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29/05/2013 | FRANCE | N°11/00939

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 29 mai 2013, 11/00939


Ch. civile A

ARRET No
du 29 MAI 2013
R. G : 11/ 00939 C-MAB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 11 Octobre 2011, enregistrée sous le no 10/ 01552

X...
C/
D'Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT NEUF MAI DEUX MILLE TREIZE
APPELANTE :
Mme Rose X...née le 23 Décembre 1947 à L'ILE-ROUSSE (20220) ...20220 L'ILE-ROUSSE

assistée de Me Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA, Me Patrice VAILLANT, avocat au b

arreau de MARSEILLE

INTIMEE :

Mme Françoise D'Y...née le 28 Octobre 1981 à Bastia (20200) ... 20220 L'ILE ...

Ch. civile A

ARRET No
du 29 MAI 2013
R. G : 11/ 00939 C-MAB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 11 Octobre 2011, enregistrée sous le no 10/ 01552

X...
C/
D'Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT NEUF MAI DEUX MILLE TREIZE
APPELANTE :
Mme Rose X...née le 23 Décembre 1947 à L'ILE-ROUSSE (20220) ...20220 L'ILE-ROUSSE

assistée de Me Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA, Me Patrice VAILLANT, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE :

Mme Françoise D'Y...née le 28 Octobre 1981 à Bastia (20200) ... 20220 L'ILE ROUSSE

assistée de Me Jean Sébastien DE CASALTA, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 mars 2013, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 29 mai 2013.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Suivant acte authentique du 13 octobre 2005, Mme Rose X...a vendu à sa nièce, Mme Françoise d'Y...une parcelle de terrain cadastrée section B no 1600 située dans le ...à L'Ile Rousse au prix de 28 965, 00 euros.

Mme Rose X...a fait assigner Mme Françoise d'Y...pour voir prononcer la résolution de l'acte authentique, subsidiairement la nullité de cet acte et encore plus subsidiairement la rescision pour lésion ainsi que le remboursement du coût des matériaux et de la main d'œ oeuvre.
Par jugement du 11 octobre 2011, le tribunal de grande instance de Bastia a débouté Mme Rose X...de ses demandes et l'a condamnée à payer à Mme Françoise d'Y...la somme de 2 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Mme Rose X...a relevé appel de ce jugement par déclaration déposée au greffe le 2 décembre 2011.
En ses dernières conclusions en date du 14 février 2012 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Mme Rose X...demande à la cour de :
- réformer le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 11 octobre 2011,
- prononcer la résolution de l'acte authentique de vente et subsidiairement d'en prononcer la nullité,
- très subsidiairement, de prononcer la rescision pour lésion de la vente,
- ordonner une expertise afin de déterminer le prix de l'immeuble avec précision,
- dire que par application de l'article 555 alinéa 3 du code civil, elle réglera le coût des matériaux et de la main d'œ uvre réellement déboursés, sous déduction de la somme de 28 965, 00 euros montant du prix de vente,

- dire qu'elle est titulaire d'un usufruit sur l'appartement du rez-de-chaussée situé dans le ...à L'Ile Rousse sur la parcelle cadastrée section B 1600,

- ordonner la publication de la décision à intervenir en marge de l'acte publié au bureau des hypothèques de Bastia 02/ 12/ 2005 volume 2005P no 9398,
- condamner Mme Françoise d'Y...à la somme de 2 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de Me Jean-Jacques Canarelli.
Elle critique le jugement déféré en ce qu'il rejeté sa demande en résolution de la vente alors que selon l'accord des parties, elle est titulaire de l'usufruit du rez-de-chaussée de l'immeuble à bâtir que lui a cédé sa nièce en contrepartie de la cession du terrain. Elle précise que le notaire a refusé de rédiger l'acte par lequel était transféré l'usufruit sur un bien qui n'existait pas mais que Mme d'Y...avait manifesté son accord avant de refuser la convention d'usufruit. Elle reproche au jugement d'avoir exigé la preuve de l'accord des parties par un écrit lequel est nécessaire uniquement pour être opposable aux tiers et pas entre les parties. Elle considère que le tribunal a ajouté à la loi en exigeant qu'elle prouve une volonté effective de céder l'usufruit de la part de Mme d'Y.... Elle ajoute que l'opération doit être analysée dans sa globalité et qu'elle consistait à lui attribuer l'usufruit en contrepartie de la cession du terrain et du paiement du prix des travaux pour la construction de la maison. Elle indique que la cour d'appel de céans a accepté ce raisonnement en rejetant la demande en paiement des loyers présentée par Mme d'Y....
Elle indique que le tribunal n'a pas tiré les conséquences de ses constatations en refusant de faire droit à sa demande d'expertise sur le prix de l'immeuble alors qu'il constatait que la valeur du terrain était difficile à fixer.
Elle considère que le tribunal aurait dû apprécier la relation de parenté pour accéder à sa demande en rescision au vu de la fraude commise par Mme d'Y....
Au cas où la cour refuserait la résolution de la vente, elle estime que l'annulation doit être prononcée, l'obligation de transférer la propriété étant nulle pour défaut de cause au regard de l'insuffisance de la contrepartie. Elle ajoute que la mésentente avec sa nièce s'est révélée peu après l'expiration du délai de deux ans pour agir en lésion et considère que Mme d'Y...a obtenu le délai de forclusion par fraude, ce qui suspend ledit délai.

En ses dernières conclusions en date du 10 avril 2012 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Mme Françoise d'Y...demande à la Cour de :

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 11 octobre 2011,

- condamner Mme Rose X...à lui payer la somme de 3 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Elle fait valoir que Mme Rose X...ne justifie pas que le droit d'usufruit dont elle se prévaut ait été formalisé par un contrat écrit et qu'elle ne produit pas l'acte de caution de jouissance en bon père de famille ainsi que l'état de l'immeuble objet de l'usufruit tels que prévus par l'article 600 et 601 du code civil. Elle ajoute que le projet d'acte de cession d'usufruit a été dressé par le notaire à la demande de Mme Rose X...et qu'elle ne l'a pas signé, lui permettant de conserver la pleine propriété de son bien. Elle dénie en outre toute force au courrier du notaire en date du 4 octobre 2007 et aux attestations produites en ce qu'ils ne témoignent pas de son engagement à concéder l'usufruit à sa tante.
Elle considère qu'aucune erreur sur le prix de vente du terrain n'est démontrée et que le contrat ne peut être annulé en raison de la modicité du prix.
Elle soulève l'irrecevabilité de l'action en rescision en raison de sa tardiveté. Elle ajoute que le prix n'est pas lésionnaire puisqu'elle a acheté à sa tante la parcelle au prix de 43, 23 euros le m2 alors qu'elle l'avait acquise quatre ans auparavant au prix de 28, 58 le m2.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2012 et l'affaire renvoyée pour être plaidée au 11 mars 2013.

MOTIFS DE LA DECISION :

1o) Sur la demande en résolution de la vente :

Par application de l'article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
En l'espèce, il est constant que l'acte de vente passé entre Mme X...et Mme d'Y...portant sur la parcelle cadastrée section B no 1600 située dans le ...à L'Ile Rousse ne mentionne pas d'engagement de la part de cette dernière de céder à la première l'usufruit d'un lot dans l'immeuble à construire sur ladite parcelle et qu'aucun écrit n'a formalisé la cession de l'usufruit par Mme d'Y...à sa tante.
Toutefois, il incombe à la cour de rechercher la commune intention des parties lors de la réalisation de la vente litigieuse et notamment si la cession s'inscrivait dans la réalisation d'une opération globale entre les deux parentes étant rappelé que Mme X...occupe les lieux depuis 2006 sans bail comme l'a décidé la cour d'appel dans son arrêt du 26 octobre 2011 en déboutant Mme d'Y...de son action en paiement de loyers.
Par application de l'article 579 du code civil, l'usufruit est établi par la loi ou par la volonté de l'homme.
Il s'en déduit que la loi n'exige pas un écrit signé pour la validité du droit d'user et de jouir de la propriété d'autrui mais que l'usufruit est un droit qui se transmet par le seul consentement des parties, consentement qui peut être prouvé par tous moyens.
En l'espèce, il ressort du courrier du 4 octobre 2007 de M. E..., dont il n'est ni démontré ni allégué qu'il soit faux, que les instructions données au notaire par Mme d'Y...et acceptées par Mme X..., lors de l'achat de la parcelle de terre suivant acte litigieux, ont été les suivantes :
a) achat de la pleine propriété de la parcelle de terre B 1600 pour une contenance de 6 ares 70 centiares moyennant le prix de 28 965, 00 euros, payés comptant,
b) construction par Mme d'Y...d'une maison d'habitation comprenant deux logements en rez de chaussée, destinés en ce qui concerne le logement de gauche à être occupé sa vie durant par le vendeur du terrain, Mme X..., dont une partie des travaux à hauteur de 28 965, 00 euros ont été réglés par Mme X...comme prévu,

c) vente par Mme d'Y...de l'usufruit du lot 2 (logement occupé par Mme X...) à cette dernière dès que la construction était achevée avec au préalable une mise en copropriété de cette maison d'habitation. Le prix de vente de l'usufruit s'élève à la somme de 28 965, 00 euros que Mme d'Y...a déjà perçu lors de la réalisation des travaux.
Les allégations de M. E...sont confirmées par les attestations des proches de Mme X...notamment celle de son frère, Jean-Paul qui fait part de l'intention de sa soeur de céder à moindre prix une partie de son terrain afin que sa nièce, Françoise, y construise un immeuble et lui réserve l'usufruit d'un des appartements.
Il résulte suffisamment de ces pièces que, nonobstant son refus de régulariser par sa signature l'acte authentique, Mme d'Y...avait manifesté son accord pour céder l'usufruit d'un des appartements à sa tante postérieurement à l'acte de vente du terrain en date du 13 octobre 2005. Faute par Mme d'Y...d'avoir rempli son obligation consistant à céder à sa tante l'usufruit de l'appartement en rez de chaussée, Mme Rose X...est en droit d'obtenir la résolution de la vente intervenue le 13 octobre 2005.

En conséquence, il convient de prononcer la résolution de la vente à compter du jour de l'acte introductif d'instance, le 6 août 2010, et d'ordonner à Mme Françoise d'Y...de restituer à Mme Rose X...la parcelle de terrain cadastrée section B no 1600 située dans le ...à L'Ile Rousse. Quant à Mme Rose X..., il lui est ordonné de restituer à Mme Françoise d'Y...la somme de 28 965, 00 euros correspondant au prix d'achat du terrain.

Un immeuble ayant été construit sur la parcelle, il convient de faire application de l'article 555 alinéa 3 du code civil et de dire que Madame X...réglera le coût des matériaux et de la main d'œ uvre réellement déboursés pour la construction de cet immeuble sous déduction de la somme de 28 965, 00 euros correspondant à la partie des travaux qu'elle a réglés entre le 5 janvier 2006 et le 22 mars 2006.
Il convient également d'ordonner la publication du présent arrêt en marge de l'acte publié au bureau des hypothèques de Bastia le 2 décembre 2005 volume 2005P no 9398.
Le jugement sera infirmé de ce chef.

2o) Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Succombant en ses prétentions, Mme Françoise d'Y...est déboutée de sa demande d'indemnisation fondée sur l'article 700 du code de procédure civile devant la cour et le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné Mme Rose X...à lui payer la somme de 2 000, 00 euros sur le même fondement. Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme Rose X...les frais exposés et non compris dans les dépens. Mme Françoise d'Y...sera dès lors condamnée à payer à Mme Rose X...la somme de 2 000, 00 euros tant au titre des frais irrépétibles de première instance que d'appel.

Le jugement déféré est également infirmé en ce qu'il a mis à la charge de Mme Rose X...les dépens de première instance. Mme Françoise d'Y..., partie succombante, supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

INFIRME le jugement rendu le 11 octobre 2011 par le tribunal de grande instance de Bastia en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,
PRONONCE la résolution, à compter du 6 août 2010, de la vente passée devant Me E..., notaire à Calenzana le 13 octobre 2005, de la parcelle de terrain cadastrée section B no 1600 située dans le ... à l'ILE ROUSSE au prix de vingt huit mille neuf cent soixante cinq euros (28 965, 00 euros) entre Mme Rose X...et Mme Françoise d'Y...;
ORDONNE à Mme Françoise d'Y...de restituer à Mme Rose X...la parcelle de terrain cadastrée section B no 1600 située dans le ...à L'Ile Rousse ;
ORDONNE à Mme Rose X...de restituer à Mme Françoise d'Y...la somme de vingt huit mille neuf cent soixante cinq euros (28. 965, 00 euros) correspondant au prix d'achat du terrain ;
DIT que Mme X...réglera le coût des matériaux et de la main d'œ uvre réellement déboursés pour la construction de l'immeuble sur la parcelle cadastrée section B no 1600 située dans le ...à L'Ile Rousse, sous déduction de la somme de vingt huit mille neuf cent soixante cinq euros (28 965, 00 euros) correspondant à la partie des travaux qu'elle a réglée entre le 5 janvier 2006 et le 22 mars 2006 ;
ORDONNE la publication du présent arrêt en marge de l'acte publié au Service de la Publicité Foncière de Bastia le 2 décembre 2005 volume 2005P no 9398 ;
CONDAMNE Mme Françoise d'Y...à payer à Mme Rose X...la somme de deux mille euros (2 000, 00 euros) tant au titre des frais irrépétibles de première instance que d'appel ;
DEBOUTE Mme Françoise d'Y...de sa demande d'indemnisation fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme Françoise d'Y...aux dépens d'instance et d'appel lesquels seront distraits au profit de Me Canarelli, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 11/00939
Date de la décision : 29/05/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2013-05-29;11.00939 ?
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