La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2013 | FRANCE | N°10/00436

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 19 juin 2013, 10/00436


Ch. civile A

ARRET No
du 19 JUIN 2013
R. G : 10/ 00436 R-MAB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 21 Avril 2010, enregistrée sous le no 08/ 1525

S. A. R. L LE COSI
C/
X... SCI MESCHINI

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF JUIN DEUX MILLE TREIZE

APPELANTE :

S. A. R. L LE COSI Lavasina 20222 BRANDO

assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Christian GIOVANNANGELI, avocat au barr

eau de BASTIA, substitué par Me Thomas VALERY, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEES :

Mme Toussainte X... née le 11...

Ch. civile A

ARRET No
du 19 JUIN 2013
R. G : 10/ 00436 R-MAB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 21 Avril 2010, enregistrée sous le no 08/ 1525

S. A. R. L LE COSI
C/
X... SCI MESCHINI

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DIX NEUF JUIN DEUX MILLE TREIZE

APPELANTE :

S. A. R. L LE COSI Lavasina 20222 BRANDO

assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Christian GIOVANNANGELI, avocat au barreau de BASTIA, substitué par Me Thomas VALERY, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEES :

Mme Toussainte X... née le 11 Septembre 1952 à NICE (06000) ...20217 SAINT FLORENT

assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Pascale PERREIMOND, avocat au barreau de BASTIA

SCI MESCHINI 13, rue Monseigneur Rigo 20200 BASTIA

assistée de Me Claude CRETY, avocat au barreau de BASTIA, substituée par Me Valérie CASTELLORIZIOS LELIEVRE, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 avril 2013, devant Mme Julie GAY, Président de chambre, et Mme Marie BART, Vice-président placé près M. le premier président, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près M. le premier président

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 19 juin 2013

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Madame Toussainte X... est propriétaire d'un appartement situé ..., au 1er étage, façade côté mer. La société civile immobilière Meschini (SCI Meschini) est propriétaire du local situé au-dessous de l'appartement de Madame Toussainte X.... Ce local est donné en location-gérance à la SARL Le Cosi laquelle y exploite un restaurant. Invoquant une gêne pour ouvrir ses fenêtres en raison de la présence d'un toit posé sur la terrasse du restaurant et des nuisances olfactives tenant aux fumées émanant du restaurant, Madame Toussainte X... a sollicité la suppression du toit ainsi que la mise aux normes de la hotte d'évacuation des odeurs et l'indemnisation de son trouble de jouissance.

Par jugement du 2 mars 2010, le Tribunal de grande instance de BASTIA a :

- rappelé que l'instance enrôlée sous le no 09/ 00645 a été jointe à l'instance enrôlée sous le no 08/ 01525,
- ordonné à la SARL Le Cosi et à la SCI Meschini de supprimer le toit de la terrasse du restaurant, et ce dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement, et sous astreinte provisoire, dont elles seront tenues in solidum, de 30, 00 euros par jour à compter de l'expiration du délai imparti,

- condamné in solidum la SARL Le Cosi et la SCI Meschini à payer à Madame Toussainte X..., pour le préjudice résultant de l'existence du toit, une indemnité de 1 000, 00 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- condamné in solidum la SARL Le Cosi et la SCI Meschini à payer à Madame Toussainte X... une indemnité de 1 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté Madame Toussainte X... du surplus de ses demandes,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné in solidum la SARL Le Cosi et la SCI Meschini aux dépens distraits au profit de Maître Giovannangelli en application de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par jugement du 21 avril 2010, le Tribunal de grande instance de Bastia a rectifié le jugement du 2 mars 2010 en condamnant in solidum la SARL Le Cosi et la SCI Meschini aux dépens.

La SARL Le Cosi a relevé appel de ces jugements par déclaration déposée au greffe le 8 juin 2010.

Par ordonnance du 28 juin 2011, le Président de chambre chargé de la mise en état a ordonné une expertise confiée à Monsieur Jean-Christian I...aux fins de :

- se rendre sur les lieux,
- fournir tous éléments permettant d'apprécier s'il existe un trouble anormal de voisinage tenant aux nuisances olfactives occasionnées par l'activité de la SARL Le Cosi,
- dans l'affirmative, en évaluer l'importance,
- dire si l'installation d'extraction et de destruction d'odeur mise en place par la SARL Le Cosi est conforme aux normes réglementaires requises,
- dans la négative, déterminer les aménagements à réaliser pour y remédier,
- faire toutes constatations utiles à la solution du litige.

L'expert a déposé son rapport le 7 décembre 2011.

En ses dernières conclusions en date du 26 juin 2012 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la SARL Le Cosi demande à la Cour de :

- dire et juger que nul ne plaide par procureur,
- constater que seul le locataire de l'immeuble peut se prévaloir de l'existence d'un lien direct et personnel avec les troubles allégués,
- constater que Madame X... ne peut prétendre subir un dommage personnel et direct et qu'elle ne peut agir en justice pour le faire cesser,
- en conséquence, réformer la disposition du jugement déféré ayant déclaré recevable l'action introduite par Madame Toussainte X...,
à titre subsidiaire,
- sur les troubles prétendument occasionnés par le toit de la terrasse :
constater que le toit qu'elle a bâti est plus bas que celui qui avait été édifié par la société qui exploitait le local antérieurement,
constater par conséquent que Madame X... ne peut prétendre subir un trouble résidant dans la diminution de son champ de vision et résultant d'une perte d'ensoleillement,
en conséquence, réformer la disposition du jugement déféré ayant ordonné la suppression du toit de la terrasse du restaurant le Cosi
-sur la demande de dommages intérêts :
constater que Madame X... qui n'a jamais habité dans les lieux ne peut prétendre subir et avoir subi un quelconque trouble de jouissance,
en conséquence, réformer la disposition du jugement déféré l'ayant condamné in solidum avec la SARL Meschini à payer à Madame X... la somme de 1 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts,
- sur les prétendues nuisances olfactives :
constater que Madame X... s'est toujours contentée d'alléguer la présence de nuisances olfactives, sans jamais rapporter la moindre preuve pouvant l'étayer,
constater que Madame X... s'est toujours opposée tant en première instance que devant la Cour à ce qu'une mesure d'expertise soit ordonnée
constater la mauvaise foi de Madame X... pour les raisons visées ci-dessus,

en conséquence, confirmer la disposition du jugement déféré ayant débouté Madame X... de sa demande de dommages intérêts en réparation des troubles qu'elle dit subir en raison de nuisances olfactives par l'activité du restaurant le Cosi,

en tout état de cause,
- constater la mauvaise foi de Madame X... et la condamner à lui payer la somme de 2 500, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner Madame X... au paiement de tous les frais exposés au titre des différents constats d'huissier et au titre du rapport du généalogiste,
- condamner Madame X... aux entiers dépens tant de première instance que ceux d'appel, lesquels comprendront tous ceux qui suivront notamment au titre de l'article 10 du décret du 12 septembre 1996 modifié par le décret du 8 mars 2001, distraits au profit de la SCP Jobin et ce en application des dispositions des articles 696 et 699 du Code de procédure civile.

Elle fait observer que l'action de Madame X... aurait dû être déclarée irrecevable par le tribunal comme contraire aux dispositions de l'article 56 du Code de procédure civile en ce qu'elle n'a visé aucun fondement juridique à sa demande. Elle soutient que l'action est irrecevable en ce qu'elle n'a pas d'intérêt à agir puisqu'elle n'occupait pas l'appartement et qu'elle n'a donc pas subi elle-même le trouble de jouissance dont elle se prévaut.

Elle affirme que Madame X... s'est plainte d'un trouble tenant à la fermeture des volets occasionné par l'aménagement d'un dôme sur la terrasse de son restaurant qui avait cessé lorsqu'elle l'a assignée en septembre 2008. Quant à la perte d'ensoleillement et à la perte de vue sur la mer, elle considère que le tribunal a été trompé par le procès-verbal dressé par Maître De J...lequel a procédé à des constatations tendancieuses, arbitraires et orientées. Elle fait valoir que la nouvelle toiture est plus basse que celle précédemment installée ; que la construction a été réalisée après obtention des autorisations administratives requises ; que l'attestation du Docteur K..., précédent locataire de Madame X... est sujette à caution en ce qu'il est le beau-frère de cette dernière et que les clichés photographiques qu'elle produit font apparaître l'absence de toute perte de vue ou d'ensoleillement. Elle ajoute que Madame X... a reconnu l'absence de tout trouble en déclarant que le toit en arc de cercle obstruait moins la vue sur la mer alors qu'il n'a toujours pas été abaissé.

Sur les nuisances olfactives, elle considère que Madame X... n'en rapporte pas la preuve et que les conclusions de l'expert rejoignent les constatations faites à sa demande par la SCP d'huissier de justice Filippi-Leca-Marzocchi.

Elle critique le jugement qui a accordé une indemnisation à Madame X... pour son trouble de jouissance alors que son locataire, le Docteur K..., ne s'est jamais plaint de troubles olfactifs ni de l'obstruction partielle de la vue sur la mer depuis son cabinet et qu'elle n'a pas prouvé les difficultés qu'elle aurait rencontrées pour relouer son appartement.

Elle se prévaut d'un préjudice financier lié à la mauvaise foi de Madame X....

En ses dernières conclusions en date du 10 janvier 2011 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la SCI Meschini demande à la Cour de :

- la recevoir en son appel incident partiel,
- confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Bastia en ce qu'il a débouté Madame X... de ses demandes au titre des troubles liés à l'évacuation des fumées de la cuisine et à l'impossibilité d'ouvrir les volets,
- infirmer la décision en ce qu'elle a retenu un trouble anormal de voisinage résultant de la perte d'ensoleillement et de vue du fait des travaux affectant le toit de la terrasse,
- constater que la preuve du trouble anormal et/ ou dommageable n'est pas rapportée,
- débouter en conséquence Madame X... de l'intégralité de ses demandes
-condamner Madame X... au paiement de la somme de 1. 500, 00 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel,
subsidiairement,
- condamner la SARL Le Cosi à la relever et à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,
- dans ce cas, dire les dépens de première instance et d'appel à la charge de la SARL Le Cosi.

Elle fait valoir que Madame X... ne souffre d'aucun trouble olfactif ou sonore ainsi qu'il a été constaté par la SCP Filippi et Leca le 19 août 2009 et qu'elle peut ouvrir ses volets maintenant que la SARL le Cosi a fait procéder aux travaux nécessaires pour remédier à cette gêne. Elle considère que Madame X... n'a rien perdu de sa vue sur le port ni de son ensoleillement à la suite des travaux sur la toiture et que le tribunal ne pouvait l'indemniser de ce chef, faute par elle de rapporter la preuve que l'exhaussement du toit était anormal.

Elle précise, à titre subsidiaire, qu'elle a mis à disposition un local conforme à sa destination à la SARL Le Cosi laquelle est à l'origine des travaux litigieux. Elle en déduit que la SARL Le Cosi doit la relever et la garantir de toutes condamnations pour ne pas avoir respecté les termes du bail commercial.

En ses dernières conclusions en date du 28 novembre 2012 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Madame Toussainte X... demande à la Cour de :

- débouter la SARL Le Cosi et la SCI Meschini de leur appel infondé
-la recevoir en son appel incident en reconnaissant les nuisances olfactives au moins entre 2007 et 2010,
- condamner la SARL Le Cosi et la SCI Meschini à lui payer la somme de 4 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour les nuisances olfactives,
- confirmer le jugement pour le surplus,
- condamner chacune des appelantes à lui payer la somme de 2 500, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la Scp Ribaut-battaglini, avoués.

Elle fait valoir que la SARL Le Cosi n'a pas soulevé devant le tribunal la fin de non recevoir tirée de l'absence de fondement juridique. Elle rappelle que son locataire n'avait aucun lien juridique avec un copropriétaire et qu'elle se devait d'agir suite à ses plaintes pour perte de vue du bien loué et des nuisances olfactives. Elle considère avoir subi un préjudice direct et personnel caractérisant son intérêt légitime à agir en raison des difficultés à trouver un nouveau locataire.

Elle conteste que les travaux réalisés le 12 septembre 2008 aient fait cesser le trouble en expliquant que du mois de décembre 2007 jusqu'au mois de septembre de l'année suivante, elle n'a pu ouvrir les persiennes qui étaient bloquées par le toit en arc de cercle du restaurant. Elle précise que les travaux réalisés ont permis d'ouvrir les persiennes mais qu'ils ont abouti à l'élévation du toit qui était déjà à 0, 90 mètre au dessus du niveau du bas des portes fenêtres de son appartement. Elle explique que les travaux ont donc obstrué encore plus la vue sur la mer dont disposait ce dernier ainsi qu'il ressort d'un nouveau constat d'huissier dressé le 15 octobre 2009.

Elle considère que son trouble de jouissance provient de la totale obscurité dans laquelle le logement a été plongé pendant neuf mois.

Pour établir les nuisances olfactives, elle se fonde sur le constat d'huissier établi en juillet 2008 ainsi que sur le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 30 octobre 2009. Elle fait observer que le fait que les nuisances n'existent plus aujourd'hui ne fait pas disparaître le trouble de jouissance depuis 2007.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2013 et l'affaire renvoyée pour être plaidée au 8 avril 2013.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- Sur la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité pour agir :

Le premier juge a estimé à bon droit par des motifs pertinents que la cour adopte que Madame Toussaint X... était recevable à agir en sa qualité de propriétaire de l'appartement dans la mesure où elle devait assurer à son locataire la jouissance paisible des lieux.

Le jugement querellé sera confirmé sur ce point.

2- Sur les troubles de voisinage :

Par application de l'article 544 du Code civil, le droit pour un propriétaire de jouir de sa chose de la manière la plus absolue est limité par l'obligation qu'il a de ne causer à la propriété d'autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage.

Il en résulte qu'un propriétaire même s'il ne réside pas sur son fonds est recevable à demander qu'il soit mis fin aux troubles anormaux de voisinage provenant d'un fonds voisin.

2-1 : Sur le préjudice né de la pose du toit de la terrasse :

- Sur l'impossibilité d'ouvrir les volets de l'appartement :

Le premier juge a retenu à juste titre que Madame Toussainte X... justifiait par le procès-verbal dressé le 2 juillet 2008 par Maître L..., huissier de justice que le toit de la terrasse de la SARL Le Cosi empêchait l'ouverture normale des fenêtres et des volets de l'appartement qu'elle donnait en location au docteur K...mais qu'à la suite des travaux réalisés par l'appelante au cours du mois de septembre 2008, ces troubles avaient cessé.

- Sur la privation de vue et de la perte d'ensoleillement :

Le premier juge a relevé à juste titre qu'il ressortait du constat dressé par Maître L..., huissier de justice, le 15 octobre 2009 que la vue directe sur la mer était toujours obstruée d'environ 0, 90 mètre dans la partie inférieure des portes-fenêtres. La SARL Le Cosi et la SCI Meschini tentent de combattre ces constatations en prétendant pour la première avoir obtenu l'autorisation administrative nécessaire à la réalisation de la toiture en arc de cercle. Or, il s'avère que la pièce no 7 produite ne correspond pas à l'autorisation dont la SARL Le Cosi entend se prévaloir mais correspond à la terrasse fermée couverte installée devant son établissement. Quant aux attestations que la SARL Le Cosi produit devant la cour, elles ne font que confirmer qu'aucun des travaux ordonnés par le tribunal dans son jugement du 2 mars 2010 n'ont été réalisés et elles ne permettent pas d'établir que les troubles retenus dans la décision ont cessé. Enfin, la SCI Meschini ne peut valablement opposer l'existence d'une toiture plus haute de la part de son précédent locataire à Madame X... alors qu'elle n'était pas propriétaire de l'appartement voisin du restaurant. Le premier juge a donc justement retenu que l'obstruction partielle de la vue sur la mer constituait un trouble anormal dont la SARL Le Cosi et la SCI Meschini sont responsables l'une comme locataire et l'autre comme propriétaire du bien litigieux. C'est également à juste titre que, pour mettre fin à ce trouble anormal de voisinage, le premier juge a ordonné à ces deux sociétés de supprimer le toit de la terrasse, dans un délai de deux mois et sous astreinte de provisoire de 30, 00 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai en les y condamnant in solidum. Le jugement querellé sera confirmé sur ce point.

Par contre, il n'est pas établi que Madame X... ait rencontré des difficultés pour donner en location l'appartement après le départ de son précédent locataire, le Docteur K..., en janvier 2010. En effet, il ressort de l'attestation en date du 14 janvier 2013 de l'agence Harmonie Home Immobilier, mandatée pour la location du local, qu'aucune difficulté n'a été soulevée lors des visites et que l'appartement a été reloué au début de l'année 2010. Madame X... doit être déboutée de sa demande d'indemnisation de ce chef.

Le jugement querellé sera infirmé sur ce point.

2-2 : Sur l'existence de nuisances olfactives :

Il n'est pas contesté que suivant facture du 15 juin 2008, le gérant de la SARL Le Cosi a fait procéder à des travaux d'installation d'un destructeur d'odeur. Les deux copropriétaires de l'immeuble voisin de l'appartement de Madame X... contactés par l'expert judiciaire ainsi que les locataires actuels (la brigade des douanes) ne se plaignent pas de nuisances olfactives. De plus, il ressort du rapport d'expertise de Monsieur Jean-Christian I...que :

- il n'a pas constaté de nuisance olfactive particulière,
- l'installation d'un neutralisant d'odeur par le gérant de la SARL Le Cosi est adaptée,
- les installations d'extraction des fumées et vapeurs des hôtes et de traitement sont conformes aux prescriptions réglementaires et de celles des constructeurs,
- la bouche d'évacuation extérieure ne respecte pas les distances prescrites par l'article 63-1 du règlement sanitaire départemental avec la fenêtre de l'appartement de Madame X...,
- compte tenu des contraintes techniques et architecturales et de l'absence de constatation de nuisances olfactives, il est proposé de procéder à des aménagements mineurs pour un coût de 346, 68 euros, de mettre en place un registre d'entretien et de formaliser les opérations d'entretien par un contrat annuel de maintenance.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le préjudice olfactif invoqué par Madame X... n'est pas établi pour la période où le Docteur K...était locataire puisqu'aucune modification n'a été apportée au système d'évacuation des odeurs depuis l'installation du destructeur courant 2008.

Le jugement querellé sera confirmé sur ce point.

3- Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Si le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné la SARL Le Cosi et la SCI Meschini à payer à Madame X... la somme de 1 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, il ne paraît pas inéquitable en revanche de laisser ses frais irrépétibles devant la Cour d'appel à la charge de chaque partie. Il ne sera donc pas fait droit aux demandes formées devant la Cour sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les dépens de première instance seront à la charge de la SARL Le Cosi et de la SCI Meschini conformément à la décision déférée qui sera confirmée sur ce point. Il convient de faire masse des dépens d'appel et de les faire supporter par Madame Toussainte X... à hauteur du tiers et par la SARL Le Cosi ainsi que la SCI Meschini à hauteur des deux tiers restants en y incluant exclusivement les frais de l'expertise judiciaire confiée à Monsieur Jean-Christian I..., les autres frais devant rester à la charge de chacune des parties. Il convient de dire que les dépens seront distraits au profit de Maître Philippe Jobin et de la SCP Ribaut-battaglini, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Confirme le jugement du 2 mars 2010 du Tribunal de grande instance de Bastia en ce qu'il a déclaré Madame Toussainte X... recevable à agir en sa qualité de propriétaire, en ce qu'il a ordonné à la SARL Le Cosi et à la société civile immobilière Meschini de supprimer le toit de la terrasse du restaurant, et ce dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement, et sous astreinte provisoire, dont elles seront tenues in solidum, de 30, 00 euros par jour à compter de l'expiration du délai imparti, en ce qu'il a débouté Madame Toussainte X... de ses prétentions quant à l'existence de nuisances olfactives, en ce qu'il a condamné in solidum la SARL Le Cosi et la société civile immobilière Meschini à payer à Madame Toussainte X... une indemnité de 1 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées,
déboute Madame Toussainte X... de sa demande d'indemnisation pour le préjudice résultant de l'existence du toit de la terrasse,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
Fait masse des dépens d'appel et dit qu'ils seront supportés par Madame Toussainte X... à hauteur du tiers et par la SARL Le Cosi ainsi que la SCI Meschini à hauteur des deux tiers restants en y incluant exclusivement les frais de l'expertise judiciaire confiée à Monsieur Jean-Christian I...et distraits au profit de Maître Philippe Jobin et de la SCP Ribaut-Battaglini, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 10/00436
Date de la décision : 19/06/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2013-06-19;10.00436 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award