Ch. civile A
ARRET No
du 29 FEVRIER 2012
R.G : 10/00269 R-JG
Décision déférée à la Cour :décision du 29 janvier 2010Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante deR.G :
X...
C/
FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT NEUF FEVRIER DEUX MILLE DOUZE
APPELANT :
Monsieur Joseph X...né le 25 Février 1930 à ...20200 BASTIA
assisté de la SCP MICHEL LEDOUX et ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS
INTIME :
FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTEpris en la personne de son représentant légalTour Gallièni II36 Avenue du Général de Gaulle93175 BAGNOLET CEDEX
assisté de Me Alain TUILLIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 décembre 2011, devant Madame Julie GAY, Président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Julie GAY, Président de chambreMadame Rose-May SPAZZOLA, ConseillerMadame Marie-Noëlle ABBA, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mademoiselle Carine GRIMALDI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 29 février 2012
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *Par arrêt avant dire droit du 6 avril 2011 auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits et de la procédure, cette Cour statuant sur le recours formé par Monsieur X... à l'encontre du FIVA a :
- commis le Docteur B... en qualité d'expert avec mission de :
convoquer les parties qui pourront se faire assister ou représenter par tout praticien de leur choix,
se faire remettre tout document nécessaire à la réalisation de sa mission,
examiner Monsieur Joseph X...,
décrire les affections dont il est atteint,
dire si celles-ci sont imputables à une exposition à l'amiante en précisant l'incidence éventuelle d'un état antérieur ou d'une pathologie intercurrente,
dans l'affirmative, fixer la date de première constatation de la pathologie,
évaluer le taux d'incapacité résultant de cette exposition au jour de l'expertise en prenant comme seule référence le barème médical du FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE,
décrire les souffrances physiques et morales endurées du fait de la maladie, les coter dans une échelle de 1 à 7,
donner un avis sur le préjudice esthétique dans une échelle de 1 à 7 et sur le préjudice d'agrément subi,
- réservé les dépens.
Le Docteur B... a rempli sa mission et déposé son rapport le 19 juillet 2011.
Il en résulte que :
- Monsieur Joseph X... est porteur d'une asbestose pleurale à type de plaques pleurales modérées et discrètement calcifiées,
- la déclaration de maladie professionnelle a été faite le 17 janvier 2005 mais on retrouve ces lésions sur un scanner du 10 octobre 2000,
- le taux d'incapacité permanente partielle prévu par le barème du FIVA est de 5 % pour les plaques pleurales sans retentissement fonctionnel respiratoire.
Le préjudice physique et le préjudice d'agrément sont très légers soit de niveau 1 sur l'échelle d'évaluation.
Il n'y a pas de préjudice esthétique.
Le préjudice moral est plus marqué car l'exposition à l'amiante a toujours une connotation négative par le risque de développement de pathologie maligne, l'expert l'évaluant comme moyen mais le laissant à l'appréciation de la cour.
Le FIVA a fait une offre d'indemnisation par correspondance du 9 août 2011 que Monsieur X... a contesté le 7 octobre 2011.
Eu égard au lien de connexité présenté par les deux procédures enrôlées sous les no 10/269 et 11/812, leur jonction sera ordonnée afin qu'il soit statué par un seul et même arrêt.
En ses écritures du 7 décembre 2011, Monsieur Joseph X... sollicite sur le fondement du rapport d'expertise du Docteur B... qui a évalué son IPP à 5 % à compter du 10 octobre 2000, date de première constatation de la maladie, en retenant l'assiette de rente adoptée par le conseil d'administration du FIVA pour l'année 2011 soit 18.203 euros, une rente proportionnelle au taux de 5 % soit 910 euros, ainsi que la capitalisation de cette rente à compter du 1er juillet 2011 en fonction de la table de mortalité publiée par l'INSEE et d'un taux d'intérêt de 2,5 % correspondant aux données économiques actuelles.
Il réclame en conséquence :
- 16.955,72 euros au titre du préjudice lié à l'incapacité fonctionnelle,
- 10.000 euros au titre de son préjudice physique,
- 40.000 euros au titre de son préjudice moral,
- 10.000 euros au titre de son préjudice d'agrément,
avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt à intervenir.
Il demande enfin le paiement d'une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses écritures déposées le 12 décembre 2011, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens, le FIVA conclut à l'homologation du rapport du Docteur B... qui fixe la date de première constatation médicale de l'affection au 10 octobre 2000 et au rejet de la demande de Monsieur X... tendant à ce que la valeur du point de rente soit proportionnelle à son taux d'incapacité.
Il offre sur la base du principe de progressivité de la valeur du point de rente et de sa propre table de capitalisation de réparer le préjudice fonctionnel de Monsieur X... par l'octroi d'une indemnité de 7.741,34 euros et de lui allouer :
- 9.100 euros au titre du préjudice moral,
- 500 euros au titre du préjudice physique,
- 500 euros au titre du préjudice d'agrément.
Il conclut au rejet de la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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* *
SUR CE :
Sur l'indemnisation du préjudice lié à l'incapacité fonctionnelle :
Attendu que Monsieur X... ne conteste pas le taux d'incapacité de 5 % retenu par le Docteur B... mais demande que son préjudice fonctionnel soit calculé proportionnellement à son taux d'incapacité sur le montant de l'assiette fixé par le FIVA pour un taux de 100% soit 18.203 euros pour l'année 2011 ;
Que la proportionnalité de la valeur du point de rente réparant justement le préjudice subi par la victime, il convient de faire droit à sa demande et de fixer le montant de la rente annuelle à 910 euros ;
Que sur cette base il sera alloué à Monsieur X... au titre des arrérages de la rente pour la période du 11 octobre 2000 au 30 juin 2011, soit pour 82 jours en 2000, 10 ans et 6 mois, la somme de (910 x 82 / 365)+(910 x 10)+(910 / 2), soit 9.759,44 euros qu'il réclame ;
Attendu qu'il y a lieu à compter du 1er Juillet 2011 de capitaliser cette rente ;
Que l'indemnisation par capitalisation doit prendre en compte l'espérance de vie actualisée avec un taux d'intérêt pertinent au regard de l'évolution des loyers de l'argent ;
Qu'il y a donc lieu d'appliquer la dernière table de mortalité publiée par l'INSEE ainsi qu'un taux de 2,5 % correspondant aux données économiques actuelles ;
Que la rente annuelle doit ainsi être multipliée par un coefficient de 7,908, la victime étant âgée de 81 ans ;
Qu'il en résulte un capital de 7.196,28 euros ;
Que le FIVA devra verser au titre du préjudice lié à l'incapacité fonctionnelle une somme totale de 9.759,44 + 7.196,28, soit 16.955,72 euros ;
Sur le préjudice physique :
Attendu qu'alors que le préjudice a été qualifié de très léger par l'expert, Monsieur X... se plaint d'essoufflement à l'effort, de toux et de douleur au niveau de la poitrine ;
Qu'il lui sera alloué à ce titre une somme de 5.000 euros ;
Sur le préjudice d'agrément :
Attendu que Monsieur X... ne pouvant plus s'adonner aux plaisirs de chasse ou du jardinage, son préjudice d'agrément qualifié de très léger par l'expert sera réparé par l'allocation d'une somme de 2.000 euros ;
Sur le préjudice moral :
Attendu que Monsieur X... subit depuis le diagnostic de plaques pleurales calcifiées, un préjudice moral se traduisant par des angoisses et une peur du lendemain en raison du risque de développement de pathologie maligne qu'implique l'exposition à l'amiante ;
Que le Docteur B... a qualifié ce préjudice de moyen tout en le laissant à l'appréciation de la cour ;
Que compte tenu des contrôles médicaux réguliers générateurs d'anxiété auxquels l'intéressé est astreint et des souffrances psychologiques réelles résultant de la crainte subjective de l'apparition d'une pathologie plus grave , il y a lieu d'indemniser ce chef de préjudice par l'octroi d'une somme de 30.000 euros ;
Attendu que Monsieur X... a été contraint d'exposer des frais irrépétibles dont il lui sera accordé réparation à hauteur de la somme de 1.500 euros qu'il réclame ;
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* *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Ordonne la jonction des procédures enrôlées sous les no 10/269 et 11/812 sous le no 10/269,
Condamne le FIVA à payer à Monsieur Joseph X... :
- la somme de SEIZE MILLE NEUF CENT CINQUANTE CINQ EUROS ET SOIXANTE DOUZE CENTIMES (16.955,72 euros) au titre de l'indemnisation de son préjudice fonctionnel permanent,
- la somme de CINQ MILLE EUROS (5.000 euros) au titre de son préjudice physique,
- la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 euros) au titre de son préjudice d'agrément,
- la somme de TRENTE MILLE EUROS (30.000 euros) au titre de son préjudice moral,
Le condamne en outre à lui payer la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Le condamne aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT