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06/12/2021 | FRANCE | N°20/002351

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 06 décembre 2021, 20/002351


VS/GB

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 355 DU SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN

AFFAIRE No : No RG 20/00235 - No Portalis DBV7-V-B7E-DGTV

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 30 janvier 2020 - Section Commerce.

APPELANT

Monsieur [U] [P]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Maître Valerie GOBERT de la SCP PAYEN - GOBERT (Toque 74), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/000359 du 12/02/

2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)

INTIMÉE

S.A.R.L. LSD MAG 1
[Adresse 3]
[L...

VS/GB

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 355 DU SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN

AFFAIRE No : No RG 20/00235 - No Portalis DBV7-V-B7E-DGTV

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 30 janvier 2020 - Section Commerce.

APPELANT

Monsieur [U] [P]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Maître Valerie GOBERT de la SCP PAYEN - GOBERT (Toque 74), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/000359 du 12/02/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)

INTIMÉE

S.A.R.L. LSD MAG 1
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Maître Isabelle WERTER-FILLOIS (Toque 8), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 octobre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Gaëlle Buseine, conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente,
Madame Gaëlle Buseine, conseillère,
Madame Annabelle Clédat, conseillère, .

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 6 décembre 2021

GREFFIER Lors des débats : Mme Lucile Pommier, greffier principal.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

M. [P] a été embauché par la SARL LSD MAG 1 par contrat de travail à durée indéterminée dans le cadre d'un CUI-CAE Dom à compter du 15 octobre 2015 en qualité de manutentionnaire de libre-service-vendeur.

Par avenant du 7 mars 2016, ses fonctions sont devenues celles d'employé polyvalent de libre-service vendeur.

Après avoir convoqué le salarié à un entretien préalable fixé le 1er août 2018, l'employeur notifiait à M. [P], par lettre datée du 6 août 2018, son licenciement pour faute grave.

Estimant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, M. [P] saisissait le 29 août 2018 le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins d'obtenir le versement de diverses indemnités liées à l'exécution et la rupture de son contrat de travail.

Par jugement rendu contradictoirement le 30 janvier 2020, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a :
- jugé que le licenciement de M. [P] [U] reposait sur une cause réelle et sérieuse et non une faute grave,
En conséquence,
- condamné la SARL LSD MAG 1 en la personne de son représentant légal au paiement des sommes suivantes :
* 3154,76 euros au titre de l'indemnité de préavis,
* 315,47 euros au titre des congés payés afférents,
* 1565,02 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- dit que les rémunérations et indemnités mentionnées à l'article R. 1454-14 du code du travail, dans la limite de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des 3 derniers mois de salaire sont de droit exécutoires en application de l'article R. 1454-28 du code du travail, la moyenne des 3 derniers mois de salaires s'élevant à 1577,38 euros,
- débouté le demandeur du surplus de sa requête,
- condamné la partie défenderesse aux éventuels dépens de l'instance.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 27 février 2020, M. [P] formait appel dudit jugement qui lui était notifié le 1er février 2020.

Par ordonnance rendue le 16 septembre 2021, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction et renvoyé la cause à l'audience du lundi 18 octobre 2021 à 14 heures 30.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique à la société LSD MAG1 le 17 mars 2021, M. [P] demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* jugé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave,
En conséquence,
* condamné la SARL LSD MAG 1 en la personne de son représentant légal au paiement des sommes suivantes :
. 3154,76 euros au titre de l'indemnité de préavis,
. 315,47 euros au titre des congés payés afférents,
. 1565,02 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,
* rejeté la demande des rappels de salaire fondée sur la classification de la convention collective IDCC 1505,
* rejeté la demande de paiement de congés payés sur le rappel de salaires pour la période de 2016 à 2018,
* rejeté la demande sur le paiement des IJSS du 3 juillet 2018 au 9 août 2018,
* rejeté la demande de paiement de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant de nouveau,
- débouter la société LSD MAG 1 de l'ensemble de ses moyens et demandes,
- juger que son licenciement ne repose ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
- condamner la société LSD MAG 1 à lui payer :
* 18443,15 euros au titre des rappels de salaires pour les années 2016 à 2018,
* 845,37 euros au titre des indemnités journalières complémentaires,
* 4172,42 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 1565,02 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,
* 10000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
* 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- ordonner à la société LSD MAG 1 d'avoir à délivrer des bulletins de paie rectifiés, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai d'un mois du prononcé de l'arrêt à intervenir.

M. [P] soutient que :
- son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, à défaut pour l'employeur de justifier de la réalité des griefs invoqués,
- compte tenu des tâches qu'il accomplissait, il est fondé à solliciter un rappel de salaire correspondant à la classification à laquelle il pouvait prétendre,
- il est également fondé à demander un rappel de complément d'indemnités journalières, compte tenu de la date de son licenciement,
- ses demandes indemnitaires liées à son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse sont justifiées.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique à M. [P] le 27 août 2020, la SARL LSD MAG 1 demande à la cour de :
- statuer ce que de droit sur la recevabilité et le mérite de l'appel,
A titre principal,
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- juger que le licenciement de M. [P] pour faute grave est parfaitement fondé en droit et en fait après avoir constaté que les faits fautifs sont démontrés et prouvés,
- débouter M. [P] de sa demande d'indemnité de licenciement, de préavis, de congés payés,
- débouter M. [P] de sa demande de rappel de salaire après avoir constaté qu'il ne peut prétendre à la classification sollicitée,
- débouter M. [P] de sa demande de dommages-intérêts,
En tout état de cause,
- faire une stricte application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, M. [P] ne versant aux débats aucune preuve de préjudice pouvant justifier l'octroi de dommages-intérêts,
En conséquence,
- faire une stricte application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, le montant de l'indemnité qui sera allouée à M. [P] ne pouvant excéder trois mois de salaire prévus par ce texte,
A titre subsidiaire,
- constater que le licenciement de M. [P] est fondé sur un motif réel et sérieux,
En conséquence,
- confirmer le jugement entreprise en toutes ses dispositions,
- débuter M. [P] pour le surplus;

La SARL LSD MAG 1 expose que :
- les faits reprochés dans la lettre de licenciement sont matériellement établis,
- le salarié ne peut prétendre à une classification autre que celle qui lui a été attribuée, compte tenu de ses fonctions qui ne nécessitaient pas de compétences particulières,
- il ne peut davantage prétendre au paiement d'indemnités journalières, eu égard à la date de son départ de l'entreprise,
- M. [P] ne peut qu'être débouté de ses demandes indemnitaires.

MOTIFS :

Sur le rappel de salaires :

La qualification professionnelle d'un salarié et sa classification dépendent des fonctions qu'il
exerce réellement.

L'avenant No 40 du 5 octobre 2000 relatif à la classification des emplois, de la convention collective du commerce de détail des fruits et légumes, épiceries et produits précise que le niveau N5 correspond à celui de vendeur hautement qualifié. Il correspond à l'emploi d'un agent de maîtrise chargé d'un rayon alimentaire traditionnel et/ou libre-service, contrôle les DLC et les DLUO, organise le vente. Apte à passer les commandes, assure le bon écoulement des marchandises en réserve, peut répartir le travail des vendeurs sous sa responsabilité. Apte à tenir la caisse. Peut également participer au nettoyage des rayons, du magasin et des réserves. Assure le respect des règles d'hygiène. Dans l'activité du marché, doit assurer le montage et démontage des éventaires et la manutention du matériel et de la marchandise.

L'article 3 du contrat de travail du salarié prévoit qu'il s'engage à accomplir les fonctions suivantes :
- Accueillir le client, évaluer les besoins et lui donner conseil sur les services et les produits,
- Remplir, ranger, nettoyer l'espace de vente et les produits en rayon,
- Surveiller la température des réfrigérateurs et congélateurs en rayon et en réserve,
- Vendre les produits pour assurer la rotation de ceux-ci,
- Encaisser les sommes suivant le moyen de paiement choisi par le client,
- Contrôler la régularité des encaissements,
- Etiqueter, baliser et changer les prix des marchandises,
- Participer à l'inventaire, la réception et la vérification des marchandises,
- Enregistrer les marchandises au scanner,
- Savoir réaliser un assortiment,
- Ouverture et fermeture du magasin,
- Prise de commande,
- Maîtrise du logiciel informatique.

M. [P] sollicite un rappel de salaire en considération d'une classification au niveau 5 de l'avenant 40 de la convention collective précitée.

Il ressort des termes de la lettre du 28 avril 2018, par laquelle l'employeur lui a infligé une sanction disciplinaire, dont M. [P] se prévaut, qu'il est tenu de suivre les DLUO, de rendre compte de ses tâches à son supérieur hiérarchique ou d'en informer ses collègues, de les hiérarchiser d'accompagner les commerciaux pour qu'ils puissent faire leurs commandes dans de bonnes conditions et qu'il est concerné par l'hygiène des locaux et du matériel.

Toutefois, ces différentes tâches ne sont pas de nature à justifier un classement au niveau 5 dès lors qu'il ressort des termes de l'annexe 40 qu'un employé de niveau N3A, tel qu'il a été classé, a en charge la vérification des DLUO, en informe son responsable, que son emploi nécessite une connaissance professionnelle établie ainsi qu'une certaine polyvalence.

La cour observe que M. [P] ne justifie pas exercer un niveau de responsabilisés lui permettant de prétendre à un niveau plus élevé de classification, la circonstance qu'il soit titulaire d'un baccalauréat spécialité comptabilité et gestion ne permettant pas, à elle seule, de lui conférer un classement supérieur, dès lors, ainsi qu'il vient d'être rappelé, qu'il convient de s'attacher à l'exercice réel des fonctions.

Par suite, M. [P] n'est pas fondé à solliciter une revalorisation de sa classification ni d'un rappel de salaires, observation étant faire que l'avenant 126 du 22 janvier 2018 relatif à l'évolution de la grille des salaires n'est entré en vigueur qu'après son licenciement.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de rappel de salaires.

Sur le licenciement :

En ce qui concerne le bien-fondé du licenciement :

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et il appartient à l'employeur d'en démontrer l'existence.

En l'espèce, la lettre de licenciement datée du 6 août 2018, qui fixe les limites du litige, précise : "Nous vous avons convoqué le 1er août dernier pour l'entretien préalable au licenciement que nous envisagions de prononcer à votre encontre.
Malgré vos explications, nous avons décidé de vous licencier pour les motifs suivants :
Le 3 juillet dernier vous avez eu une attitude inacceptable.
En effet, Madame [L] a constaté la mauvaise gestion du rayon sodas dont vous aviez la charge la veille puisqu'aussi bien elle a dû enlever en urgence un plein caddie de produits à la DLUO dépassée depuis plus d'un mois les rendant impropres à la vente !
Elle vous en a aussitôt fait la remarque et vous a également reproché de n'avoir pas signalé au responsable, comme c'est l'usage dans l'entreprise, que certains produits étaient en DLC courte, ce qui prouve votre manque d'implication et de sérieux dans l'accomplissement des tâches qui vous sont confiées.
Votre réaction a été de vous mettre à hurer en fasant de grands gestes et en donnant des coups de poing dans les murs, meubles et portes de l'entreprise faisant fi de la présence de clients et de vos collègues.
Les personnes présentes dans le magasin ont eu très peur et les voisins se sont également précipités pour voir ce qui se passait !
Vous avez ensuite saisi votre téléphonque portable pour passer plusieurs appels, ce qui est contraire au règlement en vigueur dans l'entreprise et qui vous a été rappelé par votre supérieure hiérarchique.
Vous avez pourtant continué en proférant des menaces.
Vous avez réceptionné une livraison de marchandise, en étant toujours au téléphone, sans effectuer de contrôle obligatoire, vous contentant de signer et de tamponner la facture.
Suite à ce nouvel incident, Madame [L] a demandé de vous mettre sérieusement au travail ou de partir.
Vous avez alors recommencé à adopter une attitude agressive en étant toujours au téléphone.
En raison de la tension extrême qui régnait, les gendarmes ont dû intervenir pour vous faire quitter les lieux.
Vos explications ne nous ont nullement convaincus.
Vos agissements sont totalement inadmissibles et portent un préjudice direct à l'image de marque de notre entreprise auprès de notre personnel et des personnes (clients, fournisseurs, voisins) qui se trouvaient sur les lieux.
Votre attitude démontre que vous n'avez eu aucun scrupule à nous causer sciemment un tel préjudice.
Ce comportement ne peut être toléré car il s'inscrit dans la droite ligne de l'attitude que vous avez décidé d'adopter vis à vis de votre travail.
En effet, nous avons eu à déplorer depuis plusieurs mois et particulièrement au mois d'avril dernier une dégradation très nette de votre travail et le développement d'une agressivité croissante vis à vis de vos supérieurs.
Malgré nos remarques verbales et une sanction disciplinaire le 28 avril dernier, vous n'avez pas cru devoir modifier votre attitude et vous êtes même montré menaçant et violent contre votre supérieur hiérarchique.
Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise."

Pour justifier le licenciement du salarié, l'employeur verse aux débats deux attestations ainsi que des extraits de caméras de videoprotection et des photographies de rayons.
Toutefois, il appert que les deux attestations, qui ne sont au demeurant pas conformes aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, ne sont pas de nature à démontrer la réalité des faits reprochés, en particulier l'agressivité du salarié le 3 juillet 2018. Si elles relatent un tel comportement du salarié, elles sont rédigées en des termes généraux et ne précisent pas la période à laquelle celui-ci se serait manifesté. La cour observe que M. [P] verse aux débats un procès verbal d'audition de gendarmerie daté du 3 juillet 2018 reprenant ses déclarations relatives à l'incident survenu le même jour le comportement agressif et menaçant de la responsable adjointe du magasin, ainsi qu'un certificat médical du même jour préconisant une ITT de 3 jours en raison d'un état de stress aigu. Ainsi que le souligne le salarié et alors que l'employeur se prévaut dans la lettre de licenciement de la présence de plusieurs témoins des faits, il ne verse pas d'attestations aux débats de la part de ceux-ci.

Il appert que les extraits de caméras de videoptotection et les photographies produits au dossier mettent seulement en évidence l'utilisation par M. [P] de son téléphone portable, la présence de différents sodas dans un caddie positionné à proximité d'un rayon, ainsi qu'un présentoir de boissons partiellement incomplet. Ces éléments ne permettent pas davantage d'établir une utilisation abusive du téléphone par le salarié, son comportement agressif, qui ne ressort au demeurant pas de l'examen des images, ni l'imputabilité de la présence de produits périmés ou du défaut de réassort des rayons, observation étant faite que le salarié précise sans être utilement contredit qu'il avait repris son poste de travail le 2 juillet 2018 à la suite de congés sans qu'aucune remarque de l'employeur ne lui ait été faite à ce sujet le jour de son retour sur son poste de travail.
Enfin, le salarié souligne à juste titre que le règlement intérieur invoqué dans la lettre de licenciement n'est pas versé par l'employeur aux débats.

La seule circonstance que le salarié ait fait l'objet d'une sanction disciplinaire antérieure, au demeurant contestée ou qu'il ait sollicité à plusieurs reprises une réduction de son volume horaire de travail, n'est pas de nature à prouver les faits d'agressivité, d'utilisation abusive ou de manquements dans le réapprovisionnement des rayons repris dans la lettre de licenciement.

Il ressort de l'analyse des éléments précités que les griefs reprochés au salarié ne sont pas matériellement établis et que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement est réformé sur ce point.

En ce qui concerne les conséquences financières du licenciement :

Quant à l'indemnité compensatrice de préavis :

Il convient de souligner que M. [P] comptait une ancienneté de 2 années et 10 mois, les documents de fin de contrat remis au salarié et les fiches de paie attestant d'une cessation de ses fonctions au 6 août 2018,

En application des articles L.1234-1, L.1234-5 du code du travail, et de la convention collective applicable, il convient de confirmer la somme allouée à M. [P] à titre d'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à deux mois de salaire, soit la somme de 3154,76 euros.

Quant à l'indemnité de licenciement :

En application des articles L.1234-9, R.1234-2 et R.1234-4 du code du travail, il convient de confirmer la somme allouée par les premiers juges à M. [P], qui comptait une ancienneté de trois années, incluant le délai de préavis, à titre d'indemnité de licenciement, soit 1565,02 euros.

Sur les dommages et intérêts pour rupture abusive :

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En outre, aux termes de l'article susvisé et de l'article L 1154-1 du code du travail lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Dès lors que M. [P] fonde sa demande de dommages et intérêts sur les dispositions de l'article L. 1154-1 du code du travail précitées, il convient d'examiner les éléments qu'il allègue à l'appui du harcèlement moral dont il s'estime victime.

D'une part, il ressort des pièces sur dossier que M. [P] a présenté à l'employeur par lettre du 30 octobre 2017 une demande de réduction de sa durée du travail à 35 heures à compter du 1er janvier 2018, pour raisons de santé, son contrat de travail prévoyant une durée de 42 heures par semaine incluant les heures supplémentaires. Si l'employeur n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions relatives au délai de présentation de la demande du salarié dans l'hypothèse d'une sollicitation en vue de bénéficier d'un temps partiel, il appert qu'il n'est pas utilement contredit dans ses observations relatives à la nécessaire organisation du service et qu'une suite positive a été réservée à sa demande dès le mois de mars 2018, corroborée par les mentions portées sur le nombre d'heures figurant sur les bulletins de paie.

D'autre part, M. [P] ne saurait se prévaloir du refus de l'employeur d'appliquer une revalorisation de son salaire, sa demande ayant été précédemment rejetée.

Enfin, si le salarié se prévaut d'un arrêt de travail au mois de janvier 2018 et de recommandations de la médecine du travail au mois de 2018, il convient de souligner qu'ils reposent sur ses propres déclarations et que l'attestation du CIST mentionne seulement un mauvais vécu professionnel et les troubles psychologiques qu'il présente.

Les différents éléments repris ci-dessus ne peuvent être assimilés à des faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de versement de dommages et intérêts pour rupture abusive.

Sur le complément d'indemnité journalières :

Il ressort des pièces du dossier que M. [P] a été placé en arrêt de travail à compter du 3 juillet 2018 jusqu'à la cessation des relations de travail et qu'il produit le montant des indemnités journalières versées par la caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe.

L'employeur, qui n'établit pas s'être acquitté de son obligation de paiement du complément d'indemnités journalières, se borne à faire valoir que le salarié aurait été licencié de l'entreprise au début du mois de juillet 2018, point contredit par les pièces du dossier.

Dans ces conditions, et dès lors que les calculs précis du salarié ne sont pas utilement contestés, il convient de lui allouer la somme de 845,37 euros sollicitée au titre du paiement des indemnités journalières complémentaires.

Le jugement est infirmé sur ce point.

Sur les autres demandes :

La cour observe que M. [P], bien que sollicitant l'infirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société à lui verser une somme de 315,47 euros à titre de congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis, ne sollicite plus le versement d'une somme à ce titre dans le dispositif de ses écritures. En application de l'article 954 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer sur ce point.

Il convient seulement d'ordonner la remise par la SARL MAG 1 d'un bulletin de paie et d'une attestation conformes au présent arrêt, sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte.

M. [P] ne justifiant pas de frais supportés au titre de l'article 700 du code de procédure civile et qui n'auraient pas été inclus dans l'aide juridictionnelle totale qu'il a obtenue par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 février 2020, il convient de le débouter de sa demande présentée à ce titre.

La SARL LSD MAG 1, partie perdante, sera également déboutée de sa demande afférente à l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens sont mis à la charge de la SARL LSD MAG 1.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 30 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre entre M. [P] [U] et la SARL LSD MAG 1, en ce qu'il a
- condamné la SARL LSD MAG 1 à verser à M. [P] [U] une somme de 3154,76 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- condamné la SARL LSD MAG 1 à verser à M. [P] [U] une somme de 1656,02 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
- débouté M. [P] [U] de ses demandes afférentes au versement d'un rappel de salaires et de dommages-intérêts pour rupture abusive,

Réforme et statuant à nouveau sur les autres chefs de demandes,

Dit que le licenciement de M. [P] [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SARL LSD MAG 1 à verser à M. [P] [U] une somme de 845,37 euros au titre des indemnités journalières complémentaires,

Ordonne la remise par la SARL MAG 1 d'un bulletin de paie et d'une attestation conformes au présent arrêt,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes, y compris celles au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL LSD MAG 1 aux dépens de l'instance, qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 20/002351
Date de la décision : 06/12/2021
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2021-12-06;20.002351 ?
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