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02/04/2008 | FRANCE | N°297

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile 1, 02 avril 2008, 297


ARRET No

du 02 AVRIL 2008
R. G : 05 / 00382 R- CGA
Décision déférée à la Cour : jugement du 08 mars 2005 Tribunal d'Instance d'AJACCIO R. G : 02 / 490

ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DE PORTIGLIOLO LES TERRES MARINES

C /
X... Y...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DEUX AVRIL DEUX MILLE HUIT
APPELANTE :
ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DE PORTIGLIOLO LES TERRES MARINES Prise en la personne de son représentant légal en exercice C / SARL SECIC, Syndic 34 Cours Napoléon 20000 AJACCIO

représentée par la SCP R. JOB

IN ET PH. JOBIN, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me Jean- François CASALTA, avocat au barreau d'AJACCIO
IN...

ARRET No

du 02 AVRIL 2008
R. G : 05 / 00382 R- CGA
Décision déférée à la Cour : jugement du 08 mars 2005 Tribunal d'Instance d'AJACCIO R. G : 02 / 490

ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DE PORTIGLIOLO LES TERRES MARINES

C /
X... Y...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
DEUX AVRIL DEUX MILLE HUIT
APPELANTE :
ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DE PORTIGLIOLO LES TERRES MARINES Prise en la personne de son représentant légal en exercice C / SARL SECIC, Syndic 34 Cours Napoléon 20000 AJACCIO

représentée par la SCP R. JOBIN ET PH. JOBIN, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me Jean- François CASALTA, avocat au barreau d'AJACCIO
INTIMES :
Monsieur André X... ...93160 NOISY LE GRAND

représenté par la SCP RIBAUT- BATTAGLINI, avoués à la Cour
assisté de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau D'AJACCIO

Madame Caroline Y... épouse X... ...93160 NOISY LE GRAND

représentée par la SCP RIBAUT- BATTAGLINI, avoués à la Cour
assistée de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau D'AJACCIO
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 février 2008, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre MUCCHIELLI, Président de Chambre Madame Jeanne Marie CHIAVERINI, Conseiller Madame Catherine GIRARD- ALEXANDRE, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Emmanuelle PORELLI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 02 avril 2008

ARRET :

Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Pierre MUCCHIELLI, Président de Chambre, et par Madame Emmanuelle PORELLI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* * EXPOSE DU LITIGE :

Par jugement en date du 8 mars 2005, le tribunal d'instance d'AJACCIO a déclaré recevable l'action en paiement de charges de copropriété engagée par l'Association Syndicale Libre LES TERRES MARINES à PORTIGLIOLO à l'encontre des époux X..., mais l'en a déboutée aux motifs que Monsieur X... a toujours refusé d'adhérer à cette association syndicale et qu'il ne peut y avoir d'adhésion de plein droit par le seul effet de l'acquisition d'un bien du lotissement.

Suivant déclaration du 18 avril 2005, l'ASL DE PORTIGLIOLO LES TERRES MARINES a interjeté appel de cette décision.

Le Conseiller de la mise en état, saisi par les époux X... a, par ordonnance du 9 novembre 2006, rejeté les demandes de ces derniers tendant d'une part à voir dire qu'il existe une question préjudicielle concernant l'existence ou la non existence de l'ASL et ordonner en conséquence le sursis à statuer jusqu'à la décision à intervenir du Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO sur l'action engagée par une association de défense des copropriétaires Les Terres Marines tendant à voir prononcer la dissolution de l'ASL, et d'autre part à se dessaisir au profit du Tribunal de Grande Instance en raison de la connexité entre les deux litiges.

Cette même ordonnance a déclaré irrecevables les fins de non- recevoir soulevées par les époux X... tenant à la situation matrimoniale de Monsieur X..., à la teneur même de la demande en paiement de charges de copropriété et au défaut de capacité d'ester en justice de cette association, ainsi que l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance et des conclusions signifiées devant la Cour.

En ses dernières conclusions en date du 8 février 2006, l'ASL DU LOTISSEMENT DE PORTIGLIOLO- LES TERRES MARINES représentée par son administrateur provisoire, conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré sa demande recevable, et à son infirmation en ce qu'il l'en a débouté, et demande de dire que les époux X... sont bien membres de l'association syndicale libre et de les condamner à lui payer la somme de 5. 925, 82 euros, à parfaire au jour du prononcé de la décision, au titre des charges dues à l'association, outre la somme de 2. 000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

En réponse à la fin de non- recevoir tirée du défaut de capacité d'ester en justice soulevée par les époux X..., et à l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance en découlant, elle fait valoir qu'un extrait de l'acte d'association a été publié dans un journal d'annonces légales le 20 février 2004, qu'une assemblée constitutive a bien eu lieu le 29 décembre 1992 après convocation des colotis, et que le refus de l'autorité préfectorale d'insertion au recueil des actes administratifs de la préfecture n'a aucune incidence sur la régularité de sa constitution et sur sa capacité à ester en justice.

Elle ajoute que le Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO s'est déjà prononcé sur la régularité de sa constitution aux termes d'un jugement du 26 avril 2004.

Sur le fond, elle fait valoir que contrairement à ce que soutiennent les époux X..., le contrat d'association leur est parfaitement opposable, en faisant valoir que le consentement peut résulter de l'acquisition d'une parcelle du lotissement dès lors que le cahier des charges prévoit que tout les propriétaires présents et à venir des terrains cédés feront partie de droit des ASL de par leur acquisition, comme c'est le cas en l'espèce.

En leurs dernières conclusions du 15 janvier 2007, les époux X... concluent à titre principal à l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré la demande recevable, et demandent à la fois de déclarer l'ASL irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité d'ester en justice et de dire nuls l'acte introductif d'instance et les conclusions signifiées devant la Cour.

Ils font valoir essentiellement que les statuts dont il est fait état ne peuvent être considérés comme des statuts constitutifs d'une ASL, qu'en toute hypothèse, les formalités qu'ils prévoient pour la constitution de l'ASL n'ont jamais été accomplies, et qu'ils ne leur sont pas opposables, dès lors qu'il n'en est pas fait mention dans leur acte d'acquisition.

Ils ajoutent que l'assemblée générale du 29 décembre 1992 ne peut être considérée comme constitutive de l'ASL, s'étant bornée à nommer un syndic professionnel et à désigner un Président, et ce à la majorité des voix et non à l'unanimité.

Ils soulignent que l'insertion dans un journal d'annonces légales fait état de faits erronées, dès lors qu'il n'y a pas eu consentement unanime des propriétaires et que les conditions de fond de constitution d'une association ne sont en conséquence pas réunies.

Enfin, ils font valoir qu'il n'y a pas autorité de la chose jugée par le jugement du Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO du 26 avril 2004, et ce d'autant que cette décision ne s'est pas prononcée sur la régularité de la constitution de l'ASL.

A titre subsidiaire, ils demandent de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'ASL de ses demandes, en faisant valoir que le prétendu contrat d'association leur est inopposable, dès lors que leur acte de vente ne contient aucune disposition quant à l'appartenance à une ASL qui se serait constituée ou qui devait l'être, ne comporte pas en annexe le cahier des charges, et ne mentionne pas leur consentement comme exigé par l'article 5 de la loi du 21 juin 1865 et rappelé dans les statuts.

Reconventionnellement, ils demandent de condamner l'ASL à leur payer la somme de 10. 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

*
* *

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la capacité d'ester en justice de l'ASL DU LOTISSEMENT DE PORTIGLIOLO- LES TERRES MARINES :

En vertu des dispositions combinées des articles 117, 118 et 119 du Code de Procédure Civile, le défaut de capacité d'agir en justice constitue une irrégularité de fond pouvant affecter un acte de procédure, qui peut être proposé en tout état de cause et doit être accueillie sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief et alors même que la nullité ne résulterait d'aucune disposition expresse.

L'article 5 de la loi du 21 juin 1865, abrogée par l'ordonnance no2004- 632 du 1er juillet 2004 qui reprend les mêmes dispositions en son article 7, mais qui demeure applicable en l'espèce eu égard à la date de réalisation du lotissement et de celle prétendue de la constitution de ladite association syndicale, dispose que les associations syndicales libres se forment par le consentement unanime des associés qui doit être constaté par écrit.

En outre, les articles 3, 6 et 7 de la loi précitée disposent que les associations syndicales libres ne peuvent ester en justice par leurs syndics que si un extrait de l'acte d'association a été publié dans le délai d'un mois à partir de sa date dans un journal d'annonces légales de l'arrondissement, ou s'il n'en existe aucun, dans l'un des journaux du département.

L'article 6 précise que l'acte d'association, soit les statuts, spécifie le but de l'entreprise, règle le mode d'administration de la société et fixe les limites du mandat confié aux administrateurs et syndics, détermine les voies et moyens pour subvenir à la dépense, ainsi que le mode de recouvrement des cotisations.

En l'espèce, l'ASL LES TERRES MARINES soutient en premier lieu qu'un extrait des statuts déposés le 30 novembre 1981 au rang des minutes de Maître Jean- Etienne C..., notaire à AJACCIO, a été publié dans un journal d'annonces légales, LE JOURNAL DE LA CORSE, le 20 février 2004, et qu'une assemblée constitutive a bien eu lieu le 29 décembre 1992.

Toutefois, outre qu'il apparaît difficile que des statuts aient pu être établis onze années avant même que l'assemblée générale des propriétaires constitutive de l'ASL se soit tenue, il convient d'observer que les statuts dont se prévaut l'ASL LES TERRES MARINES ne peuvent être considérés comme constitutifs de cette association mais plutôt comme des statuts cadres établis par le lotisseur, sans portée juridique quant à la constitution réelle de l'association.

Ainsi, l'article 1. 02 prévoit que l'association sera constituée par les soins du lotisseur dès que 86 lots auront été vendus, ce qui démontre que ces statuts ne peuvent être les statuts constitutifs.

De plus, l'article 7 prévoit un certain nombre de formalités obligatoires et substantielles pour la constitution de l'association, soit la tenue d'une assemblée constitutive après convocation de celle- ci par les soins du lotisseur, ou à défaut d'acquéreurs ou de la commune, par insertion dans un journal d'annonces légales des lieu et date de la réunion portée à la connaissance des intéressés par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, l'établissement d'un acte notarié constatant le fonctionnement de l'association syndicale et sa publication au Bureau des Hypothèques, et la publication d'un extrait de l'acte d'association, toutes formalités dont l'accomplissement n'est aucunement démontré en l'espèce.

Sur ce point, il importe d'observer que l'assemblée générale prétendument constitutive en date du 29 décembre 1992, ne comportait nullement pour ordre du jour la constitution de l'ASL et l'approbation des statuts de celle- ci, et a eu pour seul objet de désigner un syndic et le bureau provisoire de l'association syndicale.

Dès lors, la publication invoquée par l'ASL LES TERRES MARINES ne peut avoir eu pour effet de lui conférer la personnalité juridique et la capacité d'ester en justice, dès lors qu'elle ne pouvait suppléer à l'absence de contrat d'association et à l'adhésion unanime des propriétaires, éléments nécessaires à la constitution de l'association.

L'ASL LES TERRES MARINES fait valoir en second lieu que la régularité de sa constitution résulterait d'un jugement du Tribunal de Grande instance d'AJACCIO rendu le 26 avril 2004.

Cependant, il convient de souligner que cette décision, qui ne peut avoir autorité de la chose jugée à l'égard des époux X... qui n'étaient pas parties à l'instance, n'a en outre nullement statué sur la régularité de la constitution de l'ASL et sur sa capacité d'ester en justice.

Dès lors, il apparaît que l'ASL LES TERRES MARINES n'ayant pas été constituée régulièrement et l'acte d'association, inexistant, n'ayant pu être publié conformément aux articles 3, 6 et 7 précités, celle- ci est dépourvue de personnalité morale ainsi que de la capacité d'agir en justice, de sorte que les assignations introductives d'instance en date des 21 août 2002 et 9 septembre 2004 délivrées aux époux X... doivent être déclarées nulles.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive :

L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, les époux X..., auxquels incombe la charge de la preuve de l'exercice abusif de l'action en justice, ne rapportent nullement cette preuve, de sorte qu'ils seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile :

Il serait inéquitable en l'espèce de laisser à la charge des époux X... l'intégralité des sommes par eux exposées à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens qui seront mis à la charge de l'ASL LES TERRES MARINES, ce qui justifie la condamnation de celle- ci au paiement de la somme de 1. 500 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

*
* *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Infirme le jugement du tribunal d'instance d'AJACCIO en date du 8 mars 2005 en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant débouté Monsieur et Madame X... de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,

Statuant de nouveau,
Déclare nulle l'assignation introductive d'instance délivrées aux époux X... en date des 21 août 2002 et 9 septembre 2004 pour défaut de capacité d'ester en justice de l'ASL LES TERRES MARINES,
Condamne l'ASL LES TERRES MARINES à payer à Monsieur et Madame X... la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1. 500 euros) sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamne l'ASL LES TERRES MARINES aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT, FEUILLE DE SUIVI APRES ARRET

05 / 00382 Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours arrêt du DEUX AVRIL DEUX MILLE HUIT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 297
Date de la décision : 02/04/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance d'Ajaccio, 08 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2008-04-02;297 ?
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