COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
1ère CHAMBRE CIVILE
ARRÊT N° 380 DU 11 JUILLET 2024
N° RG 21/00679 -
N° Portalis DBV7-V-B7F-DKS6
Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de Basse-Terre du 6 mai 2021, enregistré sous le n° 17/00801.
APPELANTE :
S.C.I. ANSOLEHO
[Adresse 3]
[Localité 15]
Représentée par Me Elisabeth CALONNE, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin /Saint-Barthélémy (toque 25)
INTIMES :
Me [H] [M] ès qualités de liquidateur de la
société Alliage Assurances, anciennement dénommée SFS
[Adresse 7]
[Localité 10]
Non représenté.
Me [P] [U] ès qualités de mandataire de la
Société SFS devenue ALLIAGE ASSURANCES
[Adresse 1]
[Localité 11]
Non représentée.
Me [T] [A] [N] ès qualités de mandataire de la
SARL MI KAZ AN NOU
[Adresse 23]
[Localité 18]
Non représenté.
M. [E] [R] [Z]
[Adresse 21]
[Localité 19]
Non représenté.
S.A.R.L. BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES ANTILLES INGÉNIERIE
BET A représentée par son gérant
C/O
Mme [D] [G]
[Adresse 26]
[Localité 20]
Représentée par Me Jacques WITVOET de la SELARL SCP MORTON & ASSOCIES, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin /Saint-Barthélémy (toque 104) auquel a succédé Me Maryan MOUGEY, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin /Saint-Barthélémy (toque 8)
S.A. MAAF ASSURANCES
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice
[Adresse 22]
[Localité 14]
Représentée par Me Myriam WIN BOMPARD, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin /Saint-Barthélémy (toque114) postulant et Me Fabrice MERIDA, avocat au barreau de Fort-de-France
Société MAF
[Adresse 2]
[Localité 13]
Non représentée.
S.A.R.L. POLE ARCHITECTURE
représentée par son gérant
[Adresse 8]
[Localité 17]
Représentée par Me Jacques WITVOET de la SELARL SCP MORTON & ASSOCIES, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin /Saint-Barthélémy (toque 104) auquel a succédé Me Maryan MOUGEY, avocat au barreau de Guadeloupe/Saint-Martin /Saint-Barthélémy (toque 8)
SARL MI KAZ AN NOU
En liquidation judiciaire
[Adresse 6]
[Localité 16]
Non représentée.
Société SFS devenue ALLIAGE ASSURANCES société de droit luxembourgeois en liquidation judiciaire
[Adresse 5]
[Adresse 9]
LUXEMBOURG
Non représentée.
Société ELITE INSURANCE COMPANY LIMITED
c/o ARMOUR RISK MANAGEMENT LIMITED
[Adresse 4]
[Localité 12]
Non représentée.
COMPOSITION DE LA COUR :
Mme Judith DELTOUR, présidente de chambre
Mme Valérie MARIE-GABRIELLE, conseillère
Mme Pascale BERTO, vice-présidente placée.
DÉBATS :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés devant Mme Judith DELTOUR, présidente et Mme Valérie MARIE-GABRIELLE, conseillère, qui ont fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour.
GREFFIER
Lors des débats et du prononcé : Mme Yolande MODESTE, greffière.
ARRÊT :
Défaut, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Judith DELTOUR, présidente de chambre et par Mme Yolande MODESTE, greffière.
*
* *
Faits et procédure
Alléguant l'obtention d'un permis de construire le 8 juin 2008 pour l'édification de neuf bâtiments d'habitation, lieu-dit [Adresse 25] commune de [Localité 27], deux contrats de construction pour trois blocs de maisons individuelles jumelées, un contrat du 17 mai 2011 confiant les travaux à la SARL Mi kaz an nou, assurée par la MAAF, sous la maîtrise d'oeuvre de M. [V] [X], à l'enseigne Pôle architecture, assuré par la Mutuelle des architectes français, un retard de livraison, un constat d'huissier de justice de l'état d'avancement des travaux, et une expertise déposée le 4 juin 2016 suivant ordonnance de référé du 12 janvier 2015, par actes d'huissier de justice des 29 août 2017, 21, 26 et 28 septembre 2017 et 6 novembre 2017, la SCI Ansoleho a fait assigner la société Securities and Financial Solutions France, pour laquelle vient aux droits la SA Securities and Financial Solutions Europe, la SARL Mi kaz an nou prise en la personne de son liquidateur judiciaire Me [T] [K], et ce dernier ès-qualités de mandataire liquidateur de la SARL Mi kaz an nou, M. [E] [Z], gérant de la SARL Mi Kaz an nou, le bureau d'études techniques Antilles ingénierie, la SARL Pôle Architecture et la Mutuelle des architectes français, et la MAAF devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre pour obtenir notamment, outre le constat de leur responsabilité,
- la condamnation de la SARL Mi kaz an nou au paiement de 68 246,50 euros au titre des travaux de réfection des malfaçons ;
- la condamnation in solidum de la SARL Mi kaz an nou, de la SARL Pôle architecture et du BET au paiement de 40 145 euros eu titre du montant prévisionnel pour la réparation ;
- la condamnation solidaire de la SARL Mi kaz an nou et de la SARL Pôle architecture au paiement de 20 117,94 euros au titre de la maîtrise d'oeuvre ;
- la garantie de la MAF et de la MAAF à due concurrence ;
- la condamnation de la SARL Mi kaz an nou au paiement de 76 347,24 euros au titre des pénalités de retard ;
- la condamnation de M. [Z] au paiement de 10 000 euros dommages et intérêts;
- la condamnation de la société Elite Insurance en sa qualité d'assureur dommage ouvrage au paiement de 68 426,50 euros au titre des désordres décennaux ;
- la condamnation de la SARL Mi kaz an nou et la SARL Pôle architecture au paiement de 107 250 de dommages et intérêts au titre du préjudice matériel et financier ;
- la condamnation de la SARL Mi kaz an nou et la SARL Pôle architecture au paiement de 20 000 euros pour le préjudice moral ;
- la condamnation de la MAF à garantir le paiement ;
- leur condamnation au paiement des dépens y compris les frais d'expertise et de référé, avec distraction et de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement rendu le 5 décembre 2019, le tribunal de grande instance a ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture et la réouverture des débats pour production de diverses pièces.
Au terme d'un jugement qualifié à la fois contradictoire et réputé contradictoire, rendu le 6 mai 2021, le tribunal judiciaire de Basse-Terre a
- rejeté les demandes à l'encontre de M. [E] [Z], Pôle Architecture, 'BETA, la MAF et la MAAF' ;
- condamné la société Mi kaz an nou à payer à la SCI Ansoleho la somme de
74 542,47 euros au titre des pénalités de retard ;
- condamné la société Mi kaz an nou à payer à la SCI Ansoleho la somme de
85 011,45 euros au titre du préjudice de remise en état dont 68 246,50 euros pour lesquels la société Elite Insurance et la société Mi kaz an nou sont condamnées in solidum ;
- condamné la société Mi kaz an nou à payer à la SCI Ansoleho la somme de
370 800 euros au titre de la perte de chance de louer les logements jusqu'en mai 2021;
- condamné la société Mi kaz an nou à payer à la SCI Ansoleho la somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral ;
- rejeté la demande de dommages et intérêts de 10 000 euros au titre du préjudice financier ;
- rejeté la demande de doublement de l'intérêt légal de la somme due par Elite Insurance ;
- condamné la SCI Ansoleho à verser à la SARL Pôle Architecture, la société BETA et la MAF la somme totale de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
- condamné la SCI Ansoleho à verser la MAAF Assurance la somme totale de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les dépens engagés par la MAAF Assurance, dont distraction au profit de Me Win-Bompard ;
- condamné in solidum la société Mi kaz an nou et la société Elite Insurance à verser à la SCI Ansoleho la somme de 5 000 euros, et a les condamnées au reste des dépens, dont distraction au profit de Me Calonne, en ce compris les frais de procédure de référé (137,55 euros) et les frais d'expertise (4 996,87 euros) ;
- rappelé l'exécution provisoire de la décision.
Par déclaration reçue le 21 juin 2021, la SCI Ansoleho a interjeté appel de la décision ainsi formulé: 'appel total' et elle a repris in extenso les chefs du jugement.
Par dernières conclusions communiquées le 1er décembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la SCI Ansoleho a demandé, au visa des articles 9 et 132 du code de procédure civile, 1134 du Code civil 1792 du Code civil et 1792-6 du Code civil,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il rejette les demandes sur le fondement de la présomption de responsabilité du constructeur et la demande de condamnation de la SARL Mi kaz an nou sur ce fondement ;
- d'infirmer le jugement en ce qu'il rejette les demandes à l'encontre M. [E] [Z], Pôle architecture, BETA, la MAF et la MAAF,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il rejette la demande de dommages intérêts au titre du préjudice financier,
- d'infirmer sur la condamnation de la SCI Ansoleho à verser à la SARL Pôle architecture, la société BETA et la MAF la somme totale de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
- infirmer sur la condamnation de la SCI Ansoleho à verser à la MAAF la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les dépens engagés par la MAAF Assurance dont distraction au profit de Me Win Bompard ;
Statuant à nouveau
- condamner in solidum la SARL Mi kaz an nou, la MAAF, la MAF, la SARL Pôle architecture et BETA à payer indemniser le maître d'ouvrage au titre de la responsabilité décennale les sommes suivantes :
- 89 848,80 euros au titre de la remise en état des lieux y compris le coût de la maîtrise d'oeuvre avec les intérêts échus à compter du 4 juin 2016 sur la base de l'indice BT01 de la construction, indice de base connu en juin 104, 4 jusqu'à parfait paiement ;
- 615 600 euros au titre de la perte de chance de louer les logements jusqu'en
2021 ;
- 15 000 euros au titre du préjudice lié au trouble de jouissance résultant des travaux de remise en état à effectuer ;
- 10 000 euros au titre du préjudice financier,
- condamner solidairement Elite Insurance et 'SFS (Alliage Assurances) à payer :
- 89 848,80 euros au titre de la remise en état des lieux y compris le coût de la maîtrise d'oeuvre avec les intérêts échus à compter du 4 juin 2016 sur la base de l'indice BT01 de la construction, indice de base connu en juin 104, 4 jusqu'à parfait paiement ;
- 615 600 euros au titre de la perte de chance de louer les logements jusqu'en 2021 ;
- 15 000 euros au titre du préjudice lié au trouble de jouissance résultant des travaux de remise en état à effectuer ;
-10 000 euros au titre du préjudice financier,
'Vu 1134 anc (1193 nouv) du code civil - l'article 1142 anc du code civil - l'article 1147 anc du code civil - 1231 & 1231-1 (nouv) du code civil ;
- condamner 'la SARL la SARL Mi kaz an nou à payer la somme de 75 105,27 euros au titre des pénalités de retard' ;
- condamner la SARL Mi kaz an nou à payer la somme de 65 000 euros 'à au titre de ses manquements contractuels';
'Vu 1134 anc (1193 nouv) du code civil - l'article 1142 anc du code civil - l'article 1147 anc du code civil - 1231 & 1231-1 (nouv) du code civil'
- condamner la SARL Pôle architecture et le BET pour leur responsabilité contractuelle à payer :
- 89 848,80 euros au titre de la remise en état des lieux y compris le coût de la maîtrise d'oeuvre avec les intérêts échus à compter du 4 juin 2016 sur la base de l'indice BT01 de la construction, indice de base connu en juin 104, 4 jusqu'à parfait paiement ;
- 615 600 euros au titre de la perte de chance de louer les logements jusqu'en 2021 ;
'vu l'article 1382 anc (1240 nouv.) du code civil
- condamner M. [Z] à payer des dommages intérêts la somme de : 89 848,40 euros,
- condamner M. [Z] à payer des dommages intérêts la somme de : 615 600 euros, - condamner in solidum SARL Mi kaz an nou M. [Z] Pôle architecture BETA la MAF et la MAAF à payer au titre du préjudice moral la somme de 20 000 euros'
- condamner in solidum la SARL Mi kaz an nou, M. [Z], Pôle architecture, BETA, la MAF et la MAAF à payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens de l'instance en cause d'appel,
Subsidiairement
- prononcer la réception judiciaire au 16 juin 2014 ;
- condamner in solidum la SARL Mi Kaz an nou, la MAAF, la MAF, la SARL Pôle architecture et Beta à payer indemniser le maître d'ouvrage au titre de la responsabilité décennale les sommes suivantes :
- 89 848,80 euros au titre de la remise en état des lieux y compris le coût de la maîtrise d'oeuvre avec les intérêts échus à compter du 4 juin 2016 sur la base de l'indice BT01 de la construction, indice de base connu en juin 104, 4 jusqu'à parfait paiement ;
- 615 600 euros au titre de la perte de chance de louer les logements jusqu'en 2021 ;
- confirmer pour le surplus le jugement.
Par dernières conclusions communiquées le 28 mars 2023, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la SA MAAF Assurances, a réclamé au visa de l'article 1792 du Code civil et du contrat d'assurance,
- d'écarter la demande de fixation d'une réception judiciaire comme étant nouvelle en cause d'appel,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté toutes les demandes à l'encontre de la SA MAAF Assurances,
Y ajoutant,
- condamner la SCI Ansoleho au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Win-Bompard en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
À titre infiniment subsidiaire, et si par extraordinaire, la cour devait considérer la garantie de la MAAF comme étant acquise,
- juger que la garantie de la MAAF ne pourrait porter que sur les désordres relatifs au gros oeuvre à l'exclusion des autres lots ;
- juger que Mi kaz an nou ne saurait être considérée comme étant seule à l'origine du retard dans la livraison ;
- condamner la société BET Antilles Ingenierie BETA et la SARL Pôle architecture et son assureur la MAF à relever et garantir indemne la SA MAAF Assurances de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge.
Par dernières conclusions communiquées le 5 avril 2023, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la SARL Bureau d'études techniques Antilles ingénierie BETA et la SARL Pôle architecture, ont demandé de
- dire et juger la SCI Ansoleho mal fondée en son appel et l'en débouter ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes à l'encontre de SARL Pôle architecture, BETA ainsi que la MAF, condamné la SCI Ansoleho à verser à la SARL Pôle architecture, la société BETA et la MAF la somme totale de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
- débouter la MAAF de ses demandes à titre subsidiaire, au titre de l'exercice de ses recours contre la SARL Pôle architecture, la société BETA et la MAF ;
- condamner la SCI Ansoleho au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ainsi qu'aux entiers dépens,
Subsidiairement, sur le quantum des demandes,
- réduire le quantum à de plus justes proportions,
- ordonner une expertise financière et comptable et désigner tel expert qu'il plaira, avant de statuer sur le chiffrage de la perte de loyers alléguée par la SCI Ansoleho à hauteur de 410 000 euros.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 mai 2023. L'affaire a été fixée à plaider à l'audience du 6 novembre 2023. L'affaire a été mise en délibéré pour être rendu le 22 janvier 2024.
Par arrêt avant-dire droit du 22 janvier 2024, la cour a
- ordonné la réouverture des débats à l'audience du 24 avril 2024 à 9 heures, pour production des déclarations de créances de la SCI Ansoleho aux procédures collectives ouvertes à l'égard de la SARL Mi Kaz an nou et de la société Elite Insurance Company Limited, et le cas échéant observations sur les conséquences de leur absence et pour observations sur l'application éventuelle au litige des dispositions de l'article 9.5 de la norme AFNOR NF P 003-001 qui réglemente et plafonne l'application des pénalités de retard dans les marchés privés,
- réservé les dépens et les demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sans autre observation, l'affaire a été mise en délibéré pour être rendu le 11 juillet 2024.
Motifs de la décision
La qualification erronée du jugement est sans conséquence sur l'exercice des voies de recours.
L'appelante a intimé M. [Z], assigné à personne, la société Mi Kaz an nou représentée par son mandataire judiciaire (à l'étude), la société SFS devenue Alliage assurances société de droit luxembourgeois représentée par Me [H] [M] (à domicile) et Me [P] [U] (à personne), la société Elite Insurance Company Limited (procès-verbal de recherches infructueuses en application des dispositions de l'article 659 du code de procédure civile). L'arrêt est rendu par défaut.
Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a relevé l'absence de réception et ainsi a exclu l'application de la garantie décennale.
Statuant sur la responsabilité contractuelle de droit commun, il a considéré que le constructeur n'avait pas respecté les règles de l'art et 'sans reprendre in extenso les malfaçons', il a statué sur un 'préjudice prévisible' et considéré au titre des pénalités de retard, 1 487-31 jours par an de fermeture de l'entreprise pour les chiffrer à
74 542,47 euros, il a évalué les travaux de reprise en se fondant sur le rapport d'expertise à 85 011,45 euros, considéré qu'aucune pièce n'était produite au titre de la perte de jouissance du bien et il a retenu une perte de chance de louer six logements depuis 10 novembre 2012 jusqu'en mai 2021 en retenant une rentabilité locative de 950 euros par mois. Ayant ainsi statué sur la responsabilité contractuelle du constructeur, il a exclu l'application de l'assurance décennale. Il a estimé qu'aucune preuve d'une faute personnelle de M. [Z] n'était rapportée. Il a retenu l'absence de lien de causalité entre l'éventuelle faute de l'architecte, du bureau d'études technique et le préjudice prévisible à la signature du contrat et l'abandon du chantier par l'entreprise, le préjudice matériel et le préjudice locatif et conclu au rejet des demandes à leur encontre. S'agissant des demandes formées contre Elite assurance, il a estimé qu'en absence de réception, cette garantie n'était pas applicable, s'agissant notamment des pénalités de retard et dommages immatériels.
Sur la demande de réception judiciaire
En application des dispositions des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ; les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
L'assignation devant le tribunal de grande instance ne visait que la responsabilité contractuelle des constructeurs. Elle se fondait sur un abandon de chantier, une résiliation conventionnelle du contrat pour inexécution le 8 décembre 2016 et explicitement sur l'absence de réception.
Cependant les demandes formées en première instance de
- dire que la SARL Mi kaz an nou a engagé sa responsabilité décennale pour la transgression des articles 1792 et suivants du Code civil ;
- dire qu'il appartenait à la SARL Mi kaz an nou et tous les intervenants à la construction de procéder dans le cadre d'une réception, à la livraison d'un ouvrage exempt de vices ;
- dire que la SARL Pôle architecture en raison de contrat de mission complète a engagé sa responsabilité décennale pour les désordres affectant l'ouvrage et le rendant impropre à destination en application de l'article 1792 du Code civil,
ont conduit le premier juge à rechercher l'existence d'une réception et à l'exclure.
Ainsi les demandes fondées sur la réception et la demande de réception judiciaire ne peuvent être considérées comme nouvelles en cause d'appel.
Alors que l'application des dispositions de l'article 1792 du Code civil, suppose l'existence d'une réception, la responsabilité contractuelle trouve à s'appliquer en absence de réception ou pour les désordres qui ne relèvent pas de la garantie décennale, il résulte des conclusions de l'appelante qu'elle réclame à la fois de confirmer le jugement en ce qu'il condamne la SARL Mi kaz an nou à 'payer le préjudice de remise en état sur le fondement de la responsabilité contractuelle et les pénalités de retard aux termes du contrat de construction' et de l'infirmer en ce qu'il rejette toutes les demandes fondées sur l'article 1792 du Code civil au titre de la responsabilité décennale, d'infirmer sur le quantum des préjudices, le montant de la remise en état des pénalités.
Quoiqu'il en soit, en application des dispositions de l'article 1792-6 du Code civil, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.
Il résulte des pièces que le 2 juin 2014, la SARL Mi kaz an nou a adressé à la SCI Ansoleho et son gérant, un courrier ayant pour objet 'remise de chantier et paiement des arriérés' qui indique : 'je vous demande de bien vouloir réceptionner vos travaux qui est la phase finale de nos engagements contractuels, le 16 juin 2014 à [Localité 27], à cette occasion on procédera à la remise des clefs, au contrôle de conformité. En effet toutes les observations qui ont été soulevées de votre part sont satisfaites et pourraient faire l'objet de vérification le [du]dit jour. Cependant, il vous reste un arriéré de 8 900,95 euros'. Or, par courrier du 28 juillet 2014, l'avocat de la SCI Ansoleho a considéré que la SARL Mi kaz an nou, à l'inverse et en dépit du texte du courrier cité, adressé par 'lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juin 2014 reçue le 12 juin 2014', avait omis de convoquer les parties à la réception.
Il se déduit de ces deux pièces d'une part que la SARL Mi kaz an nou a bien convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception le maître d'ouvrage pour une réception contradictoire le 16 juin 2014 à [Localité 27] lieu du chantier, d'autre part, que le maître d'ouvrage a reçu cette convocation à laquelle il n'a pas donné suite, parce qu'il considérait que les travaux n'étaient pas terminés. (Lettre de mise en demeure du 28 juillet 2014).
En conséquence de quoi, la SCI appelante se contredit lorsqu'elle soutient au contraire des pièces que 'la réception n'a pas été refusée par le maître d'ouvrage lorsqu'elle [a été ] proposée par l'entrepreneur' que ce dernier n'a pas formalisé de réception. Si comme soutenu, l'architecte présent à cette réception n'a pas formalisé de procès-verbal, c'est en raison de l'absence du maître d'ouvrage. Puisque la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves, en absence du maître d'ouvrage à la convocation pour la réception, ni l'entreprise ni le maître d'oeuvre, sauf, le cas échéant, s'il avait reçu délégation expresse pour ce faire, ce qui n'est pas le cas, la réception ne pouvait pas avoir lieu.
Il résulte de ce qui précède que le maître d'ouvrage ne peut pas alléguer une réception alors qu'il ne s'est pas présenté à la convocation fixée pour cette formalité. Il ne peut pas y avoir non plus de réception tacite, à défaut de manifestation non équivoque du maître d'ouvrage de recevoir l'ouvrage avec ou sans réserves. L'inverse est d'ailleurs démontré par le courrier adressé par la SCI le 28 juillet 2014, qui met en évidence que le maître d'ouvrage n'a pas déféré à la convocation pour la réception, et met en demeure l'entreprise de terminer les travaux et reprendre les malfaçons pour le 15 septembre 2014, une liste ayant été notifiée le 11 mars 2014 soit avant la convocation pour la réception.
La résiliation du contrat le 6 décembre 2016 notifiée unilatéralement par le maître d'ouvrage, alors que le litige est noué ne saurait rétroactivement constituer une réception.
En absence de réception, la garantie de l'assureur décennal de la SARL Mi kaz an nou, la MAAF ne peut être actionnée et le maître d'ouvrage doit être débouté de ses demandes en ce sens et le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes à l'encontre de la MAAF. C'est donc à juste titre que le premier a statué au visa de la responsabilité contractuelle.
La SCI Ansoleho avait souscrit un contrat d'assurance dommage ouvrage auprès d'Elite Insurance Company limited, UK branch, société de droit étranger, dont le siège était [Adresse 24] England et le mandataire en France Securities & Financial Solutions. Le contrat n'est pas produit mais seulement une note de couverture. En tout état de cause, la déclaration d'appel a été signifiée à M. [H] [M], de la SELARL FIDES mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alliage assurances, anciennement dénommée SFS mandataire de la société Elite assurances, suivant jugement de conversion du tribunal de commerce de Paris du 27 septembre 2018.
La société Alliage Assurances SFS n'était pas l'assureur mais seulement le mandataire, de sorte qu'aucune demande de garantie fondée sur la note de couverture produite ne peut être formée contre elle. La SCI Ansoleho doit être déboutée de sa demande à son encontre.
S'agissant de la société Elite Insurance, aucune déclaration de créance n'a été produite et en application des dispositions de l'article L.622-21, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas déclarée et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent.
Quoiqu'il en soit cette société est défaillante, elle n'a donc pas contesté les condamnations prononcées par le premier juge. S'agissant des demandes formées en cause d'appel, la SCI Ansoleho doit être déboutée de ses demandes tant au titre des réparations, que des dommages et intérêts par ailleurs non justifiés par des pièces, contre la société Elite Insurance, étant rappelé en tant que de besoin que l'assurance dommage ouvrage, a vocation à pré-financer la réparation des dommages de la nature décennale, survenus après réception et d'obtenir le paiement des réparations relevant de la garantie décennale, sans attendre une décision de justice statuant sur les responsabilités de chacun des constructeurs.
En revanche, le premier juge n'a procédé à aucune énumération des désordres, se limitant à un renvoi au contenu de l'expertise. En conséquence, il n'a pas détaillé le dommage, la faute et le lien de causalité. Cependant, c'est ainsi qu'il a condamné la société Mi kaz an nou à payer à la SCI Ansoleho, conformément à la demande qui était faite dans les dernières conclusions citées dans le jugement, la somme de
85 011,45 euros 'au titre du préjudice de remise en état dont 68 246,50 euros pour lesquels la société Elite Insurance et la société Mi kaz an nou sont condamnées in solidum' en indiquant dans les motifs que les désordres n'avaient pas d'incidence majeure sur la structure de l'ouvrage mais méritaient d'être repris. La SARL Mi kaz an nou était défaillante devant le premier juge et défaillante en cause d'appel, par définition, elle n'a opposé aucune contestation à la réclamation de la SCI Ansoleho. En outre, elle a été placée en liquidation judiciaire, suivant jugement d'ouverture du 15 mars 2017, aucune déclaration de créance n'a été produite, malgré la demande qui a été faite.
Pour autant, le jugement d'ouverture interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas déclarée et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent, de sorte que seule une créance peut être fixée au passif de la liquidation judiciaire.
L'assureur de la SARL Mi kaz an nou, la MAAF, ne peut être tenu à garantie puisque que l'assurance responsabilité civile de l'entreprise ne permet pas de garantir la réparation des ouvrages réalisés par l'assuré, ainsi qu'établi par le contrat d'assurance, mais seulement de garantir ses locaux ou matériels professionnels, les dommages corporels aux tiers, les dommages aux biens des tiers. La SCI Ansoleho doit être déboutée de ses demandes tant au titre des réparations, que des dommages et intérêts par ailleurs non justifiés par des pièces, contre la MAAF. Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes à l'encontre de la MAAF, assureur décennal.
La SCI indique avoir confié à la SARL Mi kaz an nou la construction de deux blocs de maisons individuelles jumelées (7-8,9-10) et deux maisons individuelles (5-6), s'agissant des lots gros-oeuvre, murs extérieurs, murs intérieurs cloison, charpente couverture, menuiserie bois, menuiserie alu et peinture ; ces éléments ne ressortent pas des pièces versées et l'entreprise était seulement assurée pour les activités maçonnerie béton armé, couverture (travaux d'étanchéité occasionnels limités à 150 m²), charpentier bois et menuiseries bois, y compris pose de carrelage, faïences, assainissement, enduits. Les lots VRD, assainissement, isolation, étanchéité ne figurent pas au marché litigieux. Les lots électricité, carrelage et plomberie ont fait l'objet de marchés séparés signés par le maître d'ouvrage.
S'agissant du coût des travaux, trois devis sont joints au marché pour 192 567,43 euros, l'opération étant financée pour un total de 225 000 euros, alors que le contrat mentionne un prix forfaitaire de 82 036,44 euros HT. L'expertise fait état d'un coût de 89 009,54 TTC x 2 soit 178 019,08 euros.
Aucune pièce n'est produite relativement au prix payé. Un courrier de la SARL Mi kaz an nou du 26 mars 2014 mentionne des travaux supplémentaires de 24 017,34 euros en plus des 178 019,09 euros, un autre du 2 juin 2014 mentionne un solde dû de 8 900,95 euros. L'expert relève quatre factures pour un montant de 12 409,15 + 18 049,67 + 16 922,66 soit 47 381,89 euros, il mentionne la communication de factures et déblocages de fonds pour 42% puis le règlement de 95% des situations de travaux de la SARL Mi kaz an nou.
Selon l'expert M. [C], le projet était de construire un total de dix logements en cinq maisons individuelles, sur un terrain en pente en partie inondable, avec un assainissement pour l'ensemble et une clôture, dans un environnement résidentiel. Si l'expert relève des manquements dans l'organisation du chantier, son expertise est elliptique relativement à la descriptions des désordres.
Ainsi, elle mentionne :
- la voirie centrale en béton, et l'implantation nouvelle de la fosse septique nécessitent un réexamen, en absence de plan d'exécution des réseaux ;
- 'doute sur la construction du mur de soutènement' réalisé juste devant le bloc de construction N°7/N°8, en absence de plans d'exécution et des essais de béton ;
- le dallage en béton autour des blocs des constructions est dépourvu de joints de fractionnement, la division de plaques par sciage permet d'éviter le risque d'éclatement ;
- fissures apparentes: elles sont verticales et obliques et localisées au droit des ouvertures et de certains murs de refends et poutres, ce désordre provient d'un tassement différentiel selon les dires du Sspiteur, d'une mauvaise exécution de travaux et de l'absence de cohérence entre l'étude de sol, les études du BET ;
- sur le lot charpente et couverture, absence de crochets de sécurité, rallonges des chevrons non réglementaire, mise en oeuvre incorrecte du plafond PVC ;
- sur le lot menuiserie, les trois portes de type bois de cèdre à panneaux (séjour dégagement) qui donnent sur l'extérieur sont non conformes aux normes Antilles, infiltrations au bas de la porte du séjour, compte tenu du positionnement de la terrasse (vent d'est) risque de gonflement et de déformation des panneaux en contact avec l'eau et l'air ;
- absence d'appuis de baies avec rejingot, conformément aux règles Antilles, entraînant des infiltrations d'eau en période de pluie ;
- réservation des évacuations 'l'absence de cette réglementation pour les canalisations verticales dans le dallage et dans la dalle du rez-de-chaussée haut, de socles en béton correspondant autour des évacuations pour leur protection, entraîne inévitablement la fissure des canalisations et donc des infiltrations dans le plancher en béton à terme';
- chauffe-eaux électriques, fixés sur le mur extérieur côté jardin, présence de traces de rouille, la réglementation RT12 sur le territoire, n'a visiblement pas été respectée;
- les travaux d'électricité ne sont pas achevés, certaines prestations n'ont pas été prises en compte, notamment la pose de détecteurs de fumée dans chaque pièce ;
- lot carrelage, le seuil sous la porte du séjour n'est pas adapté, décollement du carrelage sol dans la mezzanine, absence de joints de fractionnement et de joints périphériques ;
- les murs ne sont pas revêtus de peinture type I3, décollement de la peinture sur les murs extérieurs, présent de remontées d'humidité, absence de drainage.
Il ne résulte de cette expertise aucun désordre portant atteinte à la solidité de l'ouvrage, mais seulement des non conformités aux règles de l'art ou aux normes, qui ne peuvent même pas être qualifiées de non conformité contractuelles compte tenu des lacunes du contrat et qui ne peuvent pas être toutes imputées à la SARL Mi kaz an nou, notamment s'agissant des travaux relatifs aux lots électricité, carrelage et plomberie qui ont fait l'objet de marchés séparés signés par le maître d'ouvrage.
L'expert a chiffré les travaux de reprise à 3500 euros HT pour les VRD, 2 500 euros HT pour le mur de soutènement (qui ne figure pas sur le devis produit) et 64 177,75 euros TTC pour les constructions outre 'les frais forfaitaires pour le suivi des travaux par un homme de l'art'.
Sur les demandes contre la SARL Mi kaz an nou
Le premier juge ayant intégralement fait droit aux demandes de la SCI telles qu'elles résultaient de ses conclusions, en considérant un 'préjudice prévisible', la SCI appelante ne motive pas son appel et sa réclamation de condamner les constructeurs au paiement de 89 848,80 euros au titre de la remise en état des lieux y compris le coût de la maîtrise d'oeuvre avec les intérêts échus à compter du 4 juin 2016 sur la base de l'indice BT01 de la construction, indice de base connu en juin 104,4 jusqu'à parfait paiement. Compte tenu de la liquidation judiciaire, la créance résultant du jugement doit être fixée au passif de la SARL Mi kaz an nou.
S'agissant des pénalités de retard, nonobstant l'absence de contestation de la SARL Mi kaz an nou sur ce point, en application des dispositions de l'article 1231-5 du Code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.
Pour le calcul de la pénalité de retard, le contrat prévoyait un délai d'exécution de neuf mois à dater de l'ordre de service, une pénalité d'1/3 000ème du prix convenu au contrat, par jour de retard, éventuellement compensé par le solde dû, une fermeture de l'entreprise du 1er au 31 décembre 2012, à compter du 10 novembre 2012, les travaux étant supposés terminés le 9 novembre 2012, après un délai d'exécution de quarante semaines.
Aucune indication n'est donnée sur le début du chantier, mais le délai d'exécution est fixé à 40 semaines et le contrat est prévu pour se finir le 10 novembre 2012, aucune indication n'est donnée sur l'éventuelle prise en compte des faits de grèves, intempéries ou cyclones et en tout état de cause, le maître d'ouvrage n'a pas déféré à la convocation pour la réception prévue le 16 juin 2014 et il a résilié le contrat le 6 décembre 2016. En outre, la pénalité de retard, même prévue au contrat ne pouvait excéder suivant la norme AFNOR NF P 003-001, un montant total plafonné à 5% du marché, soit en l'espèce compte tenu du marché de 82 036,44 x 2 soit 164 072,88 euros, la somme de 8 203,64 euros. Quoiqu'il en soit le premier juge ayant, en dépit de ces éléments, intégralement fait droit aux demandes de la SCI Ansoleho, cette dernière ne justifie pas du bien fondé de son appel. Compte tenu de la liquidation judiciaire, la créance résultant du jugement doit être fixée au passif de la SARL Mi kaz an nou.
S'agissant du préjudice lié au trouble de jouissance résultant des travaux de remise en état, cette demande n'a pas été ainsi formulée devant le premier juge, lequel a répondu en considérant qu'il s'agissait du non paiement du crédit immobilier. En tout état de cause, l'existence de ce préjudice n'est pas prouvée et à la supposer démontrée, il n'est pas prouvé que ce préjudice soit subi par la SCI Ansoleho et qu'il
soit imputable à la SARL Mi kaz an nou. La SCI Ansoleho ne justifie pas du bien fondé de son appel.
S'agissant de la perte de chance, le premier juge a retenu une perte de chance de louer six logements sur 103 mois, jusqu'en mai 2021 et alloué une somme de
370 800 euros sur les 615 600 euros réclamés, alors que c'est le maître d'ouvrage qui a refusé de procéder à la réception et qui a résilié le contrat en 2016. Cette disposition n'est pas contestée, compte tenu de la liquidation judiciaire, la créance résultant du jugement doit être fixée au passif de la SARL Mi kaz an nou.
La SCI Ansoleho ne fournit aucune pièce supplémentaire, elle ne prouve aucun préjudice financier, aucune mise sur le marché des biens, aucune impossibilité de les louer, alors que le constat d'huissier de justice du 7 novembre 2014 qu'elle produit met en évidence que les biens étaient, sous réserve des travaux de finition, qui ne faisaient pas partie du marché de l'entreprise assignée, en état d'être livrés. Elle ne justifie pas du bien fondé de son appel.
S'agissant du préjudice moral, malgré l'absence de toute pièce et en l'état d'une affirmation de principe, le premier juge a alloué la somme de 10 000 euros. La SCI Ansoleho ne fournit aucune pièce supplémentaire, elle ne prouve pas l'existence d'un autre préjudice moral. Elle ne justifie pas du bien fondé de son appel.
La SCI Ansoleho réclame en outre la condamnation de la SARL Mi kaz an nou à lui payer la somme de 65 000 euros au titre de ses manquements contractuels. Cette demande n'a pas été formée devant le premier juge, elle ne peut être qualifiée 'demande nouvelle' en appel, puisqu'elle peut être considérée comme l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des demandes formées devant le premier juge.
Toutefois, la SCI Ansoleho ne fournit aucune pièce supplémentaire au soutien de cette demande. S'il résulte de l'expertise des non conformités contractuelles dont certaines sont imputables à l'entreprise, ces manquements contractuels ont été intégralement réparés par les condamnations déjà prononcées. En toute état de cause, elle ne prouve aucun autre manquement contractuel imputable à l'entreprise et qui n'aurait pas été réparé. Elle ne justifie pas du bien fondé de son appel.
Sur les demandes contre la SARL Pôle architecture et le BET Antilles ingénierie
L'appelante réclame les sommes de 89 848,80 euros au titre de la remise en état des lieux y compris le coût de la maîtrise d'oeuvre avec les intérêts échus à compter du 4 juin 2016 sur la base de l'indice BT01 de la construction, indice de base connu en juin 104,4 jusqu'à parfait paiement et 615 600 euros au titre de la perte de chance de louer les logements jusqu'en 2021.
Au soutien de cette demande, elle produit une proposition d'honoraires du 23 juin 2011, confiant au BET ingénierie une mission études BA et six visites de contrôle avant coulage des ouvrages BA moyennant paiement de 8 463 euros TTC et une proposition d'honoraires de Pôle architecture mentionnant trois visites mensuelles sur huit mois pour 8 400 euros HT et deux visites pour la réception pour 600 euros soit un total de 9 000 euros. Elle produit également un courrier de M. [V] [X] de la SARL Pôle architecture, qui indique qu'il avait une mission limitée à des visites périodiques du chantier pour permettre le déblocage des fonds par la banque, qu'il n'a jamais contrôlé les plans ou les marchés, qu'il n'a pas été informé des paiements, qu'il ignorait l'existence d'un troisième bloc d'habitations, que le maître d'ouvrage a refusé une mission complète, que ses honoraires de 8 400 euros représentant 1,7% du montant du marché pour les trois blocs d'habitations ne correspondaient pas à une mission complète, qu'il n'y avait ni plans d'exécution ni CCTP, ni DCE, qu'il a fallu modifier l'emplacement de la fosse septique dont l'implantation prévue était en zone inondable, en raison d'une canalisation d'eau pluviale jamais curée.
Au delà d'une affirmation de principe et de la production de ces pièces, la SCI Ansoleho n'opère aucune démonstration de la faute de l'architecte, et de celle du BET, du préjudice qu'elle en a subi et du lien de causalité les réunissant. Elle ne justifie pas non plus du montant de ses réclamations.
En effet, s'agissant de l'architecte, l'appelante se fonde sur un contrat de maîtrise d'oeuvre complète, dont l'existence n'est pas prouvée et surtout ne résulte pas des pièces. Elle lui impute sans démonstration, l'existence des désordres dont il s'impose de relever qu'il s'agit de non conformités contractuelles ou de manquements aux règles de l'art imputables à l'entreprise, elle fait valoir une obligation de résultat s'agissant des marchés et documents qu'il établit (l'existence de tels documents n'est pas prouvée et l'architecte était étranger aux contrats signés par le maître d'ouvrage seul). Relativement au suivi du chantier, il ne résulte pas du contrat une mission complète d'études des marchés et des documents techniques, de coordination des travaux mais seulement trois visites par mois pendant huit mois et deux visites pour une réception à laquelle le maître d'ouvrage ne s'est pas rendu, alors que l'architecte était présent, ce qui résulte des écritures de l'appelante. En outre, il est établi que l'architecte avait en janvier 2014 procédé à des visites de chantier et avait à cette occasion relevé des non-conformités et défauts de finition, dont la liste été notifiée à l'entreprise.
L'architecte n'était pas chargé de l'établissement des documents techniques, le maître d'ouvrage ne peut donc lui reprocher un quelconque manquement à ce titre. Ce n'est que s'il avait été chargé d'une mission de coordination que le retard pris par le chantier pourrait éventuellement et en partie lui être reproché. Si l'architecte ne démontre pas avoir conseillé au maître d'ouvrage une mission complète, il résulte du courrier déjà mentionné et non contesté, que le maître d'ouvrage a refusé cette option.
S'agissant de BET Antilles ingénierie, la SCI Ansoleho fait valoir qu'il lui a été conseillé par M. [Z] et que l'expert a noté une défaillance avérée dans l'exécution de sa mission en absence de cohérence entre l'étude de sols et les études du BET, des appuis de baies avec rejingot sur les murs d'allège, des procès-verbaux de visite à toutes les phases des travaux, de communication sur les dysfonctionnements en présence de travaux de VRD réalisés sans permis s'agissant des voiries de desserte, de la création d'un mur de soutènement, de l'implantation de la fosse septique.
La pièce contractuelle à savoir la proposition d'honoraires mentionnée (mission études BA et six visites de contrôle avant coulage des ouvrages BA) ne concorde pas avec les manquements allégués qui sont imputables à l'entreprise qui a réalisé les travaux. En tout état de cause, à supposer, ce qui n'est pas démontré, que les travaux de voirie de desserte, la construction d'un mur de soutènement auraient été réalisés sans permis et sans en aviser le maître d'ouvrage, ils l'auraient été sans contrat et sans contrepartie financière et ils n'ont pas été réalisés par le BET mais bien par l'entreprise. S'agissant de l'implantation de la fosse septique, il résulte d'un courrier de l'architecte qu'elle a été modifiée, se trouvant initialement installée dans une zone inondable. Autrement dit, ce choix n'est pas imputable au BET et la preuve d'un préjudice en résultant pour le maître d'ouvrage n'est pas rapportée et ne ressort pas du rapport d'expertise.
Les travaux ont été réalisés par l'entreprise et non par le BET ou l'architecte, la preuve d'une faute commise par ces derniers dans l'exécution de leur mission restreinte n'est pas rapportée.
La SCI Ansoleho doit être déboutée de ses demandes et le jugement confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes à l'encontre de l'architecte Pôle Architecture et du BET Antilles ingénierie.
Sur les demandes contre M. [E] [Z]
M. [Z] est le gérant de la SARL Mi kaz an nou. Les demandes sont fondées sur l'article 1382 du Code civil, applicable au litige qui impose la démonstration d'un fait à l'origine d'un dommage ayant causé un préjudice à la SCI Ansoleho, qui réclame sa condamnation au paiement de 89 848,40 et 615 600 euros de dommages et intérêts.
L'appelante soutient qu'il a intentionnellement failli à la formalisation de la fin des relations contractuelles par un comportement constitutif d'une faute séparable de ses fonctions de gérant. Or, il est démontré par le courrier du 2 juin 2014 que la SARL Mi kaz an nou représentée par son gérant a, par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juin 2014, convoqué le maître d'ouvrage pour une réception, que ce dernier a reçu cette convocation et n'y a pas donné suite. Aucune faute personnelle du gérant extérieure à ses fonctions de nature à engager sa responsabilité n'est démontrée, pas plus que l'existence d'un préjudice subi consécutif à une action personnelle de l'intéressé.
La SCI Ansoleho doit être déboutée de ses demandes et le jugement confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes à l'encontre de M. [E] [Z].
Sur la demande subsidiaire de réception judiciaire
Les demandes reconventionnelles et subsidiaires en cause d'appel sont recevables. Cependant, en application des dispositions des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ; les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
L'assignation devant le tribunal de grande instance ne visait que la responsabilité contractuelle des constructeurs. Elle se fondait sur un abandon de chantier, une résiliation conventionnelle du contrat pour inexécution le 8 décembre 2016 et explicitement sur l'absence de réception. La demande nouvellement formée en cause d'appel de prononcer la réception judiciaire de l'ouvrage tend aux mêmes que celles soumises au premier juge à savoir l'indemnisation d'un dommage résultant d'un contrat de construction, mais le fondement juridique des demandes est différent et la demande de réception judiciaire est la conséquence de l'absence de réception évoquée et retenue devant le premier juge. Cette demande est recevable. Cependant, l'appelante ne précise pas la date à laquelle cette réception devrait être fixée, de sorte que la cour ne peut arbitrairement la fixer à telle ou telle date. En outre, avant cette demande de réception judiciaire, le maître d'ouvrage n'avait pas manifesté de façon non équivoque sa volonté de recevoir l'ouvrage avec ou sans réserve. La SCI Ansoleho doit être déboutée de cette demande.
La SCI Ansoleho qui avait succombé à ses demandes formées contre la SARL Pôle architecture, la société BETA et la MAF et contre la MAAF a été, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, logiquement condamnée à leur payer diverses sommes. Elle ne justifie pas son appel à ce titre. Nonobstant ses prétentions contraires, il était équitable d'indemniser ces parties contraintes d'engager des frais pour être représentées en justice, et de la condamner en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, étant relevé surabondamment, d'une part qu'elle réclamait 10 000 euros à ce titre et qu'elle avait formé des demandes également à ce titre contre ces parties. Elle doit être déboutée de son appel de ce chef.
La SCI Ansoleho qui succombe est condamnée au paiement des dépens avec distraction pour ceux des frais dont avance aurait été faite sans avoir reçu provision au profit de l'avocat demandeur. Elle est déboutée de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle est condamnée à payer à la MAAF d'une part et au BET Antilles ingénierie BETA et à la SARL Pôle architecture, parties communes d'intérêts, la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs
la cour
- déboute la SCI Ansoleho de toutes ses demandes en cause d'appel ;
- confirme le jugement en ce qu'il a débouté la SCI Ansoleho de ses demandes contre M. [E] [Z], la SARL Pôle Architecture, la SARL BET Antilles ingénierie, la MAF et la SA MAAF assurances ;
Y ajoutant,
- fixe les créances résultant du jugement critiqué, de 74 542,47 euros au titre des pénalités de retard, de 85 011,45 euros au titre de la remise en état dont 68 246,50 euros pour lesquels la société Elite Insurance et la société Mi kaz an nou sont condamnées in solidum, de 370 800 euros au titre de la perte de chance de louer les logements, de 10 000 euros au titre du préjudice moral, de 5 000 euros et 3 000 euros au titre des frais irrépétibles et outre les dépens engagés par la MAAF Assurance, dont distraction au profit de Me Win-Bompard, de 5 000 euros in solidum avec la société Elite Insurance et des dépens, en ce compris les frais de procédure de référé (137,55 euros) et les frais d'expertise (4 996,87 euros) au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Mi kaz an nou SCI Ansoleho et de la société Elite Insurance;
- condamne la SCI Ansoleho au paiement des dépens avec distraction au profit de Mme [F], en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
- condamne la SCI Ansoleho à payer à la SA MAAF Assurances la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne la SCI Ansoleho à payer au BET Antilles ingénierie BETA et à la SARL Pôle architecture, parties communes d'intérêts, la somme de 4000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La décision a été signée par Mme Judith DELTOUR, présidente de chambre et par Mme Yolande MODESTE, greffière.
La présidente La greffière