Ch. civile B
ARRET No
du 30 NOVEMBRE 2011
R. G : 10/ 00311 C-PH
Décision déférée à la Cour : décision du 12 mars 2010 Tribunal de Commerce de BASTIA R. G : 09/ 1714
X...
C/
Société A. M. C CROISIERES
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
TRENTE NOVEMBRE DEUX MILLE ONZE
APPELANT :
Monsieur Laurent X...... 20226 PALASCA
représenté par Me Antoine-Paul ALBERTINI, avoué à la Cour
ayant pour avocat Me Pasquale VITTORI, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 1360 du 06/ 05/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
INTIMEE :
Société A. M. C CROISIERES Prise en la personne de son représentant légal en exercice 38 Rue Clémenceau B. P 2 20260 CALVI
représentée par la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me Dominique SALICETI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 octobre 2011, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2011.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* * Vu le jugement du Tribunal de commerce de BASTIA du 12 mars 2010 qui a :
débouté Monsieur Laurent X...de ses demandes dirigées contre la société AMC CROISIERES,
rejeté les demandes reconventionnelles de la société AMC CROISIERES au titre d'un trop perçu et de dommages-intérêts,
condamné Monsieur X...à payer la société AMC CROISIERES la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné Monsieur X...aux entiers dépens de l'instance.
Vu la déclaration d'appel déposée le 15 avril 2010 pour Monsieur X....
Vu les dernières conclusions de l'appelant du 11 mai 2011 aux fins de voir :
Avant dire droit :
Ordonner à la société AMC CROISIERES de lui communiquer, sous astreinte de 100 euros par jour de non communication à compter de la décision, en original, le livre de bord du Catamaran BACARA,
Au fond sur le licenciement :
1- dire le licenciement nul et infondé :
• au principal, en application de la convention collective applicable, condamner la société AMC CROISIERES à lu payer la somme de 15 053, 31 euros à titre d'indemnisation du préjudice subi,
• au subsidiaire, en application du contrat de travail, condamner la société AMC CROISIERES à lui payer la somme de 12 033, 35 euros à titre d'indemnisation du préjudice subi,
2- si le licenciement était considéré comme réel et sérieux :
• au principal, en application de la convention collective applicable, condamner la société AMC CROISIERES à lui payer la somme de 6 053, 01 euros au titre des sommes dues,
• au subsidiaire, en application du contrat de travail, condamner la société AMC CROISIERES à lui payer la somme de 3 033, 35 euros au titre des sommes dues,
Indépendamment du licenciement :
• condamner la société AMC CROISIERES à lui payer la somme de 3 888, 41 euros au titre de rappels de salaire,
• la condamner au titre des heures supplémentaires :
- au principal à lui payer, en application de la convention collective la somme de 16 127, 76 euros,
- au subsidiaire, en application du contrat de travail, la somme de 9 180, 72 euros,
• la condamner au titre des jours fériés et des dimanches :
- au principal, en application de la convention collective au paiement de la somme de 1 242, 60 euros,
- au subsidiaire, en application du contrat de travail, au paiement de la somme de 707, 85 euros,
• la condamner au titre des jours d'arrêt de travail :
- au principal, en application de la convention collective au paiement de la somme de 400, 90 euros,
- au subsidiaire, en application du contrat de travail, au paiement de la somme de 228, 25 euros,
• la condamner, au titre de rappels d'indemnités journalières de nourriture, au paiement de la somme de 431, 19 euros,
• la condamner à lui remettre des fiches de salaire rectifiées selon le minima social et un certificat de travail rectifié selon les condamnations prononcées,
• la condamner au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions de la société AMC CROISIERES du 8 mars 2011 aux fins de confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, à l'exception de celles rejetant ses demandes reconventionnelles et, statuant à nouveau, de voir :
• condamner Monsieur X...à lui verser la somme de 1 037, 49 euros, celle de 4 000 euros au titre des dommages-intérêts et celle de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
• condamner Monsieur X...aux entiers dépens.
Vu l'ordonnance de clôture du 7 septembre 2011.
*
* *
Par lettre recommandée du 7 septembre 2005, la société à responsabilité limitée AMBIANCE MAXI CATAMARAN (AMC) exerçant à l'enseigne AMC CROISIERES, a notifié à Monsieur Laurent X...qu'elle employait depuis le mois de mai 2005 en qualité de skipper, son licenciement pour faute grave au motif de l'abandon le 11 août 2005 de son poste de capitaine après avoir embarqué des passagers et les avoir laissés sans aucun autre skipper à bord du catamaran BACARA.
Monsieur X...a saisi le Tribunal d'instance de L'ILE-ROUSSE afin de voir déclarer abusif le licenciement dont il a fait l'objet mais, par jugement du 19 décembre 2005, cette juridiction s'est déclarée incompétente au profit du Tribunal de commerce de BASTIA.
L'affaire a fait l'objet d'une radiation du rôle, par jugement du 5 octobre 2007, en raison d'une plainte avec constitution de partie civile pour faux et usage de faux déposée par Monsieur X...qui niait être l'auteur d'un rapport de mer déposé sous sa signature.
Une ordonnance de non-lieu ayant été rendue le 17 mars 2009, l'affaire était remise au rôle et, par jugement du 12 mars 2010, le Tribunal de commerce de BASTIA a rejeté les demandes de Monsieur X...en jugeant son licenciement justifié et ne pouvant donner lieu au versement d'indemnités. Le tribunal a refusé d'ordonner la production sous astreinte du rapport de mer sollicitée par Monsieur X...en considérant qu'il n'était pas utile à la solution du litige. Le tribunal a en outre rejeté la demande de prime de précarité et les autres demandes accessoires de Monsieur X...présentées indépendamment du licenciement en les jugeant non justifiées, de même que la demande de la société AMC présentée au titre d'un trop perçu justifiée par la seule attestation d'une salariée.
Devant la Cour, Monsieur X...indique qu'il a signé le 1er mai 2005 un contrat avec la société LOCAT LOISIR pour la période du 1er au 11 mai 2005 pour un salaire de 1 664, 40 euros puis un contrat avec la société AMC en date du premier mai 2005 pour la période du 1er mai au 30 septembre 2005 pour un salaire de 2 000 euros par mois, puis un contrat du 12 mai 2005 avec la société AMC pour la période du 12 mai au 30 septembre 2005 pour un salaire de 1 800 euros par mois.
Il précise que ce dernier contrat a été visé par les affaires maritimes et qu'il est en cause même si la société AMC s'était engagée à prolonger son contrat jusqu'au 30 novembre 2005 sur la base de 1 800 euros brut par mois, ce qui lui permettrait, sans réellement travailler en octobre et novembre, de percevoir sur la base de cinq mois réellement travaillés une moyenne de 2 200 euros net par mois.
Il indique avoir effectué des traversées Corse-Continent et soutient que le livre de bord est un élément essentiel dans le présent litige pour établir les avaries déjà rencontrées avec le catamaran qui l'ont conduit à refuser de prendre la mer le 11 août 2005 et les heures et conditions de travail à bord.
Il se réfère à la procédure pénale pour contester la disparition du livre de bord invoquée par la société AMC et considère que le refus de production de ce document constitue une résistance abusive qui doit conduire la Cour à constater que l'employeur n'est pas en mesure de le contredire sur les heures de travail déclarées.
Il précise n'avoir jamais rédigé et signé le rapport de mer figurant dans la procédure pénale.
Il soutient que la mise à pied conservatoire notifiée dans la lettre du 25 août 2005 de convocation à un entretien préalable et le licenciement pour faute grave ne sont pas justifiés.
Il souligne que la faute grave impose une réaction immédiate de l'employeur et que la mise à pied est intervenue 14 jours après les faits.
Il explique son refus de naviguer par son refus de mettre en danger la vie des plaisanciers et considère que l'abandon de poste n'est pas caractérisé dès lors qu'il a pris soin de prévenir l'armateur immédiatement de la raison légitime de son refus. Il indique avoir averti les affaires maritimes de CALVI de cela le 12 août 2005 et se réfère à sa lettre du 26 août 2005 qui énumère les raisons qui l'avaient empêché de prendre la mer. Il se fonde sur l'attestation de Monsieur A..., marin du BACARA, qui précise qu'il a décidé de ne pas prendre la mer pour des raisons de sécurité.
Il précise qu'une avarie est intervenue le 13 août 2005, comme il l'avait prévu.
Il fait valoir que si le licenciement devait être considéré comme réel et sérieux le salarié ne doit pas être privé des indemnités qui lui sont alors dues, en particulier son salaire du 11 août au 31 août 2005 et son salaire du mois de septembre 2005, s'agissant d'un contrat à durée déterminée devant arriver à terme le 30 septembre 2005.
Il revendique l'application de la convention collective de la navigation de plaisance, en particulier ses articles G 39 et G 44. Il considère que ses fonctions, son diplôme et son expérience auraient dû lu faire bénéficier d'un classement en catégorie A et d'un salaire net mensuel de 2 485, 47 euros. Il entend obtenir des rappels de salaire sur la base de la convention collective, des majorations pour heures supplémentaires prévues à l'article G 61 et pour travail exceptionnel du dimanche, jours fériés et de nuit prévues à l'article G 66.
Il précise qu'il travaillait 14 heures par jour, 7 jours sur 7, soit 84 heures par semaine, qu'il a effectué des traversées Corse-Continent et que la société AMC proposait à ses clients des sorties tardives afin d'admirer le coucher de soleil qui le conduisaient à devoir accoster à CALVI de nuit, bien après 22 heures.
Il conteste l'attestation du restaurateur produite par l'intimée et entend obtenir un rappel des indemnités journalières de nourriture, en précisant que lorsqu'il déjeunait au restaurant il s'acquittait lui-même de ses repas. Il considère être fondé à obtenir la remise des fiches de paye et d'un certificat de travail rectifiés.
La société AMC CROISIERES réplique en se fondant sur le contrat de travail à durée déterminée conclu le 12 mai 2005 portant le visa de l'inspection du travail maritime pour une période allant du 12 mai 2005 au 30 septembre 2005 prévoyant une activité de skipper, soit de capitaine sur un catamaran à voile pour une navigation côtière, et un salaire mensuel brut de 1 800 euros.
Elle soutient que Monsieur X...ne pouvait être embauché en qualité d'ingénieur et cadre de la convention collective applicable mais en qualité de chef de bord sur un navire à voile en catégorie d'embauche numéro 6 et qu'il a bénéficié d'un salaire supérieur au taux horaire de cette catégorie. Elle se réfère au récapitulatif des services du marin émanant des affaires maritimes qui indique que Monsieur X...n'a eu qu'un seul employeur et qu'il avait la qualification de chef de bord.
Elle considère que la procédure de licenciement pour faute grave est régulière et fondée, que plusieurs attestations établissent l'abandon de poste alors que le navire était au mouillage forain et que 28 clients étaient à bord.
Elle conteste le mauvais état de marche du catamaran et souligne que Monsieur X...n'a pas rédigé de rapport de mer le 11 août 2005 et que ce rapport aurait dû être conservé par le capitaine.
Elle indique que l'abandon de poste est constitutif pour le capitaine d'une infraction pénale et d'une faute disciplinaire et qu'en cas de faute grave l'employeur n'est pas tenu de prononcer au préalable une mise à pied conservatoire mais seulement de mettre en oeuvre le licenciement dans le délai le plus restreint possible.
Elle précise que du 11 août au 29 août 2005 Monsieur X...ne s'est plus manifesté et qu'il a, selon elle, emporté le journal de bord lorsqu'il a récupéré ses affaires personnelles le soir du 11 août 2005.
Elle indique que le gérant de la société a noté dans ce journal que Monsieur X...avait quitté le bord et qu'il l'avait remplacé, étant titulaire du brevet permettant d'exercer les fonctions de skipper.
Elle conteste le bien-fondé des demandes de Monsieur X...relatives à une prime de précarité, qui n'est pas due en cas de rupture anticipée du contrat de travail, à une indemnité de nourriture alors que le capitaine mangeait à bord avec les clients et prenait ses repas sur le compte de l'entreprise en cas de sortie à la demi-journée à la pizzeria Le Via Marine, ainsi qu'en atteste Monsieur Luc B....
Elle s'oppose également à la demande de rappel de salaires et d'indemnités journalières et se réfère aux déclarations trimestrielles simplifiées ENIM, à une lettre adressée le 26 avril 2006 faisant état d'un trop perçu de 1 117, 49 euros, à une grille de calcul de salaires applicable au premier janvier 2006 et à une attestation de la secrétaire comptable mentionnant deux acomptes de 700 euros versés mais non signalés au comptable.
Elle soutient, s'agissant des heures supplémentaires réclamées, que Monsieur X...n'apporte pas la preuve de leur accomplissement alors qu'il a récupéré lors des jours où la navigation n'était pas possible les heures travaillées en plus des 35 heures hebdomadaires.
Elle fait valoir qu'aucune réclamation de ce chef n'a été présentée avant le licenciement et se réfère au dépliant publicitaire qui précise les horaires de sortie du catamaran de 9 heures à 12 heures et de 14 h 30 à 17 h 30 pour considérer que Monsieur X...travaillait 6 heures par jour plus un quart d'heure avant le départ et un quart d'heure au retour. Elle indique que Monsieur X...a beaucoup effectué de demi-journées, exceptionnellement des couchers de soleil. Elle détaille les heures travaillées en mai, juin, juillet et août ainsi que les jours de congé pour fixer à 7, 23 heures supplémentaires dues à Monsieur X...lui donnant droit à une rémunération de 80 euros à déduire du trop perçu de 1 117, 49 euros.
Elle n'est pas opposée le cas échéant à une mesure d'expertise sur le décompte des heures supplémentaires mais entend obtenir des dommages et intérêts à hauteur de 4 000 euros en réparation du préjudice causé par l'abandon de poste et la même somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION :
Attendu que l'appelant a versé aux débats deux contrats d'engagement maritime à la plaisance professionnelle datés du premier mai 2005, l'un conclu avec LOCAT LOISIRS jusqu'au 11 mai 2005, l'autre avec la société AMC allant jusqu'au 30 septembre 2005 ainsi qu'un troisième contrat avec cette société daté du 12 mai 2005, à durée déterminée, jusqu'au 30 septembre 2005 pour un salaire mensuel de 1 800 euros, une durée de travail considérée égale à 35 heures par semaine et une durée de congés payés de 3 jours par mois ;
Attendu que seul ce dernier contrat est visé par l'administration des affaires maritimes ; qu'il a régi les relations contractuelles ayant existé entre l'appelant et l'intimée et sera pris en compte dans la présente instance ;
Attendu que l'appelant soutient que l'intimée s'était engagée à l'embaucher jusqu'au 30 septembre 2005 mais que rien ne vient corroborer cette allégation ;
Attendu que l'appelant demande avant dire droit qu'il soit ordonné à l'intimée de communiquer sous astreinte le livre de bord du catamaran BACARA en original mais que cette demande ne peut prospérer dès lors que l'intimée soutient que ce journal a été emporté par l'appelant et que celui-ci ne démontre pas que l'intimée l'ai en sa possession ;
Attendu que Monsieur X...conteste l'abandon de poste qui a motivé son licenciement et verse aux débats une attestation établie par Monsieur Virginio A..., matelot du BACARA, qui indique que l'appelant a décidé de ne pas prendre la mer " pour des raisons de sécurité flagrante et surtout pour les clients " et qu'" il est parti 5 minutes avant que la navette des clients arrive à bord " ;
Attendu que ce matelot précise que cet acte est compréhensible du fait de l'état vétuste du bord mais qu'il se garde bien d'indiquer les équipements défaillants du navire susceptibles de mettre en cause la sécurité des passagers et de l'équipage ;
Attendu que l'appelant a en revanche énuméré dans sa lettre du 26 août 2005, postérieure à la réception de la convocation à l'entretien préalable, les défaillances constatées, en particulier une voie d'eau tribord nécessitant d'écoper 7 à 8 seaux d'eau par jour, un problème de fixation du moteur tribord, une absence de pompe de cale à tribord, une pompe manuelle non connectée, une absence de groupe électrogène et de groupe frigorifique ;
Attendu que l'appelant n'a pas établi la réalité des défauts dont il a fait état ; qu'il a précisé dans le lettre du 26 août 2005 qu'il en avait informé les affaires maritimes et la gendarmerie maritime mais que rien ne vient corroborer cette affirmation, la portée de l'avarie intervenue le 13 août 2005 étant limitée selon l'intimée et la preuve du contraire n'étant pas rapportée ;
Attendu qu'en qualité de capitaine, l'appelant avait la possibilité d'établir un rapport de mer signalant les risques que l'état du navire faisaient encourir à l'équipage et aux passagers ; qu'il avait également la possibilité de refuser de prendre la mer tant que les réparations nécessaires n'avaient pas été effectuées ;
Attendu en revanche qu'il n'était guère responsable, si le navire se trouvait dans l'état décrit dans la lettre du 26 août 2005, de quitter le bord en permettant à un remplaçant d'effectuer la croisière qu'il estimait de nature à mettre en péril la sécurité des passagers ;
Attendu que l'attestation de Monsieur Marc C...produite par l'intimée présente une version très différente de celle de l'appelant et précise que les passagers étaient à bord, le bateau dans la baie de CALVI, lorsqu'à la suite d'une discussion avec l'hôtesse et après des insultes, Monsieur X...avait utilisé l'annexe pour quitter le bord, les passagers étant laissés sur le navire ;
Attendu que cette version de l'abandon du navire est corroborée par l'attestation établie par l'hôtesse d'accueil, Madame Marlène D..., l'ancienne employée de la société AMC ;
Attendu que ces deux attestations sont confortées par plusieurs autres attestations qui ne concernent pas directement l'abandon de poste mais font état d'un comportement lunatique de Monsieur X...qui cadre bien avec son attitude le 11 août 2005 ;
Attendu qu'ainsi que l'ont retenu les premiers juges, Monsieur X...a manqué gravement aux obligations qui lui incombaient en qualité de capitaine en abandonnant le navire et ses passagers dans ces conditions ;
Attendu que la société AMC était fondée à le licencier pour faute grave après avoir respecté la procédure de licenciement sans que l'absence de mise à pied conservatoire antérieure à l'entretien préalable fasse obstacle à cette qualification du licenciement car les circonstances de l'espèce et l'absence du salarié à compter de son abandon de poste du 11 août 2005 ont fait obstacle à ce que cette mise à pied ne lui soit signifiée avant le 25 août 2005 ;
Attendu qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur X...de ses demandes afférentes au licenciement ;
Attendu que l'appelant a produit des justificatifs de ses diplômes et de son expérience professionnelle afin de justifier le classement en catégorie A de la convention collective de la navigation de plaisance numéro 3187 de nature à lui permettre de se voir attribuer le salaire minimal mensuel net de 2 485, 47 euros des ingénieurs et cadres ;
Attendu cependant que le contrat du 12 mai 2005 précise qu'il est engagé comme skipper d'un catamaran à voile pratiquant la navigation côtière ; qu'il ne justifie pas l'obtention des diplômes énumérés par la convention pour bénéficier de la qualité d'ingénieur ou cadre ; qu'il a été employé comme chef de bord d'un navire à voile en catégorie 6 et ne peut en conséquence obtenir la requalification justifiant les rappels de salaire qu'il demande ;
Attendu que l'absence de production du livre de bord ne doit pas conduire la Cour à constater que l'employeur n'est pas en mesure de contredire l'appelant sur les heures de travail déclarées par lui ;
Attendu que l'affirmation de l'appelant selon laquelle il travaillait sept jours sur sept et 14 heures par jour se heurte au constat de ce que la météo s'oppose parfois à la navigation, aux horaires qui figurent sur le dépliant touristique de la société AMC qui propose des sorties à la journée de 9 ou 10 heures à 18 heures incluant deux arrêts baignade, ou à la demi-journée de 9 heures à 12 heures ou de 14 h 30 à 17 h 30, au décompte précis fourni par l'employeur et à l'absence de contestation malgré la remise des bulletins de paye de mai à juillet 2005 ne mentionnant pas d'heure supplémentaire et se révélant conforme à l'explication proposée par l'employeur selon laquelle l'appelant récupérait les heures supplémentaires à l'exception du mois d'août 2005 durant lequel il n'a pu récupérer 7, 23 heures supplémentaires et peut demander le versement de la somme de 80 heures ;
Attendu que la demande de l'appelant relative aux jours d'arrêt de travail n'est pas plus fondée faute pour lui d'avoir pris en compte l'intervention de la caisse de maladie en l'espèce ;
Attendu qu'en l'absence de réclamation et en l'état de l'attestation du restaurateur produite par l'intimée, il y a lieu de considérer que l'appelant mangeait à bord ou à terre sur le compte de l'intimée ;
Attendu que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes présentées au titre des heures supplémentaires, sauf pour le montant de 80 euros, des jours fériés et des dimanches, des rappels d'indemnités journalières de nourriture et des jours d'arrêt de travail qui, ainsi que l'ont relevé les premiers juges ne sont pas justifiés par Monsieur X...;
Attendu que s'agissant du trop perçu réclamé par l'intimée, les premiers juges ont considéré que l'attestation de la secrétaire ne suffisait pas à l'établir même si elle indiquait que deux acomptes de 700 euros avaient été versés par chèque le 25 mai et le 2 juin 2005 ;
Attendu que devant la Cour l'intimée produit un extrait de sa comptabilité relatif au compte du salarié X...sur lequel figurent ces acomptes alors que l'appelant ne produit aucun élément de preuve justifiant ces versements pour des activités autres que celles mentionnées aux bulletins de salaire ou permettant de contester les écritures comptables afférentes à ces versements ;
Attendu en conséquence qu'il y aura lieu d'infirmer le jugement entrepris de ce chef et de condamner l'appelant à verser la somme de 1 117, 48 euros au titre du trop perçu, de laquelle sera déduite la somme de 80 euros due par l'intimée au titre des heures supplémentaires, soit en définitive la somme de 1 037, 48 euros ;
Attendu que l'intimée ne justifie pas la réalité du préjudice qu'elle invoque à l'appui de sa demande de dommages-intérêts qui sera en conséquence rejetée ;
Attendu que l'équité ne commande pas de prononcer en cause d'appel une condamnation s'ajoutant à celle prononcée en première instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile qui mérite confirmation ;
Attendu que l'appelant qui succombe supportera les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle. *
* *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement du Tribunal de commerce de BASTIA du 12 mars 2010 en toutes ses dispositions à l'exception de celles relatives à la demande en paiement présentée par Monsieur Laurent X...au titre des heures supplémentaires et à la demande relative à un trop perçu présentée par la société AMC,
Statuant de nouveau de ces chefs,
Dit que Monsieur X...a droit au paiement de la somme de QUATRE VINGT EUROS (80 €) au titre d'heures supplémentaires impayées,
Dit que la société AMC a droit au remboursement de la somme de MILLE CENT DIX SEPT EUROS et QUARANTE HUIT CENTIMES (1 117, 48 €) correspondant à un trop perçu par Monsieur X...,
Condamne, après compensation, Monsieur X...à verser la somme de MILLE TRENTE SEPT EUROS et QUARANTE HUIT CENTIMES (1 037, 48 €) à la société AMC,
Y ajoutant,
Rejette le surplus des prétentions des parties,
Condamne Monsieur X...aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER LE PRESIDENT