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07/02/2022 | FRANCE | N°20/007631

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 07 février 2022, 20/007631


VS/RLG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 22 DU VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN

AFFAIRE No : No RG 20/00763 - No Portalis DBV7-V-B7E-DH52

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 25 septembre 2020 - Section Activités Diverses -

APPELANTE

Madame [P] [M]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par M. [C] [N] (Défenseur Syndical)

INTIMÉE

S.A.R.L. RAYMOND GABRIEL ET COMPAGNIE Prise en la personne de son représentant légal domicilié ès-qualité audit

siège
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Maître Alexandra LEGUIDE de la SELEURL LEGUIDE ASSOCIE, avocat au barreau de...

VS/RLG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 22 DU VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN

AFFAIRE No : No RG 20/00763 - No Portalis DBV7-V-B7E-DH52

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 25 septembre 2020 - Section Activités Diverses -

APPELANTE

Madame [P] [M]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par M. [C] [N] (Défenseur Syndical)

INTIMÉE

S.A.R.L. RAYMOND GABRIEL ET COMPAGNIE Prise en la personne de son représentant légal domicilié ès-qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Maître Alexandra LEGUIDE de la SELEURL LEGUIDE ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS et Maître Florence BARRE AUJOULAT, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 4 octobre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mesdames Rozenn Le Goff et Marie-Josée Bolnet, conseillères, chargées d'instruire l'affaire.

Ces magistrast ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente,
Mme Marie-Josée Bolnet, conseillère,
Mme Annabelle Clédat, conseillère,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 22 novembre 2021 date à laquelle le prononcé de l'arrêt a été prorogé au 7 février 2022.

GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie Sourirant, greffier.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE

Après plusieurs contrats à durée déterminée du 13 août 2008 au 22 septembre 2009, Mme [P] [M] a été embauchée par la SARL Raymond Gabriel et Cie suivant contrat à durée indéterminée du 21 septembre 2009, en qualité d'aide-soignante.

La SARL Raymond Gabriel et Cie emploie moins de 50 salariés et a pour objet l'exploitation de la clinique médico-génico-obstrético-chirurgicale "La Violette", ayant une activité exclusive de soins de suite et de réadaptation.

La SARL Raymond Gabriel et Cie relève de la convention collective d'hospitalisation privée à but lucratif.

Par courrier du 31 janvier 2018, Mme [P] [M] a fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire en raison de deux actes qualifiés par l'employeur comme étant "de maltraitance" sur patients en date des 16 et 17 janvier 2018. Cette mise à pied a été contestée par Mme [P] [M] par lettre du 6 février 2018 et confirmée par l'employeur le 22 mars 2018.

Le 22 février 2018, la SARL Raymond Gabriel et Cie a affiché un nouveau planning horaires destiné à l'ensemble du personnel aide-soignant pour la période allant du 05 mars 2018 au 25 mai 2018.

Mme [P] [M] a été en congés du 26 février 2018 au 13 mars 2018.

A son retour, le 14 mars 2018, elle a été convoquée par la cadre de santé Mme [W] afin de discuter du changement de planning intervenu.

Par courrier adressé en lettre recommandée avec avis de réception en date du 19 mars 2018, Mme [P] [M] a contesté la modification du planning en invoquant le fait de l'existence d'un accord verbal la dispensant de travailler les vendredis après-midi et samedis toute la journée.

A la suite de ce courrier, Mme [P] [M] ne s'est pas présentée à son poste le samedi 24 mars 2018.

Le 27 mars 2018, Mme [L] [X], gérante et directrice, a reçu Mme [P] [M] suite à sa demande afin qu'elle puisse s'expliquer sur son absence.

Par lettre recommandée avec avis de réception, en date du 28 mars 2018, la SARL Raymond Gabriel et Cie a sanctionné par un avertissement l'absence de Mme [P] [M].

Mme [P] [M] s'est par la suite à nouveau absentée les vendredi 30 mars 2018 après- midi, samedi 7 avril 2018, samedi 21 avril 2018 et vendredi 27 avril 2018 après-midi.

Par courrier en date du 30 avril 2018, adressé en lettre recommandée avec avis de réception, la SARL Raymond Gabriel et Cie a convoqué Mme [P] [M] à un entretien préalable qui s'est tenu le 14 mai 2018.

Par courrier en date du 18 mai 2018, la SARL Raymond Gabriel et Cie a notifié à sa salariée son licenciement pour faute grave.

Soutenant que son licenciement serait dépourvu de cause réelle et sérieuse, Mme [P] [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Basse-Terre par requête du 15 janvier 2019 afin d'obtenir le paiement de diverses sommes en lien avec la rupture de son contrat de travail ainsi que des documents de fin de contrat modifiés.

Par jugement du 25 septembre 2020, le bureau de départage du conseil de prud'hommes de Basse-Terre a :
DIT que le licenciement pour faute grave de Mme [P] [M] est parfaitement justifié ;
DÉBOUTÉ Mme [P] [M] de sa demande de mesures complémentaires d'instruction par l'audition des représentants du personnel et la communication des procès-verbaux de réunion ;
DÉBOUTÉ Mme [P] [M] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
DÉBOUTÉ Mme [P] [M] de sa demande de paiement des salaires pendant sa mise à pied conservatoire ;
DÉBOUTÉ Mme [P] [M] de sa demande de paiement de congés payés sur ces salaires ;
DÉBOUTÉ Mme [P] [M] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis ;
DÉBOUTÉ Mme [P] [M] de sa demande de congés payés sur préavis ;

Par déclaration du 22 octobre 2020, Mme [P] [M] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 29 septembre 2020.

Les parties ont conclu et l'ordonnance de clôture est intervenue le 24 juin 2021.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon ses dernières conclusions notifiées le 11 janvier 2021, Mme [P] [M] demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 septembre 2020 par le Conseil de prud'hommes de Basse-Terre, section activités diverses, en sa formation de départage et de :
- Dire et juger que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse.
- Condamner la SARL Raymond Gabriel et Cie à lui payer les sommes suivantes :
Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 21 074,40 euros
Salaire afférent à la mise à pied conservatoire : 1 401,75 euros
Congés payés sur salaire : 140,18 euros
Indemnité compensatrice de préavis : 4 683,20 euros
Congés payés sur préavis : 429,13 euros
Indemnité de licenciement : 5 805,22 euros
Et à lui délivrer un nouveau certificat de travail, une nouvelle attestation pôle emploi et une nouvelle fiche de paie pour le mois mai 2018.
- Ordonner l'audition des témoins cités ainsi que celle des salariés qui étaient représentants du personnel à l'époque des faits.

Mme [P] [M] expose, en substance, que :
- dès son embauche, il avait été convenu avec l'employeur qu'elle ne travaillerait jamais le vendredi et le samedi, ceci pour des raisons religieuses ; et de fait, n'a jamais travaillé ces jours-là, sans que cela perturbe le fonctionnement du service ;
- son licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse, dans la mesure où celui-ci a été prononcé alors qu'elle avait refusé la modification substantielle de son contrat de travail ;
- les contrats de travail à durée déterminée qu'elle a conclus avec la SARL Raymond Gabriel et Cie l'ont été en fraude à la loi puisque sans respect du délai de carence et alors, au surplus, que pendant plus d'un an elle a occupé le même poste d'aide soignante dans un emploi lié à l'activité normale et permanente de la clinique La Violette ;
- quant à elle, n'a jamais fait preuve de mauvaise volonté, allant jusqu'à proposer de travailler selon le nouveau planning, étant entendu que les vendredis et samedis travaillés seraient considérés comme un service qu'elle viendrait rendre à la clinique et non un travail ;
- l'employeur a refusé cette offre, lui proposant de travailler du lundi au vendredi de 8h00 à 13h00, soit 25 heures par semaine ;
- ainsi ce qui était possible dans le cadre d'une durée hebdomadaire de 25 heures ne l'était pas dans celui d'une durée hebdomadaire de 35 heures ;
- l'employeur savait pertinemment qu'elle n'aurait pas accepté cette proposition de travail à temps partiel et qu'il pourrait ainsi procéder à son licenciement sans avoir à lui payer les indemnités liées à la rupture ;
- rien n'obligeait la SARL Raymond Gabriel et Cie à modifier son contrat de travail et l'audition des représentants du personnel ne pourrait qu'en attester ;
- en commettant cet abus de droit la SARL Raymond Gabriel et Cie a tout simplement voulu lui faire payer son impertinence, à savoir le refus de l'avertissement qui lui avait été infligé ;
- son licenciement a été prononcé de manière vexatoire et elle est fondée à réclamer l'allocation d'une indemnité en réparation du préjudice tant moral que financier qu'elle a subi.

Selon ses dernières conclusions notifiées le 8 avril 2021, la SARL Raymond Gabriel et Cie demande à la cour de :
- Confirmer en tous points le jugement du conseil de prud'hommes en date du 25 septembre 2020
- Dire et juger qu'elle était en droit de modifier le planning de Mme [P] [M] s'agissant de la faire travailler le vendredi après-midi ou le samedi, s'agissant de jours ouvrables, sans requérir son accord préalable ;
- Constater l'absence d'un quelconque accord de nature à engager à ne pas faire travailler ses salariés le vendredi après-midi et le samedi ;
- Constater qu'elle n'a pas abusé de son pouvoir de direction en demandant à Mme [P] [M] de venir travailler le vendredi après-midi et le samedi ;
- Dire que le licenciement pour faute grave du fait de ses absences répétées le vendredi après-midi et le samedi de Mme [P] [M] suite à la mise en place du nouveau planning est parfaitement justifié ;
- Constater l'absence de licenciement à caractère vexatoire ;
- Débouter Mme [P] [M] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner Mme [P] [M] à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- Condamner Mme [P] [M] aux entiers dépens.

La SARL Raymond Gabriel et Cie expose, en substance, que :
- le changement d'horaire ne nécessite pas, en principe, l'accord du salarié ;
- il ne peut lui être reproché d'avoir procédé à la modification du planning de Mme [P] [M], dès lors qu'en sa qualité d'employeur elle n'a fait que mettre en oeuvre son pouvoir de direction ;
- Mme [P] [M] n'apporte aucune preuve de l'existence d'un quelconque « accord » verbal que ce soit et encore moins écrit concernant le fait qu'il aurait été convenu que la salariée ne devrait en aucun cas travailler le vendredi après-midi et le samedi toute la journée ;
- les changements de plannings ont été opérés suite à la demande des salariés lors de réunions prévues à cet effet, et en aucun cas de façon discrétionnaire ;
- ces changements concernaient l'ensemble des salariés du service et non pas simplement Mme [P] [M] ;
- Mme [P] [M] a eu parfaitement connaissance du nouveau planning dès le 23 février 2018 (elle était en poste le matin ce jour-là), qui prévoyait un changement la concernant prévu un mois plus tard, le 24 mars 2018 ;
- en étant délibérément absente les vendredis après-midi et samedis suivants, mentionnés sur le nouveau planning, malgré un avertissement sanctionnant une première absence le 24 mars 2018,
Mme [P] [M] a commis une faute grave justifiant son licenciement, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une mesure d'instruction ;
- Mme [P] [M] n'apporte d'aucune manière la preuve que son licenciement aurait été prononcé de manière vexatoire.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I / Sur la cause du licenciement

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis. La preuve en incombe à l'employeur.

La lettre de licenciement en date du18 mai 2018, qui fixe la limite du litige, est rédigée comme suit : « Suite à notre entretien du 14 mai 2018 avec Mme [L] [X] (assistée de Mme [F] [W], Cadre de santé salariée dans l'entreprise) lors duquel vous étiez assistée par Mme [H] [E] et avez ainsi pu faire valoir vos observations, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour faute grave en raison de vos absences répétées et injustifiées.
Votre contrat de travail d'aide-soignante à durée indéterminée en date du 21 septembre 2009 prévoit à l'article 4 "Horaires de travail" que :
" les horaires de travail du salarié seront ceux en vigueur au sein de son service tels qu'affichés.
Mme [P] [M] est informée que ces horaires de travail sont susceptibles d'évoluer et donc d'être modifiés ce qu'elle accepte expressément (?)"
En date du 22 février 2018, un nouveau planning horaire pour la période du 5 mars 2018 au 25 mai 2018 a été affiché pour l'ensemble du personnel aide-soignant.
La modification de ce planning est intervenue suite à la demande d'une très grande majorité du personnel lors de réunions sur la qualité de vie au travail organisées avec l'ANACT et L'AGENCE RÉGIONALE DE SANTÉ et a notamment visé à permettre une meilleure répartition des vendredis et des samedis travaillés entre les différent(e)s aides soignant(e)s.
Par courrier recommandé AR en date du 19 mars 2018, vous avez fait part de votre désaccord s'agissant de venir travailler le vendredi après-midi et le samedi, demandant à la Direction de revoir sa position quant à la modification des plannings.
Vous avez été en absence injustifiée le 24 mars 2018, ce qui a justifié un avertissement le 28 mars 2018 dans lequel il vous était exposé que « nous maintenons les nouveaux horaires décidés en collectif pour la bonne organisation du service ».
Nonobstant cet avertissement et faisant à nouveau fi du pouvoir de direction de l'employeur, vous avez réitéré la faute reprochée, en étant à nouveau absente et ce sans aucune justification valable, en contradiction avec vos obligations liées à votre contrat de travail :- Le vendredi après-midi 30 mars ;
- Le samedi 7 avril 2918 ;
- Le samedi 21 avril 2018;
- Le vendredi après-midi 27 avril 2018.
Or nous vous rappelons que vos absences répétées et injustifiées perturbent gravement le bon fonctionnement du Service qui se doit pourtant d'assurer une continuité sans faille des soins à prodigués à nos patients, et étant précisé que celles-ci obligent vos collègues à pallier vos propres manquements, ce qui est inacceptable.
Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise est ainsi impossible.
Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement.
Vous avez fait par ailleurs l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifiée verbalement le 30 avril 2018 et qui vous a été confirmée par lettre recommandée AR du même jour.
Dès lors, la période non travaillée du 30 avril 2018 au 18 mai 2018 ne sera pas rémunérée.
Enfin, nous vous adresserons par courrier votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi.(?) ».

L'employeur reproche ainsi à Mme [P] [M] des absences répétées et injustifiées perturbant le bon fonctionnement du service.

Mme [P] [M] ne conteste pas avoir eu connaissance du nouveau planning horaire affiché par l'employeur le 22 février 2018, destiné à l'ensemble du personnel aide-soignant pour la période du 05 mars 2018 au 25 mai 2018.

Mme [P] [M] ne conteste pas davantage que selon ce planning elle devait travailler le vendredi après-midi 30 mars 2018, le samedi 7 avril 2918, le samedi 21 avril 2018 et le vendredi après-midi 27 avril 2018, ce qu'elle n'a pas fait.

* Sur l'existence d'un accord dispensant Mme [P] [M] de travailler le vendredi après-midi et le samedi

C'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Basse-Terre a retenu que Mme [P] [M] ne prouvait pas l'existence d'un tel accord.

Il suffit de rappeler que :
- le contrat de travail à durée indéterminée signé le 21 septembre 2008 par Mme [P] [M] prévoit en son article 4 "HORAIRES DE TRAVAIL" : "les horaires de travail du salarié seront ceux en vigueur au sein de son service tels qu'affichés. Mademoiselle [P] [M] est informée que ces horaires de travail sont susceptibles d'évoluer et donc d'être modifiés ce qu'elle accepte expressément. Mademoiselle [P] [M] pourra être appelée à effectuer des heures supplémentaires à la demande expresse de sa direction" ;
- il est expressément indiqué dans ses trois premiers contrats à durée déterminée, signés en 2008, que : « La durée du travail est établie en fonction des heures qu'elle aura effectuées (selon le planning),Elle peut varier en fonction des dispositions du contrat de travail, Melle [P] [M] s'engage à effectuer un travail selon les horaires fixes, variables, alternés, de jour, qui lui sont précisés par le chef de service ou son remplaçant ».
- ses trois contrats à durée déterminée suivants, signés en 2009, comportent une clause rédigée comme suit : « Il est expressément convenu que, sous réserve d'un délai de prévenance de 7 jours ouvrés, cette répartition pourra être modifiée » et que « Ces modifications pourront conduire : à une répartition de l'horaire sur tous les jours ouvrables du mois et toutes plages horaires, sans restriction » ;
- la fiche de poste approuvée par Mme [P] [M] le 28 novembre 2017 prévoit qu'elle exerce le poste "d'aide soignante qualifiée de jour" et s'agissant de ses horaires de travail : "les plages horaires sont fixées à 6 heures 45 - 14 heures et/ou 13 heures 45 - 21 heures (voir planning)..

La cour relève en outre qu'aucune des attestations produites en cause d'appel ne prouve que l'employeur se serait engagé verbalement à dispenser Mme [P] [M] de travailler le vendredi après-midi et/ou le samedi.

* Sur le pouvoir de l'employeur de modifier le planning des salariés

Il est de jurisprudence constante que la modification du planning des salariés relève du pouvoir de direction de l'employeur et ne nécessite donc pas, en principe, l'accord du salarié, sauf atteinte excessive à sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos.

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que le changement de planning des aide-soignants affiché le 22 février 2018, découlait d'études menées au sein de la clinique dès septembre 2017, divers sondages et réunions (des 7 septembre, 3 octobre, 14 novembre et 5 décembre 2017, 30 janvier 2018) ayant démontré la nécessité de modifier ce planning en réponse à de réels besoins des salariés eux-mêmes, à la recherche d'une certaine équité dans la répartition de leurs jours de travail ; que c'est donc de manière collective et concertée que la SARL Raymond Gabriel et Cie a entendu lisser les horaires de travail de ses salariés.

Contrairement à ce que soutient Mme [P] [M], rien au dossier ne permet de juger que l'employeur aurait agi dans le but de sanctionner son impertinence lors de la contestation de sa mise à pied du 31 janvier 2018.

Conclusion

Ainsi que l'a justement retenu le juge départiteur, le changement des horaires de travail de Mme [P] [M] tels qui ont été faits dans le respect des dispositions de son contrat de travail et des plannings de service, ne nécessitait donc pas son accord préalable. Elle ne rapporte d'ailleurs pas plus pas la preuve que l'instauration de cette nouvelle répartition de travail ait porté une atteinte excessive au respect de sa vie privée, familiale ou à son droit de repos l'ayant conduit à ne pas se présenter à son poste.

Dès lors, en refusant de se soumettre au nouveau planning décidé par la direction et en s'absentant de son poste plusieurs fois pour convenance personnelle, alors au surplus qu'elle avait déjà reçu un avertissement pour ce motif le 28 mars 2018, Mme [P] [M] a commis une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise.

Le jugement entrepris sera ainsi confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [P] [M] était parfaitement justifié, sans qu'il soit utile d'ordonner une mesure d'instruction.

II/ Sur les conséquences financières du licenciement

La salariée licenciée pour faute grave ne peut qu'être déboutée de ses demandes d'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et de congés payés y afférents, de paiement des salaires pendant sa mise à pied conservatoire et de congés payés sur ces salaires.

Mme [P] [M] ne produit pas le moindre commencement de preuve de ce que les conditions de son licenciement auraient était vexatoires.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

III / Sur les demandes annexes

Le licenciement de Mme [P] [M] pour faute grave étant justifié, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise d'un nouveau certificat de travail, d'une nouvelle attestation pôle emploi ni d'une nouvelle fiche de paie pour le mois de mai 2018.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande.

Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné Mme [P] [M] à verser à SARL Raymond Gabriel et Cie la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu d'en rajouter en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Basse-Terre le 25 septembre 2020, en toutes ses dispositions ;

Condamne Mme [P] [M] aux dépens ;

Rejette le surplus des demandes, plus amples ou contraires.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/007631
Date de la décision : 07/02/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2022-02-07;20.007631 ?
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