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03/06/2024 | FRANCE | N°23/00784

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 03 juin 2024, 23/00784


GB/LP









COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT N° 131 DU TROIS JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE



AFFAIRE N° : N° RG 23/00784 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DS6E



Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre - section industrie- du 15 Juin 2023.





APPELANTE



Madame [E] [M] [V]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par M. [O] [P] (Défenseur syndical ouvrier)



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INTIMÉES



S.A.S. SUN ET EAU ANTILLES GUYANE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Non représentée



S.E.L.A.R.L. MONTRAVERS & [L] ès qualités de liquidateur judiciaire de SAS SUN ET EAU ANTILLES GUYANE...

GB/LP

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT N° 131 DU TROIS JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

AFFAIRE N° : N° RG 23/00784 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DS6E

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre - section industrie- du 15 Juin 2023.

APPELANTE

Madame [E] [M] [V]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par M. [O] [P] (Défenseur syndical ouvrier)

INTIMÉES

S.A.S. SUN ET EAU ANTILLES GUYANE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Non représentée

S.E.L.A.R.L. MONTRAVERS & [L] ès qualités de liquidateur judiciaire de SAS SUN ET EAU ANTILLES GUYANE

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Non représentée

Association AGS - CGEA - DE [Localité 5]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Gaëlle BUSEINE, conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Rozenn Le GOFF, conseillère, présidente,

Mme Annabelle CLEDAT, conseillère,

Mme Gaëlle BUSEINE, conseillère,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 03 juin 2024

GREFFIER Lors des débats Mme Lucile POMMIER, greffier principal.

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.

Signé par Mme Rozenn Le GOFF, conseillère, présidente et par Mme Valérie Souriant, greffier principal, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

**********

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme [V] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée par la Sas Sun et Eau Antilles Guyane à compter du 1er septembre 2021 en qualité d'assistante commerciale.

Mme [V] saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre le 31 août 2022 aux fins de voir :

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur,

- dire que la résiliation sera effective à la date de rupture du contrat, soit le 3 octobre 2022,

- condamner la Sas Sun et Eau Antilles Guyane, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, à lui payer les sommes suivantes :

* 3789,82 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2674 euros à titre d'indemnité pour le préjudice subi,

- déclarer la décision à intervenir opposable à l'Unedic délégation Ags-Cgea et juger qu'il garantira le paiement des condamnations,

- condamner la Sas Sun et Eau Antilles Guyane, pris en la personne de son liquidateur judiciaire, aux entiers dépens.

Par jugement du 15 septembre 2022, le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre prononçait l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire de la Sas Sun et Eau Antilles Guyane et désignait Me [X] [L], ès-qualités de liquidateur judiciaire.

Mme [V] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 3 octobre 2022, la date de rupture de celui-ci ayant été fixée au 24 septembre 2022.

Par jugement réputé contradictoire en date du 15 juin 2023, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a :

- déclaré recevable la requête de Mme [V] [E],

- dit que Mme [V] [E] a été licenciée pour motif économique par le liquidateur judiciaire désigné par jugement du tribunal mixte de commerce,

- débouté Mme [V] [E] de toutes ses demandes,

- condamné Mme [V] [E] aux entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 6 juillet 2023, Mme [V] formait appel dudit jugement, dont le pli de notification est revenu avec la mention 'défaut d'accès ou d'adressage', en ces termes : 'L'objet de l'appel est de demander à la cour d'appel la réformation de la décision de première instance du 15 juin 2023 RG F22/260 en ce que le conseil de prud'hommes, section industrie a :

- déclaré recevable la requête de Mme [V] [E],

- dit que Mme [V] [E] a été licenciée pour motif économique par le liquidateur judiciaire désigné par jugement du tribunal mixte de commerce,

- débouté Mme [V] [E] de toutes ses demandes,

- condamné Mme [V] [E] aux entiers dépens'.

Par ordonnance du 29 février 2024, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction et renvoyé la cause à l'audience du lundi 15 avril 2024 à 14h30.

En application de l'article 474 du code de procédure civile, le présent arrêt est réputé contradictoire, les intimés ayant été cités à personne et n'ayant pas constitué avocat.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DE L'APPELANTE :

Selon ses dernières conclusions, notifiées par actes d'huissier du 28 septembre 2023 et du 29 septembre 2023 aux intimés, Mme [V] demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable et fondé,

- infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

- juger que les manquements sont suffisamment graves aux obligations qui sont imparties à la Sas Sun et Eau Antilles Guyane,

En conséquence,

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la Sas Sun et Eau Antilles Guyane,

- dire que la résiliation sera effective à la date de rupture du contrat soit le 3 octobre 2022,

- condamner la Sas Sun et Eau Antilles Guyane, prise en la personne de Maître [X] [L], liquidateur judiciaire de la Selarl Montravers [L], à lui payer les sommes suivantes:

* 3789,82 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2674 euros à titre d'indemnité du préjudice financier,

- condamner la Sas Sun et Eau Antilles Guyane, prise en la personne de Maître [X] [L], liquidateur judiciaire de la Selarl Montravers [L], aux entiers dépens,

- déclarer la décision à intervenir opposable à l'Unedic Délégation Ags Cgea qui en garantira le paiement.

Mme [V] soutient que :

- il convient d'examiner le bien fondé de sa demande de résiliation judiciaire, celle-ci étant antérieure à son licenciement pour motif économique,

- l'employeur a méconnu ses obligations de paiement des salaires, justifiant le prononcé de la résiliation judiciaire à ses torts exclusifs,

- elle a subi un préjudice financier dont elle justifie.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions de l'appelante pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions.

MOTIFS :

Sur la résiliation judiciaire :

En ce qui concerne le bien-fondé de la demande de résiliation judiciaire :

Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour motif économique ou que le contrat de travail prend fin par suite de l'adhésion du salarié à une convention de reclassement personnalisé, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est justifiée.

Le salarié peut poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur si elle apparaît justifiée par des manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations, de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

Lorsqu'elle est justifiée, la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur prend les effets d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse avec toutes ses conséquences de droit. La rupture est prononcée au jour de la décision, sauf si le contrat de travail a déjà été rompu et que le salarié n'est plus au service de son employeur.

En l'espèce, Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes le 31 août 2022 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, puis son contrat de travail a été rompu pour motif économique le 24 octobre 2022. Il convient, dès lors d'examiner en premier le bien-fondé de la demande de résiliation judiciaire formulée par la salariée, liée au défaut de paiement de ses salaires par l'employeur.

S'il résulte des pièces du dossier que l'employeur n'a pas procédé au règlement des salaires de Mme [V] pour la période du mois juin à septembre 2022, il résulte de ses écritures que ceux-ci ont été versés aux mois de novembre et décembre 2022.

Toutefois, cette régularisation étant intervenue en cours de procédure initiée devant les premiers juges, mais postérieurement à la rupture du contrat de travail de la salariée par suite de son licenciement pour motif économique, celle-ci est fondée à se prévaloir d'un manquement qui, eu égard à sa durée, rendait impossible la poursuite du contrat de travail.

Dès lors, il convient de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de la salariée, aux torts exclusifs de l'employeur, qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la date du 3 octobre 2022 mentionnée dans les écritures de la salariée.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de ce chef de demande.

En ce qui concerne les conséquences financières de la résiliation judiciaire :

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, et compte tenu de l'ancienneté de la salariée de 13 mois, de son salaire moyen, de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (32 ans), de l'absence d'éléments relatifs à sa situation à l'issue de la cessation des relations contractuelles et des circonstances dans lesquelles celle-ci est intervenue, il convient d'accorder à la salariée une somme de 1895 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à un mois de salaire.

Cette créance sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la Sas Sun et Eau Antilles Guyane.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de ce chef de demande.

Sur la demande de dommages et intérêts :

L'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond.

Si Mme [V] se prévaut d'un préjudice financier lié au défaut de paiement de ses salaires par l'employeur durant quatre mois, elle n'en justifie pas par les pièces versées aux débats.

Toutefois, le préjudice moral, lié aux démarches qu'elle a été amenée à réaliser dans le contexte de non-paiement de ses salaires est établi par les différents courriels qu'elle a adressés à l'employeur dès le mois de juillet 2022.

Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme [V], lié au défaut de paiement de ses salaires en lui allouant la somme de 400 euros, qui sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Sun et Eau Antilles Guyane.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] sur ce point.

Sur les autres demandes :

Il convient de dire que le présent arrêt est opposable à l'Ags-Cgea de [Localité 5], dans la limite de ses garanties légales et réglementaires.

Infirmant le jugement déféré, il convient de condamner la Selarl Montravers [L], en la personne de Maître [L] [X], es-qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Sun et Eau Antilles Guyane, aux entiers dépens de première instance et d'appel et de dire que ces dépens seront pris en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 juin 2023 par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre entre Mme [V] [E] et la Sas Sun Eau Antilles Guyane,

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [V] [E] aux torts exclusifs de l'employeur,

Dit que cette résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse à la date du 3 octobre 2022,

Fixe les créances de Mme [V] [E] au passif de la liquidation judiciaire de la Sas Sun et Eau Guadeloupe aux sommes suivantes :

- 1895 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 400 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

Dit l'arrêt opposable à l'Ags-Cgea de [Localité 5], dans la limite de ses garanties légales et réglementaires,

Condamne la Selarl Montravers [L], en la personne de Maître [L] [X], es-qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Sun et Eau Antilles Guyane, aux entiers dépens de première instance et d'appel et dit que ces dépens seront pris en frais privilégiés de procédure collective.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00784
Date de la décision : 03/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-03;23.00784 ?
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