La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/03/2023 | FRANCE | N°23/00003

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 5ème ch (référés), 01 mars 2023, 23/00003


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE



5ème CHAMBRE CIVILE - REFERES



ORDONNANCE N° 7 DU 01 MARS 2023





N° RG 23/00003 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DQZF



Décision déférée à la cour :



DEMANDERESSE AU REFERE :



S.A.R.L. BOULANGERIE NOUVELLE

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Sarah CHARBIT-SEBAG, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY, substituée par Me LAPIN, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY








r>DEFENDEUR AU REFERE :



Monsieur [L] [D] [I]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Pierre-yves CHICOT, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY







...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

5ème CHAMBRE CIVILE - REFERES

ORDONNANCE N° 7 DU 01 MARS 2023

N° RG 23/00003 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DQZF

Décision déférée à la cour :

DEMANDERESSE AU REFERE :

S.A.R.L. BOULANGERIE NOUVELLE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sarah CHARBIT-SEBAG, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY, substituée par Me LAPIN, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY

DEFENDEUR AU REFERE :

Monsieur [L] [D] [I]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Pierre-yves CHICOT, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY

COMPOSITION DE LA COUR :

Les conseils des parties ont été entendus à l'audience publique des référés tenue le 1er février 2023 au Palais de justice de Basse-Terre par madame Marie Josée BOLNET, conseillère par délégation du premier président, assistée de madame Murielle LOYSON, greffière.

Contradictoire, prononcée publiquement le 1er mars 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du code de procédure civile.

Signée par madame Marie Josée BOLNET, conseillère, magistrate délégataire et par madame Murielle LOYSON, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat à durée indéterminée en date du 1er avril 2019 avec reprise d'ancienneté, Monsieur [L] [I] a été engagé par la société Boulangerie Nouvelle (SARL) en qualité de boulanger.

Le 10 mai 2022, Monsieur [L] [I] a assigné, en référé, la société Boulangerie Nouvelle devant le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre afin de la voir condamner au versement des sommes suivantes':

- 1'539,00 euros au titre de l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

- 1'539,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 3'000 euros au titre de dommages et intérêts,

- 3'078,88 euros au titre du licenciement pour inaptitude,

- 1'539,00 euros au titre de l'indemnité de congés payés,

- 49'128,98 euros au titre des salaires de septembre 2019 à mai 2022,

- 649,39 euros au titre des frais bancaires,

- 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande en outre la capitalisation des intérêts, les documents sociaux et la remise des bulletins de paie, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par ordonnance contradictoire en date du 10 octobre 2022, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, statuant en référé, a'notamment':

- condamné la société Boulangerie Nouvelle en la personne de son représentant légal à verser à Monsieur [L] [I] les provisions suivantes':

*49'128,98 euros au titre des salaires de septembre 2019 à septembre 2022,

*649,39 euros au titre des frais bancaires,

*1'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Boulangerie Nouvelle à remettre à Monsieur [L] [I] les bulletins de paie de mai et juin 2022, sous astreinte de 50'euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

- débouté Monsieur [L] [I] du reste de ses demandes,

- prononcé l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamné la société Boulangerie Nouvelle aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée à la cour sous le RG n° 22/00057 en date du 19 octobre 2022, la société Boulangerie Nouvelle a interjeté appel de cette décision.

Par acte d'huissier de justice du 5 janvier 2023, la société Boulangerie Nouvelle a, au visa des articles 514 et suivants du code de procédure civile, fait assigner devant la juridiction de céans Monsieur [L] [I], aux fins de':

- la déclarer recevable et bien fondée en sa demande,

- juger qu'elle a démontré les moyens sérieux d'annulation de la décision de première instance,

- juger qu'il existe des conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire prononcée,

En conséquence,

- ordonner la suspension de l'exécution de plein droit de la décision en date du 10 octobre 2022 rendue par le juge des référés du conseil de prud'hommes,

- condamner Monsieur [L] [I] à lui verser la somme de 2'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de son assignation et s'agissant des moyens sérieux de réformation, la société Boulangerie Nouvelle invoque la nullité de la saisine du conseil de prud'hommes en raison de l'absence de fondement juridique précis en violation de l'article 56 du code de procédure civile.

Elle relève également l'incompétence du juge des référés en raison de l'existence d'une contestation sérieuse, en l'absence d'urgence et de trouble manifestement illicite.

Elle expose des moyens de défense au fond qui permettent de démontrer que c'est à bon droit qu'elle a suspendu le versement du salaire de Monsieur [L] [I], ce dernier n'ayant pas justifié son absence et n'ayant pas exécuté ses obligations professionnelles.

Quant aux conséquences manifestement excessives, la société Boulangerie Nouvelle indique se trouver dans une situation financière difficile qui la contraindrait à engager des procédures de licenciement économique à l'égard de ses salariés.

Selon ses conclusions en date du 31 janvier 2023, Monsieur [L] [I] demande au premier président de':

A titre principal,

- déclarer la demande de la société Boulangerie Nouvelle irrecevable,

A titre subsidiaire,

- dire la demande de la société Boulangerie Nouvelle injustifiée,

En conséquence,

- débouter la société Boulangerie Nouvelle de ses demandes,

- condamner la société Boulangerie Nouvelle aux frais irrépétibles et la condamner à lui verser à ce titre la somme de 3'000 euros,

- condamner la société Boulangerie Nouvelle aux entiers dépens dont distraction le cas échéant au profit de Maître Pierre-Yves Chicot.

A l'appui de ses prétentions, Monsieur [L] [I] indique que la Société Boulangerie Nouvelle a comparu en première instance sans formuler d'observations sur l'exécution provisoire. Il précise qu'aucune conséquence manifestement excessive n'a été révélée après la décision rendue en première instance. En effet, l'état des finances de la société avait déjà été versé aux débats. Il précise, dans l'hypothèse où les conséquences manifestement excessives seraient examinées, qu'il se trouve dans une situation financière très difficile et rappelle par ailleurs que son employeur n'a pas sollicité des délais de paiement en première instance. Ce dernier ne démontre pas en quoi les sommes au paiement desquelles il a été condamné ne lui seraient pas dues.

Concernant l'existence du moyen sérieux de réformation tiré de la nullité de la saisine du conseil de prud'hommes, il soutient que l'article 56 du code de procédure civile, d'une part vise spécifiquement l'assignation et ne concerne pas le mode de validité d'une requête, et d'autre part nécessite la preuve d'un grief qui n'est pas démontré en l'espèce. Il invoque des éléments ayant trait au fond du litige pour expliquer la condamnation de la société Boulangerie Nouvelle au paiement de salaires. Il ajoute que le préjudice qu'il a subi motive la condamnation en première instance de son employeur au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en précisant qu'aucune démonstration n'est faite tendant à prouver que sa demande à ce titre n'a pas été formulée oralement devant le conseil de prud'hommes.

A l'audience du 1er février 2023, le conseil de la société demanderesse corrigeait en partie ses prétentions, notamment celle relative à l'exception de nullité de la saisine du conseil de prud'hommes, se prévalant cette fois de l'article 57 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'action

La société Boulangerie Nouvelle justifie de la déclaration d'appel du 19 octobre 2022 (pièce n°21). Son action sera déclarée recevable.

Sur le bien-fondé de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

1- A titre liminaire, il importe de rappeler qu'en vertu de l'article R1454-28 du code du travail, "A moins que la loi ou le règlement n'en dispose autrement, les décisions du conseil de prud'hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire. Le conseil de prud'hommes peut ordonner l'exécution provisoire de ses décisions.

Sont de droit exécutoires à titre provisoire, notamment :

1° Le jugement qui n'est susceptible d'appel que par suite d'une demande reconventionnelle ;

2° Le jugement qui ordonne la remise d'un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer ;

3° Le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement."

Eu égard à ces dispositions, l'ordonnance rendue en référé le 10 octobre 2022 par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre est par sa nature juridique une décision provisoire qui répond non seulement aux critères énoncés par les 2° et 3° de l'article ci-dessus, ce qui fait d'elle une décision exécutoire de droit à titre provisoire, mais également' une décision dont l'exécution à titre provisoire a été ordonnée par le premier juge pour l'ensemble.

2- Aux termes de l'article 514-3 du code de procédure civile, «'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

En cas d'opposition, le juge qui a rendu la décision peut, d'office ou à la demande d'une partie, arrêter l'exécution provisoire de droit lorsqu'elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.'»

L'irrecevabilité de la demande est soulevée par Monsieur [L] [I] au visa du deuxième alinéa de cet article.

La lecture de l'ordonnance querellée révèle que la société Boulangerie Nouvelle, défenderesse, était représentée en première instance et n'a formulé aucune observation relative à l'exécution provisoire devant le conseil de prud'hommes.

Dans ces conditions, l'alinéa 2 de cet article trouve à s'appliquer en l'espèce.

Il ressort du dossier que les éléments développés par la société demanderesse s'agissant des conséquences manifestement excessives ne peuvent être considérés comme nouveaux dans la mesure où il n'est versé au débat aucun document comptable, aucune pièce fiscale permettant de comparer les situations financières de cette société antérieurement et postérieurement à l'ordonnance du 10 octobre 2022. Il n'est pas davantage démontré le moindre risque de licenciement économique dont elle se prévaut.

Les conditions posées par l'article 514-3 alinéa 2 du code de procédure civile ainsi que celles du 2° de l'article 517-1 du même code étant cumulatives, il n'y a pas lieu à examen de la première condition posée par ces articles se rapportant à l'existence d'un moyen sérieux de réformation, qui en l'occurrence est difficilement soutenable en matière de salaires non versés au salarié durant une période si longue , à savoir de septembre 2019 à septembre 2022 .

Les conditions des articles précités n'étant pas réunies, la demande d'arrêt de l'exécution provisoire sera rejetée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'y a pas lieu, en équité, à application particulière des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La demanderesse succombant dans ses demandes, les dépens seront, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, laissés à sa charge.

Le ministère de l'avocat n'étant obligatoire en matière de procédure orale, la demande formulée par M. [I] au titre de la distraction prévue par l'article 699 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, non susceptible de pourvoi,

Déclarons l'action entreprise recevable,

Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance rendue par le conseil de prud'hommes le 10 octobre 2022,

Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Laissons les dépens à la charge de la société Boulangerie Nouvelle,

Rejetons le surplus des demandes, plus amples ou contraires.

Fait à Basse-Terre, au Palais de Justice, le 1er mars 2023,

Et ont signé la présente ordonnance,

Le greffier La conseillère délégataire


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 5ème ch (référés)
Numéro d'arrêt : 23/00003
Date de la décision : 01/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-01;23.00003 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award