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18/10/2006 | FRANCE | N°273

France | France, Cour d'appel de Bastia, Ct0268, 18 octobre 2006, 273


ARRET No ----------------------- 18 Octobre 2006 ----------------------- 05/00358 ----------------------- Véronique X... C/ SA DEXIA CREDIT LOCAL DE FRANCE ----------------------Décision déférée à la Cour du : 21 octobre 2004 Conseil de Prud'hommes d'AJACCIO 03/00239 ------------------ AS COUR D'APPEL DE BASTIA CHAMBRE SOCIALE ARRET DU : DIX HUIT OCTOBRE DEUX MILLE SIX APPELANTE : Mademoiselle Véronique X... ... Représentée par Me BOLELLI, substituant Me Jean Michel MARIAGGI, avocats au barreau d'AJACCIO INTIMEE : SA DEXIA CREDIT LOCAL DE FRANCE prise en la personne de son représenta

nt légal 7 à 11 Quai André CITROEN BP 1002 75901 PARIS CE...

ARRET No ----------------------- 18 Octobre 2006 ----------------------- 05/00358 ----------------------- Véronique X... C/ SA DEXIA CREDIT LOCAL DE FRANCE ----------------------Décision déférée à la Cour du : 21 octobre 2004 Conseil de Prud'hommes d'AJACCIO 03/00239 ------------------ AS COUR D'APPEL DE BASTIA CHAMBRE SOCIALE ARRET DU : DIX HUIT OCTOBRE DEUX MILLE SIX APPELANTE : Mademoiselle Véronique X... ... Représentée par Me BOLELLI, substituant Me Jean Michel MARIAGGI, avocats au barreau d'AJACCIO INTIMEE : SA DEXIA CREDIT LOCAL DE FRANCE prise en la personne de son représentant légal 7 à 11 Quai André CITROEN BP 1002 75901 PARIS CEDEX 15 Représentée par la SCP MORELLI-MAUREL-SANTELLI / PINNA-RECCHI, avocats au barreau d'AJACCIO COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

L'affaire a été débattue le 13 Juin 2006 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur MUCCHIELLI, Président de Chambre

Monsieur HUYETTE, Conseiller,

Monsieur STEFF, Conseiller qui en ont délibéré. GREFFIER :

Monsieur DALESSIO, lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 18 Octobre 2006

ARRET No

page 2 ARRET Contradictoire Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe. Signé par Monsieur MUCCHIELLI, Président de

Chambre et par Monsieur DALESSIO, greffier présent lors de la mise à disposition de la décision.

FAITS ET PROCÉDURE :

Mlle Véronique X... a été embauchée à compter du 2 mai 1989 suivant contrat à durée indéterminée par le GIE Bureau des techniques d'actuariat et de management de la caisse des dépôts et consignations (BETAM), en qualité de secrétaire dactylo 1ère classe, affectée à la direction du développement local à AJACCIO (2A).

A compter du 1er avril 1992 son contrat de travail a été transféré au Crédit Local de France devenu son nouvel employeur, puis, à compter du 24 octobre 1996, au groupe DEXIA, par transfert de l'activité du Crédit Local de France à la filiale du même nom de ce dernier groupe. Elle a été élue déléguée du personnel suppléant de l'entreprise au début de l'exercice 2000.

Suite à la décision le 5 juin 2001 de la direction du groupe DEXIA de supprimer sa représentation régionale en Corse et à la proposition faite à l'intéressée d'une mutation à Marseille, Mlle X... a été licenciée pour motif économique par courrier du 25 janvier 2002, après autorisation de l'inspection du travail du 18 janvier 2002.

Par décision du 13 août 2002 le Ministre des Affaires Sociales, du Travail et de la Solidarité a annulé cette autorisation.

Par courrier du 28 août 2002 l'intéressée a sollicité sa réintégration dans l'entreprise en application de l'article L. 436-3 du Code du travail.

La société DEXIA a alors proposé à l'intéressée par courrier du 4

septembre 2002, réitéré le 13 septembre suivant, de l'affecter à sa direction territoriale de Marseille (13), au même emploi ou dans un emploi équivalent, et lui a demandé de s'y présenter le 9 septembre 2002.

ARRET No

page 3

Par courrier du 9 septembre 2002 Mlle X... a refusé cette proposition d'affectation en indiquant que sa réintégration devait se faire dans un poste équivalent en CORSE.

Suite à trois procédures en référé devant le conseil de prud'hommes d'AJACCIO et à la décision de l'inspection du travail du 5 mai 2003 de rejeter la demande d'autorisation de licenciement pour incompétence de l'autorité administrative, Mlle X... a été licenciée le 18 juin 2003 pour faute grave (abandon de poste).

Contestant cette mesure, par courrier du 2 octobre 2003 de son conseil, elle a saisi le conseil des prud'hommes d'AJACCIO en paiement de diverses sommes.

Par jugement du 21 octobre 2004 cette juridiction a constaté la réalité du motif économique tel que reconnu dans la décision administrative, pris acte des tentatives d'embauche dans le cadre du reclassement opérées par DEXIA CREDIT LOCAL, constaté le refus de Mlle X... de réintégrer son poste de travail à compter du 9 septembre 2002, constaté l'abandon de poste, débouté Mlle X... de toutes ses demandes fondées sur la réintégration, sur le paiement des salaires et sur la liquidation d'astreinte, débouté la demanderesse

de ses demandes fondées sur la rupture du contrat de travail, débouté les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et a mis les dépens à la charge de Mlle X.... Mlle X... a interjeté appel.

Elle demande par son conseil, vu l'article L.436-3 du Code du travail, de constater la nullité du licenciement survenu en période de protection, de constater la rupture du contrat de travail au tort de l'employeur, de condamner la société DEXIA à payer l'ensemble des salaires qu'elle aurait perçu entre le mois d'avril 2002 et la date de la décision à intervenir sur la base de 2400 euros brut mensuel, soit du 1er avril 2002 au 13 juin 2006 la somme de 101460 euros, total à parfaire à la date de l'arrêt à intervenir, de condamner la société DEXIA à payer 150000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice résultant du licenciement abusif compte tenu notamment des ARRET No

page 4 circonstance du comportement de l'employeur, de condamner la société DEXIA à payer 36000 euros au titre de l'indemnité spéciale due au salarié protégé pendant toute la durée de la protection, soit du 1er avril 2002 au 18 juin 2003 et de condamner la société DEXIA à payer 5000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société DEXIA CREDIT LOCAL demande par son conseil, vu l'ordonnance de M. le premier président de la cour d'appel de BASTIA

du 28 janvier 2003, vu l'arrêt de la chambre sociale de cette cour d'appel du 8 avril 2003, vu l'article L. 425-3 du Code du travail, vu la décision de M. le Ministre des affaires sociales et du travail du 14 octobre 2003, constatant la réalité du motif économique tel que reconnu dans la décision administrative, constatant le refus de Mme X... de réintégrer son poste de travail, constatant en conséquence l'abandon de poste, constatant également que Mme X... a volontairement caché un nouvel emploi depuis le 12 janvier 2004 démontrant ainsi sa mauvaise foi, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement de première instance, de rejeter les demandes de Mme X... comme étant totalement infondées, reconventionnellement, de la condamner à payer 10000 euros à titre de juste dommages et intérêts pour procédure abusive, de la condamner à payer 5000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et les dépens.

SUR CE,

Sur l'obligation de réintégration.

Mlle X... soutient qu'en application des dispositions précitées l'employeur avait l'obligation de la réintégrer dans l'entreprise, dans le même emploi ou dans un emploi équivalent et en CORSE et que son affectation à Marseille ne remplit donc pas ces conditions.

Selon les dispositions des articles L. 425-3 et L. 436-3 du Code du travail la réintégration dans un emploi équivalent s'entend, notamment, d'un emploi situé dans le même secteur géographique.

ARRET No

page 5

En outre, ce n'est qu'en cas de disparition de l'emploi occupé initialement par le salarié protégé que la réintégration peut avoir lieu dans un emploi équivalent comportant le même niveau de rémunération, la même qualification, et les mêmes perspectives de carrière que l'emploi initial et permettant l'exercice du mandat représentatif.

Cependant, sauf fraude, l'obligation de réintégration à la charge de l'employeur peut cesser, en cas notamment, de disparition de l'entreprise ou de l'établissement, ou d'impossibilité matérielle absolue de réintégrer le salarié dans son emploi initial ou dans le même secteur géographique.

En particulier, la réintégration du salarié protégé dans un emploi équivalent peut entraîner sa mutation dans un autre établissement, différent de celui fixé par son contrat de travail, s'il n'existe aucun emploi disponible dans l'établissement où il était précédemment occupé, le salarié, réintégré par l'effet de la loi, ne pouvant invoquer les dispositions de son contrat de travail à cet égard.

En l'espèce, il est constant que la société DEXIA n'avait plus aucune agence ou établissement en CORSE à compter du mois d'octobre 2001, et il n'est pas allégué ni établi par Mlle X... que la réorganisation de l'entreprise ait eu pour but d'entraver l'exercice de ses droits par l'intéressée.

Dès lors, en proposant à l'intéressée le 4 septembre 2002 un emploi équivalent à compter du 9 septembre 2002, dans l'agence la plus proche de son lieu de travail initial, l'employeur respecté les obligations mises à sa charge par les dispositions précitées.

Le moyen invoqué à ce titre doit donc être écarté.

Sur la nullité invoquée.

Mlle X... invoque la nullité à la fois du licenciement pour motif

économique intervenu le 25 janvier 2002 et celle du licenciement pour faute du 18 juin 2003.

L'annulation sur recours hiérarchique par décision du 13 août 2002 du ministre des affaires sociales de l'autorisation administrative de licenciement du 18 janvier 2002, confirmée par jugement du tribunal administratif de Paris du 2 février 2005, a, en effet, privé ce licenciement de toute validité et de tout effet.

ARRET No

page 6

En revanche, au vu des pièces produites, le licenciement disciplinaire notifié à l'intéressée par courrier du 18 juin 2003 est intervenu alors que Mlle X... avait perdu le bénéfice de la protection des dispositions des articles 436-1 et suivants du Code du travail et n'encourt donc pas la nullité invoquée.

En effet, en application des dispositions des articles L.425-3 alinéa 3 et L.436-3 alinéa 3 du Code du travail et du fait du renouvellement des délégués du personnel le 4 juin 2002, Mlle X... bénéficiait de cette protection pendant une durée de 6 mois à compter du jour de sa réintégration, soit, eu égard aux motifs précités, compte tenu de son affectation régulière le 9 septembre 2002 à la direction territoriale de la société DEXIA à Marseille, jusqu'au 9 mars 2003.

Il s'ensuit que ce moyen doit être également écarté.

Sur la légitimité du licenciement.

La lettre de licenciement du 18 juin 2003 mentionne notamment "Pour les motifs ci-après, nous vous notifions votre licenciement pour

faute grave ... Ce licenciement est motivé par votre absence injustifiée et continue depuis votre réintégration le 9 septembre 2002 dans vos fonctions d'assistante commerciale au sein de la direction régionale de Corse, à Marseille...(...)."

Mlle X..., qui ne conteste pas avoir refusé de se rendre à son nouveau poste, estime que l'employeur avait l'obligation de la réintégrer dans un emploi équivalent en CORSE et qu'elle n'a dès lors commis aucune faute en refusant de prendre sa nouvelle affectation.

Elle soutient, subsidiairement que les faits reprochés étaient prescrits à la date de l'introduction de la procédure de licenciement en application des dispositions de l'article L. 122-44 du Code du travail.

Toutefois, s'agissant d'un comportement fautif du salarié qui s'est poursuivi dans le temps, la prescription prévue par les dispositions invoquées ne s'applique pas.

Dès lors, et eu égard aux motifs précités, l'abandon par la salariée de son poste de travail pendant plusieurs mois constitue une faute grave justifiant la mesure de licenciement prononcée.

ARRET No

page 7

Il s'ensuit que les demandes de Mlle X... à cet égard doivent être rejetées et le jugement entrepris confirmé de ce chef.

Sur les demande de salaires et d'indemnité spéciale due à un salarié protégé

Compte tenu des motifs précités la demande en paiement d'indemnité

spéciale doit être rejetée.

Toutefois, et eu égard à ces même motifs, s'agissant de la demande en paiement de salaires à compter du mois d'avril 2002 et jusqu'à la décision à intervenir, il convient d'y faire droit jusqu'à la date de l'offre de réintégration rejetée par l'intéressée, soit, au vu des pièces produites, la somme de 12000 euros (2400 x 5 mois + 8 jours). En effet, s'agissant des salaires postérieurs à cette offre, l'emploi initial ayant disparu et l'emploi proposé à la salariée suite à sa demande de réintégration étant équivalent à l'emploi initialement occupé à l'origine, le refus par l'intéressée d'occuper le nouvel emploi et de fournir un travail dispensait l'employeur de l'obligation de rémunération.

Le jugement entrepris sera donc réformé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société intimée ne démontre pas l'existence d'une faute de la salariée ayant dégénéré en un abus dans l'exercice de son recours.

Sur les frais irrépétibles

Il n'y a pas lieu en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur les dépens

Mlle X... qui succombe pour l'essentiel en son appel doit supporter les dépens.

ARRET No

page 8

PAR CES MOTIFS

L A C O U R

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

En la forme, reçoit l'appel de Mlle X...,

Au fond,

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté Mlle X... de sa demande en paiement de salaires,

Statuant à nouveau du chef de la disposition infirmée,

Condamne la société DEXIA CREDIT LOCAL DE FRANCE à payer à Véronique X... 12640 euros au titre des salaires des mois d'avril à septembre 2002,

Le confirme pour le surplus,

Y ajoutant,

Rejette toute autre demande,

Condamne Mlle Véronique X... aux dépens d'appel.

LE GREFFIER

LE PRESIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Ct0268
Numéro d'arrêt : 273
Date de la décision : 18/10/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. Mucchielli, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2006-10-18;273 ?
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