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21/03/2012 | FRANCE | N°09/00817

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 21 mars 2012, 09/00817


Ch. civile B

ARRET No
du 21 MARS 2012
R. G : 09/ 00817 C-PL
Décision déférée à la Cour : jugement du 28 juillet 2009 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G : 08/ 303

X...
C/
POLYCLINIQUE MAYMARD Y...Compagnie d'assuranc MUTUELLES DU MANS ASSURANCES Z...CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY EN VELAY A...CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE-CORSE A...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT ET UN MARS DEUX MILLE DOUZE

APPELANT :

Monsieur Gilles X...Pris en sa qualité de commissaire à l'exé

cution du plan de cession des sociétés SARL CLINIQUE COMITI et SCS POLYCLINIQUE COMITI ... 94130 NOGENT SUR M...

Ch. civile B

ARRET No
du 21 MARS 2012
R. G : 09/ 00817 C-PL
Décision déférée à la Cour : jugement du 28 juillet 2009 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G : 08/ 303

X...
C/
POLYCLINIQUE MAYMARD Y...Compagnie d'assuranc MUTUELLES DU MANS ASSURANCES Z...CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY EN VELAY A...CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE-CORSE A...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT ET UN MARS DEUX MILLE DOUZE

APPELANT :

Monsieur Gilles X...Pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession des sociétés SARL CLINIQUE COMITI et SCS POLYCLINIQUE COMITI ... 94130 NOGENT SUR MARNE

ayant pour avocat la SCP RIBAUT BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA et la SCP LEANDRI LEANDRI, avocats au barreau d'AJACCIO

INTIMES :

POLYCLINIQUE MAYMARD Prise en la personne de son représentant légal en exercice La Résidence-Chemin de l'usine à gaz 20200 BASTIA

ayant pour avocat Me Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA et Me Albert PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA

Compagnie d'assurances MUTUELLES DU MANS ASSURANCES Prise en la personne de son représentant légal en exercice 14 Boulevard Alexandre Oyon 72030 LE MANS CEDEX 09

ayant pour avocat Me Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA et Me Albert PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA

Monsieur Franck Y......20219 VIVARIO

assisté de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, Me Sophie PERREIMOND, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2009/ 2921 du 05 novembre 2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
Monsieur Georges Z......20000 AJACCIO

assisté de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA et de Me Véronique ESTEVE, avocat au barreau de NICE

Monsieur Clément A...POLYCLINIQUE MAYMARD ...20200 BASTIA

assisté de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA et de Me Véronique ESTEVE, avocat au barreau de NICE

Maître José A...Pris en sa qualité de représentant des créanciers ...20000 AJACCIO

ayant pour avocat la SCP RIBAUT BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA et la SCP LEANDRI LEANDRI, avocats au barreau d'AJACCIO

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY EN VELAY Prise en la personne de son représentant légal en exercice Avenue André Soulliers 43011 PUY EN VELAY

Défaillante

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE-CORSE Prise en la personne de son représentant légal en exercice 5, Avenue Jean Zuccarelli BP 501 20406 BASTIA CEDEX

Défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 02 février 2012, devant Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 21 mars 2012.

ARRET :

Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *ORIGINE DU LITIGE :

Monsieur Franck Y..., victime d'un accident de scooter le 20 juillet 1994 à l'âge de 17 ans, a été opéré d'une fracture du fémur le même jour à la clinique MAYMARD par le docteur A...qui a pratiqué une ostéosynthèse par plusieurs vis corticales.

Les suites opératoires ont révélé une infection provoquant le transfert du patient à la clinique COMITI où il a été pris en charge par le docteur Z...qui l'a opéré le 31 août 1994 pour réaliser un drainage avec irrigation et à nouveau le 2 septembre 1994 pour placer un pansement et immobiliser le genou.

Le docteur Z...a ensuite adressé Monsieur Y...au centre MOLINI à PORTICCIO pour la mise en place d'une rééducation du genou.

Devant la faiblesse des progrès accomplis, Monsieur Y...a de nouveau été opéré le 6 janvier 1995 à la clinique COMITI toujours par le docteur Z...qui a procédé à une arthrolyse du genou et une ablation des 4 vis avant d'adresser le patient au centre de rééducation précité où un écoulement purulent de la cicatrice a alors été constaté.

Une nouvelle intervention du docteur Z...a eu lieu le 31 janvier 1995. Mais l'état du patient s'étant aggravé, celui-ci a été transféré à la polyclinique de BAR LE DUC où il a été opéré le 14 avril 1995 par le docteur H...qui, en procédant à l'ablation de tout le matériel, a pu constater que les vis flottaient dans le pus, qu'il existait une pseudo-arthrose au niveau de la fracture non consolidée et enfin que le prélèvement montrait l'existence d'un staphylocoque doré.

Monsieur Y...a obtenu, par voie de référé, la désignation d'un expert et l'allocation d'une provision de 5 000 euros.

Sur le fondement du rapport d'expertise déposé par le professeur I..., il a entrepris devant le tribunal de grande instance de BASTIA, saisi par assignations délivrées les 24, 25 et 29 janvier 2008, une action en déclaration de responsabilité et réparation de son préjudice à l'encontre de la Polyclinique MAYMARD, la compagnie d'assurances Mutuelles du Mans (ci-après MMA), le docteur Clément A..., le docteur Georges Z..., Maître Gilles X...es qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession des sociétés SARL Clinique COMITI et SCS Polycliniqe COMITI, Maître Joseph A...es qualité de représentant des créanciers des mêmes sociétés.

Les organismes sociaux, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du PUY EN VELAY puis celle de HAUTE-CORSE, ont été appelées en déclaration de jugement commun.

Par jugement réputé contradictoire du 28 juillet 2009 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de BASTIA a :

- déclaré le docteur Clément A..., la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA solidairement responsables de l'infection nosocomiale contractée par Monsieur Y...,
- déclaré le docteur Georges Z..., Maître Gilles X...es qualité et Me Joseph A...es qualité solidairement responsable du retard thérapeutique,
- condamné le docteur Clément A...à payer à Monsieur Y...la somme de 17 225 euros représentant sa part de responsabilité dans la réparation du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent, du préjudice d'agrément et du préjudice esthétique,

- condamné solidairement la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA à payer à Monsieur Y...la somme de 17 225 euros représentant leur part de responsabilité dans la réparation du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent, du préjudice d'agrément et du préjudice esthétique,

- dit qu'il convient de déduire des condamnations mises à la charge de la Polyclinique MAYMARD et de son assureur la MMA la somme de 5 000 euros versée à titre de provision,
- condamné solidairement le docteur Georges Z..., Maître Gilles X...es qualité et Maître Joseph A...es qualité à payer à Monsieur Y...la somme de 26 500 euros représentant leur part de responsabilité dans la réparation du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent et du préjudice d'agrément,
- condamné solidairement le docteur Clément A..., la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA, le docteur Georges Z..., Maître Gilles X...es qualité et Maître Joseph A...es qualité à payer à Monsieur Y...la somme de 23 676, 20 euros au titre des frais divers, frais de véhicule adapté, réparation de l'incidence professionnelle et du préjudice psychologique,
- débouté Monsieur Y...de ses demandes tendant à l'indemnisation du préjudice de formation, du préjudice esthétique temporaire et du préjudice sexuel,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné solidairement le docteur Clément A..., la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA, le docteur Georges Z..., Maître Gilles X...es qualité et Me Joseph A...es qualité à payer à Monsieur Y...la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, étant précisé que cette somme comprend celle de 717, 02 euros réclamée au titre des frais exposés pour se rendre à l'expertise.

*

* *
ETAT DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR :

Par déclarations remises au greffe le 15 septembre 2009 et le 5 octobre 2009 respectivement, Maître Gilles X..., es qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession des sociétés SARL Clinique COMITI et SCS Polyclinique COMITI et Maître Joseph A..., agissant es qualité de représentant des créanciers des mêmes sociétés, ont relevé

appel de cette décision, avant même sa signification, en intimant Monsieur Franck Y..., le docteur Georges Z..., la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du PUY EN VELAY et celle de HAUTE-CORSE.

Monsieur Franck Y...a relevé appel incident. Par actes d'huissier des 3 et 4 mars 2010, il a fait assigner devant la cour le docteur Clément FILIPPI, la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA.

Par conclusions récapitulatives du 19 janvier 2011 régulièrement notifiées, Maître Gilles X...et Maître Joseph A...demandent à la cour de :

- infirmer la décision appelée,
- débouter Monsieur Franck Y...de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre des appelants,
- le condamner au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 1er février 2011, régulièrement notifiées, Monsieur Franck Y...demande à la cour de :

- homologuer le rapport d'expertise du professeur I...,
- constater que le docteur Clément A..., la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA sont solidairement et conjointement responsables de l'infection nosocomiale contractée par Monsieur Franck Y...sur le fondement de l'obligation de sécurité-résultat,
- constater que le docteur Georges Z...est responsable du retard thérapeutique sur le fondement de la faute,
- condamner le docteur Clément A..., la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA conjointement et solidairement à verser à Monsieur Y...la somme globale de 66 627, 19 euros représentant la part qui leur est imputable dans la réparation du déficit fonctionnel temporaire, la souffrance endurée, le préjudice esthétique temporaire, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice d'agrément, le préjudice esthétique permanent et le préjudice sexuel,
- condamner le docteur Georges Z...à verser à Monsieur Y...la somme globale de 38 336, 13 euros représentant la part qui lui est imputable dans la réparation du déficit fonctionnel temporaire, la souffrance endurée, le préjudice esthétique temporaire, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice d'agrément, le préjudice esthétique permanent et le préjudice sexuel ;

- condamner le docteur Clément A..., la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA, le docteur Georges Z...à verser à M. Y...la somme globale de 152 243, 22 euros représentant les frais divers, l'assistance à tierce personne temporaire, les frais de véhicule adapté, le préjudice de formation, l'incidence professionnelle et le préjudice psychologique,

- déduire des sommes mises à la charge de la la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA, celle de 5 000 euros versée à titre de provision,
- condamner le docteur Clément A..., la Polyclinique MAYMARD et son assureur la MMA, le docteur Georges Z..., Maître Gilles X...et Maître Joseph A...es qualité à verser à Monsieur Y...la somme de 3 000 euros correspondant à la procédure devant le tribunal de grande instance et la même somme correspondant à la procédure devant la cour d'appel, le tout en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- infirmer le jugement du 28 juillet 2009 dans toutes les dispositions contraires aux présentes demandes.

Par conclusions récapitulatives du 17 janvier 2011, régulièrement notifiées, le docteur Clément A...et le docteur Georges Z...demandent à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité du docteur Georges Z...,
- constater qu'il n'existe pas de lien de causalité direct et certain entre le prétendu retard dans la prise en charge par le docteur Georges Z...et la survenue de l'infection,
- constater que la perte d'une chance réelle et sérieuse n'est pas rapportée,
- mettre hors de cause le docteur Georges Z...,
- dire et juger que l'imputabilité des préjudices liées à l'infection sera partagée par moitié par le docteur Clément A...et la Polyclinique MAYMARD soit pour chaque partie les sommes suivantes : 1 750 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, 3 000 euros pour les souffrances endurées, 11 250 euros du chef du déficit fonctionnel permanent, 2 225 euros au titre du préjudice d'agrément, 1 000 euros pour le préjudice esthétique permanent,
- ramener à de plus justes proportions les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
A titre subsidiaire, les mêmes parties demandent à la cour de :

- dire et juger que la responsabilité du docteur Georges Z...ne saurait être engagée à plus de 25 % au titre de la perte de chance,

- dire et juger que l'imputabilité des préjudices liées à l'infection sera partagée par moitié par le docteur Clément A...et la Polyclinique MAYMARD après soustraction de la perte de chance de 25 % imputable au docteur Georges Z...,
- ramener l'indemnisation sollicitée à de plus justes proportions,
- débouter Monsieur Y...de ses demandes au titre du préjudice esthétique temporaire, du préjudice d'agrément, du préjudice sexuel et réformer le jugement rendu en première instance en ce sens,
- débouter Monsieur Y...de sa demande au titre du préjudice de formation celle-ci n'étant étayée par aucune pièce probante et confirmer le jugement rendu en première instance en ce sens,
- débouter Monsieur Y...de sa demande au titre de l'assistance tierce personne temporaire,
- dire et juger que le docteur Georges Z...est tenu à l'indemnisation des sommes suivantes : 825 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, 750 euros pour les souffrances endurées, 5 625 euros du chef du déficit fonctionnel permanent, 1 125 euros au titre du préjudice d'agrément, à l'exception de tout autre poste de préjudice,
- dire et juger que le docteur Clément A...est tenu à l'indemnisation des sommes suivantes : 1 237, 50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, 1 125 euros pour les souffrances endurées, 8 437, 50 euros du chef du déficit fonctionnel permanent, 1 687, 50 euros au titre du préjudice d'agrément, 1 000 euros pour le préjudice esthétique permanent à l'exception de tout autre poste de préjudice,

- ramener à de plus justes proportions la demande formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 2 novembre 2010, régulièrement notifiées, les Mutuelles du Mans Assurances IARD et la polyclinique MAYAMARD demandent à la cour de :

- débouter les mandataires de la clinique COMITI de leur appel principal et le docteur Georges Z...de son appel incident et confirmer le jugement déféré sur l'imputabilité aux établissements hospitaliers de l'aggravation de l'état de la victime par réalisation du risque thérapeutique dans les proportions arbitrées par la présence du juge,
- débouter Monsieur Y...de son appel incident et le débouter de toutes ses demandes nouvelles en appel et manifestement injustifiées,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf à réduire sur certains postes le montant de l'indemnisation allouée,

- constater que la CPAM n'entend exercer aucun recours et y renonce de ce fait,
- lui déclarer l'arrêt à venir opposable.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 1 mai 2011 et fixée à plaider à l'audience du 8 septembre 2011.

Par arrêt avant dire droit du 19 octobre 2011, la cour de céans, constatant que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du PUY EN VELAY et celle de HAUTE-CORSE, intimées dans la déclaration d'appel, n'avaient pas constitué avoué et n'avaient pas été assignées par les appelants, a, en application des dispositions de l'article 908 du code de procédure civile, ordonné la réouverture des débats, révoqué l'ordonnance de clôture, ordonné à Maître Gilles X..., es qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession des sociétés SARL Clinique COMITI et SCS Polyclinique COMITI et à Maître Joseph A..., agissant es qualité de représentant des créanciers des mêmes sociétés, d'assigner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du PUY EN VELAY et la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de HAUTE-CORSE en leur signifiant la déclaration d'appel et renvoyé l'affaire devant le conseiller de la mise en état.

Les deux organismes sociaux ont été régulièrement assignés le 27 octobre et le 28 octobre 2008 avec signification de la déclaration d'appel et des conclusions des appelants.

Ils n'ont pas constitué avoué ; dans la mesure où les deux assignations ont été signifiées à personne, il convient de statuer par arrêt réputé contradictoire.
La procédure a été nouveau clôturée en cet état par ordonnance du 7 décembre 2011 ; l'affaire a été plaidée à l'audience du 2 février 2012 puis mise en délibéré au 21 mars 2012, les parties régulièrement avisées.

*

* *
SUR QUOI, LA COUR :

La cour se réfère à la décision entreprise et aux conclusions récapitulatives susdites pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties.

Le rapport d'expertise établi le 29 mars 2007 par le professeur I...procède d'un examen contradictoire, complet, rigoureux, approfondi des données techniques de la cause. Il n'a suscité aucune contestation d'ordre juridique et technique. Les conclusions de ce rapport peuvent donc servir de base à la discussion sur l'appréciation des responsabilités et sur l'évaluation du préjudice.

L'expert a conclu, pour l'essentiel, qu'il existe manifestement une infection nosocomiale suite à l'intervention initiale du 20 juillet 1994 : en effet, l'infection était absente à l'admission et s'est développée dans les suites immédiates de l'intervention pratiquée par le docteur A...à la clinique MAYMARD. ; que le germe en cause est très certainement un staphylocoque doré endogène ; que la constatation per-opératoire d'une pseudarthose faite le 6 janvier 1995 par le docteur Z...rendait illusoire une arthrolyse de l'os maintenu uniquement par le matériel en place ; que la constatation d'une ostéite le 31 janvier 1995 devait aboutir rapidement à l'indication d'une intervention, telle que celle pratiquée par le docteur H...le 14 avril 1995 ; que manifestement le docteur Z...n'a pas l'expérience de ce genre de complication et était dépassé par l'évolution de cette infection dont il n'a pas mesuré la gravité fonctionnelle ; que le résultat est un retard de deux mois et demi dans le traitement de la pseudarthose infectée, responsable d'une aggravation du préjudice fonctionnel.

Sur les responsabilités, c'est par une motivation appropriée, qu'en se fondant sur les énonciations qui précèdent le tribunal a retenu que l'infection nosocomiale contractée par Monsieur Franck Y...engageait la responsabilité du docteur A...et de la clinique MAYMARD, qui d'ailleurs acquiescent tous deux expressément aux dispositions du jugement les déclarant solidairement responsables de l'infection et les condamnant sous la même solidarité à réparer les préjudices en découlant.

S'agissant du docteur Z...qui a opéré Monsieur Franck Y...à trois reprises entre le 6 et le 21 janvier 1995, ce praticien ne peut sérieusement contester, malgré les arguments qu'il tente d'avancer, avoir commis des fautes dans le traitement de l'infection pourtant mise en évidence dès la première intervention. Il est en effet établi que l'intéressé a tardé à enlever le matériel mis en place lors de l'intervention du 20 juillet 1994, qu'il s'est abstenu de solliciter l'avis d'un confrère spécialisé sur le protocole de soins à adopter, qu'en définitive il n'a pas pris la mesure de la gravité des conséquences de la présence d'un staphylocoque doré.

Par suite, la disposition du jugement déféré ayant déclaré le docteur Z...responsable du retard thérapeutique ayant contribué à l'aggravation de l'infection et de ses conséquences doit être confirmée.

Contrairement à ce que soutient Monsieur Y...dans son appel incident, c'est par de justes motifs que le premier juge a retenu que la faute commise par le docteur Z...n'a généré qu'une aggravation de l'infection initiale et qu'elle doit s'analyser en une perte de chance pour la patient de voir traiter à temps l'infection et de réduire d'autant ses conséquences. En effet, s'il est très probable que les suites opératoires se seraient déroulées de manière moins compliquée si le docteur Z...avait pris plus tôt la décision de retirer le matériel et de traiter l'infection, cela n'est toutefois pas certain.

En répartissant les responsabilités dans la production des dommages à raison de 50 % au titre de l'infection imputable au docteur A...et à raison de 50 % du chef des fautes ayant entraîné une perte de chance pour le patient de voir son état s'améliorer imputables au docteur Z..., le tribunal a procédé à une appréciation conforme aux données techniques de la cause, telles qu'elles ressortent notamment du rapport d'expertise, et qu'il convient dès lors de confirmer.

Pour retenir la responsabilité de Maître X...et de Maître A...en leur qualité respective de commissaire à l'exécution du plan et de représentant des créanciers des SARL Clinique COMITI et SCS Polyclinique COMITI, le premier juge a constaté que le docteur Z...exerçait au sein de la clinique COMITI lors de ses interventions incriminées et non dans un cabinet privé et il a relevé que la clinique ne produisait pas le contrat la liant au médecin.

Or, il résulte de ce contrat, produit en appel, qu'en réalité le docteur Z...exerçait son activité en toute indépendance et qu'en l'absence d'autres éléments justifiant la mise en cause de l'établissement de santé dans la production du dommage, la mise en cause de celui-ci, qui ne saurait être postulée, ne peut être retenue.

Il convient, par suite, d'infirmer le jugement déféré dans ses dispositions déclarant Maître X...et Maître A..., es qualité, solidairement responsables avec le docteur Z...du retard thérapeutique, et prononçant des condamnations à leu encontre tant au titre de la réparation du dommage que des chefs de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

La cour, statuant à nouveau, ordonnera la mise hors de cause de Maître X...et de Maître A.... En revanche, aucune considération ne commande d'accueillir la demande reconventionnelle qu'ils ont formée en appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dommages, l'expert a retenu un préjudice esthétique de 3, 5/ 7, un pretium doloris de 4, 5/ 7, une IPP de 20 %. Ces estimations procèdent d'un examen approfondi et sont fondées techniquement ; les séquelles prises en compte sont directement imputables à l'infection et à son évolution ; contrairement à ce que soutiennent la MMA, la clinique MEYMARD, le docteur A...et le docteur Z...par de simples affirmations, elles ne se rattachent ni à l'accident initial ni à celui dont Monsieur Y...a été victime en septembre 2005.

La répartition de la charge de la réparation entre les parties condamnées in solidum effectuée par le premier juge procède d'une appréciation pertinente et non sérieusement contestée de la contribution de la responsabilité de chacun à la réalisation des dommages. Il convient dès lors d'entrer en voie de confirmation sur les partages effectués comme suit :

- au titre de l'IPP : 50 % pour le docteur A..., la clinique MAYMARD et son assureur la MMA qui ne conteste pas sa garantie et 50 % pour le docteur Z...,
- au titre du pretium doloris : 55, 5 % pour le docteur A..., la clinique MAYMARD et la MMA, 44, 5 % pour le docteur Z...,
- au titre du préjudice esthétique auquel le retard thérapeutique n'a pas contribué : 100 % pour le docteur A..., la clinique MAYMARD et la MMA.

C'est encore à bon droit et sans être critiqué par les intéressés eux-mêmes que le tribunal a retenu que dans leurs rapports entre eux, le docteur A...d'une part, la clinique MAYMARD et la MMA d'autre part, doivent supporter par moitié les condamnations mises solidairement à leur charge.

S'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires, le premier juge a retenu à juste titre que Monsieur Y...rapportait la preuve de frais d'hospitalisation, de location de télévision et de téléphone acquitté pour un montant de 2 238 euros, somme qu'il a mise à la charge du docteur A..., de la clinique MAYMARD et son assureur la MMA, du docteur Z..., de Maître X...et de Maître A...solidairement. Les frais exposés pour se rendre à l'expertise ont été intégrés dans l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Ces dispositions, non sérieusement critiquées, seront confirmées sauf en ce qu'elles concernent Maître X...et de Maître A....

Monsieur Y...sollicite en outre en appel l'allocation de la somme de 4 048 euros au titre de l'assistance d'une tierce personne, en l'occurrence sa mère, pendant 253 jours. Cette prétention, bien que nouvelle, est toutefois recevable sur le fondement de l'article 566 du code de procédure civile car elle est l'accessoire des demandes en réparation du préjudice soumise au premier juge.

Toutefois, elle n'est pas suffisamment justifiée et il convient de la rejeter.

S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents, c'est par des motifs exacts et pertinents que le premier juge a retenu des frais de véhicule adapté évalués à 3 438, 20 euros, qu'il a écarté le préjudice de formation allégué par la victime, qu'il a évalué l'incidence professionnelle à la somme de 10 000 euros.

En l'absence de moyens nouveaux sérieux et de nouvelles preuves convaincantes, le jugement sera confirmé de ces chefs. Par ailleurs, la cour estime devoir rejeter, au regard des explications produites, la demande modificative tendant au financement de l'achat d'un véhicule automatique et de son renouvellement pendant cinq ans, formée par Monsieur Y...devant elle.

S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux temporaires, c'est encore par des motifs exacts et pertinents que le tribunal a évalué le déficit fonctionnel temporaire à 6 600 euros, les souffrances endurées à 10 000 euros et qu'il n'a pas retenu de préjudice esthétique temporaire. En l'absence de moyens nouveaux sérieux et de nouvelles preuves convaincantes, le jugement sera également confirmé de ces chefs.

S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux permanents, c'est toujours par des motifs exacts et pertinents que le tribunal a évalué le déficit fonctionnel permanent à 30 600 euros, le préjudice d'agrément à 10 000 euros, le préjudice esthétique permanent à 3 500 euros, le préjudice psychologique à 8 000 euros et qu'il n'a pas retenu le préjudice sexuel allégué.

En l'absence de moyens nouveaux sérieux et de nouvelles preuves convaincantes, le jugement sera encore confirmé de ces chefs.

Les dispositions du jugement déféré portant attribution à Monsieur Y...de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et relatives aux dépens de première instance seront confirmées sauf en ce qu'elles concernent Maître X...et Maître A..., comme déjà indiqué.

Compte tenu de la mise hors de cause de ces derniers, appelants principaux, les dépens de l'appel seront mis à la charge de Monsieur Y...qui succombe dans son appel incident.

Aucune considération ne commande de faire une nouvelle application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les parties seront déboutées des demandes qu'elles ont formée devant le cour sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celles retenant la responsabilité de Maître Gilles X...et de Maître Joseph A...en leurs qualités respectives de commissaire à l'exécution du plan de cession et de représentant des créanciers des sociétés SARL Clinique COMITI et SCS Polycliniqe COMITI, et prononçant des condamnations à leur encontre,
Statuant à nouveau de ces seuls chefs,
Ordonne la mise hors de cause de Maître Gilles X...et de Maître Joseph A...,
Déclare recevables mais non fondées les demandes nouvelles formées par Monsieur Franck Y...,
Dit n'y avoir lieu à application en appel des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
Déclare le présent arrêt opposable à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du PUY EN VELAY et à celle celle de HAUTE-CORSE,
Condamne Monsieur Franck Y...aux dépens de l'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 09/00817
Date de la décision : 21/03/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2012-03-21;09.00817 ?
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