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04/04/2012 | FRANCE | N°03/01146

France | France, Cour d'appel de Bastia, Ch. civile a, 04 avril 2012, 03/01146


Ch. civile A

ARRET No
du 04 AVRIL 2012
R. G : 03/ 01146 C-RMS
Décision déférée à la Cour : jugement du 07 octobre 2003 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G : 03/ 209

S. A. R. L LA MEDITERRANEE S. A. SEDACO S. A. R. L SEDAFRAIS S. A. R. L SEDAGEL S. A SEDDA

C/
Cie d'assurances GENERALI ASSURANCES IARD
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
QUATRE AVRIL DEUX MILLE DOUZE
APPELANTES :
S. A. R. L LA MEDITERRANEE Prise en la personne de son représentant légal en exercice Lieudit Puretti Montesoro RN 193 20600 BASTIA



assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA et de Me Géraldine BRASIER PORTE...

Ch. civile A

ARRET No
du 04 AVRIL 2012
R. G : 03/ 01146 C-RMS
Décision déférée à la Cour : jugement du 07 octobre 2003 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G : 03/ 209

S. A. R. L LA MEDITERRANEE S. A. SEDACO S. A. R. L SEDAFRAIS S. A. R. L SEDAGEL S. A SEDDA

C/
Cie d'assurances GENERALI ASSURANCES IARD
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
QUATRE AVRIL DEUX MILLE DOUZE
APPELANTES :
S. A. R. L LA MEDITERRANEE Prise en la personne de son représentant légal en exercice Lieudit Puretti Montesoro RN 193 20600 BASTIA

assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA et de Me Géraldine BRASIER PORTERIE, avocat au barreau de PARIS

S. A. SEDACO Prise en la personne de son représentant légal en exercice R. N 193 20200 BASTIA

assistée de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA et de Me BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS

SARL SEDAFRAIS Prise en la personne de son représentant légal en exercice RN 193 20600 BASTIA

assistée de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA et de Me BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS

SARL SEDAGEL Prise en la personne de son représentant légal en exercice RN 193 20600 BASTIA

assistée de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA et de Me BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS

S. A SEDDA Prise en la personne de son représentant légal en exercice RN 193 20600 BASTIA

assistée de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA et de Me BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

Compagnie d'assurances GENERALI ASSURANCES IARD Prise en la personne de son représentant légal en exercice 7 Boulevard Haussman 75009 PARIS

assistée de Me Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA et de Me Michel BELLAICHE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 janvier 2012, devant Madame Julie GAY, Président de chambre, et Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Julie GAY, Président de chambre Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Madame Marie-Noëlle ABBA, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 28 mars 2012, prorogée par le magistrat par mention au plumitif au 04 avril 2012.

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*
* *Par acte du 29 janvier 2003, la SARL LA MEDITERRANEE a fait assigner à jour fixe devant le tribunal de grande instance de BASTIA les sociétés SA SEDACO, SA SEDDAFRAIS, SA SEDAGEL et SA SEDDA en responsabilité pour nuisances sonores subies dans le cadre de l'exploitation de son fonds de commerce d'hôtel restaurant sous l'appellation " Hôtel OSTELLA " situé à BASTIA, à proximité des locaux occupés par ces sociétés.

Selon jugement du 7 octobre 2003, le tribunal a fait droit à la demande de la SARL MEDITERRANEE, a déclaré ces sociétés responsables du trouble anormal de voisinage et les a condamnées à exécuter un écran acoustique et un toit métallique tels que préconisés par l'expert Monsieur D...désigné par le juge des référés et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification de la décision. La SARL MEDITERRANEE a par contre été déboutée de sa demande en dommages et intérêts tandis que les sociétés défenderesses ont été condamnées à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 6 novembre 2003, les sociétés SA SEDACO, SA SEDAFRAIS, SA SEDAGEL et SA SEDDA ont interjeté appel de cette décision.

Par acte du 10 novembre 2003, la SARL MEDITERRANEE a également relevé appel du jugement.

Les deux procédures ont été jointes pour être suivies sous le no 03/ 1146.

Suivant exploit en date du 11 janvier 2005, les sociétés SA SEDACO, SA SEDAFRAIS, SA SEDAGEL et SA SEDDA ont appelé en la cause leur assureur, la compagnie GENERALI ASSURANCES IARD.

Par arrêt mixte rendu le 21 mars 2007, la cour de ce siège a confirmé le jugement déféré sur la responsabilité résultant du trouble anormal de voisinage, l'a infirmé pour le surplus et avant dire droit sur les mesures à retenir pour faire cesser les nuisances, a ordonné un complément d'expertise confié au même expert.

Selon arrêt du 18 juin 2008, la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par les sociétés SA SEDACO, SA SADAFRAIS, SA SEDAGEL et SA SEDDA.

L'expert D...a déposé son rapport le 19 janvier 2008 dans lequel il écarte les autres solutions que celle initialement préconisée consistant à installer un mur acoustique et une couverture de la seule zone de chargement de l'entrepôt SEDAGEL, en précisant que cette méthode est la meilleure par rapport au coût et à l'efficacité.

Evoquant une quatrième solution proposée par un expert amiable, désigné par la SARL MEDITERRANEE, le cabinet QUALICONSULT et consistant en la pose d'une couverture métallique de 1500 m2 de grande portée sans pilier pour permettre la manoeuvre des camions, pour un coût de l'ordre de 200 000 euros contre 60 000 euros pour le système qu'il préconise, l'expert judiciaire estime que cette installation lui paraît financièrement disproportionnée par rapport au résultat souhaité concernant l'atténuation acoustique attendue.

La cour dans un arrêt avant dire droit rendu le 3 février 2010 a toutefois ordonné un complément d'expertise confié à Monsieur Charles F...avec mission de donner tous éléments de réponse quant à la faisabilité (administrative, technique et financière) de la solution préconisée par le cabinet QUALICONSULT et afin de donner tous les éléments comparatifs de réponse sur la pertinence de cette solution par rapport à celle proposée par Monsieur D...concernant l'installation d'un mur acoustique et d'une couverture de la seule zone de chargement de l'entrepôt SEDAGEL.

Selon ordonnance du 26 mars 2010, le conseiller chargé du contrôle des expertises a désigné Monsieur Pierre G...en remplacement de Monsieur Charles F...qui a refusé la mission.

Monsieur G...qui s'est adjoint un sapiteur, le cabinet APAVE a déposé son rapport le 1er décembre 2010.

Dans ses dernières conclusions déposées le 8 août 2011, la SARL MEDITERRANEE demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné une mesure de cessation des troubles reposant sur la solution n o 2 et en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnisation.

La SARL MEDITERRANEE demande à la cour statuant à nouveau de :

- donner acte aux établissements SEDDA de ce qu'ils acceptent le principe de la solution consistant à la couverture de leur site,

- donner acte aux établissements SEDDA de la garantie donnée par ceux-ci quant à l'aval donné par le propriétaire du site à la réalisation de tels travaux,

- ordonner en tout état de cause la création d'une couverture isophonique d'une surface d'environ 1200 m2 sur ossature charpente métallique de 27 m de portée sans poteau intermédiaire, la construction d'un bardage vertical double peau isophonique toute hauteur sur les façades ouest et sud, la construction d'un bardage vertical double peau isophonique en retombée de 2 m en rive de toiture sur façade nord et est, la mise en place de ventilations naturelles équipées de pièges à sons sur le versant est de la toiture, l'équipement des façades non fermées nord et est par porte souple PVC à lanière posée seulement sur la moitié de la hauteur de l'ouverture,
- dire que ces réalisations devront intervenir dans le délai de 5 mois à compter de l'arrêt et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,
- condamner in solidum les sociétés SEDDA, SEDAGEL, SEDACO et SEDAFRAIS et GENERALI au titre du préjudice subi jusqu'au 31 décembre 2010 au paiement des sommes de 666 320 euros au titre de la perte de marge, de 271 980 euros au titre du coût d'insonorisation, de 81 774 euros par année à compter de 2011 jusqu'à l'achèvement des travaux et 79 218 euros au titre de la perte de marge pendant la période de rémanence et dire que lesdites sociétés devront l'indemniser à hauteur des pertes de clientèle telles qu'évaluées ci dessus jusqu'à la disparition définitive des nuisances et en sus des astreintes sus visées,
- subsidiairement ordonner une expertise financière pour vérifier et confirmer les éléments du calcul du préjudice subi,
- en tout état de cause, condamner in solidum lesdites sociétés au paiement de la somme de 160 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens distraits au profit de Maître AP ALBERTINI.

Les sociétés SEDDA, SEDAFRAIS, SEDAGEL et SEDACO demandent quant à elles à la cour dans leurs dernières écritures déposées le 11 avril 2011 de leur donner acte de la mise en oeuvre de la solution technique préconisée par l'expert Monsieur G..., de débouter la SARL MEDITERRANEE de sa demande visant à voir ordonner au groupe SEDDA qu'il se renseigne sur la faisabilité administrative de la solution préconisée par l'expert QUALICONSULT, débouter celle-ci de sa demande tendant à voir ordonner au groupe SEDDA la construction d'une couverture totale de la zone de déchargement (zone A) telle que préconisée en hypothèse 6 du rapport QUALICONSULT, dire que les préjudices allégués ne sont pas constitués et débouter en conséquence la SARL MEDITERRANEE de ses demandes à ces titres, subsidiairement leur donner acte de ce qu'ils s'en rapportent à justice sur le principe d'une expertise financière, dire à supposer un préjudice établi que la SARL

MEDITERANEE a joué un rôle causal dans l'aggravation puis la prolongation du dommage et en chiffrer l'incidence à 20 % du préjudice global en raison de la surexposition volontaire de celle-ci à la source des nuisances et à hauteur de 80 % du solde, depuis le 7 octobre 2003, date du jugement dont elle a refusé l'exécution, dire qu'au delà du 9 août 2004, date à laquelle celle-ci a refusé la mise en oeuvre de la solution préconisée par Monsieur H..., la SARL MEDITERRANEE ne saurait être indemnisée d'aucun préjudice, condamner enfin la compagnie GENERALI à les relever et garantir en cas de condamnation.

Les sociétés SEDDA concluent en tout état de cause à la condamnation de la SARL MEDITERRANEE au paiement de la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens distraits au profit de la SCP JOBIN.

La compagnie GENERALI IARD demande quant à elle à la cour de constater que l'appel en cause des sociétés SEDDA qui n'est pas justifié par une évolution du litige est irrecevable, constater subsidiairement que l'action engagée en cause d'appel est prescrite en application de l'article L 114-1 du code des assurances, à titre infiniment subsidiaire constater que la garantie de la compagnie ne saurait être recherchée que si la responsabilité des sociétés SEDDA est établie, constater que celle-ci n'est pas établie, en toute hypothèse dire que la garantie n'est pas acquise et débouter les sociétés SEDDA de leur demande, en tout état de cause dire que les préjudices allégués ne sont pas établis et débouter la SARL MEDITERRANEE de ses demandes, condamner les sociétés SEDDA au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens distraits au profit de Maître CANARELLI.

La procédure a été clôturée selon ordonnance du 10 novembre 2011.

*
* *

MOTIFS :

- Sur les travaux à réaliser :

Monsieur Pierre G...expert commis par arrêt avant dire droit du 3 février 2010 a conclu le 10 décembre 2010 après s'être adjoint le concours d'un sapiteur le cabinet APAVE, expert en acoustique ainsi qu'il suit : " Nous avons indiqué qu'une couverture de la zone de chargement et de stationnement le long de la limite de la propriété pouvait permettre un abaissement du volume sonore significatif.

En ce qui concerne le volet administratif, nous avons pris bonne note du dire de Me BOURDAIS (conseil des établissements SEDDA) concernant l'absence d'obstacle administratif à la réalisation de structures antibruit dans la mesure où elle ne porte pas atteinte à la qualité du site et ne créeront pas de SHON du fait que les volumes resteront ouverts.
Nous confirmons la proposition de Monsieur D...dans son principe qui consiste à proposer la couverture de la zone de chargement mais en la réduisant de 1500 m2 à 700 m2, ce qui est suffisant pour les atténuations recherchées. Nous n'avons pas perdu de vue que les mesures diurnes sont proches de la norme surtout dans les parties les plus élevées de l'hôtel, celles qui sont les plus sensibles aux nuisances sonores.
En revanche, la réalisation d'un mur de clôture anti-bruit serait sans effet significatif.
Le rapport de l'APAVE apporte les renseignements utiles, les mesures ont été faites dans les conditions que nous avons considéré comme habituelles, étant entendu que les demandeurs les jugent insuffisantes et les défendeurs excessives ; mais à moins de procéder à des mesures tous les jours pendant une année, nous croyons avoir atteint les limites d'un examen impartial. "
Le sapiteur en acoustique APAVE a en effet à la demande de l'expert réalisé des mesures de niveaux sonores diurnes (7 heures à 22 heures) et nocturnes (22 heures à 7 heures) en limite de propriété et sur une terrasse de l'hôtel Ostella. Ainsi, celui-ci indique dans son rapport : " En période diurne, avec 6 groupes froid en fonctionnement, moteurs thermiques à l'arrêt, le bruit émergent est de 4, 1 dBa en limite de propriété et 0, 8 dBa au niveau du balcon du 5ième étage alors que la norme limite à 5 dBa l'émergence maximun. Dans ces conditions, la norme est respectée.
Avec 6 groupes froids en fonctionnement, moteurs thermiques en fonctionnement, les mêmes mesures donnent respectivement 9, 4 et 4, 5 dBA ;
En conclusion, en période diurne, seule la limite de propriété est concernée par un dépassement de la norme dans la configuration groupes électriques et moteurs thermiques en fonctionnement.
En période nocturne, avec 6 groupes froids en fonctionnement, moteurs thermiques à l'arrêt, le bruit émergent est 10, 9 dBA en limite de propriété et 5, 8 dBA au niveau du balcon du 5ième étage alors que la norme limite à 3dBa l'émergence maximum. Dans ces conditions, la norme est largement dépassée et nécessite des dispositions constructives.
Trois solutions ont été envisagées, l'une concernant un mur antibruit, l'autre une couverture du site sur 1500 m2 et enfin une troisième limitant la couverture à la zone de chargement soit 700 m2.
La solution consistant à réaliser un mur antibruit en limite de la propriété SEDDA ne peut être retenue pour un abaissement significatif du bruit émergeant nocturne.

En effet, la configuration des lieux avec des parois de bâtiment situées en face de ce mur avec un retour à angle droit, engendrerait des réverbérations qui amplifieraient l'intensité des sons.

D'autre part, ce mur, s'il pouvait protéger les parties basses de l'hôtel soit au niveau de clôture ne pourraient empêcher les sons d'être perçus aux niveaux supérieurs de l'hôtel.
La solution visant à couvrir tout le site sur 1500 m2 est excessive car les sources de nuisance sonores nocturnes permanentes se situent principalement dans l'aire de chargement.
En définitive, seul un vélum recouvert en sous face de matériaux absorbants pourrait permettre l'atténuation recherchée. Celui-ci aurait pour effet d'encapsuler les groupes sans pour autant empêcher l'évacuation de l'air éjecté par les groupes froid.
Il ne nous appartient pas d'en faire le projet mais nous pouvons en définir les principes à savoir : une structure métallique ou en bois lamellé collé par exemple peut être envisagée, celle-ci pouvant accepter des portées compatibles avec la circulation et les manoeuvres des véhicules. En fait, il suffirait de réaliser des auvents devant les quais de chargement et le long de la clôture côté hôtel de la longueur des camions augmentée de 2 mètres environ.
Les contraintes à respecter concernent particulièrement les inclinaisons des sous faces afin d'amortir les résonances. La maîtrise d'oeuvre du projet devra comprendre entre autres un acousticien qui devra déterminer l'affaiblissement acoustique nécessaire au projet pour entrer dans les normes.
Le projet comprendrait :
- des poteaux de 4, 50 m de hauteur supportant des portiques de 10 à 12 m de portée,
- des bacs autoportant métalliques recouvert en sous face de flocage isolant,
- les dispositifs d'évacuation des eaux pluviales, gouttières, descentes, raccordements aux réseaux.
Le coût de cette opération qui concerne 700 m2 est évalué à 180 000 euros environ, maîtrise d'oeuvre comprise. "
Ces conclusions qui sont claires et précises et qui sont le fruit d'un travail sérieux et approfondi, effectué après visite des lieux et mesurage des niveaux sonores en période diurne et nocturne et qui répondent parfaitement à la mission donnée par la cour quant à la pertinence de la solution du cabinet QUALICONSULT méritent pour ces raisons d'être retenues d'autant qu'elles recueillent l'adhésion des sociétés SEDDA et celle de principe de la SARL MEDITERRANEE.

En effet, les établissements SEDDA acceptent la solution proposée par l'expert et justifient avoir déposé le 21 février 2011 une demande de permis de construire tendant à créer une couverture acoustique sur la zone de chargement des quais en continuation des toitures existantes sur une surface de 980 m2 et avoir obtenu celui ci le 7 mars 2011, lequel a été modifié le 5 avril 2011.

La SARL MEDITERRANEE quant à elle accepte le principe de la solution proposée par l'expert consistant à réaliser la couverture du site mais entend que celle-ci s'étende sur 1200 m2 et soit effectuée selon les observations de son expert, Monsieur I...alors que l'expert judiciaire propose de limiter la couverture à la zone de chargement soit une surface de 700 m2 environ.
Les observations formulées par Monsieur I...qui ne revêtent pas un caractère contradictoire ne sauraient être retenues par la cour.
L'expert par ailleurs a répondu expressément à la demande formulée par la SARL MEDITERRANEE en précisant que la solution visant à couvrir tout le site sur 1500 m2 est excessive car les sources de nuisance sonores nocturnes permanentes se situent principalement sur la zone de chargement.
Force est ainsi d'observer qu'en cela, Monsieur G...rejoint les conclusions de l'expert D...qui lui aussi avait proposé de limiter la couverture du site à la seule zone de chargement.
Enfin, contrairement à ce que soutient la SARL MEDITERRANEE, l'expert et le sapiteur ont posé les principes qui doivent guider la réalisation de la solution qu'ils préconisent à savoir la réalisation d'auvents devant les quais de chargement et le long de la clôture de l'hôtel Ostella de la longueur des camions augmentée de 2 mètres lesquels pourraient être de structure métallique ou en bois lamellé collé, le projet devant en outre comprendre des poteaux de 4, 50 m de hauteur supportant des portiques de 10 à 12 m de portée, des bacs autoportant métalliques recouverts en sous face de flocage isolant et les dispositifs d'évacuation des eaux pluviales, gouttières, descentes et raccordements aux réseaux ainsi qu'une maîtrise d'oeuvre incluant un acousticien qui devra déterminer l'affaiblissement acoustique nécessaire au projet pour entrer dans les normes.
Ainsi, retenant les conclusions de l'expert G..., il convient de condamner les sociétés SEDDA, SEDAFRAIS, SEDAGEL, SEDACO à effectuer la couverture de la zone de chargement d'une surface de 700 m2 selon les prescriptions du rapport d'expertise et ce, dans un délai de 5 mois à compter de la signification du présent arrêt et passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

- Sur le préjudice :

Au titre de la réparation de son préjudice, la SARL MEDITERRANEE réclame diverses sommes et plus précisément la somme de 271 980 euros représentant le coût des travaux d'insonorisation

et de climatisation effectués (double vitrage dans la plupart des chambres, dans la salle de restaurant et dans la réception, climatisation dans ces pièces, couverture et double vitrage de la piscine et couverture de la terrasse) et celle de 666 320 euros au titre de la perte de marge subie jusqu'au 31 décembre 2010 outre celle de 81 774 euros par année à compter de 2011 jusqu'à l'achèvement des travaux.

Au soutien de ses demandes, la SARL MEDITERRANEE verse aux débats le rapport d'expertise établi par Monsieur Jean Michel J....

- Sur les travaux réalisés :

L'expert J... considère dans son rapport que la SARL MEDITERRANEE a dû engager des travaux exceptionnels afin de limiter la gêne occasionnée à ses clients lesquels auraient été inutiles dans des conditions normales d'exploitation.

L'expert chiffre le montant des travaux réalisés à la somme de 271 980 euros réclamée par la SARL MEDITERRANEE.
Force est cependant de constater d'une part la très grande imprécision de certains des postes retenus qui ne permet pas une véritable vérification (couverture dalle béton, rehaussement du mur EDF) et qui pour cette raison doivent être rejetés.
D'autre part et surtout, ni la SARL MEDITERRANEE ni l'expert par elle missionné ne démontrent en quoi les travaux relatifs à la pose d'un double vitrage et à la climatisation de l'hôtel dont celle-ci demande le remboursement à titre de dommages et intérêts ont été rendus indispensables par les nuisances sonores.
Il appartient en effet à cette dernière d'établir l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre les nuisances sonores et la réalisation des travaux qu'elle a effectués.
Or, ceux-ci n'apparaissent pas en lien direct avec le trouble anormal de voisinage subi par la SARL MEDITERRANEE.
En effet, compte tenu de la situation de l'hôtel OSTELLA lequel est implanté à proximité immédiate de la route nationale à quatre voies, d'une ZAC (zone d'activités économiques) et de parcelles de terre réservées aux activités industrielles tels que cela ressort des plans versés à la procédure et du rapport d'enquête publique relatif à la modification de la ZAC d'ERBAJOLO, la SARL MEDITERRANEE ne peut pas valablement soutenir que les aménagements qu'elle a effectués, au demeurant classiques et de surcroît imposés par le standing de son établissement ont été rendus nécessaires par les seuls nuisances phoniques causées par les camions frigorifiques du groupe SEDDA.
Il en est de même des travaux de climatisation s'agissant d'un hôtel classé trois étoiles et situé dans une région où les températures sont élevées notamment durant la saison estivale.

La SARL MEDITERRANEE doit en conséquence être déboutée de ses demandes tendant à obtenir le remboursement des travaux de double vitrage et d'insonorisation.

En revanche, la demande relative aux travaux de couverture de la piscine et de la terrasse doivent être admis eu égard au principe de responsabilité retenu par la cour de cassation dans son arrêt rendu le 18 juin 2008 qui a confirmé l'arrêt de la cour de céans en date du 21 mars 2007. Ainsi, la somme de 11 117, 68 euros doit être allouée à ce titre à la SARL MEDITERRANEE sans qu ‘ il y ait lieu de considérer comme le demandent les sociétés SEDDA que la SARL MEDITERRANEE a joué un rôle causal dans l'aggravation et la prolongation du dommage qu'elle subit. L'extension de l'hôtel en effet ne saurait être assimilée à une faute dont cette dernière devrait répondre.

- Sur le préjudice commercial :

LA SARL MEDITERRANEE allègue un préjudice commercial qu'elle chiffre à la somme actualisée au 31 décembre 2010 de 666 320 euros et soutient que celui-ci consiste en une perte d'activités durant la moyenne et la haute saison.

Pour ce faire, la SARL MEDITERRANEE s'appuie sur le rapport établi par Monsieur J... lequel souligne : " Nous avons procédé à une étude comparative du taux de remplissage de l'hôtel OSTELLA avec ceux collationnés par l'INSEE qui portent sur la CORSE entière. Le graphique met en évidence le constat, année après année, d'un taux d'occupation de l'hôtel OSTELLA supérieur d'environ 20 points au taux moyen de la CORSE en basse saison. Par contre, cet écart positif entre OSTELLA et la CORSE entière tend à s'estomper voire à s'inverser pendant la haute saison. En effet, OSTELLA réalise à cette époque des performances souvent moins bonnes que celles de l'intersaison.
Il est impossible de ne pas faire un parallèle entre cette situation et l'existence d'un bruit qui, ainsi que cela a été décrit plus haut, présente une certaine proportionnalité avec l'activité globale de l'île. Il est d'ailleurs intéressant de relever que l'écart entre les taux d'occupation de l'hôtel OSTELLA et le reste de la CORSE présente une corrélation de-0, 70, tout à fait significative au plan statistique, avec le taux d'occupation des hôtels CORSE entière : plus l'activité touristique de la CORSE est élevée, moins bonnes sont les performances de remplissage d'OSTELLA. Ce constat conduit à conclure à l'existence d'un lien de causalité entre les nuisances sonores émises par les sociétés SEDDA et le remplissage relatif de l'hôtel OSTELLA. "

Cependant comme le font observer justement les sociétés du groupe SEDDA, le raisonnement de l'expert J... repose sur un postulat inexact qui consiste à tenir pour acquis que tous les hôtels de CORSE connaissent un cycle d'activité identiques et que l'hôtel OSTELLA pour pouvoir avoir un taux d'occupation maximum en haute et moyenne saison se situe dans une région touristique, ce qui n'est pas le cas.

L'hôtel OSTELLA est en effet implanté à proximité de la route nationale à quatre voies et de la zone industrielle sud de BASTIA comme il a été dit plus haut et séparé de la mer par ces dernières. Force est de constater que l'hôtel OSTELLA de par cette situation doit être considéré comme un hôtel de ville et non de villégiature dont la clientèle est plus composée de VRP que de vacanciers, ce qui explique les conclusions de Monsieur J... à savoir un taux moyen d'occupation supérieur de 20 points en basse saison et qui s'estompe voire s'inverse en haute saison.

Ainsi, si l'écart du taux d'occupation tend à se réduire en haute saison, ceci ne signifie pas comme Monsieur J... le soutient que les sociétés du groupe SEDDA font plus de bruit, ce qui d'ailleurs ne ressort nullement de l'expertise judiciaire de Monsieur G...mais que la majorité des hôtels situés en CORSE a une vocation plus balnéaire et touristique que l'hôtel OSTELLA.
En conséquence, la SARL MEDITERRANEE doit être déboutée de sa demande au titre du préjudice commercial lequel n'est pas établi, la cour n'ayant pas en application de l'article 146 du code de procédure civile par ailleurs à pallier à la carence de celle-ci en faisant droit à sa demande subsidiaire d'organisation d'une expertise financière.

- Sur l'appel en cause de la compagnie GENERALI IARD :

La compagnie GENERALI IARD conclut à l'irrecevabilité de son appel en cause en application des articles 554 et 555 du code de procédure civile, à titre subsidiaire à la prescription sur le fondement de l'article L 114-1 du code des assurances de l'action engagée, à titre infiniment subsidiaire à l'absence de garantie.

L'article 554 du code de procédure civile dispose que " Peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité ".
L'article 555 du même code ajoute que " Ces mêmes personnes peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause ".
Il résulte de ces textes que seule l'évolution du litige permet d'appeler en garantie devant la cour une personne qui n'était pas partie en première instance.
En l'espèce, par acte du 11 janvier 2005, les sociétés SEDDA ont appelé en intervention forcée pour la première fois en cause d'appel leur assureur afin de le voir condamner à les relever et garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre.
Il ressort de la procédure que suivant exploit du 25 avril 2000, la SARL MEDITERRANEE a assigné devant le juge des référés du tribunal de grande instance de BASTIA les sociétés SEDDA afin de voir constater
les nuisances sonores, que selon ordonnance de référé du 12 décembre 2000, Monsieur D...a été désigné en qualité d'expert, que suivant exploit du 29 janvier 2003, la SARL MEDITERRANEE a assigné à jour fixe les sociétés SEDDA pour voir déclarer celles-ci responsables d'un trouble anormal du voisinage, ordonner les travaux pour remédier à celui-ci, et l'indemniser de son préjudice et que selon jugement rendu le 7 octobre 2003, le tribunal de grande instance de BASTIA a déclaré les sociétés SEDDA responsables in solidum du trouble anormal de voisinage, a condamné in solidum celles-ci à exécuter l'écran acoustique et le toit métallique préconisés par l'expert judiciaire et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et a débouté la SARL MEDITERRANEE de ses demandes en dommages et intérêts.
Il est constant que la notion d'évolution du litige qui est d'interprétation stricte suppose l'existence d'un élément nouveau, révélé par le jugement ou survenu postérieurement à celui-ci et impliquant la mise en cause, tel un changement de situation des parties, une transformation des données du procès résultant d'un fait ancien ou de l'apparition d'un fait nouveau, susceptible de donner du litige une vision différente et déterminante pour la solution du procès.
Les sociétés SEDDA soutiennent que la communication aux débats, le 21 septembre 2004 en cause d'appel d'un rapport comptable évaluant le préjudice subi par la SARL MEDITERRANEE et chiffrant celui-ci à la somme de 486 980 euros justifie l'appel en garantie de la compagnie GENERALI.
La production aux débats de cette expertise n'implique pas cependant une évolution du litige dés lors que dés l'assignation des sociétés SEDDA devant le premier juge, des demandes en dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ont été formées par la SARL MEDITERRANEE.
L'appel en garantie de la compagnie GENERALI IARD doit en conséquence être déclarée irrecevable.
En tout état de cause, il y a lieu d'observer que l'action engagée contre l'assureur est sur le fondement de l'article L 114-1 du code des assurances prescrite.
En effet, selon ce texte, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurances sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.
Il est par ailleurs constant qu'en cas de demande de désignation d'expert, le point de départ du délai biennal court à compter du jour de l'action en référé.
Or, en l'espèce celle-ci remonte au 20 septembre 2000 de sorte que l'action des sociétés SEDDA diligentée à l'encontre de leur assureur suivant acte du 11 janvier 2005 est prescrite.

L'équité enfin commande de condamner les SA SEDDA, SEDAFRAIS, SEDAGEL, SEDACO à payer à la SARL MEDITERRANEE la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et celle de 1 500 euros du même chef à la compagnie GENERALI IARD.

*

* *

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Vu l'arrêt mixte rendu le 21 mars 2007 par la cour de ce siège,

Condamne les sociétés SEDDA, SEDAFRAIS, SEDAGEL et SEDACO à effectuer la couverture de la zone de chargement d'une surface de 700 m2 selon les prescriptions de l'expert G...c'est à dire par la réalisation d'auvents devant les quais de chargement et le long de la clôture de l'hôtel OSTELLA de la longueur des camions augmentée de 2 mètres lesquels pourraient être de structure métallique ou en bois lamellé collé, le projet devant en outre comprendre des poteaux de 4, 50 m de hauteur supportant des portiques de 10 à 12 m de portée, des bacs autoportant métalliques recouverts en sous face de flocage isolant et les dispositifs d'évacuation des eaux fluviales, gouttières, descentes et raccordements aux réseaux ainsi qu'une maîtrise d'oeuvre incluant un acousticien qui devra déterminer l'affaiblissement acoustique nécessaire au projet pour entrer dans les normes,
Dit que ces travaux devront être exécutés dans un délai de 5 mois à compter de la signification du présent arrêt et passé ce délai sous astreinte de CENT EUROS (100 euros) par jour de retard,
Condamne les sociétés in solidum SEDDA, SEDDAFRAIS, SEDAGEL et SEDACO à payer à la SARL MEDITERRANEE la somme de ONZE MILLE CENT DIX SEPT EUROS et SOIXANTE HUIT CENTIMES (11 117, 68 euros) représentant le montant des travaux de couverture réalisés,
Déboute les Sociétés SEDACO, SEDDAFRAIS, SEDAGEL et SEDDA de leur demande tendant à considérer que la SARL MEDITERRANEE a contribué à l'aggravation et à la prolongation du dommage,
Déboute la SARL MEDITERRANEE du surplus de ses demandes,
Rejette toutes autres demandes contraires,
Déclare irrecevable l'appel en garantie de la compagnie GENERALI IARD,

Dit en tout état de cause que l'action engagée contre celle-ci est prescrite,

Condamne in solidum les SA SEDDA, SEDDAFRAIS, SEDAGEL et SEDACO à payer à la SARL MEDITERRANEE la somme de DEUX MILLE CINQ CENTS EUROS (2 500 euros) au titre des frais irrépétibles de procédure non compris dans les dépens et celle de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 500 euros) du même chef à la compagnie GENERALI IARD,
Condamne les SA SEDDA, SEDAFRAIS, SEDAGEL et SEDACO aux dépens distraits au profit de Maître AP ALBERTINI, avocat à la cour et Me JJ CANARELLI, avocat à la cour qui en ont fait la demande.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Ch. civile a
Numéro d'arrêt : 03/01146
Date de la décision : 04/04/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2012-04-04;03.01146 ?
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