COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRÊT No23 DU 10 JANVIER 2022
No RG 21/00535
No Portalis DBV7-V-B7F-DKF2
Décision déférée à la cour : Jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Basse-Terre, décision attaquée en date du 26 Avril 2021, enregistrée sous le no 11-20-000331
APPELANTES :
Madame [E] [F] [S]
[Adresse 13]
[Localité 6]
Représentée par Me Mahamadou Tandjigora, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
Madame [WV] [YN] [S]
[Adresse 13]
[Localité 6]
Représentée par Me Mahamadou Tandjigora, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
INTIMES :
Monsieur [H] [C]
[Adresse 10]
[Localité 6]
Madame [EJ] [CR] épouse [K]
[Adresse 13]
[Localité 6]
Madame [HV] [CR] épouse [LG]
[Adresse 12]
[Localité 4]
Monsieur [B] [CR]
Le Moule
[Localité 8]
Madame [L] [CR]
[Adresse 13]
[Localité 6]
Monsieur [GC] [CR]
La Retraite
[Localité 5]
Monsieur [T] [CR]
[Adresse 13]
[Localité 9]
Monsieur [V] [CR]
[Adresse 11]
[Localité 7]
Madame [A] [CR] épouse [U]
[Adresse 11]
[Localité 7]
Monsieur [P] [CR]
[Adresse 13]
[Localité 6]
Monsieur [J] [R] [M]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Tous représentés par Me Hugues Joachim de la SELARL J - F - M, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 15 Novembre 2021, en audience publique, devant la cour composée de :
Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre,
Mme Christine Defoy, conseillère,
Mme Annabelle Cledat,conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait rendu par sa mise à disposition au greffe de la cour le 10 Janvier 2022.
GREFFIER,
Lors des débats et lors du prononcé :Mme Armélida Rayapin, Greffière.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. Signé par Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre et par Mme Armélida Rayapin, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Suivant correspondance reçue au greffe le 22 juin 2020, Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] ont saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Basse-Terre pour contester leur expulsion de la parcelle noAM [Cadastre 1], sise à [Adresse 13], diligentée par Monsieur [H] [C], par Mme [EJ] [CR], épouse [K], par Mme [HV] [LG], née [CR], par M. [B] [CR], par Mme [L] [CR], par M. [GC] [CR], par Mme [T] [CR], par M. [V] [CR], par Mme [A] [CR], épouse [U], par M. [P] [CR] et par M. [J] [R] [M].
Elles ont demandé au juge de l'exécution de :
-les déclarer bien fondées en leur contestation,
-constater que la procédure d'expulsion initiée par l'huissier de justice [Z], à la demande des consorts [CR]/ [C], est nulle, en ce que les commandements en date des 25 mai et 9 juin 2020 ont été délivrés, nonobstant la signification irrégulière de l'arrêt du 18 décembre 2006 servant de base aux poursuites
-prononcer la nullité de la procédure d'expulsion irrégulière et manifestement infondée,
-condamner les consorts [CR]/ Marcelin à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, toutes causes de préjudice confondues,
-condamner les consorts [CR]/[C] à leur payer à chacune la somme de 1500 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 26 avril 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre a :
-débouté Mme [F] et Mme [WV] [S] de l'intégralité de leurs demandes,
-condamné Mme [F] et Mme [WV] [S] à payer à Monsieur [H] [C], à Mme [EJ] [CR], épouse [K], à Mme [HV] [LG], née [CR], à M. [B] [CR], à Mme [L] [CR], à M. [GC] [CR], à Mme [T] [CR], à M. [V] [CR], à Mme [A] [CR], épouse [U], à M. [P] [CR] et à M. [J] [R] [M] la somme de 1500 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l'instance
Le 13 mai 2021, Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] ont interjeté appel total du jugement déféré.
Suite à l'orientation de la procédure à bref délai et à l'avis notifié par le greffe le 8 juin 2021, les appelantes ont fait signifier leur déclaration d'appel aux intimés les 11, 14 et 15 juin 2021, lesquels ont régularisé leur constitution par la voie électronique le 21 juin 2021.
Les parties ayant conclu, l'affaire a été fixée et clôturée à l'audience du 15 novembre 2021 à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré au 10 janvier 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
1/ Mme [F] [S] et Mme [WV] [S], appelantes :
Vu les conclusions notifiées le 1er juillet 2021 par Mme [F] [S] et par Mme [WV] [S], par lesquelles celles-ci demandent à la cour de :
-les recevoir en leur appel et le dire bien fondé,
-y faisant droit, constater que la procédure d'expulsion initiée par l'huissier de justice [Z], à la demande des consorts [CR]/ [C], est nulle en ce que les commandements en date des 25 mai et du 9 juin 2020 reposent sur un arrêt qui ne leur a pas été régulièrement précisé,
-constater que cette procédure d'expulsion irrégulière et manifestement infondée a porté atteinte à leurs droits légitimes, ce qui est source d'un immense préjudice moral et matériel,
-en conséquence, infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge de l'exécution en date du 26 avril 2021,
-statuant à nouveau, prononcer la nullité de la procédure d'expulsion irrégulière et manifestement infondée initiée par l'huissier de justice [Z], à la demande des consorts [CR]/[C],
-débouter les consorts [CR] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
-reconventionnellement, condamner les consorts [CR]/[C] à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, toutes causes de préjudices confondues,
-condamner les consorts [CR]/[C] à leur payer à chacune la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
2/ M. [H] [C], Mme [EJ] [CR], épouse [K], Mme [HV] [LG], née [CR], M. [B] [CR], Mme [L] [CR], M. [GC] [CR], Mme [T] [CR], M. [V] [CR], Mme [A] [CR], épouse [U], à M. [P] [CR] et à M. [J] [R] [M], intimés,
Vu les conclusions récapitulatives notifiées le 10 novembre 2021 par lesquelles les intimés demandent à la cour de :
-déclarer Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] recevables en leur appel,
-confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
-condamner les appelantes à leur payer la somme de 3000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
MOTIFS :
Sur la régularité de la procédure d'expulsion,
Les appelantes critiquent le jugement déféré qui les a déboutées de leurs prétentions tendant à voir déclarer nulle et infondée la procédure d'expulsion diligentée à leur encontre par les consorts [CR]/[C].
Pour ce faire, elles font valoir que l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre en date du 18 décembre 2006, servant de base aux poursuites, ne leur a pas été régulièrement signifié. Elles exposent que la signification de ladite décision faite le 6 mars 2007 à la personne de Mme [F] [S] et le 9 mars suivant à Mme [WV] [S], dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile, n'est pas régulière, dès lors que l'huissier instrumentaire n'a pas réalisé toutes les diligences nécessaires pour tenter de trouver l'adresse de la signifiée.
En outre, les s?urs [S] indiquent qu'elles ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion, dès lors qu'elles justifient être propriétaires de la parcelle litigieuse.
Sur le premier moyen, il résulte de l'examen des actes de signification et plus particulièrement de celui concernant Mme [WV] [S], intervenu le 9 mars 2007, dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile, que l'huissier instrumentaire s'est transporté à l'adresse déclarée par les requérants et qu'il a constaté qu'aucune personne ne répondait à l'identification du destinataire de l'acte, ni à son domicile ou sa résidence.
L'huissier a alors indiqué qu'il avait procédé à des vérifications auprès des voisins, des commerçants, du facteur et qu'il s'avérait que le destinataire de l'acte ne résidait plus à cette adresse.
Les appelantes considèrent ces vérifications insuffisantes et reprochent à l'huissier de ne pas avoir sollicité les services de la mairie, de ne pas avoir sérieusement interrogé les voisins immédiats et de ne pas avoir consulté les annuaires téléphoniques.
Toutefois, force est de constater que les voisins ont été consultés et que les appelantes ne démontrent nullement que ces investigations n'ont pas été réalisées de manière sérieuse.
Pour le surplus, l'huissier instrumentaire apprécie en opportunité la nature des investigations à réaliser. La consultation des services de la mairie et des annuaires n'ont nullement un caractère obligatoire.
Dès lors que dans l'acte de signification, l'huissier a précisé, comme en l'espèce de manière détaillée, la nature des diligences qu'il a accomplies, qu'elles se sont avérées suffisantes et qu'il a caractérisé ainsi son impossibilité matérielle de signifier l'acte à personne, il a répondu aux exigences de l'article 659 du code de procédure civile.
En outre, Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] reprochent à l'huissier de ne pas avoir respecté les prescriptions de l'article 659 alinéa 2 du code de procédure civile et de ne pas avoir envoyé au destinataire de l'acte, le même jour ou au plus tard le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, une copie de l'acte, objet de la signification, à sa dernière adresse connue, par lettre recommandée avec avis de réception, cette formalité étant requise à peine de nullité.
Toutefois, s'agissant d'une nullité pour vice de forme relevant de l'article 114 du code de procédure, elle ne peut prospérer que lorsque le destinataire de l'acte est en mesure de se prévaloir d'un grief. Or, force est de constater que les appelantes s'avèrent défaillantes à l'effet de caractériser le grief qu'elles auraient subi du fait de l'absence d'envoi de cette lettre recommandée.
Il résulte donc de ce qui précède que l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 18 décembre 2006 a été régulièrement signifié aux appelantes et constitue donc un titre exécutoire valable sur le fondement duquel peut être diligentée la procédure d'expulsion critiquée.
Cette procédure est par ailleurs parfaitement régulière puisque l'huissier instrumentaire, après avoir signifié aux s?urs [S] un commandement de quitter les lieux dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile, le 18 janvier 2020, a repris la procédure après avoir obtenu leurs adresses respectives en métropole.
C'est dans ces conditions que le 15 mai 2020, Maître [G] [Z] a adressé un courrier aux appelantes, leur indiquant que les clés d'accès à la maison leur avaient été restituées. Il leur a ensuite signifié à personne un nouveau commandement de quitter les lieux à leur adresse de métropole.
Il s'ensuit que la procédure d'expulsion ainsi diligentée contre Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] est parfaitement régulière.
Sur le second moyen, les appelantes soutiennent qu'aucune mesure d'expulsion ne peut être diligentée à leur encontre, dès lors qu'elles sont propriétaires de la parcelle litigieuse immatriculée noAM157.
Pour cela, elles produisent trois actes de notoriétés : un premier en date du 25 octobre 1969, établi par Maître [N] [AY], suite aux décès de M. et Mme [Y] [X], un second en date du 25 mai 1983 rédigé par Maître [W] [O], concernant M. [W] [X] et son épouse et un troisième en date du 7 mars 2016 concernant Melle [D] [I] [S].
Si ces actes de notoriété établissent que les appelantes ont la qualité d'héritières de Mme [D] [I] [S], venant elle-même aux droits des consorts [X], ils ne permettent pas d'établir que la parcelle noAM [Cadastre 1] relève desdites successions. Les attestations jointes ne permettent pas davantage de pallier la carence des parties dans l'administration de cette preuve, pas plus que les pièces émanant du cadastre.
Dès lors que Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] s'avèrent défaillantes à l'effet de démontrer qu'elles sont propriétaires de la parcelle noAM [Cadastre 1] pour laquelle elles font l'objet d'une procédure d'expulsion, il y a lieu de considérer que cette dernière est parfaitement régulière.
Sur la demande indemnitaire des appelantes,
Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] ne pourront par ailleurs qu'être déboutées de leur demande tendant à se voir indemniser du préjudice subi du fait de l'irrégularité de la procédure d'expulsion dont elles ont fait l'objet.
Dès lors que la procédure est régulière et qu'elle ne démontre nullement la matérialité du préjudice allégué, elles seront déboutées de plus fort de cette prétention.
Dans ces conditions, les appelantes ne pourront qu'être déboutées de l'ensemble de leurs prétentions et le jugement déféré confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les autres demandes,
Il ne paraît pas inéquitable de condamner les appelantes qui succombent en leurs prétentions à payer aux consorts [CR]/ Marcelin la somme de 3000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
Enfin, Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] seront déboutées de leurs demandes formées de ce chef.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant
Condamne Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] à payer à Monsieur [H] [C], à Mme [EJ] [CR], épouse [K], à Mme [HV] [LG], née [CR], à M. [B] [CR], à Mme [L] [CR], à M. [GC] [CR], à Mme [T] [CR], à M. [V] [CR], à Mme [A] [CR], épouse [U], à M. [P] [CR] et à M. [J] [R] [M] la somme de 3000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] de leur demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [F] [S] et Mme [WV] [S] aux entiers dépens de la procédure.
Et ont signé,
La Greffière La Présidente