référé,
- condamné M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... aux dépens.
Le tribunal a considéré, au visa de l'article 682 du code civil, que la propriété des époux X...disposait d'un accès sur le chemin communal bordant sa propriété côté Sud intitulé sur l'extrait cadastral " ancien chemin communal de Biguglia à la plaine " lequel dessert d'autres parcelles édifiées de maison sans autre accès à la voie publique et qui se présente comme une route goudronnée suffisamment large pour permettre le passage de tous types de véhicules, notamment engins de chantiers et véhicules de secours. Il a ajouté que la pente de ce chemin communal n'empêchait pas la circulation des véhicules. Il a précisé qu'il incombe aux propriétaires d'édifier les éventuelles constructions ou de disposer les éléments nécessaires à leur habitation en fonction de l'accès dont ils disposent sur la voie publique. Il en a conclu que les époux X...ne démontraient pas l'état d'enclave de leur fonds pour les débouter.
M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... ont relevé appel de ce jugement par déclaration déposée au greffe le 16 décembre 2011.
En leurs dernières conclusions déposées par voie électronique auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... demandent à la cour de :
- réformer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bastia le 15 novembre 2011 en toutes ses dispositions,
- constater l'état d'enclave de leur propriété,
- dire et juger qu'en conséquence ils disposent d'un droit de passage légal sur le chemin litigieux,
- dire et juger qu'en raison de leur possession plus que trentenaire, les époux Y...ne pourront prétendre à une indemnité,
En tout état de cause
-condamner solidairement les époux Y...à leur payer la somme de 3 000, 00 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens distraits au profit de Me Albertini, Avocat.
Ils font valoir que lors de l'acquisition de leur parcelle, aucun droit de passage ne leur a été reconnu alors que les parcelles 992 et 993 en ont bénéficié de la part de leur vendeur commun, M. K...lequel s'était engagé à faire réparer son oubli par devant notaire. Ils indiquent que néanmoins et depuis plus de 34 ans, ils utilisaient quotidiennement ce droit de passage sans difficultés jusqu'à ce que les propriétaires des parcelles 992 et 993 décident de rénover le chemin. Ils exposent avoir accepté de participer aux frais de rénovation à la condition que leur droit de passage soit régularisé. Devant le refus des époux Y...de régulariser la situation, ils ont intenté la présente procédure.
Ils estiment que leur fonds est enclavé depuis l'origine au motif que le permis de construire leur a été donné sur la base de l'unique accès à la voie publique réalisé par M. K.... Ils ajoutent que M. K...a ouvert un deuxième chemin pour désenclaver les parcelles 1064 et 1065. Ils font observer que ce chemin ne leur permet pas d'accéder à leur parking et à leur garage et qu'il existe une différence de niveau qui empêche le distributeur de produits pétroliers d'accéder en toute sécurité à leur cave à fuel.
Ils critiquent le jugement en considérant que le chemin d'accès retenu par le tribunal est la propriété des époux K...et n'est pas une voie publique ; que leur fonds ne dispose donc d'aucun accès à la voie publique et que leur passage doit s'exercer sur la propriété des époux Y.... Ils considèrent en effet que le fait de rendre compatible l'utilisation du chemin se trouvant au Sud de leur propriété impliquerait des travaux très importants.
Ils soutiennent également avoir utilisé le chemin revendiqué pendant 34 ans et avoir acquis par prescription l'assiette et le mode d'exercice de la servitude de passage.
Ils contestent les critiques émises par les époux Y...à l'encontre des attestations qu'ils produisent à l'appui de leurs prétentions. Ils considèrent que les époux Y...pouvaient se procurer par eux-même le document d'arpentage qu'ils leur reprochent de ne pas avoir produit aux débats.
En leurs dernières conclusions déposées par voie électronique auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, M. Bernardin Y...et son épouse Mme Ghislaine F... demandent à la cour de :
- débouter les époux X...de leurs demandes,- condamner les époux X...à leur payer la somme de 5 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Subsidiairement :
- ordonner une expertise et un transport sur les lieux.
Ils font valoir que les servitudes de passage ne s'acquièrent que par titre et que le fait d'avoir autorisé ponctuellement les époux X...à utiliser le chemin de desserte ne leur confère aucun droit.
Ils soutiennent que la prescription dont se prévalent les époux X...nécessite que leur fonds soit enclavé. Or, ils contestent l'état d'enclave en rappelant qu'ils utilisent le passage depuis trente ans en vertu d'une simple tolérance et qu'il n'est qu'un passage secondaire. Ils font observer que la propriété des appelants dispose d'une entrée principale très large sur le chemin communal carrossable et utilisé quotidiennement par d'autres usagers. Ils réfutent les affirmations des époux X...en rappelant que l'ancien chemin de Biguglia permet l'accès à leur villa, la pente n'étant pas un obstacle à la desserte par un camion de livraison de produits pétroliers.
Ils s'étonnent que les époux X...n'aient pas versé le document d'arpentage de la parcelle no 473 annexé à l'acte de vente du 22 novembre 1976 et qui contenait division de l'ancienne parcelle B 149. Ils considèrent que ce document prouverait qu'ils n'ont jamais acquis aucune servitude à travers leur parcelle B 944.
Ils critiquent les attestations produites par les appelants pour soutenir la prescription de l'assiette de la servitude.
Ils expliquent que la volonté de M. K..., leur vendeur commun, n'était pas d'aménager une seconde route d'accès dans le sens Ouest-Est puisqu'existait déjà le chemin communal. Ils ajoutent que les époux X...ont ensuite profité du chemin de desserte Nord-Sud qui avait été créé pour désenclaver les parcelles 992 et 993 alors qu'ils disposaient depuis l'origine de l'accès Ouest-Est. Ils soutiennent que le chemin Ouest-Est a été élargi pour permettre l'accès à la propriété X...ainsi qu'aux parcelles situées plus au Sud et qu'il est couramment utilisé par des camions.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2013 et l'affaire renvoyée pour être plaidée au 3 juin 2013.
MOTIFS DE LA DECISION :
Le premier juge a, par des motifs pertinents que la cour adopte, constaté l'absence de l'état d'enclave invoqué par M. Antoine X...et par son épouse Mme Mathilde B... et en conséquence, rejeté toutes leurs demandes. Les pièces supplémentaires produites par les appelants devant la cour ne permettent pas plus d'établir l'état d'enclave de leur fonds étant rappelé que la tolérance dont ils auraient pu bénéficier de la part des époux Y...ne leur confère pas de droit de passage sur le chemin Nord-Sud destiné à desservir les parcelles cadastrées B no 992 et 993. L'expertise sollicitée à titre subsidiaire par M. Bernardin Y...et par son épouse Mme Ghislaine F... ne paraît donc pas opportune en l'état des pièces versées aux débats.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Succombant en leurs prétentions, M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... seront déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme ils l'ont été en première instance, le jugement étant confirmé sur ce point. Il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. Bernardin Y...et de son épouse Mme Ghislaine F... les frais non compris dans les dépens engagés devant la cour d'appel. M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... seront condamnés à leur payer la somme de 2 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Le jugement sera également confirmé en ce qu'il les a condamnés à payer à M. Bernardin Y...et à son épouse Mme Ghislaine F... une indemnité sur le même fondement.
M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... sont tenus aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 15 novembre 2011,
Y ajoutant,
CONDAMNE M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... à payer à M. Bernardin Y...et à son épouse Mme Ghislaine F... la somme de deux mille euros (2 000, 00 euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
LAISSE à la charge de M. Antoine X...et son épouse Mme Mathilde B... les dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT