ARRET No-----------18 Septembre 2007------------06 / 00203------------COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE C / Pierrot Antoine Z..., COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT AUX EXPROPRIATIONS--------------Décision déférée à la Cour du : 16 mai 2006 Juge de l'expropriation de BASTIA 05 / 386
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS
ARRET DU : DIX HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT
APPELANTE :
COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE Direction Routes Haute Corse-BF-8, Bd Benoîte Danesi 20411 BASTIA CEDEX Représentée par la SCP MUSSO DOMINIQUE ET MUSSO CATHERINE, avocats au barreau de PARIS
INTIME :
Monsieur Pierrot Antoine Z... ... 20222 BRANDO Représenté par Me Jean FILIPPI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE
Monsieur EMMANUELLI, Président de Chambre Mme PIAZZA, Conseiller, suppléant en remplacement du titulaire empêché, M. LEJEUNE, Juge aux Expropriations de la Corse du Sud
GREFFIER :
Monsieur DALESSIO, lors des débats.
COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT :
Mme MIRA, Inspectrice des Impôts,
DEBATS :
A l'audience publique du 15 Mai 2007
ARRET Nopage 2
ARRET
Contradictoire Prononcé et signé par Monsieur EMMANUELLI, Président de Chambre à l'audience publique du 18 Septembre 2007 date indiquée à l'issue des débats et signé par Monsieur DALESSIO, greffier présent lors du délibéré.
***EXPOSE DU LITIGE :
Par jugement No 05 / 0386, en date du 16 mai 2006, rendu suite à une ordonnance d'expropriation prononçant au profit de la Collectivité Territoriale de Corse, l'expropriation pour cause d'utilité publique des immeubles portions d'immeubles et droits réels immobiliers nécessaires à l'aménagement d'une voie nouvelle reliant les communes de BASTIA et de FURIANI, situés les territoires de ces communes, le juge de l'expropriation du département de la Haute Corse a fixé à la somme de 159. 686 euros le montant de l'indemnité de dépossession dûe à Monsieur Z... Pierrot, ladite indemnité comprenant une indemnité principale de 144. 260 euros et une indemnité de remploi de 15. 426 euros.
La Collectivité territoriale de Corse a, par lettre recommandée expédiée le 29 juin 2006, reçue au secrétariat greffe de la Cour d'appel le 30 juin 2006, interjeté appel de cette décision.
Par mémoire déposé le 30 août 2006, il est soutenu que la Collectivité territoriale ayant décidé de créer une voie nouvelle pour assurer la liaison de la route départementale 264 au croisement du chemin d'Agliani à BASTIA, un arrêté du 08 mars 2004 pris par le préfet de la Haute Corse a déclaré d'utilité publique le projet de création de voie et un second arrêté en date du 18 février 2005 a déclaré cessibles les terrains nécessaires à la réalisation. Aucun de ces actes n'a fait l'objet de recours ni de pourvoi.
La date de référence aux termes de l'article L. 13-15 du Code de l'expropriation se situe un an avant l'arrêté d'ouverture d'enquête publique. Ainsi cette enquête étant intervenue le 21 août 2003, la date de référence à prendre en considération est celle du 21 août 2002. La parcelle en cause No BM 143 est située en zone ND du plan d'occupation des sols de la ville de BASTIA ; Sur cette zone, à protéger en raison de la qualité du paysage et des éléments naturels qui la composent, ne sont autorisés que les équipements publics d'infrastructure.
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C'est à tort que le premier juge a qualifié les terrains expropriés de " terrains limitrophes de zones urbanisées et à proximité immédiate de ces zones ". Il résulte de l'article L. 13-15-II-b du Code de l'expropriation que constituent des terrains à bâtir les parcelles situées à l'intérieur des zones urbanisées et à proximité d'un secteur urbanisé. Il n'a pas été recherché par le juge de l'expropriation si les réseaux présents sur les lieux ou proximité étaient d'une capacité suffisante. Le développement futur de la ville de BASTIA et les modifications annoncées prévues au POS constituent des changements de valeur, antérieurs à la date de référence dont il ne peut être tenu compte.
Il est demandé à la Cour de réformer le jugement entrepris, de fixer le prix des terrains expropriés sur la base de 7,62 € le m ², de fixer l ‘ indemnité due à Monsieur Z... Pierrot à la somme de 61. 459 € remploi compris.
Monsieur Z... Pierrot, intimé, par mémoire régulièrement déposé le 29 septembre 2006, conclut à titre principal à l'irrecevabilité de l'appel et du mémoire de la Collectivité Territoriale de Corse et à titre subsidiaire à la confirmation de la décision.
Il est rappelé que la parcelle BM 143 se situe actuellement en zone non constructible, le changement de classement a été opéré de façon inopinée le 05 décembre 2001 ; Que la Collectivité Territoriale par lettre du 21 décembre 1999 avait pris acte du caractère constructible d'un ensemble de parcelles comprises en zone 2Na ; Que le déclassement postérieur constitue une restriction qui procède de la seule intention dolosive de l'autorité expropriante destinée à minimiser le coût de l'opération. Que le terrain inexactement décrit pas l'administration comme étant en pente, ne présente qu'une légère déclivité et offre une large vue sur la façade maritime.
Le Commissaire du Gouvernement conclut le 20 octobre 2006 à la confirmation du jugement.
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ARRET Nopage 4
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel
Attendu qu'il soutenu par les intimées que le recours serait tardif, qu'il n'est pas justifié d'une habilitation régulière du président de l'exécutif de la Collectivité Territoriale de Corse pour agir en justice, que le mémoire serait parvenu au greffe de la Cour après expiration des délais légaux.
Attendu que selon l'article R. 13-47 du Code de l'expropriation, l'appel contre les décisions rendues en matière d'expropriation est interjeté par les parties ou par le commissaire du Gouvernement dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, par acte extrajudiciaire ou par déclaration faite ou adressée par pli recommandé, au greffe de la cour.
Attendu que selon l'article 668 Nouveau Code de procédure civile la date de notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition.
Attendu que l'appel qui a été notifié par lettre recommandée expédiée le 29 juin 2006, doit à la lumière de ces textes, être considéré comme recevable.
Attendu que selon délibération en date du 24 juillet 2006, dont un exemplaire est versé aux débats, l'Assemblée de Corse a autorisé le président de l'exécutif à interjeter appel, à la suite de différents jugements rendus par le juge de l'expropriation.
Attendu que le jugement rendu au profit des M.Z... est spécialement visé par cette délibération.
Attendu que l'autorisation donnée postérieurement à l'introduction de l'action peut être produite à tout moment jusqu'au jour du jugement.
Attendu que par la délibération de son assemblée du 24 juillet 2006 l'autorité expropriante a valablement habilité son représentant légal à agir en justice.L'appel interjeté le 29 juin 2006 n'est entaché d'aucune irrégularité.
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Attendu que selon l'article R. 13-49 du Code de l'expropriation, l'appelant doit, à peine de déchéance, déposer ou adresser son mémoire et les documents qu'il entend produire au greffe de la chambre dans un délai de deux mois à dater de l'appel.
Attendu que la date à prendre en considération est, non pas celle de la réception du mémoire mais celle à laquelle le mémoire a été adressé.
Attendu que par l'envoi de son mémoire au greffe de la Cour au moyen d'une lettre recommandée expédiée le 29 août 2006, la Collectivité Territoriale de Corse a agi dans le strict respect de ce texte.
Au fond :
Attendu qu'il résulte des constatations effectuées par le premier juge que l'emprise s'exerce sur la parcelle cadastrée section BM Numéro 143 au lieu-dit « Canone » sur la commune de BASTIA, d'une contenance de 7. 213 m ² ; Que cette parcelle de belles dimensions est située en zone ND, zone à protéger en raison de la qualité du paysage et du caractère des éléments naturels qui la composent. Qu'elle est décrite comme belle, en pente douce et située à proximité d'une zone marquée par un habitat essentiellement individuel.
Attendu que le premier juge a retenu un prix unitaire au mètre carré de 20 euros eu égard à la configuration et à la nature du terrain, à sa proximité des zones urbanisées de Corbaja et de Montesoro et aux termes de comparaison proposés par M. le Commissaire du Gouvernement, lequel estimait qu'il n'existait aucune possibilité de construction.
Attendu qu'il ressort toutefois du dossier, notamment des constatations effectuées par le juge de l'expropriation que la parcelle est viabilisée et que les réseaux publics d'eau potable, d'électricité et d'assainissement sont à proximité immédiate.
Attendu que selon l'article L. 13-15-11-1o du Code de l'expropriation, la qualification de terrain à bâtir, est réservée aux terrains qui, un an avant l'ouverture de l ‘ enquête prévue à l ‘ article L. 11-1 ou, dans le cas visé à l'article L. 11-3, un an avant la déclaration d'utilité publique sont, quelle que soit leur utilisation, tout à la fois.
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a) Effectivement desservis par une voie d'accès, un réseau électrique, un réseau d'eau potable... un réseau d'assainissement, à condition que ces divers réseaux soient situés à proximité immédiate des terrains en cause et soient de dimensions adaptées à la capacité de construction de ces terrains...
b) Situés dans un secteur désigné comme constructible par un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé ou par un document d'urbanisme en tenant lieu, ou bien, en l'absence d'un tel document, situés soit dans une partie actuellement urbanisée d'une commune... ».
Attendu que selon les articles L. 111-1 et suivants du Code de l'urbanisme, tout terrain sur le territoire d'une commune, ne bénéficiant ni de POS, ni de PLU, ni de carte communale est par principe inconstructible s ‘ il n ‘ est pas situé dans un secteur urbanisé.
Attendu que la qualification de terrain à bâtir n'est pas invoquée par les personnes expropriées n'a pas été retenue par le premier juge dans sa motivation.
Attendu que les conditions d'application des articles L. 13-15-11-1o du Code de l'expropriation et L. 111-1 du Code de l'urbanisme ne sont pas remplies.
Attendu que l'estimation du bien exproprié ne peut être effectuée qu'au regard de sa nature un an avant la déclaration d'utilité publique.
Attendu que les estimations proposées par l'autorité expropriante ne rendent pas compte de l'emplacement privilégié du bien exproprié à proximité immédiate des zones urbanisées alors que le reclassement en zone constructible figure au programme d'aménagement et de développement durable de la ville de BASTIA et encore du développement futur de la zone facilité par la création d'une voie nouvelle.
Attendu que ces éléments sont de nature à conférer au terrain une plus-value par rapport au prix d'une terre à vocation agricole dépourvue de spécificité particulière.
Attendu qu'au regard de ce qui précède des termes de comparaison auxquels il est fait référence, des accords amiables intervenus, il convient de fixer la valeur vénale des biens expropriés au prix de 20 euros le mètre carré, ainsi qu'en a décidé le juge de l'expropriation.
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Attendu que le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
L A C O U R
Statuant publiquement et contradictoirement,
En la forme déclare recevable l'appel la Collectivité Territoriale de Corse ;
Au fond, confirme en toutes ses dispositions le jugement No05 / 00386 rendu le 16 mai 2006 par le juge de l'Expropriation du Département de la Haute Corse.
Dit que les dépens seront supportés par l'expropriant.
LE GREFFIERLE PRESIDENT