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04/06/2008 | FRANCE | N°444

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile 1, 04 juin 2008, 444


R. G : 07 / 00237 C- DM
Décision déférée à la Cour : jugement du 28 février 2007 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G :

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS
C /
X... D... D... F...

CHAMBRE CIVILE
APPELANT :
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS Pris en la personne de son représentant légal en exercice 64 rue Defrance 94300 VINCENNES

représenté par la SCP R. JOBIN ET PH. JOBIN, avoués à la Cour
assisté de Me Pascale PERREIMOND, avocat au barreau d

e BASTIA substituée par Me Aurélie NAVARI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEES :
Madame Domin...

R. G : 07 / 00237 C- DM
Décision déférée à la Cour : jugement du 28 février 2007 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G :

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS
C /
X... D... D... F...

CHAMBRE CIVILE
APPELANT :
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS Pris en la personne de son représentant légal en exercice 64 rue Defrance 94300 VINCENNES

représenté par la SCP R. JOBIN ET PH. JOBIN, avoués à la Cour
assisté de Me Pascale PERREIMOND, avocat au barreau de BASTIA substituée par Me Aurélie NAVARI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEES :
Madame Dominique Madeleine X... Pris en sa qualité d'administratrice légale de ses enfants mineurs Saveria et Andria A...... 20250 CORTE

représentée par Me Antoine- Paul ALBERTINI, avoué à la Cour
assistée de Me Rose- Marie PROSPERI, avocat au barreau de BASTIA
Madame Marie Antoinette D... épouse E... ... 20250 CORTE

représentée par Me Antoine- Paul ALBERTINI, avoué à la Cour
assistée de Me Rose- Marie PROSPERI, avocat au barreau de BASTIA
Madame Anne Xavière D... ... 20250 CORTE

représentée par Me Antoine- Paul ALBERTINI, avoué à la Cour
assistée de Me Rose- Marie PROSPERI, avocat au barreau de BASTIA
Madame Pauline Marie F... épouse D... ... 20250 CORTE

représentée par Me Antoine- Paul ALBERTINI, avoué à la Cour
assistée de Me Rose- Marie PROSPERI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue en chambre du conseil du 25 avril 2008, devant Monsieur Bernard WEBER, Conseiller, et Monsieur David MACOUIN, Conseiller, chargés du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard WEBER, Conseiller, magistrat du siège présent le plus ancien dans l'ordre des nominations à la Cour, faisant fonction de président de chambre, Madame Marie- Laure PIAZZA, Conseiller Monsieur David MACOUIN, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie- Lucie G....
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 04 juin 2008.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiqué et qui a fait connaître son avis.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé hors la présence du public par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Bernard WEBER, Conseiller, et par Madame Emmanuelle PORELLI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu la décision de la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions Pénales (CIVI) du 28 février 2007 qui :
- déclare recevable et bien fondée la demande d'indemnisation présentée,
- alloue en réparation du préjudice moral :
* à Madame Pauline D... la somme de 18. 500 euros,
* à chacun des enfants mineurs Andria et Saveria D... la somme de 26. 000 euros,
* à Mesdames Anne Xavière D... et Marie Antoinette D... la somme de 6. 500 euros,
le tout sous déduction des provisions versées,
- ordonne une expertise médicale de Madame Dominique X....
Vu l'appel interjeté contre cette décision par le Fonds de Garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions.
Vu les écritures de ce dernier du 7 février 2008 tendant à ce que la Cour :
- dise que Monsieur Noël D... a commis une faute de nature à exclure tout droit à indemnisation,
- infirme la décision entreprise sauf en ce qui concerne le poste du préjudice matériel,
- déboute les consorts D... et X... de leurs demandes tendant à la réparation de leur préjudice,
- condamne ces derniers à rembourser les provisions qu'elle leur a déjà versées,
- dise que les dépens devront rester à la charge du Trésor Public.
Vu les conclusions des consorts D... et de Madame Dominique X... du 16 janvier 2008 demandant à la Cour :
A titre principal,
- de dire que l'ordonnance du président de la CIVI rendue le 30 novembre 2005 a autorité de la chose jugée sur le caractère recevable de la demande d'indemnisation,
A titre subsidiaire,
- de dire que Noël D... et Madame Dominique X... n'ont commis aucune faute excluant leur droit à indemnisation,
- de confirmer la décision entreprise sur le montant des sommes qui leur ont été allouées en réparation de leur préjudice moral,
- d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle rejette la demande d'indemnisation du préjudice matériel,
- d'ordonner une contre- expertise médicale et psychiatrique aux fins d'évaluer les préjudices personnels de Madame X...,
- condamner le fonds de garantie à payer la somme de 2. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens avec application des dispositions de l'article 699 du dit code.
Vu la communication de la procédure au Ministère Public le 9 avril 2008.
*
* *
MOTIFS
Sur la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée
Attendu que les consorts D...- X... opposent aux demandes du Fonds de garantie une fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ;
Qu'il estiment en effet que par son ordonnance du 30 novembre 2005, confirmée par arrêt de la cour du 11octobre 2006, le président de la CIVI a déjà statué sur la question de la recevabilité de leur demande d'indemnisation de telle sorte que le fonds de garantie est mal fondé à soumettre à la cour un nouveau moyen tendant aux mêmes fins ;
Attendu cependant que le moyen tiré de la faute de la victime de nature à exclure ou réduire son indemnisation ne s'analyse pas en un moyen d'irrecevabilité mais touche au fond même du droit à indemnisation ;
Que dès lors cette fin de non- recevoir sera rejetée ;
Sur la faute commise par Noël D...
Attendu que le 31 août 1995, à Corte, Noël D... a été abattu de plusieurs coups de feu alors qu'il circulait à bord du véhicule conduit par sa compagne, Madame Dominique X..., laquelle a été elle- même blessée ;
Que l'information judiciaire a permis d'identifier les auteurs de ces faits comme étant Jean- André I... et Jean- Pierre J..., membres d'un mouvement nationaliste opposé à celui auquel appartenait la victime ;
Qu'elle a permis en outre d'établir que les auteurs de ces faits, après avoir croisé le véhicule conduit par Madame X..., avaient profité de ce que celui- ci se trouvait bloqué par un autre véhicule dans un passage étroit pour avancer armés et faire feu à de nombreuses reprises sur Noël D... et sa compagne ;
Qu'il est apparu en outre que Noël D... avait lui- même fait feu sur ses agresseurs ;
Attendu que le fonds de garantie déduit des circonstances de ces faits une faute de la victime de nature à exclure le droit à indemnisation de ses ayants- droit ;
Qu'il estime en effet que la victime en se déplaçant avec une arme de poing dont elle a fait usage, se savait menacée, et s'était armée en conséquence, dans l'attente d'un règlement de compte ;
Que cet élément et l'absence de demande de protection auprès des services de police démontrent, selon lui, le choix délibéré de Noël D... de régler par la violence un conflit trouvant sa source dans une ou des activités illégales et de s'exposer, en conséquence, délibérément à un risque ;
Attendu que les consorts D...- X... répondent que l'implication de Noël D... dans des activités illégales et l'existence d'un contentieux entre ce dernier et une bande rivale ne reposent sur aucun élément de preuve ;
Qu'ils se fondent en outre sur les éléments de l'information pour invoquer le caractère purement fortuit de la rencontre entre la victime et ses agresseurs ;
Attendu qu'au terme du dernier alinéa de l'article 706-3 du code de procédure pénale la réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime ;
Qu'il appartient au fonds de garantie de démontrer cette faute ;
Qu'en l'espèce l'information a permis d'établir, selon l'ordonnance de renvoi devant la cour d'assises de la chambre de l'instruction de Paris, que Madame X... a tenté, à la demande de son compagnon, et en vain, une manoeuvre de dégagement de son véhicule concomitamment aux premiers coups de feu d'une part et d'autre part que Noël D... n'a tiré avec son arme qu'à titre de riposte ;
Qu'il en ressort que ce dernier n'a pas été à l'origine immédiate de son agression et a tenté d'y échapper ;
Qu'en l'absence d'éléments supplémentaires, la faute de la victime à l'origine de son meurtre ne saurait être présumée à partir de son appartenance au mouvement de l'" A Cuncolta Naziunalista " et du contexte d'affrontements violents entre groupes nationalistes ;
Que de la même manière, le port prohibé d'une arme, pour répréhensible qu'il soit ne saurait présumer de la part de Noël D... le choix délibéré de régler par la violence un contentieux avec un groupe rival ;
Qu'il apparaît au contraire que la rencontre entre les victimes et leur agresseurs a été purement fortuite ;
Qu'en outre aucune pièce des débats ne permet de confirmer l'existence préalable de menaces à l'encontre de Noël D... ;
Qu'en conséquence la preuve d'une faute imputable à Noël D... de nature à exclure ou réduire le droit à indemnisation de ses ayants- droit n'est pas établie ;
Que le premier jugement sera dès lors confirmé de ce chef ;
Sur le préjudice matériel
Attendu que les consorts D...- X... sollicitent la réparation du préjudice matériel résultant de la destruction sur réquisition du Procureur de la République du véhicule à bord duquel les victimes se trouvaient au moment de l'agression et qui avait été placé sous scellé ;
Qu'ils prétendent à l'appui de leur demande que celle- ci n'est que l'accessoire des demandes d'indemnisation consécutives aux préjudices subis par elles ;
Attendu que l'article 706-3 ne prévoit la réparation que des seuls dommages résultant des atteintes à la personne ;
Que la réparation du préjudice matériel n'entre pas dans les prévisions de cet article peu important à cet égard son caractère accessoire ;
Que la décision attaquée, en ce qu'elle a rejeté cette demande sera en conséquence confirmée de ce chef par substitution de motifs ;
Sur la demande de contre- expertise
Attendu que les experts désignés par la décision attaquée ont rédigé leur rapport le 15 mai 2007 ;
Qu'il ressort de cette expertise que ces derniers ont répondu clairement et sans ambiguïté aux questions qui leur étaient posées et qu'aucun dire n'a été formulé par Madame X... ;
Que la simple insatisfaction d'une partie quant aux conclusions d'un expert ne saurait servir de fondement à une demande de contre- expertise ;
Qu'en conséquence la demande formée en ce sens par les consorts D...- X... sera rejetée ;
Attendu qu'aucune partie n'a conclu sur l'évaluation des préjudices de Madame X... ;
Que l'évocation est une simple faculté que la cour n'entend pas exercer compte tenu de la nature, de l'importance des conséquences dommageables et de la nécessité de préserver aux parties le droit au double degré de juridiction ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Attendu qu'il est équitable de condamner le Fonds de Garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions à payer aux consorts D...- X... la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Sur les dépens
Attendu que les frais exposés devant les juridictions de première instance et d'appel statuant en matière d'indemnisation des victimes d'infractions sont à la charge du Trésor Public conformément aux dispositions des articles R 91 et R 92 du code de procédure pénale.
*
* *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de l'ordonnance du président de la Commission d'Indemnisation de Victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions du 30 novembre 2005.
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.
Y ajoutant :
Rejette la demande de contre- expertise médicale et psychiatrique de Madame Dominique X....
Condamne le Fonds de Garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions à payer aux consorts D...- X... la somme globale de CINQ CENTS EUROS (500 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que les dépens sont à la charge du Trésor Public.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT, FEUILLE DE SUIVI APRES ARRET

07 / 00237 Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours arrêt du QUATRE JUIN DEUX MILLE HUIT
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS Rep / assistant : la SCP R. JOBIN ET PH. JOBIN (avoués à la Cour) Rep / assistant : Me Pascale PERREIMOND (avocat au barreau de BASTIA)

C /
X... Rep / assistant : Me Antoine- Paul ALBERTINI (avoué à la Cour) Rep / assistant : Me Rose- Marie PROSPERI (avocat au barreau de BASTIA) D... Rep / assistant : Me Antoine- Paul ALBERTINI (avoué à la Cour) Rep / assistant : Me Rose- Marie PROSPERI (avocat au barreau de BASTIA) D... Rep / assistant : Me Antoine- Paul ALBERTINI (avoué à la Cour) Rep / assistant : Me Rose- Marie PROSPERI (avocat au barreau de BASTIA) F... Rep / assistant : Me Antoine- Paul ALBERTINI (avoué à la Cour) Rep / assistant : Me Rose- Marie PROSPERI (avocat au barreau de BASTIA)


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 444
Date de la décision : 04/06/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de Grande Instance de BASTIA, 28 février 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2008-06-04;444 ?
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