La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2024 | FRANCE | N°21/01143

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 1ère chambre, 11 juillet 2024, 21/01143


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE



1ère CHAMBRE CIVILE



ARRÊT N° 381 DU 11 JUILLET 2024







N° RG 21/01143 -

N° Portalis DBV7-V-B7F-DL6U



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre du 2 septembre 2021, enregistré sous le n° 19/02514.





APPELANT :



M. [U] [Z]

[Adresse 5]

[Localité 2]



Représenté par Me Tania GALVANI, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin/Saint-Barthélémy (toque 62)




<

br>INTIMEES :



S.A. CAISSSE D'EPARGNE CEPAC

[Adresse 6]

[Localité 1]



Représentée par Me Daniel WERTER, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin/Saint-Barthélémy (toque 8)





Mme [P] [L]

[Ad...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° 381 DU 11 JUILLET 2024

N° RG 21/01143 -

N° Portalis DBV7-V-B7F-DL6U

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre du 2 septembre 2021, enregistré sous le n° 19/02514.

APPELANT :

M. [U] [Z]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représenté par Me Tania GALVANI, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin/Saint-Barthélémy (toque 62)

INTIMEES :

S.A. CAISSSE D'EPARGNE CEPAC

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée par Me Daniel WERTER, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin/Saint-Barthélémy (toque 8)

Mme [P] [L]

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représentée par Me Jamaldin BENMEBAREK, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin/Saint-Barthélémy (toque 114)

COMPOSITION DE LA COUR :

Mme Judith DELTOUR, présidente de chambre

Mme Valérie MARIE-GABRIELLE, conseillère

Mme Pascale BERTO, vice-présidente placée.

DÉBATS :

A la demande des parties, et conformément aux dispositions des articles 907 et 799 du code de procédure civile, l'affaire ne requérant pas de plaidoirie, le conseiller de la mise en état a autorisé le dépôt des dossiers au greffe de la chambre.

GREFFIER :

Lors du dépôt des dossiers et du prononcé : Mme Yolande MODESTE, greffière.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

*

* *

FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé du 11 octobre 2018, M. [U] [Z], vendeur, a conclu avec Mme [P] [L], acquéreur, un 'compromis de vente' relatif à une villa mitoyenne type F3 composant le lot n° 901 de l'ensemble immobilier Résidence les Sources [Localité 4] Guadeloupe) moyennant le prix de 72 500 euros, sous plusieurs conditions suspensives dont l'obtention par l'acquéreur d'un prêt bancaire, la réception de l'offre bancaire devant intervenir au plus tard le 3 janvier 2019.

Faisant valoir l'inexécution par M. [Z] de ses obligations, ce qui n'a pas permis la réalisation de cette vente, par acte d'huissier de justice du 22 août 2019, Mme [L] l'a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, pour déclarer parfaite la vente conclue par M. [Z], dire que le jugement à intervenir vaudra vente, condamner M. [Z] à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice de jouissance outre celle de 20 000 euros au titre de son préjudice moral, à défaut de juger cette vente parfaite entre les parties, condamner M. [Z] à lui verser la somme de 32 464,62 euros représentant le coût total du crédit immobilier contracté pour acheter ce bien ainsi que la somme de 30 000 euros au titre de son préjudice moral.

Par jugement contradictoire rendu le 2 septembre 2021, le tribunal a :

- débouté Mme [L] de ses demandes tendant à juger que la vente par M. [Z] à Mme [L] est parfaite et que le jugement à intervenir vaudra vente;

- débouté M. [Z] de ses demandes tendant à juger que la mise en demeure adressée par Mme [L] à M. [Z] par courrier recommandé avec avis de réception en date du 18 juillet 2019 est nulle et de nul effet et que la mise en demeure adressée par Mme [L] à M. [Z] par courrier recommandé avec avis de réception en date du 18 juillet 2019 entraîne la nullité des actes subséquents accomplis et notamment de l'assignation délivrée à M. [Z] le 22 août 2019 ;

- dit que le compromis de vente de la chose d'autrui est nul ;

- condamné M. [Z] à payer à Mme [L] les sommes de 32 464,62 euros au titre de son préjudice matériel et 20 000 euros au titre de son préjudice moral ;

- condamné M. [Z] aux entiers dépens de l'instance ;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration reçue au greffe le 29 octobre 2021, M. [Z] a interjeté appel de ce jugement. Se prévalant d'une faute de la société Caisse d'Épargne (la CEPAC) en qualité d'organisme prêteur, par acte d'huissier de justice du 20 septembre 2022, M. [Z] l'a fait assigner devant la cour d'appel de Basse-Terre pour obtenir notamment sa condamnation à lui payer les sommes de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral et 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant avis de non-constitution du 6 décembre 2021, la déclaration d'appel a été signifiée le 3 janvier 2023 à Mme [L].

Par ordonnance du 20 mars 2023, le conseiller de la mise en état, a :

- déclaré irrecevable la demande de la société CEPAC fondée sur les articles 554 et 555 du code de procédure civile en ce qu'elle a été présentée au conseiller de la mise en état et non à la cour,

- écarté la demande, devenue sans objet, de communication de pièces,

- dit que les dépens suivront le sort de ceux de l'instance sur le fond.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 décembre 2023. Les parties ayant donné leur accord pour que la procédure se déroule sans audience, le dépôt des dossiers a été autorisé au 22 avril 2024 puis l'affaire mise en délibéré au 11 juillet 2024, date de son prononcé par mise à disposition au greffe.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses conclusions déposées le 26 janvier 2022 et notifiées le 14 mars 2022 au conseil de Mme [L]- auxquelles il est renvoyé pour plus ample informé sur ses moyens et prétentions, M. [Z], appelant, demande à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé, l'appel interjeté par M. [Z],

Et statuant à nouveau,

Vu l'article 28 du décret n°55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière,

- constater l'absence de publication de l'acte introductif d'instance délivré à M. [Z] le 22 août 2019 au service chargé de la publicité foncière,

En conséquence,

- dire et juger l'action de Mme [L] irrecevable,

- réformer le jugement en ce qu'il a :

.débouté M. [Z] de ses demandes tendant à juger que la mise en demeure adressée par Mme [L] par courrier recommandé avec avis de réception en date du 18 juillet 2019, est nulle et de nul effet et qu'elle entraîne la nullité des actes subséquents accomplis et notamment l'assignation délivrée le 22 août 2019,

.condamné M. [Z] à payer à Mme [L] la somme de 32 464,62 euros au titre de son préjudice matériel et 20 000 euros au titre de son préjudice moral,

Vu les articles 1589 et 1599 du code civil et la jurisprudence applicable en la matière et les pièces produites aux débats,

- constater que M. [Z] est devenu propriétaire du bien immobilier le 14 juin 2019, soit postérieurement au compromis de vente signé le 11 octobre 2018,

En conséquence,

- dire et juger que M. [Z] n'avait pas le pouvoir d'engager un bien immobilier dont il n'était pas propriétaire au moment de la signature du compromis,

- constater que Mme [L] n'ignorait pas la situation du bien au jour de la signature du compromis de vente,

- dire et juger que le compromis de vente signé le 11 octobre 2018 ne vaut pas vente,

- dire et juger que le compromis de vente en date du 11 octobre 2018, est nul et n'a pu produire aucun effet,

- dire et juger que M. [Z] ne peut être condamné sur la base d'un compromis de vente nul et de nul effet ,

- constater que Mme [L] a manqué à ses obligations en ne faisant pas connaître à M. [Z] l'obtention du prêt,

- constater que Mme [L] ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle n'a pas pu se désengager du contrat de financement accepté pour l'acquisition du bien immobilier sis [Adresse 8] (Lot N°901) [Localité 3], en l'absence de vente dudit bien,

En conséquence,

- débouter Mme [L] de sa demande de condamnation de M. [Z] au remboursement du prêt,

- débouter Mme [L] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral et troubles de jouissance,

À titre subsidiaire,

- constater qu'aucun délai précis n'est laissé à M. [Z] dans la mise en demeure du 18 juillet 2019 pour s'exécuter,

En conséquence,

- dire et juger que la mise en demeure adressée par Mme [L] à M. [Z] par courrier recommandé avec avis de réception du 18 juillet 2019, est nulle et de nul effet,

- dire et juger que la mise en demeure adressée par Mme [L] à M. [Z] par courrier recommandé avec avis de réception du 18 juillet 2019, entraîne la nullité des actes subséquents accomplis et notamment de l'assignation délivrée à M. [Z] le 22 août 2019,

- condamner Mme [L] à payer à M. [Z] la somme de 5000 euros en

vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Tania Galvani, avocat aux offres de droit.

Dans ses dernières conclusions en date du 2 juin 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample informé sur ses moyens et prétentions, Mme [L] sollicite de la cour, de :

- déclarer recevable la constitution d'intimée de Mme [L],

- rejeter toutes les demandes fins et conclusions de M. [Z] ou toutes autres demandes portées par les parties contre Mme [L],

- juger qu'un accord sur la chose et sur le prix est intervenu entre les parties,

- juger que Mme [L] a rempli la condition suspensive dans les délais,

- juger que Mme [L] a versé un acompte sur le prix de vente du bien immobilier, objet du litige,

- juger que ledit accord portait sur la chose d'autrui à l'insu de Mme [L],

- confirmer le jugement querellé en cause d'appel dans son entier dispositif en ce qu'il a déclaré nul, de nul effetledit compromis de vente car portant sur la chose d'autrui au moment de la signature dudit acte, condamné M. [Z] à payer à Mme [L] la somme de 20 000 euros au titre du préjudice de jouissance dudit bien immobilier, condamné M.[Z] à payer à Mme [L] la somme de

32 464,62 euros représentant le coût total du crédit immobilier contracté par elle pour acheter ledit bien immobilier, condamné M. [Z] aux dépens, rejeté les demandes formulées par M. [Z],

Statuer à nouveau, et :

- condamner M. [Z] à payer à Mme [L] la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- réserver à nouveau les dépens de l'instance.

Dans ses conclusions notifiées le 4 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample informé sur ses moyens et prétentions, la société CEPAC, intervenante forcée, demande à la cour de :

- déclarer irrecevable la mise en cause de la CEPAC pour la première fois devant la cour d'appel,

En tout état de cause,

- statuer ce que de droit sur le bien fondé de l'appel,

- déclarer les demandes dirigées contre la CEPAC irrecevables et en tout état de cause non fondées,

- débouter M. [Z] de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la CEPAC,

- condamner M. [Z] à verser à la CEPAC une somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'intervention forcée en cause d'appel de la société CEPAC

En application des articles 554 et 555 du code de procédure civile, les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.

Sur ce fondement, il est admis que l'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel, n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige.

En l'espèce, il ressort de l'acte introductif d'instance du 22 août 2019 que Mme [L] a fait assigner M. [Z] en réalisation de la vente passée le 11 octobre 2018 et à défaut en paiement de la somme de 32 464,62 euros représentant le coût du crédit immobilier contracté pour acheter le bien objet de cette vente outre des dommages et intérêts pour le préjudice moral causé.

Or, il n'est justifié d'aucune évolution du litige, caractérisée par la révélation d'une circonstance de droit ou de fait née du jugement ou postérieure à celui-ci modifiant les données juridiques du litige. En effet, le jugement a apprécié le litige en l'état des fondements juridiques et des preuves présentées par les parties et n'a révélé aucun élément nouveau tant sur le plan juridique qu'au regard des faits, constituant pas une transformation des données du litige. Ainsi, M. [Z] disposait dès la première instance des éléments lui permettant d'attraire en la cause, s'il l'estimait nécessaire, la société CEPAC puisque une des prétentions de la demanderesse portait précisément sur le remboursement du coût de l'emprunt contracté par elle auprès de cette dernière.

Par voie de conséquence, en l'absence d'évolution du litige au sens de l'article 555 du code de procédure civile susvisé, l'intervention forcée de la société CEPAC en cause d'appel par M. [Z] suivant assignation du 20 septembre 2022, sera déclarée irrecevable, tout comme le sont nécessairement les prétentions formulées à son encontre.

Sur l'absence de publication de l'acte introductif d'instance au service de la publicité foncière

Si selon l'article 28 du décret du 4 janvier 1955, sont obligatoirement publiés au service chargé de la publicité foncière de la situation des immeubles, 'tous actes, même assortis d'une condition suspensive, et toutes décisions judiciaires, portant ou constatant entre vifs a) mutation ou constitution de droits réels immobiliers', il est admis que la publicité foncière n'est exigée, à peine d'irrecevabilité, que pour les demandes en justice tendant à l'anéantissement rétroactif d'un droit antérieurement publié.

Or, au cas d'espèce, l'assignation introductive d'instance du 22 août 2019 concerne les effets d'un compromis de vente passé sous la forme d'un acte sous seing privé, non publié. Aussi, en l'absence de publication de cet acte, M. [Z] est mal fondé à invoquer, pour ce motif, l'irrecevabilité des demandes présentées par Mme [L].

Dès lors, ce moyen inopérant sera rejeté et l'action de Mme [L] déclarée recevable.

Sur le bien fondé de l'appel

En liminaire, il y a lieu de constater que Mme [L] n'a pas formé appel incident sur le rejet de ses demandes tendant à juger que la vente conclue est parfaite et que le jugement à intervenir vaudra vente, de sorte que ces chefs de demandes sont devenus définitifs.

Sur les responsabilités

À l'énoncé des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi, cette disposition étant d'ordre public.

Aux termes des dispositions de l'article 1231-1 du code civil (anciennement 1147), le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Il est constant que le 11 octobre 2028, M. [Z] vendeur et Mme [L] acquéreur, ont signé un acte sous seing privé relatif à une villa mitoyenne type F3 à usage d'habitation de la Résidence Les Sources [Localité 3] moyennant le prix de 72 500 euros, celle-ci s'étant acquittée le 9 novembre 2018 de la somme de 450 euros à titre d'acompte sur les frais d'acte dans la comptabilité de M. [Y] [V] notaire en charge de la vente.

La condition suspensive d'obtention de prêt prévue expressément dans l'intérêt exclusif de l'acquéreur, ne comportait pas de caractéristiques particulières, sauf à spécifier dans le compromis que la réception de l'offre de prêt devrait intervenir au plus tard le 3 janvier 2019, date également prévue pour la réalisation de l'acte authentique de vente.

Il ressort des pièces du dossier que cette offre conclue par Mme [L] avec la société CEPAC le 25 octobre 2018 a bien été acceptée et portée à la connaissance du notaire ainsi qu'il apparaît du décompte du 9 novembre 2018 de l'étude notariale portant la mention 'prêt banque 1 montant versé pour paiement prix 79 600€' de sorte que M.[Z] ne peut valablement soutenir qu'il n'en avait pas eu connaissance. S'il n'est pas justifié de l'envoi sur ce point par Mme [L] d'une lettre recommandée avec avis de réception, le déblocage des fonds chez le notaire dès le 9 novembre 2018 fait foi de l'acceptation du prêt, étant observé que M. [Z] n'a aucunement interrogé Mme [L] sur ce point ainsi que le prévoit le compromis de vente signé, en cas de carence éventuelle de l'acquéreur, ce qui n'était pas le cas en l'espèce (page 7 dudit acte).

De plus, il est constant qu'en s'engageant le 11 octobre 2018 à vendre le bien en cause, M. [Z] avait parfaitement connaissance de ne pas en être encore propriétaire, puisqu'il l'est devenu de son propre aveu le 14 juin 2019 suite à la levée d'option faite par la Semsamar, information ne figurant pas dans la convention conclue et dont il n'est pas démontré qu'elle ait été portée à la connaissance de Mme [L] antérieurement à la signature du compromis de vente du 11 octobre 2018, cet acte fixant du reste au 3 janvier 2019 la date de réalisation de l'acte authentique, date à laquelle M. [Z] n'en était toujours pas propriétaire, de sorte que la vente promise doit être considérée comme nulle.

Par ailleurs, selon petite annonce du 21 décembre 2018 produite aux débats, il apparaît que M. [Z] a remis en vente le bien objet de la promesse de vente à un prix bien supérieur à celui convenu avec Mme [L] de sorte que, -sans établir les manquements allégués de l'agence immobilière ou d'un préposé de la société CEPAC-, il n'entendait manifestement pas poursuivre la vente à laquelle il s'était pourtant engagé avec Mme [L], avouant d'ailleurs avoir finalement vendu son bien le 30 octobre 2019.

Dans tous les cas, aux termes du compromis de vente conclu, les moyens invoqués par M. [Z] selon lesquels la mise en demeure du 18 juillet 2019 qui lui a été adressée par le conseil de Mme [L], serait sans effet en raison notamment de l'absence de délai pour s'exécuter ce qui entraînerait également la nullité de l'assignation introductive d'instance sont parfaitement inopérants puisque d'une part il est contractuellement prévu la possibilité de saisir la juridiction compétente en cas de défaillance d'une partie et que d'autre part, cela ne peut induire la nullité de l'acte introductif d'instance dont le régime est soumis à des règles spécifiques non invoquées en la cause.

Aussi, il n'est aucunement démontré que Mme [L] a commis une faute dans l'exécution de ses obligations contractuelles. En revanche, en ne donnant pas suite au compromis signé le 11 octobre 2018 alors que l'acquéreur avait satisfait à la condition suspensive d'obtention de prêt et en ne respectant pas les termes de l'engagement conclu avec cette dernière, M. [Z] a commis une faute engageant sa responsabilité.

Dès lors, c'est à bon droit que la juridiction de premier ressort a rejeté les demandes de M. [Z], en conséquence de quoi, le jugement querellé sera confirmé sur ces points.

Sur les préjudices

S'agissant des préjudices dont il demandé réparation, au vu des pièces produites (offre de prêt, tableau d'amortissement, synthèse des crédits, relevé de compte, décompte notarié) , Mme [L] justifie de l'obtention du prêt n°5367734 réalisé auprès de la société CEPAC pour l'achat du bien litigieux et du déblocage des fonds à hauteur de la somme de 98 667 euros dont elle doit assurer le remboursement selon mensualités de 442,37 puis 490,42 euros depuis novembre 2018 et jusqu'en 2043 alors qu'elle n'a pas pu acquérir le bien litigieux. Il est donc justifié du lien de causalité entre les conséquences de cet engagement financier exigé aux termes de la convention conclue entre les parties et l'échec de la vente promise du fait de M. [Z], sans que ce dernier, du fait des manquements qu'il a commis, ne puisse valablement invoquer la nullité de la convention de prêt du fait de la nullité du contrat de vente.

Cependant, sur la nature et l'étendue de ce préjudice, avant dire droit, il y a lieu d'ordonner la réouverture des débats le 16 septembre 2024 pour recevoir les observations écrites des parties sur l'existence d'une éventuelle perte de chance Mme [L] de ne pas contracter un emprunt bancaire dans le cadre de la promesse de vente conclue le 11 octobre 2018 avec M. [Z].

Dans l'attente, les autres demandes et les dépens sont réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour

- relève l'irrecevabilité de l'intervention forcée en cause d'appel de la société Caisse d'épargne CEPAC et des demandes de M. [U] [Z] à son encontre ;

- déclare recevable l'action de Mme [P] [L] contre M. [U] [Z];

- confirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [Z] de ses demandes tendant à juger que la mise en demeure adressée par Mme [L] à M. [Z] par courrier recommandé avec avis de réception en date du 18 juillet 2019 est nulle et de nul effet et que la mise en demeure adressée par Mme [L] à M. [Z] par courrier recommandé avec avis de réception en date du 18 juillet 2019 entraîne la nullité des actes subséquents accomplis et notamment de l'assignation délivrée à M. [Z] le 22 août 2019 et dit que le compromis de vente de la chose d'autrui est nul ;

Avant dire droit sur les demandes de dommages et intérêts,

- ordonne la réouverture des débats le 16 septembre 2024 à 10 heures pour observations écrites de Mme [P] [L] et M. [U] [Z] sur l'appréciation d'une éventuelle perte de chance de ne pas contracter un prêt bancaire lié au compromis de vente conclu le 11 octobre 2018

- réserve les autres demandes et les dépens de l'instance ;

La décision a été signée par Mme Judith DELTOUR, présidente de chambre et par Mme Yolande MODESTE, greffière.

La présidente La greffière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01143
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;21.01143 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award