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14/05/2008 | FRANCE | N°146

France | France, Cour d'appel de Bastia, Ct0268, 14 mai 2008, 146


Anne Marie X... C / SAS U CORSU---------------------- Décision déférée à la Cour du : 20 septembre 2007 Conseil de Prud'hommes de BASTIA 07 / 44------------------ CD

CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :

Madame Anne Marie X...... 20290 LUCCIANA Représentée par Me Pasquale VITTORI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

SAS U CORSU, prise en la personne de Monsieur Erwan Y..., directeur d'édition, ... 20221 CERVIONE Représentée par Me Angèle Josée BRESCIANI- PAOLI, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

L'

affaire a été débattue le 25 Mars 2008 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur MU...

Anne Marie X... C / SAS U CORSU---------------------- Décision déférée à la Cour du : 20 septembre 2007 Conseil de Prud'hommes de BASTIA 07 / 44------------------ CD

CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :

Madame Anne Marie X...... 20290 LUCCIANA Représentée par Me Pasquale VITTORI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

SAS U CORSU, prise en la personne de Monsieur Erwan Y..., directeur d'édition, ... 20221 CERVIONE Représentée par Me Angèle Josée BRESCIANI- PAOLI, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

L'affaire a été débattue le 25 Mars 2008 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur MUCCHIELLI, Président de Chambre Madame DEZANDRE, Conseiller Monsieur MACOUIN, Conseiller

qui en ont délibéré.
GREFFIER :
Monsieur DALESSIO, lors des débats.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mai 2008

ARRET

Contradictoire Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe. Signé par Monsieur MUCCHIELLI, Président de Chambre et par Monsieur DALESSIO, greffier présent lors de la mise à disposition de la décision.

*** FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS

Madame X... Anne- Marie a été embauchée par la S. A. S U CORSU en qualité d'attachée commerciale (agent de maîtrise coefficient 300) selon contrat à durée indéterminée à effet du 6 janvier 2004.
Elle a saisi la juridiction prud'homale le 19 février 2007 d'une demande en requalification de son contrat en contrat de VRP avec toutes conséquences de droit et, par jugement du 20 septembre 2007, le Conseil de prud'hommes de Bastia :
" Ordonne l'application du statut de VRP à compter du 1er janvier 2008, Déboute Madame X... de toutes autres demandes, Déboute la S. A. S U CORSU de ses demandes reconventionnelles, Dit que chaque partie conservera ses frais de procédure ".

Mme X... a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions écrites du 21 mars 2008 réitérées à l'audience, Mme X... demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et :- ordonner l'application rétroactive à la date de son embauche du statut de VRP sous astreinte de 500 euros par jour de retard et la requalification du contrat de travail,- dire et juger que le secteur de prospection exclusif de Mme X... est le secteur BALAGNE GALERIA (soit Corte- Vizzavona- Ponte Leccia- sortie Casamozza- Folleli- Moriani- Aleria- Mavela),- ordonner la désignation d'un expert- comptable aux fins de calculer son préjudice au titre du rappel de salaires et congés payés et au titre des cotisations complémentaires,- ordonner la régularisation des fiches de paie sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- condamner l'employeur à lui verser 15 000 euros à titre de dommages et intérêts, 13 877, 19 euros correspondant à la perte de janvier à mars 2008 et subsidiairement celle de 77 028, 74 euros correspondant à la perte financière pour l'année 2008, et 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions écrites du 25 mars 2008 réitérées à l'audience, la S. A. S U CORSU demande la confirmation du jugement en ce qu'il fixe la mise en application du statut de VRP à compter du 1er janvier 2008 sans rétroactivité, constater que ce statut n'est pas obligatoirement applicable en l'absence de secteur exclusif de prospection attribué à la salariée, rejeter les autres demandes de Mme X... et la condamner à payer 10 000 euros au titre du préjudice matériel et moral et celle de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en faisant essentiellement valoir que la salariée n'a pas de secteur exclusif de prospection.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'application du statut de VRP
Le contrat de travail qui a pour objet la représentation et qui détermine la nature des marchandises ou prestations de services offertes à la vente ou l'achat, la région dans laquelle doit s'exercer l'activité ou les catégories de clients à visiter, ainsi que le taux des rémunérations est un contrat de représentant statutaire (VRP).
Ainsi, l'existence d'un secteur fixe de prospection est un élément essentiel du contrat de VRP.
En l'espèce, le contrat écrit entre les parties stipule à l'article 3- Fonctions et attributions : Les attributions ne comportent pas la concession d'un secteur géographique et d'un portefeuille clients permanent. Mme X... pourra se voir confier des zones et des clients différents en fonction des besoins de la société. Elle ne peut prétendre à aucun droit de suite sur les clients qui ont passé un ordre par son entremise.
Il ressort des pièces du dossier que, dans la pratique, l'employeur a fourni au début de chaque année à la salariée une liste nominative de clients à visiter aux fins de prise de commandes, et l'étude de ces listes montre des variations sensibles de portefeuille d'une année sur l'autre, notamment en
termes de domiciliation géographique des clients, de sorte qu'il ne peut pas s'en déduire l'attribution à Mme X... d'un secteur géographique fixe et précisément délimité.
Ainsi, l'affirmation de la salariée selon laquelle " lors de son embauche le 6 janvier 2004, il lui a été attribué un portefeuille client précis avec comme secteur géographique de prospection BALAGNE GALERIA (soit Corte- Vizzavona- Ponte Leccia- sortie Casamozza- Folleli- Moriani- Aleria- Mavela) " non seulement est directement contredite par les termes du contrat mais encore ne repose sur aucun élément de fait permettant d'établir que l'exercice de l'activité de représentation aurait été de fait sectorisée au cours de la relation contractuelle.
On remarque à cet égard que les communes qu'elle cite entre parenthèses pour expliciter la délimitation du secteur " BALAGNE GALERIA " prétendument attribué sont toutes situées en dehors de la Balagne (dont fait partie la commune de Galeria), ce qui ne conforte pas son argumentation.
Mme X... ne peut pas non plus se prévaloir utilement d'une note du 20 mars 2000 émanant de la société JFC adressée " à tous les commerciaux " indiquant : " Un secteur de prospection vous a été attribué lors de votre embauche au sein de notre société " alors que le contrat de travail litigieux a été conclu avec la S. A. S U CORSU près de quatre ans plus tard.
Par ailleurs, aucune détermination de secteur en termes de catégorie de clientèle n'est revendiquée ni même identifiable, et le caractère incertain et fluctuant du périmètre de prospection de Mme X... est confirmé par le fait qu'à partir de septembre 2006 où la S. A. S U CORSU souhaite pouvoir appliquer à l'ensemble de ses commerciaux le statut de VRP, elle se heurte à la difficulté de délimiter le secteur de chacun, certains des intéressés se refusant à voir limiter leur zone dintervention. Le délégué du personnel, ayant accepté une mission de concertation aux fins d'harmonisation des secteurs entre les salariés concernés, relevait ainsi dans une lettre du 17 janvier 2007 à la direction " l'anarchie des secteurs en Haute Corse ".
Il convient d'ailleurs de rappeler que la saisine du Conseil de prud'hommes par Mme X... est postérieure à ces événements et que le Conseil de prud'hommes, après avoir constaté l'absence de secteur permanent et géographiquement délimité pour chacun des commerciaux, indiquait que " le statut de VRP ne sera appliqué qu'une fois les secteurs redéfinis et les portefeuilles redistribués ".

Il est néanmoins constant qu'à la date de la clôture des débats devant la Cour, les parties n'ont pas trouvé d'accord sur la délimitation d'un secteur.

Dès lors que Mme X... manque à établir qu'elle exerçait effectivement son activité sur un secteur déterminé de prospection, soit à compter de la date de son embauche, comme elle le demande, soit à compter du 1er janvier 2008 en application de la décision du Conseil de prud'hommes, il y a lieu de constater qu'elle ne relève pas obligatoirement du statut légal de VRP.
Cependant, il convient de tenir compte de ce que la S. A. S U CORSU sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il fixe au 1er janvier 2008 la mise en application du statut de VRP revendiqué par Mme X....

Sur le statut de cadre

Mme X..., embauchée en qualité d'agent de maîtrise assimilé cadre (article 4 bis de l'accord du 14 mars 1947) en fonction de la convention collective applicable à l'entreprise a régulièrement cotisé à la caisse de retraite complémentaire correspondante, ainsi qu'il ressort des bulletins de salaire versés aux débats.
Cependant, elle ne justifie pas de la qualité de VRP cadre qu'elle revendique, étant relevé qu'est considéré comme ayant la qualification de cadre (article 4 de l'accord du 14 mars 1947) le VRP travaillant pour un seul employeur et remplissant au moins un des trois critères suivants :- avoir une formation technique, administrative ou commerciale équivalente à celle des cadres de l'entreprise et exercer des fonctions nécessitant la mise en oeuvre des connaissances acquises,- exercer par délégation de l'employeur un commandement sur d'autres représentants,- exercer des fonctions impliquant initiative, responsabilité et pouvoir être considéré comme ayant délégation du chef d'entreprise. Elle sera donc déboutée de la demande de rectification des bulletins de salaire et cotisations sociales formée de ce chef.

Sur la demande d'expertise

Mme X... sollicite l'organisation d'une mesure d'expertise " aux fins de calculer son préjudice au titre du rappel de salaires et congés payés ", sans pour autant former de

demande chiffrée en rappel de salaires et congés payés et sans démontrer ni même alléguer sérieusement ne pas avoir été remplie de ses droits à l'un ou l'autre de ces titres.

Elle se borne en effet à faire référence à une expertise ordonnée par arrêt de la Cour du 28 mars 2007, statuant sur renvoi après cassation dans un litige distinct ayant opposé la S. A. S U CORSU à deux autres salariés de l'entreprise embauchés en 1997 aux termes d'un contrat de travail différent du sien, stipulant notamment que le taux de commission intégrait les congés payés, expertise déposée postérieurement à la clôture des débats devant la Cour et sur laquelle il n'a pas encore été statué.
Or, dans le cas de l'espèce, l'analyse des bulletins de salaire versés aux débats ne fait pas ressortir d'irrégularité ou de méconnaissance par l'employeur des droits de la salariée, d'une part en ce qui concerne les indemnités de congés payés au regard notamment de la règle du dixième invoquée dans les écritures de la salariée sans aucun élément ni calcul à l'appui, et d'autre part en matière de salaire, alors que Mme X... n'établit ni même ne prétend que l'employeur ne lui aurait pas versé les commissions prévues contractuellement.
Il convient donc, en application de l'article 146 du code de procédure civile, de rejeter la demande d'expertise.

Sur les autres demandes

La demande d'indemnisation financière pour l'ensemble de l'année 2008, formée le 21 mars de cette année, est manifestement irrecevable.
Même à limiter la demande relative à une perte de salaire de janvier à mars 2008 aux seuls mois écoulés de janvier et février, force est de constater qu'elle n'est pas fondée sur une absence ou une insuffisance de paiement de commissions sur des ordres pris, conformément aux dispositions contractuelles, mais sur un prétendu manque à gagner découlant de la définition du portefeuille clientèle pour l'année 2008 (annuaire 2009), aligné sur un secteur géographique de prospection précisément délimité à compter de 2008, suite à la décision du Conseil de prud'hommes, ce qui a pour effet de priver la salariée de la prospection de la clientèle hors de sa zone.
Or, l'application du statut de VRP qu'elle revendique est nécessairement liée à la détermination d'un secteur géographique.
De plus, l'employeur établit par les pièces qu'il produit, et ce n'est pas sérieusement contesté par l'intéressée, que le portefeuille du secteur attribué à Mme X... pour l'année 2008 correspond à un chiffre d'affaires potentiel comparable à celui qu'elle a réalisé en 2007 toutes zones confondues, de sorte que la salariée ne subit aucun préjudice.
Il convient d'observer à cet égard que le calcul versé au dossier par Mme X... à l'appui de sa demande ne permet pas d'établir un rapport effectif avec des sommes perçues ou perdues à titre de commissions au cours de la période concernée.
Mme X... sera donc déboutée de sa demande relative à une perte de salaire non advenue ni démontrée au cas d'espèce.
Enfin, il résulte de ce qui précède que l'employeur n'a pas méconnu les droits de la salariée, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'accueillir la demande en dommages et intérêts pour le préjudice moral qui en serait résulté.
La S. A. S U CORSU sera également déboutée de sa demande en dommages et intérêts, étant relevé que la salariée n'a fait qu'user des voies de droit que la loi lui confère, qu'il n'est pas démontré d'intention de nuire et que l'employeur n'établit pas le préjudice dont il demande réparation.

PAR CES MOTIFS

L A C O U R
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
Constate que l'employeur déclare vouloir appliquer le statut de VRP à Mme X... à compter du 1er janvier 2008 et que le dispositif du jugement attaqué n'est pas critiqué de ce chef,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Déboute les parties de toutes autres demandes,

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme X... aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Ct0268
Numéro d'arrêt : 146
Date de la décision : 14/05/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bastia, 20 septembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2008-05-14;146 ?
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