Ch. civile B
ARRET No
du 25 JANVIER 2012
R. G : 08/ 00405 C-PH
Décision déférée à la Cour : jugement du 13 mars 2008 Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO R. G : 06/ 143
X... Y...
C/
Z...A...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE DOUZE
APPELANTS :
Madame Arlette Marie Louise X... née le 04 Décembre 1937 à ROUEN (76000) ...75013 PARIS
assistée de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA et de Me Marguerite GRAZIANI-METZGER, avocat au barreau de PARIS plaidant en visioconférence
Monsieur Mark Antony Y... pris tant en son personnel qu'en qualité de tuteur de sa soeur Karen Y..., née le 30 septembre 1968 à LONDRES, tous deux héritiers de Françoise Marie Antoinette Georgette X... épouse Y..., décédée le 18 mai 2009 né le 17 Juin 1966 à LONDRES ...1134 VUFFLENS LE CHATEAU (SUISSE)
assisté de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA et de Me Marguerite GRAZIANI-METZGER, avocat au barreau de PARIS plaidant en visioconférence
INTIMES :
Monsieur André Antoine Charles Z...né le 05 Avril 1927 à CENTURI (20238) ...1201 GENEVE (SUISSE)
assisté de la SCP RIBAUT BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, Me Eric PERES, avocat au barreau de PARIS
Monsieur Jean-François A...né le 11 Novembre 1954 à BONIFACIO (20169) ... 20169 BONIFACIO
Défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 décembre 2011, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2012.
ARRET :
Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* * Vu le jugement du Tribunal de grande instance d'AJACCIO du 28 mars 1996 qui, sur assignation de Monsieur Jean-François A...par Monsieur André Z..., a notamment constaté que Monsieur Z...est propriétaire d'une parcelle de terre d'un hectare cinquante sept ares et quatre vingt centiares cadastrée no 581 et 584, lieudit Marina di Fiori sur la commune de BONIFACIO.
Vu le jugement du Tribunal de grande instance d'AJACCIO du 13 mars 2008 qui a notamment déclaré irrecevable la tierce opposition au jugement du 28 mars 1996 formée par Mademoiselle Arlette X... et Madame Françoise X... épouse Y... en leur qualité d'héritières de feue Marie X....
Vu la déclaration d'appel du 21 mai 2008 déposée pour Mademoiselle Arlette X... et Madame François X... épouse Y... à l'encontre du jugement du 13 mars 2008.
Vu l'assignation délivrée le 6 octobre 2008 à la personne de Monsieur Jean-François A...qui est défaillant.
Vu l'arrêt mixte de la Cour d'appel de BASTIA du 8 décembre 2010 qui a déclaré recevable la tierce-opposition formée par Mademoiselle Arlette X... et Madame Françoise X... épouse Y... et, avant dire droit sur le bien-fondé de cette tierce-opposition, a invité Monsieur Z...à appeler en cause l'ensemble des propriétaires des parts indivises de l'immeuble visé dans l'acte sous-seing privé du 8 août 1994 et réservé les dépens.
Vu les dernières conclusions du 12 octobre 2011 déposées pour Madame Arlette X... et Monsieur Mark Y... pris tant en son nom personnel qu'en qualité de tuteur de sa soeur Karen Y..., tous deux héritiers de feue Françoise X... épouse Y..., décédée en cours de procédure, aux fins d'infirmation du jugement du 13 mars 2008 et de voir :
- déclarer Monsieur Z...et Monsieur A...irrecevables en l'ensemble de leurs prétentions sans examen au fond en vertu des articles 122 et 123 du code de procédure civile,
- déclarer nulle l'intégralité de la procédure engagée par Monsieur Z...à l'encontre de Monsieur A...agissant comme mandataire de Madame Marie X... et réformer entièrement le jugement rendu le 28 mars 1996 par le Tribunal de grande instance d'AJACCIO en vertu de l'article 117 du code de procédure civile,
- déclarer nulle de nullité absolue la vente consentie par Monsieur A...ès-qualités, à Monsieur Z...suivant acte sous-seing privé du 8 août 1994 et débouter Monsieur Z...de toutes ses demandes,
- en conséquence rétracter le jugement rendu le 28 mars 1996 constatant la propriété de Monsieur Z...sur la parcelle en cause,
- ordonner les publicités nécessaires aux hypothèques de la décision rendue,
- condamner Monsieur A...à verser aux concluants la somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis du fait de ses agissements en fraude de leurs droits,
- condamner Monsieur Z...à payer aux concluants la somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice auquel il a concouru,
- les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant sera recouvré pour ces derniers conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions de Monsieur Z...du 14 octobre 2011 aux fins de voir :
- donner acte à Monsieur Z...qu'il renonce à contester le caractère fondé de la tierce-opposition et qu'il acquiesce à la demande des appelants de voir rétracter le jugement du 28 mars 1996 en ce qu'il a dit valable la vente des parcelles conclue le 8 août 1994 avec les consorts B...-X...,
- du fait de l'annulation de la vente du 8 août 1994, condamner conjointement et solidairement Madame Arlette X... et Monsieur Y... en son nom personnel et en qualité de tuteur de sa soeur Karen Y... au paiement des sommes suivantes :
• 137 204, 11 euros (correspondant au prix de vente), augmentés des intérêts au taux légal capitalisés à compter du 12 février 1997,
• 43 447, 96 euros (correspondant aux frais d'acquisition et de dépôt de jugement) augmentés des intérêts au taux légal capitalisés à compter du 12 février 1997,
• le remboursement des taxes foncières depuis 1997 sur présentation des justificatifs,
• 10 000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1147 du code civil,
- débouter les appelants de leur demande de dommages-intérêts et, à titre subsidiaire, en modérer le montant,
- débouter les appelants de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner à payer à Monsieur Z...la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui comprendront les frais de publication à la Conservation des Hypothèques, dont distraction au profit de son avoué.
Vu l'ordonnance de clôture du 19 octobre 2011.
Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure et des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à l'arrêt du 8 décembre 2010 et aux dernières conclusions des parties ;
Attendu que l'arrêt mixte du 8 décembre 2010 indiquait que l'examen du bien-fondé de la tierce-opposition supposait de déterminer l'existence d'un mandat donné par les vendeurs à Monsieur A...et précisait que les appelants avaient hérité de feue Marie X... qui ne possédait qu'une partie des droits afférents à la parcelle visée dans l'acte sous-seing privé, avant d'inviter Monsieur Z...à appeler en cause l'ensemble des personnes qui étaient titulaires des droits sur cette parcelle ;
Attendu que Monsieur Z...n'a pas procédé à cet appel en cause et qu'il acquiesce à la demande des appelants de voir rétracter le jugement du 28 mars 1996 en ce qu'il a dit valable la vente de la parcelle conclue le 8 août 1994 ;
Attendu que les appelants soulèvent la fin de non recevoir pour défaut de droit d'agir de Monsieur Z...en soutenant que l'arrêt de la Cour d'appel de GRENOBLE du 9 décembre 2003 a définitivement jugé que Monsieur A...ne disposait d'aucun pouvoir d'agir en justice pour leur compte et qu'en conséquence est irrecevable toute prétention émise par Monsieur Z...à l'encontre de Monsieur A..., dépourvu du droit d'agir ;
Attendu cependant que Monsieur Z...n'était pas partie à l'instance qui a abouti à l'arrêt du 9 décembre 2003 et qu'il est recevable à agir dans la présente instance pour défendre ses droits tirés de l'acte sous-seing privé du 8 août 1994 ;
Attendu que les appelants soulèvent également l'irrecevabilité de toute demande formée contre ou au nom de Madame Marie X... représentée par Monsieur A...en faisant valoir que leur mère est décédée le premier juin 1995 avant le jugement du 28 mars 1996 ;
Attendu cependant que Madame Marie X... était en vie à la signature de l'acte sous-seing privé de vente du 8 août 1994dans lequel Monsieur A...se présente comme son mandataire et celui d'autres indivisaires ;
Attendu que le jugement du 28 mars 1996 a constaté la propriété de Monsieur Z...issue de l'acte du 8 août 1994 et que Monsieur Z...était recevable à agir dans la présente instance pour défendre ses droits nés de cet acte ; qu'il y a donc lieu de rejeter les fins de non recevoir proposées par les appelants ;
Attendu que si Monsieur Z...n'était pas dépourvu d'intérêt à agir, il s'est abstenu d'appeler en cause l'ensemble des personnes possédant des droits sur la parcelle vendue et n'a pas démontré que Madame Marie X... avait mandaté Monsieur A...pour vendre ses droits indivis, ni ne l'avait autorisé à la représenter en justice ;
Attendu que Monsieur Z...a acquiescé à la demande d'annulation de la vente tout en indiquant qu'il avait été un acquéreur de bonne foi ;
Attendu qu'il y a lieu en conséquence de dire bien fondée la tierce-opposition et d'accueillir la demande des appelants visant à obtenir l'annulation de la procédure engagée par Monsieur Z...à l'encontre de Monsieur A...agissant au nom de Madame Marie X..., la nullité de la vente consentie par Monsieur A...suivant acte sous-seing privé du 8 août 1994, la rétractation du jugement rendu le 28 mars 1996 et la publication du présent arrêt à la Conservation des Hypothèques ;
Attendu que les appelants présentent une demande de dommages-intérêts à l'encontre de Monsieur A...qui a selon eux agi en fraude de leurs droits et de Monsieur Z...auquel ils reprochent d'avoir contribué à leur préjudice en ayant assigné Monsieur A...visé personnellement comme défendeur alors que le demandeur savait qu'il n'était pas propriétaire et en ayant négligé de vérifier la validité d'un mandat de vente puis celle d'un mandat de représentation en justice des prétendues mandantes ;
Attendu que le comportement fautif de Monsieur A...est établi par sa condamnation pénale pour abus de confiance et par l'utilisation d'une fausse qualité de mandataire dans l'acte sous-seing privé de vente du 8 juin 1993 au profit de la société IMMOBILCORSE puis dans l'acte sous-seing privé du 8 août 1994 de vente de la même parcelle à Monsieur Z...;
Attendu que ces agissements frauduleux ont causé aux appelants un préjudice caractérisé par des soucis et les inconvénients d'une longue procédure qui mérite une réparation par la condamnation de Monsieur A...au paiement de la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Attendu en revanche que Monsieur Z...est étranger à la première vente consentie à la société IMMOBILCORSE, qu'il n'a pas été condamné comme le complice ou le receleur de Monsieur A...; qu'il a certes assigné le mandataire et non les mandants devant le Tribunal de grande instance d'AJACCIO mais que son assignation du 19 mai 1995 précise que dans l'acte sous-seing privé du 8 août 1994, Monsieur A...agissait en qualité de mandataire des consorts B...-C...-D...et qu'il n'est pas démontré que Monsieur Z...ait agi dans l'intention de porter atteinte aux droits des personnes pour lesquelles Monsieur A...disait agir ;
Attendu que Monsieur Z...qui était assisté d'un conseil, apparaît en outre comme la victime de l'absence de vérification de la qualité de mandataire de Monsieur A...à laquelle le tribunal n'a pas non plus procédé ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter la demande de dommages-intérêts présentée par les appelants contre Monsieur Z...;
Attendu que Monsieur Z...a présenté une demande reconventionnelle en dommages-intérêts du fait de l'annulation de la vente, non contre Monsieur A..., mais contre les appelants, alors que Monsieur A...a été condamné pour abus de confiance, qu'il a été démontré que sa qualité de mandataire de Madame Marie X... était inexacte et que les appelants n'ont pas bénéficié du prix de vente ni ne peuvent être tenus pour responsables d'une opération dont ils n'ont eu connaissance qu'après le 8 août 2004 ;
Attendu qu'il y a lieu en conséquence de rejeter la demande de dommages-intérêts présentée par Monsieur Z...ainsi que sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les dépens comprenant le coût de la publication ordonnée seront mis à la charge de Monsieur Z...et de Monsieur A...qui succombent, l'avoué des appelants étant autorisé à faire application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
*
* *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement du Tribunal de grande instance d'AJACCIO du 13 mars 2008,
Dit bien fondée la tierce-opposition formée à l'encontre du jugement du Tribunal de grande instance d'AJACCIO du 28 mars 1996 et rétracte ce jugement
Y ajoutant,
Rejette les fins de non recevoir proposées par les appelants,
Déclare nulle l'intégralité de la procédure engagée par Monsieur André Z...à l'encontre de Monsieur Jean-François A...agissant au nom et comme mandataire de Madame Marie X...,
Déclare nulle la vente consentie par Monsieur A...à Monsieur Z...suivant acte sous-seing privé du 8 août 1994,
Ordonne la publication au Service de la publicité foncière d'AJACCIO du présent arrêt concernant les parcelles cadastrées section N no 0581 et no 0584, adresse Marina di Fiori, commune de BONIFACIO,
Condamne Monsieur Jean-François A...à payer aux appelants la somme de VINGT CINQ MILLE EUROS (25 000 €) à titre de dommages-intérêts,
Rejette le surplus des prétentions des parties,
Condamne Messieurs Z...et A...aux entiers dépens comprenant le coût de la publication ordonnée et autorise l'avoué des appelants à faire application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT