Ch. civile A
ARRET No
du 09 JANVIER 2013
R. G : 10/ 00683 C-RMS
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 12 Août 2010, enregistrée sous le no 10/ 255
X...
C/
S. A. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
NEUF JANVIER DEUX MILLE TREIZE
APPELANTE :
Madame Valérie X... épouse Y... née le 13 Janvier 1968 à PARIS
... 20224 ALBERTACCE
ayant pour avocat Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, Me Gilles SIMEONI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
S. A. CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE Prise en la personne de son représentant légal 1, Avenue Napoléon III-BP 308 20193 AJACCIO CEDEX
assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, la SCP RETALI GENISSIEUX, avocats au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 octobre 2012, devant la Cour composée de :
Madame Julie GAY, Président de chambre Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Monsieur Pierre Yves CUZIN, Vice-Président placé près Monsieur le Premier Président
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 09 janvier 2013.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* * Vu le jugement rendu le 12 août 2010 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BASTIA :
- se déclarant compétent pour connaître des demandes,
- déboutant Madame Valérie X... épouse Y... de ses demandes,
- déboutant la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE DE LA CORSE DE sa demande formée en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- condamnant Madame Valérie X... épouse Y... à payer à la CRCAMC la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamnant Madame Valérie X... épouse Y... aux dépens.
Vu la déclaration d'appel de Madame Valérie X... épouse Y... déposée au greffe le 3 septembre 2010.
Vu les dernières écritures de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE en date du 4 janvier 2012.
Vu les dernières conclusions de Madame Valérie X... épouse Y... déposées au greffe le 22 mai 2012.
Vu l'ordonnance de clôture du 27 juin 2012 et le renvoi à l'audience du 22 octobre 2012 pour plaidoiries.
SUR CE :
Selon actes notariés en date du 26 mars 1990 et 19 janvier 1993, la CRCAMC a consenti aux époux Salomon Y... et Valérie X... deux prêts d'un montant respectif de 205. 245, 14 francs (31. 289, 42 euros) et 144. 472, 25 francs (22. 024, 73 euros).
Le 24 septembre 1993, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de Monsieur Salomon Y... laquelle a été convertie le 11 mai 1999 en liquidation judiciaire.
Le 6 juillet 1999, la banque a déclaré sa créance pour la somme de 778. 888, 56 francs (117. 126, 10 euros) à titre privilégié et 305. 148, 02 francs (45. 886, 92 euros) à titre chirographaire.
Le 14 décembre 1999, la banque a fait délivrer à Madame Valérie X... épouse Y... un commandement de payer la somme de 186. 202, 96 euros en exécution des deux prêts consentis et d'un jugement rendu le 10 décembre 1996 par le tribunal de grande instance de BASTIA.
Suivant exploit du 25 janvier 2010, Madame Valérie X... épouse Y... a fait assigner la CRCAMC devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BASTIA en nullité dudit commandement.
Le 12 août 2010, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BASTIA a rendu le jugement visé.
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* *
MOTIFS :
- Sur la compétence du juge de l'exécution :
En application de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire, " le juge de l'exécution connaît de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.
Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en oeuvre.
Le juge de l'exécution connaît sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découlent.
Il connaît sous la même réserve, des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires. "
Si le commandement de payer ne constitue pas un acte d'exécution à proprement parler, il est constant toutefois que celui-ci constitue un préalable nécessaire à l'exécution et en tant que tel est indissociable de la mesure d'exécution.
C'est en conséquence à juste titre que le premier juge a retenu sa compétence.
- Sur la prescription :
La nature commerciale des engagements souscrits suivant actes authentiques du 26 mars 1990 et 19 janvier 1993 n'est pas contestée de sorte que l'action en paiement du créancier se prescrit par dix ans.
Il résulte des pièces produites et en particulier du décompte produit par la CRCAMC que les époux Y... ont cessé de régler les mensualités du prêt souscrit le 26 mars 1990, le 20 novembre 1993 et celles du prêt du 19 janvier 1993, à compter du 20 mai 1993.
La procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de Monsieur Y... le 24 septembre 1996 a été convertie en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce de BASTIA du 11 mai 1999.
Il est constant que si le délai de prescription n'est pas suspendu par la seule ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur, la déclaration de créance à la procédure collective a pour effet de suspendre la prescription tant à l'égard du débiteur que de la caution et ce, jusqu'au jour de la clôture.
La CRCAMC justifie en l'espèce avoir déclaré sa créance le 6 juillet 1999 de sorte que le délai de prescription dont le point de départ doit être fixé à la date de la mise en demeure du 6 mars 1996 a été suspendu à compter du 6 juillet 1999, cette suspension s'étant poursuivie jusqu'à la clôture de la procédure collective laquelle selon le CREDIT AGRICOLE n'est pas encore intervenue.
Madame Valérie X... épouse Y... qui invoque un défaut de publication de la liste des créances ne rapporte pas la preuve d'une irrégularité affectant la déclaration de créance susceptible de permettre d'en écarter les effets au regard du calcul du délai de prescription.
Outre le fait que le délai de dix ans n'était pas expiré au jour de la déclaration de créance du 6 juillet 1999, le premier juge a à bon droit observer que le juge commissaire a admis les créances selon ordonnance du 2 décembre 2002 et que cette admission qui équivaut à une décision judiciaire définitive a entraîné l'interversion des prescriptions. La prescription de droit commun qui s'est substituée à la prescription originelle étant ramenée à dix ans par la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile et la preuve de l'expiration au jour du commandement du 14 décembre 2009 du délai de prescription dans sa durée totale n'étant pas rapportée, le moyen tiré de la prescription de l'action de la CRCAMC doit être rejeté.
- Sur la nullité en la forme du commandement et de la déclaration de créance :
Les nullités en la forme invoquées par Madame Valérie X... épouse Y... du commandement de payer qui ne comporte pas la mention prévue par l'article 81 du décret du 31 juillet 1992 du délai de 8 jours offert au débiteur pour lui permettre de se libérer de la dette et celle de la déclaration de créance fondée sur le défaut de mention de la nature du privilège dont bénéficie le créancier, du capital dû au jour de l'ouverture de la liquidation, des modalités du calcul des intérêts et du montant des intérêts doivent être rejetées dès lors que l'appelante ne justifie d'aucun grief au sens de l'article 114 du code de procédure civile.
- Sur le manquement à l'obligation de conseil et l'existence de manoeuvres dolosives :
Madame Y... soutient que la banque a fait preuve d'une légèreté blâmable et a manqué à son obligation de conseil en octroyant deux prêts à Monsieur Y... alors qu'elle connaissait ses difficultés financières et qu'elle ne pouvait ignorer les répercussions sur sa situation.
Comme l'a fort justement observé le premier juge par un motif qu'il y a lieu d'adopter, outre le fait que la compétence du juge de l'exécution apparaît discutable au regard à tout le moins du caractère tardif de la contestation, ce que soutient l'appelante n'est étayé par aucune pièce et il ne peut être tiré de la carence du débiteur dans ses paiements à compter du mois de mai 1993 ni la preuve que sa situation financière se trouvait irrémédiablement compromise au jour de la signature des actes en cause, ni la démonstration nécessaire des manoeuvres dolosives du prêteur.
Madame Y... enfin qui ne justifie d'aucune démarche visant à apurer le passif dont elle est également tenue en sa qualité de co emprunteur alors qu'elle a de fait compte tenu de la procédure collective bénéficié de larges délais ne saurait reprocher à la banque de ne pas avoir agi plus tôt y compris à l'encontre de la caution SAGI, aucune carence fautive dans le recouvrement des sommes dues aboutissant à augmenter la dette à son préjudice n'étant ici démontrée.
L'abus de procédure n'étant toutefois pas établie, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande en dommages et intérêts de la CRCAMC.
L'équité cependant commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner Madame Y... au paiement de la somme de 1. 200 euros de ce chef.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y AJOUTANT,
Déboute la CRCAM de la CORSE de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,
Condamne Madame Valérie X... épouse Y... à payer à la CRCAM de la CORSE la somme de MILLE DEUX CENTS EUROS (1. 200 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame Valérie X... épouse Y... aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT