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12/12/2012 | FRANCE | N°11/00530

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 12 décembre 2012, 11/00530


Ch. civile A

ARRET No
du 12 DECEMBRE 2012
R. G : 11/ 00530 R-BN
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 07 Juin 2011, enregistrée sous le no 10/ 1708

X...
C/
Y...SA AXA FRANCE IARD

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DOUZE DECEMBRE DEUX MILLE DOUZE
APPELANT :
Monsieur Jean Baptiste X...né le 13 Septembre 1969 à BASTIA (20200) ...20270 ALERIA

assisté de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Ange-Laurent BIN

DI, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/ 2394 du 21/ 07/ 2011...

Ch. civile A

ARRET No
du 12 DECEMBRE 2012
R. G : 11/ 00530 R-BN
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 07 Juin 2011, enregistrée sous le no 10/ 1708

X...
C/
Y...SA AXA FRANCE IARD

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DOUZE DECEMBRE DEUX MILLE DOUZE
APPELANT :
Monsieur Jean Baptiste X...né le 13 Septembre 1969 à BASTIA (20200) ...20270 ALERIA

assisté de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Ange-Laurent BINDI, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/ 2394 du 21/ 07/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

INTIMES :

Monsieur Pierre Y......... 20240 GHISONACCIA

assisté de Me Pascale PERREIMOND, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Jean jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA

SA AXA FRANCE IARD Prise en la personne de son représentant légal en exercice 26 Rue Drouot 75009 PARIS

assistée de Me Pascale PERREIMOND, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Jean jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 octobre 2012, devant Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller, et Monsieur Pierre Yves CUZIN, Vice-Président placé près Monsieur le Premier Président, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Julie GAY, Président de chambre Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Monsieur Pierre Yves CUZIN, Vice-Président placé près Monsieur le Premier Président Monsieur Bruno NUT, candidat à l'intégration directe dans le corps judiciaire en stage probatoire, a siégé en surnombre et participé au délibéré avec voix consultative

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2012

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* * Le 16 août 2009, le troupeau de brebis de Monsieur Jean Baptiste X..., éleveur dans la région d'ALERIA, a été victime d'une attaque alors qu'il se trouvait dans un enclos, 79 brebis ayant été tuées.

Deux chiens de race « Jagd Terrier » appartenant à Monsieur Pierre Y...ont été retrouvés à proximité des lieux de l'agression des brebis.
Par acte d'huissier de justice en date du 16 septembre 2010, Monsieur Jean-Baptiste X...a fait assigner Monsieur Pierre Y...devant le tribunal de grande instance de Bastia qui, par jugement du 7 juin 2011 :
- dit que l'action engagée par Monsieur Jean Baptiste X...sur le fondement de l'article 1384 du Code civil doit être examinée sur le fondement de l'article 1385 du même code,
- déboute Monsieur Jean Baptiste X...de l'intégralité de ses demandes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamne Monsieur Jean Baptiste X...à payer la somme de 800 euros (huit cents euros) à Monsieur Pierre Y...au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile qui sera recouvrée conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.
- condamne Monsieur Jean Baptiste X...aux dépens,

Par déclaration déposée le 27 juin 2011, Jean Baptiste X...a fait appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 10 février 2012 et déposées le 13 février suivant auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus complet de ses prétentions et moyens, il demande à la Cour de :- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- et faisant droit à l'assignation,
- condamner les intimés à devoir conjointement et solidairement la somme de 63. 467 pour la perte du préjudice économique,
- sauf, à titre subsidiaire, les condamner de la même façon à devoir pour les causes sus-énoncées, la somme de 43. 111 euros avec intérêts de droit à compter du constat du vétérinaire et de Monsieur Y..., tous deux non discutables,
- dans tous les cas de figure,
- les condamner également à devoir la somme de 2. 500 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à la somme de 3. 000 euros, pour dommages intérêts, pour résistance manifestement abusive et injustifiée, outre les entiers dépens.

Monsieur Jean-Baptiste X...prétend que la responsabilité de Monsieur Y...n'est pas sérieusement contestable aux motifs que ses deux chiens, des « Jagd Terrier », race particulièrement offensive et dangereuse, étaient les seuls chiens sur le terrain où se trouvait le troupeau partiellement décimé, que ces chiens portaient un collier d'identification, que le propriétaire, Monsieur Y..., qui est venu récupérer son chien a reconnu les faits, faits corroborés par les attestations du vétérinaire. Il chiffre son préjudice à l'appui d'un rapport établi par la chambre de l'agriculture de la Haute-Corse à la somme principale de 63. 467 euros se décomposant à raison de 9. 720 euros pour la perte de cheptel, 35. 812 euros pour la perte de production laitière, 7. 299 euros pour la perte de production d'agneau de lait, 636 euros pour les frais

vétérinaire et 10. 000 euros pour le préjudice moral. Il s'oppose aux prétentions des intimés soutenant que Monsieur Y...a reconnu sa responsabilité, que les attestations du vétérinaire ne comportent aucune contradiction mais uniquement des précisions, qu'il offre de ramener à titre subsidiaire à la somme de 43. 111 euros l'indemnisation qu'il réclame qui comprendra la perte du cheptel à reconstituer, la perte de la production de lait et des agneaux de lait pendant quatre ans. Il précise avoir produit en cause d'appel les photographies des chiens remises à l'expert de la compagnie d'assurances lors de sa visite.

Dans leurs dernières conclusions signifiées et déposées le 16 avril 2012, la compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD et Monsieur Pierre Y...demandent à la cour de :

- débouter l'appelant des fins de son recours, en conséquence,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 juin 2011,
- condamner Monsieur X...à verser à la compagnie AXA la somme de 2. 500, 00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile correspondant à la procédure d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.

Ils font valoir que Monsieur X...produit une attestation du vétérinaire qui n'est pas sincère comme ayant été datée du 16 août 2009 relatant certains faits survenus le lendemain et qu'il existe une divergence dans les déclarations de ce vétérinaire. Ils soutiennent que Monsieur Y...n'a pas reconnu que ses chiens avaient attaqué des brebis mais uniquement qu'ils s'étaient enfuis et s'étonnent que le courrier de Monsieur Y...et les photographies des chiens n'aient été communiqués que pour la première fois en cause d'appel. Ils soutiennent aussi qu'aucun élément ne permet d'imputer le sinistre aux chiens de Monsieur Y...dont la race est affectueuse et destinée à la chasse et qu'il est possible qu'en raison de l'ouverture de la chasse la veille des faits, d'autres chiens de chasse soient à l'origine du sinistre. Ils contestent également les calculs d'indemnisation du préjudice présentés par Monsieur X...soutenant que le rapport de la chambre d'agriculture de la Haute-Corse propose plusieurs solutions d'indemnisation non cumulatives.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2012.

*

* *
MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que l'article 1385 du Code civil énonce que le propriétaire d'un animal, ou celui qui s'en sert, pendant qu'il est à son usage, est responsable du dommage que l'animal a causé, soit que l'animal fût sous sa garde, soit qu'il fût égaré ou échappé ;

Attendu que c'est par des motifs circonstanciés et appropriés que la cour adopte, que le premier juge, tranchant le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, a dit que l'action engagée par Monsieur X...sur le fondement de l'article 1384 du Code civil doit être examinée sur le fondement de l'article 1385 du même code ;

Attendu qu'il résulte des propres déclarations de Monsieur X...que lorsqu'il est arrivé sur son exploitation dans l'après-midi du 16 août 2009 située au lieu-dit Vadina à ALERIA, il a découvert des brebis tuées dans le parc réservé aux bêtes gestantes ainsi que la présence de deux chiens de race « Jagd Terrier » dont l'un d'eux portait des traces de sang sur le museau et le pelage ainsi qu'un collier sur lequel est inscrit le nom et le numéro de téléphone portable de Monsieur Y.... Que ces déclarations sont corroborées par des photographies de l'animal ensanglanté qu'il verse aux débats ;
Attendu que bien que le second chien également énervé, comme en atteste Madame G..., docteur vétérinaire, appelée sur les lieux, n'ait pas pu être attrapé, Monsieur Y...ne conteste pas les courriers qu'il a rédigés et qui sont versés aux débats par l'appelant selon lesquels il reconnaît que ses deux chiens s'étaient échappés la veille du chenil et qu'il était venu personnellement récupérer l'un des deux chiens capturé par Monsieur X...;
Qu'aucun autre chien n'a été découvert dans l'enclos de Monsieur X...ou aux alentours à l'exception du second chien de race « Jagd Terrier » appartenant également à Monsieur Y...;

Attendu qu'il ne peut être contesté que les deux chiens qui ont été vus ce jour là par Monsieur X...et Madame G..., et dont un des deux portant des traces de sang sur le museau et le pelage a été appréhendé par Monsieur X..., appartiennent à Monsieur Y...;

Attendu par ailleurs que Madame G..., Docteur vétérinaire, dans les certificats qu'elle a rédigés, datés du 16 août 2009, dont un comporte une erreur évidente de date ne venant en rien affecter sa portée, constate ce même jour les dégâts causés par une attaque de chiens dont les bêtes ont trouvé la mort soit par morsures soit par étouffement en se jetant contre les barrières de l'enclos ;

Attendu que ces éléments démontrent l'existence d'un lien de causalité entre la présence des chiens de Monsieur Y...et le préjudice dont fait état Monsieur X...; qu'en conséquence la responsabilité de Monsieur Y...sur le fondement de l'article 1385 du Code civil doit être retenue ; que le jugement critiqué doit donc être réformé ;

Attendu qu'il y a lieu de réparer le préjudice économique souffert par Monsieur X...né de la perte des brebis composant une partie de son cheptel dont la valeur a été fixée par la chambre d'agriculture de la Haute-Corse à la somme de 120 euros par bête ;

Attendu qu'il ressort des déclarations de Monsieur X..., des constats de Madame G..., vétérinaire, et du certificat la société d'équarrissage que 79 brebis sont mortes. Qu'il y a lieu d'indemniser l'appelant à hauteur de 9. 480 euros (120 euros x 79) en réparation de cette perte. Le vétérinaire a par ailleurs relevé que les brebis tuées étaient gestantes. Dans ces conditions, et puisqu'une brebis met bas en moyenne 1 à 2 agneaux, il y a lieu d'indemniser également Monsieur X...de la perte de ces futurs agneaux de lait tués avec les brebis porteuses dont la valeur a été évaluée selon le rapport de la chambre d'agriculture de la Haute-Corse à (11. 341 euros/ 349) 32, 50 euros l'unité, soit un préjudice pour 79 brebis tuées mettant bas en moyenne 1, 5 agneau de 3. 851, 25 euros. La cour réparera ainsi le préjudice économique souffert par l'appelant en lui allouant la somme de (9. 480 euros + 3851, 25 euros) 13. 331, 25 euros ;

Attendu que Monsieur X...a également souffert d'un préjudice moral d'une part en constatant la mort d'une partie importante de son cheptel et d'autre part en abrégeant lui-même la souffrance de certaines de ses bêtes, que la cour réparera en lui allouant une somme de 6. 000 euros ;

Attendu qu'il convient de condamner in solidum Monsieur Y...et sa compagnie d'assurances au paiement de ces sommes augmentées des intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance ;

Attendu que l'appelant doit être débouté du surplus de sa prétention relative à la perte de production, celui-ci ne rapportant pas la preuve par la production de pièces comptables d'une perte du chiffre d'affaires de son activité. Il ne produit pas plus la note d'honoraires du vétérinaire dont il sollicite remboursement et la cour ne pourra que rejeter cette demande ;

Attendu qu'il y a lieu de rejeter la demande de dommages et intérêts pour résistance manifestement abusive et injustifiée présentée par Monsieur X...qui n'a pas expressément formulé les moyens de

fait et de droit sur lesquels est fondée cette demande en ne respectant pas ainsi les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile ;

Attendu que la Cour estime qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Monsieur Jean-Baptiste X...qui bénéficie de l'aide juridictionnelle totale ;

Attendu que Monsieur Pierre Y...et la société AXA ASSURANCES doivent, en revanche, être condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel ;

*

* *

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Confirme le jugement rendu le 7 juin 2011 par le tribunal de grande instance de Bastia uniquement en ce qu'il a dit que l'action engagée par Monsieur X...sur le fondement de l'article 1384 du Code civil doit être examinée sur le fondement de l'article 1985 du même code,

infirme le jugement en toutes ses autres dispositions,
Statuant à nouveau,
condamne in solidum Monsieur Pierre Y...et la société AXA ASSURANCES, à payer à Monsieur Jean-Baptiste X...les sommes de TREIZE MILLE TROIS CENT TRENTE ET UN EUROS ET VINGT CINQ CENTIMES (13. 331, 25 euros) en réparation de son préjudice économique et de SIX MILLE EUROS (6. 000 euros) en réparation de son préjudice moral, augmentées des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,
Condamne in solidum Monsieur Pierre Y...et la société AXA ASSURANCES aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 11/00530
Date de la décision : 12/12/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2012-12-12;11.00530 ?
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