ARRET No ----------------------- 21 Septembre 2005 ----------------------- 04/00164 ----------------------- Mireille X... C/ Nathalie Y... ----------------------Décision déférée à la Cour du : 19 mai 2004 Conseil de Prud'hommes de BASTIA 02/00187 ------------------ MH COUR D'APPEL DE BASTIA CHAMBRE SOCIALE ARRET DU : VINGT ET UN SEPTEMBRE DEUX MILLE CINQ APPELANTE : Madame Mireille X... ( BOUTIQUE MARJORIE ) 9, Avenue Emile SARI 20200 BASTIA Représentée par Me Jean-Pierre SEFFAR, avocat au barreau de BASTIA INTIMEE : Madame Nathalie Y... 6, Avenue Emile SARI 20200 BASTIA Représentée par Me Gilles ANTOMARCHI, avocat au barreau de BASTIA COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
L'affaire a été débattue le 28 Juin 2005 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur MUCCHIELLI, Président de Chambre
Monsieur HUYETTE, Conseiller,
Monsieur STEFF, Conseiller qui en ont délibéré. GREFFIER :
Monsieur DALESSIO, lors des débats.
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Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 21 Septembre 2005 ARRET Contradictoire Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe. Signé par Monsieur MUCCHIELLI, Président de Chambre et par Monsieur DALESSIO, greffier présent lors de la mise à disposition de la décision. FAITS, PROCÉDURE ET ARGUMENTS
Madame Y... a été embauchée le 26 septembre 2000 par Madame X... comme vendeuse, par contrat à durée déterminée et à temps partiel (20 heures par semaine).
Puis la relation s'est poursuivie en contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2001, sans contrat écrit.
Après avoir été placée en arrêt de travail le 28 mai 2002, Madame Y... a passé une unique visite de reprise le 27 septembre 2002 à l'issue de laquelle le médecin du travail l'a déclarée inapte à tous postes de l'entreprise.
Elle a été convoquée à un entretien préalable puis licenciée par lettre du 5 novembre 2002 en ces termes :
(..) nous sommes contraints de vous licencier pour le motif suivant : inaptitude définitive au poste de vendeuse reconnue par la médecine du travail. Ainsi pour ce motif votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible (..).
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Madame Y... a saisi le Conseil de prud'hommes de Bastia afin de faire juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de faire reconnaître qu'elle a travaillé à plein temps, et d'obtenir les sommes mentionnées dans le jugement.
Par jugement du 19 mai 2004, le Conseil a annulé le licenciement, constaté que Madame Y... a été employée à plein temps, et lui a alloué : - 1.154,27 euros de rappel de salaire, - 13.851,24 euros de dommages-intérêts, - 1.154,27 euros pour non respect de la procédure,
puis a ordonné la remise de bulletins de salaires modifiés pour les mois d'octobre 2000 à 2002 et d'une nouvelle attestation ASSEDIC.
Devant la Cour, Madame X... soutient qu'elle ne conteste pas que la procédure de licenciement n'a pas été respectée puisqu'il n'y avait pas 5 jours entre la convocation et l'entretien préalable, par ailleurs que le médecin du travail a bien précisé qu'une seule visite était effectuée en application de l'article R 241-51-1 du code du travail, que le licenciement était régulier, que l'inaptitude de la salariée fait obstacle au paiement du préavis, qu'elle salariée n'a pas travaillé à plein temps, qu'elle disposait d'une grande liberté pour s'organiser, qu'elle n'a jamais présenté de réclamation à ce titre, que Madame Y... n'apporte aucun élément démontrant l'existence d'un harcèlement moral.
Elle conclut au rejet de toutes les demandes.
Madame Z... plaide de son côté que la procédure était irrégulière et sollicite la confirmation du jugement à ce titre, que son licenciement est nul puisqu'il n'y a
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page 4 eu qu'une seule visite de reprise et qu'elle demande 13.851,24 euros de dommages-intérêts, qu'elle a droit au préavis à hauteur de 1.154,27 euros et à l'indemnité spéciale de licenciement de l'article L 122-32-6 du code du travail soit 692,56 euros, que les attestations versées aux débats démontrent qu'elle a travaillé à plein temps au sein de la boutique de Bastia et qu'elle a droit à un rappel de salaire de 10.054,43 euros ainsi qu'aux congés payés afférents,
qu'elle a été victime d'un harcèlement moral sous la forme d'attaques et de man.uvres hostiles et dégradantes, qu'elle demande 6.925,62 euros de dommages-intérêts en réparation, enfin que son employeur doit être condamné à lui remettre les bulletins de salaire modifiés et à régulariser sa situation auprès des caisses sous astreinte. MOTIFS DE LA DÉCISION :
1 : la rupture du contrat de travail
Sur le bulletin de visite du 25 septembre 2000, le médecin du travail a écrit :
Inapte définitivement à la reprise de son poste et aux postes de l'entreprise, une seule visite suffit en vertu de l'article R 241-51-1 du code du travail.
En mentionnant à la fois le texte de l'article du code du travail permettant qu'en cas de danger une seule visite médicale soit effectuée, et en y ajoutant la mention une seule visite suffit , le médecin a nécessairement estimé qu'il existait une situation de danger immédiat au sens de cette disposition.
Dès lors, le licenciement de Madame Y... pour inaptitude pouvant être régulièrement engagé après cette unique visite médicale. ARRET No
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Et le préavis n'étant pas effectué, du fait de son inaptitude, Madame Y... n'a pas droit à une indemnité compensatrice.
2 : la durée du travail
Selon les termes de l'article L 212-4-3 du code du travail, le contrat de travail à temps partiel doit être un contrat écrit, et doit mentionner notamment la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
En l'absence d'indications écrites en ce sens dans le contrat, c'est à l'employeur de rapporter la preuve d'une part que le salarié concerné a travaillé effectivement selon un horaire réduit, et d'autre part qu'il a toujours eu connaissance à l'avance de la répartition de ses horaires sans être contraint de rester en permanence à la disposition de l'entreprise, faute de quoi ce salarié peut prétendre à une rémunération correspondant à un plein temps même si son temps de travail réel est resté inférieur.
En l'espèce, la Cour relève que Madame X... produit, outre le premier contrat à durée déterminée prévoyant un travail à temps partiel, les attestations de Mesdames Reynaud, Gandolphi, et Zamboni, commerçantes voisines qui indiquent que Madame Y... n'était pas tout le temps présente dans le magasin de Madame X..., de Madame A... amie d'alors de Madame Y... qui écrit que cette dernière travaillait à mi-temps.
Mais Madame Y... produit également des attestations de commerçantes voisines (Mesdames et Messieurs B..., Martini, Exiga) qui affirment que la salariée travaillait à plein temps, de Madame C... voisine de cette dernière et de Madame D... habitant la même rue qui attestent dans le même sens, ainsi que de clientes (Mesdames Renard, Battesti et Morrachini) affirmant à leur tour que Madame Y... travaillait de façon permanente.
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En présence d'attestations contradictoires mais émanant toutes de personnes extérieures au magasin, la Cour, outre l'absence de contestation de Madame Y... concernant sa rémunération pendant une longue période, retient finalement comme essentielle l'attestation de Madame E..., retoucheuse à temps plein de Madame X... et donc membre de l'entreprise, qui confirme que Madame Y... travaillait toujours à temps partiel.
De ce fait, la Cour considère que la preuve est suffisamment rapportée qu'après son passage de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée Madame Y..., qui n'explique pas pourquoi sa charge de travail aurait augmenté, a continué à travailler à temps partiel selon les modalités initiales et été rémunérée en conséquence.
3 : le harcèlement moral
Selon les termes de l'article L 122-49 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
La Cour constate, alors que c'est à Madame Y... de rapporter la preuve de l'existence d'un comportement inacceptable de Madame X... envers elle, qu'elle produit d'une part la photocopie d'une main courante mais qui ne fait que reprendre ses allégations ce qui n'a pas valeur de preuve, et d'autre part une attestation rédigée par Madame F... qui mentionne des remarques vexantes , une très courte
attestation rédigée par Madame G... qui mentionne seulement avoir été témoin d'agressions verbales , une attestation rédigée par madame H... relevant des réflexions déplaisantes , une attestation de Madame I... mentionnant des réflexions humiliantes , mais sans qu'aucune de ces personnes ne donne d'indication sur le contenu précis
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page 7 des remarques et sans qu'il soit précisé quand et combien de fois elles ont été témoin de tels faits.
Ces éléments sont beaucoup trop imprécis, tant en ce qui concerne leur nature que leur fréquence, pour caractériser un harcèlement moral au sens de l'article L 122-49 précité.
Par ailleurs l'existence d'une erreur concernant le numéro de sécurité sociale porté sur les bulletins de paie (le numéro de son époux et non le sien) ne constitue pas non plus un fait de harcèlement puisque l'employeur ne peut pas l'avoir connu sans que la salariée ne le fournisse et soit de fait partiellement à l'origine de l'erreur. La Cour relève sur ce point que dans ces conclusions écrites madame Y... n'explique nullement comment Madame X... a pu avoir connaissance du numéro de sécurité sociale de son mari autrement que par elle-même.
Enfin, à supposer même que l'employeur ait anormalement tardé à remettre certain documents administratifs, étant relevé que dans ses conclusions écrites Madame Y... n'indique même pas à quelle date elle les a reçus mettant ainsi la Cour dans l'impossibilité
d'apprécier l'existence d'un tel retard, celui-ci ne serait pas constitutif d'un harcèlement moral.
Et il en est de même du refus allégué de versement d'un complément maladie, aucune pièce du dossier produit ne venant confirmer cette
Et il en est de même du refus allégué de versement d'un complément maladie, aucune pièce du dossier produit ne venant confirmer cette allégation.
Pour ces raisons, la demande présentée à ce titre doit être rejetée. 4 : les frais de procédure (art. 700 code de procédure civile)
Par équité, chacune des deux parties conservera la charge de ses frais.
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PAR CES MOTIFS,
L A C O U R,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement contesté sauf en ce qui concerne l'indemnité allouée pour non respect de la procédure de licenciement.
ET STATUANT A NOUVEAU,
REJETTE les autres demandes.
CONDAMNE Madame Y... aux dépens.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT