COUR D'APPEL DE BASTIA
Ch. civile A
ARRET du 26 JANVIER 2011
R. G : 09/ 00402 C-CGA
Décision déférée à la Cour : jugement du 26 mars 2009 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G : 08/ 1320
X...
C/
Y...Y...
APPELANTE :
Madame Marie Josée X...née le 09 Janvier 1950 à TOULON (83000) Chez Monsieur Z...... 20228 LURI
représentée par la SCP R. JOBIN ET PH. JOBIN, avoués à la Cour
assistée de Me Laurence GAERTNER DE ROCCA SERRA, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/ 002191 du 03/ 09/ 2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
INTIMEES :
Madame Valérie Y...née le 21 Juillet 1974 à BASTIA (20200) ...13006 MARSEILLE 06
représentée par la SCP Antoine CANARELLI-Jean-Jacques CANARELLI, avoués à la Cour
assistée de Me Antoine RETALI, avocat au barreau de BASTIA
Madame Sylvie Y...née le 21 Juillet 1974 à BASTIA (20200) ...13100 AIX-EN-PROVENCE
représentée par la SCP Antoine CANARELLI-Jean-Jacques CANARELLI, avoués à la Cour
assistée de Me Antoine RETALI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 octobre 2010, devant Madame E...GAY, Président de chambre, et Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller, dont l'un d'eux a été chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame E...GAY, Président de chambre Madame Catherine GIRARD-ALEXANDRE, Conseiller Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Sophie DUVAL.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2010, prorogée par le magistrat par mention au plumitif au 26 janvier 2011.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame E...GAY, Président de chambre, et par Madame Sophie DUVAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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* *EXPOSE DU LITIGE
Monsieur Blaise Y..., marié sous le régime de la séparation de biens avec Madame Marie-Josée X..., est décédé le 10 juillet 1987, en laissant pour lui succéder leurs deux filles, Valérie et Sylvie Y...ainsi que sa veuve, usufruitière légale du quart des biens composant sa succession.
Par acte d'huissier en date du 3 avril 1996, Valérie et Sylvie Y...ont fait assigner leur mère Marie-Josée X...en partage de la succession de feu Blaise Y....
Par ordonnance du 15 janvier 1997, le juge de la mise en état a commis Paul Marie F...en qualité d'expert avec pour mission notamment d'évaluer la masse à partager, de dire si les biens étaient commodément partageables en nature et, le cas échéant, proposer un lotissement pour le tirage au sort avec mise à prix en vue de la licitation.
Cet expert a déposé son rapport le 9 février 1998.
Par jugement du 1er juillet 1999, le Tribunal de grande instance de BASTIA a ordonné le partage de la succession de feu Blaise Y..., homologué le rapport d'expertise de Monsieur F..., dit n'y avoir lieu à statuer en l'état sur la demande de Marie-Josée X...relative aux revenus locatifs, rejeté la demande de cette dernière relative au remboursement de la somme de 20. 000 francs, dit que la somme de 292. 397, 14 francs (44. 475, 66 euros) devait être restituée par la succession à Marie-Josée X..., et renvoyé les parties devant un notaire pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage.
Ce jugement n'a pas été frappé d'appel.
Le 16 avril 2002, Maître Jean-Claude G..., notaire chargé des opérations de liquidation, a dressé un procès-verbal de difficultés aux termes duquel il indique qu'il n'a pu obtenir de Marie-Josée X...la représentation de la somme de 529. 811, 50 francs revenant à ses filles sur le montant des avoirs bancaires restés en sa possession, ce qui rendait, selon lui, impossible les opérations de partage selon les modalités résultant du rapport d'expertise homologué.
Par acte d'huissier en date du 18 juillet 2002, Marie-Josée X...a fait assigner en référé Sylvie et Valérie Y...pour demander la désignation d'un administrateur provisoire avec pour mission d'établir les comptes de la succession depuis 1994, gérer les biens la composant et recouvrer les loyers et le montant de la gérance du fonds de commerce qui auraient été perçus indûment par ses filles.
Par ordonnance en date du 18 septembre 2002, le juge des référés du Tribunal de grande instance de BASTIA a constaté l'accord des parties pour l'application de l'article 811 du code de procédure civile et, ce faisant, a renvoyé l'affaire à l'audience du juge commissaire du 7 novembre 2002.
Par jugement du 3 juin 2004, le Tribunal de grande instance de BASTIA a ordonné la poursuite des opérations de compte, liquidation et partage des biens dépendants de la succession de Blaise Y..., ordonné une expertise complémentaire confiée à Serge H..., débouté Marie-Josée X...notamment de ses demandes en dommages et intérêts et en désignation d'un administrateur provisoire.
L'expert a déposé son rapport le 14 février 2005.
Par jugement du 22 mars 2007, le Tribunal de grande instance de BASTIA a ordonné la poursuite des opérations de compte, liquidation et partage des biens dépendant de la succession de feu Blaise Y..., renvoyé les parties devant Maître I...pour, après avoir calculé les droits de chacune des parties s'il l'estimait nécessaire, y procéder sur le fondement de l'évaluation réactualisée des biens immobiliers et mobiliers contenue dans le rapport d'expertise de Serge H..., et condamné Marie-Josée X...à payer à Sylvie et Valérie Y...la somme de 10. 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la perte du fonds de commerce inclus dans la masse partageable.
Par jugement rectificatif du 19 juillet 2007, le tribunal a ordonné l'insertion au dispositif du jugement du 22 mars 2007 de la mention de l'exécution provisoire.
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Valérie et Sylvie Y...ont fait assigner Marie-Josée X...par acte d'huissier en date du 23 juin 2008 devant le Tribunal de grande instance de BASTIA aux fins d'obtenir l'homologation de l'état liquidatif des biens et droits immobiliers dépendant de la succession de Blaise Y...dressé le 17 avril 2008 par Maître I.... Marie-Josée X...n'a pas comparu avant la clôture de l'instruction de l'affaire le 6 octobre 2008, et sa demande en révocation de l'ordonnance de clôture a été rejetée.
Suivant jugement rendu le 26 mars 2009, le Tribunal de grande instance de BASTIA a homologué l'état liquidatif précité et condamné Marie-Josée X...aux dépens.
Marie-Josée X...a interjeté appel par déclaration déposée le 4 mai 2009.
Par arrêt avant dire droit en date du 14 avril 2010, la Cour a invité les parties à présenter leurs observations sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 22 mars 2007 ayant commis le notaire aux fins de procéder aux opérations de compte, liquidation, et partage sur le fondement de l'évaluation réactualisée des biens immobiliers et mobiliers composant la succession contenue dans le rapport de Serge H....
En ses dernières conclusions en date du 12 mai 2010 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Marie-Josée X...conclut à l'infirmation de la décision déférée et demande en conséquence :
- d'ordonner la poursuite des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de feu Blaise Y...par Maître Jacques I...,
- de dire que l'état liquidatif sera dressé par le notaire conformément au rapport homologué par jugement du Tribunal de grande instance de BASTIA en date du 1er juillet 1999 et que ce dernier devra procéder à une réactualisation des valeurs qui y sont indiquées conformément au jugement rendu le 22 mars 2007,
- de désigner un juge commis pour surveiller les opérations et enjoindre au notaire de rendre compte à ce dernier,
- de condamner solidairement Valérie et Sylvie Y...à lui payer la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par leurs dernières écritures déposées le 27 avril 2010 auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé complet de leurs moyens et prétentions, Valérie et Sylvie Y...demandent de débouter Marie-Josée X...de son appel infondé, et irrecevable, sa demande se heurtant à l'autorité de la chose jugée, et demandent de la condamner au paiement de la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'instruction de l'affaire a été déclarée close par ordonnance du 30 juin 2010, et l'affaire fixée à plaider au 27 septembre 2010 a été renvoyée au 25 octobre 2010 sur la demande de l'appelante.
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MOTIFS DE LA DECISION
En application des dispositions de l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée, qui constitue une fin de non-recevoir, « n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ».
En l'espèce, comme l'a relevé précédemment la Cour en son arrêt du 14 avril 2010, le Tribunal de grande instance de BASTIA a, par jugement du 22 mars 2007 dont le caractère irrévocable n'est pas discuté, définitivement :
- ordonné la poursuite des opérations de compte, liquidation et partage des biens dépendant de la succession de feu Blaise Y...,
- renvoyé en conséquence les parties devant Maître I...pour, après avoir calculé les droits de chacune des parties s'il l'estimait nécessaire, y procéder sur le fondement de l'évaluation réactualisée des biens immobiliers et mobiliers composant la succession contenue dans le rapport d'expertise de Serge H....
Le tribunal a ainsi statué après avoir notamment précisé dans ses motifs que Marie-Josée X...devait être déboutée de sa demande tendant à l'exécution des opérations de partage sur le fondement du rapport déposé par l'expert F...le 9 février 1998, ladite demande étant exactement identique à celle qu'elle formule aujourd'hui devant la Cour.
La demande ainsi formulée devant la Cour se heurte incontestablement à l'autorité de la chose jugée, en l'état de la triple identité de cause, d'objet et de parties, par la décision du 22 mars 2007, et doit en conséquence être déclarée irrecevable.
A titre surabondant, il n'est pas inutile de souligner que Marie-Josée X..., qui développe devant la Cour les mêmes critiques à l'encontre du rapport d'expertise de Serge H...au soutien de sa demande précitée déjà formulée devant le tribunal dans le cadre de l'instance ayant abouti au jugement du 22 mars 2007, n'a pas pour autant interjeté appel de cette précédente décision, devenue irrévocable.
En conséquence de ce qui précède, le jugement sera confirmé.
En l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties l'intégralité des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, lesquels seront supportés par Marie-Josée X....
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Déclare Marie-Josée X...irrecevables en ses demandes en raison de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du Tribunal de grande instance de BASTIA en date du 22 mars 2007 ;
Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de BASTIA en date du 26 mars 2009 ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne Marie-Josée X...aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT