COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SPECIALE DES MINEURS
ARRÊT N° 11 DU 25 MARS 2024
R.G : N° 24/00061 - N° Portalis DBV7-V-B7I-DUTP
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Juge des enfants de BASSE-TERRE, décision attaquée en date du 19 Octobre 2023, enregistrée sous le n° 122/0063
APPELANT :
Monsieur [O] [W]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Comparant en personne
assisté de Maître Jeanne-Hortense LOUIS, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART (Toque 62)
INTIMES :
Monsieur [Y] [B] [Z]
C/M. [P] [X]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Non comparant, ni représenté
Madame [D] [K]
Comparante en personne
AIDE SOCIALE A L' ENFANCE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Non comparante, ni représentée
Madame [U] [E]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3] ( MARTINIQUE )
dispensée de comparaître en application des dispositions des articles 446-1 et 946 du Code de Procédure Civile
COMPOSITION DE LA COUR :
l'affaire a été débattue le 21 mars 2024, hors la présence du public, en chambre du conseil devant la cour composée de :
Monsieur Thomas Habu Groud, conseiller délégué à la protection de l'enfance suivant ordonnance du premier président en date du 4 décembre 2023, président,
Mme Rozenn Le Goff, conseillère,
Mme Annabelle Clédat, conseillère,
qui en ont délibéré
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 25 mars 2024.
MINISTERE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au Ministère Public représenté lors des débats par M. François Schuster, substitut général, qui a fait connaître son avis.
GREFFIER,
Lors des débats: Mme Valérie Souriant, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé hors la présence du public, en chambre du conseil, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par Monsieur Thomas Habu Groud, conseiller, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
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[T] [W] née le 6 février 2017 est issue des relations de M. [B] [Z] et Mme [H] [W]. Cette dernière s'est suicidée le 16 juillet 2019 et M. [Z] n'a pas reconnu l'enfant.
Par ordonnance du 19 novembre 2019, [T] a été provisoirement confié à l'aide sociale à l'enfance pour une durée de 6 mois avec orientation en famille d'accueil et il a été accordé à M. [Z] un droit de visite en présence d'un tiers deux fois par semaine, outre un droit de visite en présence d'un tiers pour les membres de la famille maternelle.
Par jugement du 24 juillet 2020, la mineure a été confiée à l'aide sociale à l'enfance pour une durée d'un an et il a été accordé à M. [Z] un droit de visite médiatisé. La décision relève que [T] se trouve au centre d'un conflit majeur entre M. [Z] et la famille maternelle qui le tient responsable du décès de Mme [W].
Par décision du 9 juillet 2021, la mesure de placement auprès de l'aide sociale à l'enfance a été levée et [T] a été confiée à sa tante maternelle, Mme [U] [E] qui réside en Martinique.
A la suite d'un courrier de Mme [E] indiquant ne plus être en capacité émotionnelle d'accueillir [T], le juge des enfants de Fort-de-France a ordonné la mainlevée du placement à son domicile et [T] a été confiée à l'aide sociale à l'enfance de Guadeloupe avec une orientation préconisée chez Mme [V] [A], son ancienne accueillante familiale.
Par jugement du 19 octobre 2023, le juge des enfants du tribunal judiciaire de Basse-Terre a notamment :
- confié [T] [W] au conseil départemental de la Guadeloupe Service de l'aide sociale à l'enfance;
- dit que M. [O] [W], Mme [D] [K] et Mme [U] [E] bénéficient d'un droit de visite et d'hébergement à l'appréciation du service gardien.
Par ordonnance du 22 décembre 2023, le juge des enfants du tribunal judiciaire de Basse-Terre a :
- rejeté la demande de Mme [U] [E] aux fins de séjour en Martinique, de [T] durant les fêtes de fin d'année;
- suspendu le droit de visite et d'hébergement de M. [O] [W], Mme [D] [K] et Mme [U] [E];
- maintenu un droit de visite à l'appréciation du service gardien et en lieu neutre au bénéfice de M. [O] [W], Mme [D] [K] et Mme [U] [E],
- dit les dépens seront supportés par l'Etat.
Par courrier recommandé avec accusé de réception envoyé le 11 janvier 2024, M. [O] [W] a interjeté appel à l'encontre de cette décision dont la date de notification ne ressort pas du dossier.
Par ailleurs, le juge aux affaires familiales a déclaré la mineure délaissée par son père biologique.
DEBATS A L'AUDIENCE :
Le président est entendu en son rapport.
M. [W] explique qu'il ne sait pas pourquoi son droit de visite et d'hébergement a été supprimé. Il ajoute qu'à Noël, sa compagne s'est fait opérer et ils n'ont pas pu accueilir [T].
Mme [K] indique qu'elle ne comprend pas cette sanction et qu'ils ne peuvent plus voir [T] ni lui téléphoner.
Me Louis, en sa plaidoirie, demande un planning pour accueillir [T] avant son éventuelle adoption. Elle explique que la mineure est très attachée à ses parents maternels.
Le ministère public, représenté par M. François Schuster, substitut général, a requis l'infirmation de l'ordonnance déférée.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la recevabilité de l'appel
Il ne ressort d'aucun élément du dossier que l'appel interjeté par M. [O] [W] aurait pu être formé tardivement.
Il est donc recevable en ce qui concerne les délais.
Sur le droit de visite et d'hébergement de la famille maternelle
Aux termes de l'article 371-4, alinéa 1, du code civil, l'enfant a le droit d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l'intérêt de l'enfant peut faire obstacle à l'exercice de ce droit.
En l'espèce, il ressort du rapport de situation de l'aide sociale à l'enfance en date du 18 octobre 2023 que depuis le retour de la mineure en Guadeloupe, M. [W] exerce effectivement le droit de visite et d'hébergement avec sa petite-fille à chaque vacance scolaire et que la mineure est très attachée à son grand-père.
Le rapport indique également que les visites de la mineure chez sa tante, Mme [K], se passaient très bien et étaient l'occasion pour [T] de voir ses frères [N] et [J]. Il précise aussi que [T] a tissé des liens forts avec sa famille maternelle qui représente un point d'ancrage dans son histoire.
Enfin, le service d'aide sociale à l'enfance conclut en faveur du maintien des liens avec le grand-père et la fratrie.
Au regard de ces éléments, il est de l'intérêt de l'enfant de maintenir les liens avec les membres de la famille maternelle, l'éventualité d'une adoption ne constituant nullement un obstacle à de tels liens.
Par conséquent, l'ordonnance entreprise sera infirmée sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de Mme [U] [E] aux fins de séjour en Martinique de [T] durant les fêtes de fin d'année.
Dès lors, le droit de visite et d'hébergement de M. [O] [W], Mme [D] [K] et Mme [U] [E] sera rétabli.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant en chambre du conseil, après débats en chambre du conseil, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel de M. [O] [W],
Infirme l'ordonnance du 22 décembre 2023 du juge des enfants du tribunal judiciaire de Basse, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de Mme [U] [E] aux fins de séjour en Martinique, de [T] durant les fêtes de fin d'année,
Statuant à nouveau,
dit que M. [O] [W], Mme [D] [K] et Mme [U] [E] bénéficient d'un droit de visite et d'hébergement à organiser avec le service gardien,
Laisse les dépens à la charge de l'Agent judiciaire de l'Etat.
Le greffier, Le président,